*2<S A C I
précis hiftorique dé leur découverte , & feulement
pour en faciliter l ’intelligence , & je renverrai à
eu fixer les procédés après avoir recueilli les nouveaux
principes qui doivent feryir à les perfectionner.
Je donnerai donc , i ° . I’hiftoire de la découverte
du bleu de PruJJe , & des diverfes opinions fur fa
*iaturev
. z 9. Les expériences qui y démontrent un acide
particulier.
-, 30. Le procédé pour l’obtenir libre. ,
4°. L ’examen de l'a nature & des propriétés de
cet acide.
5 L ’application de* ces principes à la préparation
du bleu de Prujfe, & de la leffive colorante.
6°. Enfin, la ‘manière d’agir de cet acide fur les
ba-fes- & fes affinités*
§ . I. Découverte du bleu de PruJJe , & opinions fur
fa nature.
I. 'Touffaint, dans fes obfervations fur la phy-
fique, a prétendu que-le bleu de Pr.ufe avoit été
connu des anciens, & employé dans' leurs peintures;
mais le célèbre Landriani a fait voir dans fa
differtation fur ie bleu de Berlin, par les témoignages.
de Théophrajle & de Pline , & par l’analyfe.
d’une momie égyptienne, par JVL de L a va l, que
les anciens connoiffoient le bleu d’outre-mer & le
finalt ou azur de cobalt, & que le bleu de PruJJe,
qui fedaifie attaquer par les fubftances vitrioliques
& calcaires , n’auroit pu fou tenir leur contaéV
pendant tant de fiècles, & conferver les belles
teintes bleues que l ’on admire encore aujourd’hui
dans les peintures d’Herculanura.
Stahlrapporte d’ans'fes trois cents: expériences,&c.
qu’une équivoque donna lieu à la découverte du
bleu de PruJJe. Diejback, chymifte de Berlin, voulant
précipiter la décoction de laque de cochenille
avec Falkali fixe, emprunta de Dippel un
alkali du tartre , fur lequel il avoit diftillé plusieurs
fois fon huile animale & comme il y avoit
du vitriol de mars dans la décoétion de laque; la
liqueur donna fur-le-champ un beau bleu au lieu
d’un précipité rouge. En réfléchifiant fur les cir-
conftances de ce phénomène , on trouva aifément
le. procédé-pour Te produire à volonté, & le bleu
de PruJJe devint un objet de commerce.
Dans le temps que fa préparation étoit encore
un feeret, Henckel, travaillant fur le fel que fournit
la- cendre de foude ( kali genicuhmm ) , obferva
que lorfqu’pn verfoit des acides dans la diffolu-
tion de ce f e l , il s y formoit un dépôt pulvérulent
abfolument femblable au bleude Prujfe Jûora
fciturnïfans, &e. );
Le bleu de PruJJe a volt été annoncé dès. 1710
dans les mémoires de Facadémie de Berlin, mais
fans, aucune defcription du procédé , que les inventeurs
fe refermèrent fans doute pour tirer plus
d avantage de fa fabrication ; il fut publié,, pour '
A C ï
. la première fois , dans les tranfaélions philofophî-
J ques pour l’année 1724, par Woodward, qui déclara
qu’il lui avoit été envoyé d’Allemagne par un de fes
amis. C ’eft tout ce que l’on fait de la manière donc
'cette préparation a été rendue publique ; on ignore
fi elle vient originairement des premiers inventeurs»
ou fi elle eft due aux recherches de quelque Chymifte
pour la découvrir.
La méthode indiquée par Woodward réuftit très-
bien ; il recommande de préparer un alkali extemporané,
en faifant détonner un mélange de quatre
onces de nitre & quatre onces d’alkali du tartre,
d’ajouter au réfidu quatre.onces de fang de boeuf
bien defleehé, de calciner le tou t à un feu modéré
, jufqu’à ce que le fang foit abfolument réduit
en charbon, ou qu’il ne donne plus de fumée
capable de noircir les corps blancs que l’on lui préfente
, & d’augmenter le fe» fur la fin ,. jufqu’à
faire rougir médiocrement le creufet. On jette la
matière toute rouge dans l ’eau, on, la fait bouillir
pendant une demi-heute ; après avoir décanté cette
première eau , on en jette de nouvelle fur le ré- ■
fidu charbonneux que Fon fait de même bouillir ;
on répète ces opérations jufqu’à ce qûe la- dernière
eau loit infipide, alors toutes ces liqueurs font
réunies pour être rapprochées par l’évaporation.
C’eft ce que les Allemands ont nommé lejjive de
fang, les François , lejjive alkaline phlogijliquée, &
qu’il faut diftinguer de celle qu’on a depuis appel--
lée lejjive faturée de matière colorante >. dont j,e parlerai
dans un inftant.
On prépare d’autre côté une diflolution de deux
onces de vitriol de mars, & de huit onces d’alun
dans deux pintes d’eau bouillante ; on mêle cette-
diflolution toute chaude avec la leftîve alkaline que ■
Fon a fait auffi chauffer ; il y a grande effervef-
cence, les liqueurs fe'troublent , prennent une
couleur v erte, tirant plus ou moins au bleu , & i l
s’y forme un dépôt de même couleur-.
Il ne refte plus qu’à aviver cette couleur; pour
cela, on ver fe , fur la fécule, de l’acide muriatique
que l’on mêle avec foin ; on en ajoute jufqu’à ce: •
qu’on voie qu’il 11’augmenteplusFîntenfité du bleu,
on le lave entente jufqu’à ce que l ’eau forte infi—
pide, & on fait fécher doucement.
Tel eft le procédé par le moyen duquel on a>
fait de- très-beau bleude PruJJe avant que de pofle-
der la. - vraie théorie de ce produit. Il eft: bon de-
favoir comment on y eft parvenu „ de rappeller les
diverfes opinions qui Font précédée, & les-obfervations
dont cette matière a été enrichie par ceux
qui s’en font occupés.
IL La même année que Woodward' publia le
• procédé, Brown entreprit une fuite d’expériences
. pour en déterminer les conditions : il découvrit
que la chair avoit, de même que le fang de boeuf,,
la propriété de phlogiftiquer l’alkali , quoique, le
réfui ta t ne fût pas toujours auffi confiant. Il penfa-
' que le" bleu de PruJJe a étoit que la partie bitumi—
A C I
fteufe du fe r , développée par la leffive alkaline ,
&. fixée dans la. terre alumineufe. ■
Geoffroy adopta la même explication : il trouva
que dans le règne, animal, les huiles, te laine , la
corne d.e c e r f, l’éponge , difpofoient 1 allcali, de
.même que le fang , à précipiter le fer en bleu ; que
dans le règne v égé talle s fommites de thym , les
topinambous, & quelques autres charbons végé- .
taux traités avec Falkali lui communiquoient à un
certain point la même vertu ; ce qui lui fervit a
rendre raifon -du phénomène obfervé par Henckel
fur le fel de foude, en teippofant qu’il avoit reçu .
le phlogiftique dans l’incinération, & qu’il précï-
pi toi t ainfi le fer dont les acides minéraux n’é-
toient jamais exempts.
Neuman eftàya les huiles empyreu ma tiques animales,
&. les reconnut propres à cette opération.
L ’abbé Menon imagina que la couleur du fer étoit
bleue, mais que cette couleur, mafquée ordinairement
par quelque madère (aline , reparoiftbit
dès qu’il en étoit féparé par le phlogiftique de la
leffive alkaline, & qu’ainfi le bleu de Pruffe n’ét-oit
que du fer précipité dans fon état naturel. Il vit
très-bien que la terre-alumineufe ne fervoit qu’a
diminuer l’intenfité du bleu , & à en rendre la
nuance plus agréable.
Dans le mémoire que M.Macquer publia dans-
„ le recueil de Facadémie de 1752, il établit que le
bleu de PruJJe n’étoit autre choie que du fer chargé
d’une furabondance de matière inflammable que lui
fournifloit l’alkali phlogiftiqué. J ’ai; déjà annoncé-:
que cette opinion ne pouvoir. plus fe foutenir ;
mais il n’en eft pas moins vrai que c’eft au travail
de, cet habile Chymifte que nous devons les premiers,
principes qui ont commencé à répandre
quelque lumière fur la théorie de cette opération ,
& à en diriger la manipulation.
M. Macquer ayant obfervé, i° . que les alkalis
purs précipitoient le fer de fes diflolutions en
jaune plus ou moins foncé., zQ. que ce précipité
. étoit foluble dans les acides , 3°. que la fécule
bleue obtenue de la leftîve bleue phlogiftiquée après
l ’addition de l’acide muriatique, m’étoit pas attaquée
par les acides, il conclut que le premier précipité
vert n’étoit point une fubftance homogène ,
mais un afiemblage de deux précipités , l’un jaune,
& l’autre bleu , & qu’il fuffifoit de reprendre le
premier par un acide quelconque pour rendre au
fécond toute fon intenfité. De là il comprit que
l ’acide de l’alun employé à cette préparation y étoit
lui-même utile, en faturant en grande partie la portion
purement alkaline de la leftîve, & diminuant
en proportion la quantité de précipité jaune ferrugineux.
Cet académicien s’étant de même affiné par l’expérience,
d'une part, qu’il étoit impoflîble de porter
l’ai kali au point de faturation de la matière colorante
par la calcination , de quelque manière que
Fon s’y prît, & que les alkalis traités avec les fubf-
tanees inflammables pour faire la leftîve propre au
A C I 227
lieu de Truffe, reftoient toujours alkalis, & même
pour la plus grande partie; ayant découvert d'autre
part que Falkali bien pur enlevoit par la voie humide
au fer métamorphofé en bleu de PruJJe toutes
les propriétés qui le faifoient différer du fimple fer ;
ayant enfin éprouvé que Falkali qui avoit opéré ce
changement devenoit abfolument femblable. à
celui qu’on avoit calciné avec des matières inflammables
, pour le mettre en état de précipiter le fer
en bleu ; que fes propriétés alkalines s’affoibliffoient
d’autant plus qu’il fe chargeoit davantage de cette
matière teignante, il entreprit de le faturer compte
tternent. L ’événement juftifia fon attente: à force
de donner du bleu de Pruffe à décolorer à un même
alkali, il le rendit te l, qu’il pouvoit bouillir fur le
bleu de PruJJe , fans en altérer aucunement la couleur;
cet alkali, fournis à toutes tes épreuves chy-
miques , fe trouva n’avoir plus aucune des propriétés
âlkalines ; & de cette découverte on tira le précédé
qui nous a mis en;pôffeffion de ce réaélif fi
précieux, connu jufqu’à préfent fous le nom de
lejjive faturée de la matière colorante du bleu de Pruffe.
Dans fes . expériences multipliées fur le bleu de
PruJJe, M. Macquer faifit encore plu fleurs autres
circonftancés importantes ; c’eft que la leffive faturée
'n’étoit pas décompofée par l ’acide vitrioli-
que libre, qu’elle ne l’étoit pas parla difTolution
d’alun , & qu’au contraire , toute fubftance métallique
diffoute par un acide quelconque féparoit la
matière phlogiftique d’avec tous les alkalis fixes &
volatils; d’où il conclut que dans l ’opération du
bleu de PruJJe , il falloit que l’affinité du fer fe réunît
à cel)e de l ’acide avec Falkali, pour former
une fomme ..d’affinités capable, de déterminer la
féparation. Cette explication lumineufe d’un phénomène
auffi frappant n’a pas peu contribué* à
établir la_ théorie des affinités réunies , où affinités
doubles.
Depuis la publication de cet excellent mémoire,
il eft peu de Chymiftes qui n’aient fait quelques
recherches fur le bleu de PruJJe, foit pour perfectionner
fa fabrication' & la préparation de la liqueur
teignante, foit pour ajouter ce qui manquoit
encore à l’entière connoiffance de fes vrais principes.
Je ferai mention des travaux des premiers,
lorfqu’il fera queftion a*en fixer les procédés , que
l’on fera bien plus en état d’apprécier quand on
connoîtra la nature de ces produits; il me refte à
parcourir ici en peu de mots ce qui a précédé cette
belle découverte.
Weifman réuftit à faire du bleu de Pruffe en traitant
Falkali avec des huiles empyreumatiques végétales
, & Model en conclut que la fuie des végétaux
fournifloit, de même que 1e fang, des parties
têrreûfés colorées qui s’üniffoient à Falkali,
MM. Brandt & Monnet ont foutenu la même opinion.
Cartheufer. avoit également remarqué que }es
cendres de quelques .végétaux avoient la vertu de
1 phlogiftiquer Falkali ; Jacobi l’a alterné particuliére-
1 ment dn charbon de h vigne ; M. Spielman dit avoir