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fin têt placé ail milieu d’un fourneau à vent ; ils
ont été retirés en même .temps : l’un a été laide a
côté du fourneau pour refroidir fpontanément à l’air,
un autre a été jeté dans Peau froide , , le troifième,
dans l’huile de lin, le quatrième a été plongé dans
du mercure, & fixé par une pince au fond du mortier
de fonte qui le contenoit.
Le premier a réfifté long-temps au marteau avant
de fe .caffer ., il a fallu l’entailler .d’abord par la
lime, & elle n’y mordoit que difficilement ; il .à
montré dans toute fa caffure un grain fenfiblement
plus fin & moins, brillant que celui de la barre où
il ayoit été pris.
Le fécond, trempé à l’eau, a.caffé aflez facilement,
ion grain étoit un peu plus -fin., mais..prefque auffi
blanc que celui du précédent.
Le troifième, -trempé à l’iiùile , s’eft .trouvé très-
dur à la lime, j’ai eu,une peine extrême à le rompre,
ion grain étoit auffifin, & même un peu plus terne
.que celui du morceau trempé à l’.eau.
Le quatrième, trempé au mercure, l’emportoit fen-
fiblen îent fur tous les autres, pour la fineffe & la
couleur grife du grain ; il avoit auffi moins de corps,
s’eft. partagé du premier coup de marteau en plu-
fieurs fragmens, la plupart en travers.
6°. Ces expériences^comparées fur le même acier,
me paroiflànt les plus, propres à 'déterminer la caufe
immédiate du changement-de grain, j’ai cru devoir
les répéter fur un acier plus fin. J’ai pris en confé-
quence .un barreau d’acier de deux lignes quarrées,
tel qu’on l’envoie d’Allemagne pour les burins &
•autres .outils d’horlogerie,- je l’ai partagé en quatre
morceaux, j’ai opéré comme pour l’acier, bourfoufflé :
-voici. les réfultats.
Le premier morceau, refroidi à l’a ir , fe courboit
'•fous la panne du marteau, il a fallu l’entamer à la
lime pour le rompre, la. cgffure a préfenté dans le
-milieu un grain alfez fin, mais blanc :& brillant, &
:tout autour du nerf de couleur grife.
Le fécond, trempé à l!eau, s’efi caffé net . en trois
fragih ens du premier coup; fon graimparfaitement
-égal, étoit d’un gris cendré, & de la plus grande
„fineffe. L’ayant poli fur une de Tes faces, l’acide ni-
. treux y a laifié une tache noire, mais peu fondée
; tandis qu’une goutte du même acide portée
fur le milieu de la caffiire, après qu’.elle eut été
; également polie, y a laiffé une tache noire beaucoup
plus foncée.-Ce fait que je crois‘ devoir no-
: ter ici en pafiànt, nous fournira ailleurs des confé-
. quencfes importantes.
Le troifûme, trempé à l’huile, fe courboit auffi
facilement que celui refroidi à Pair; cependant la
-limé Tentamoit à peine, je n’ai pu le rompre qu’a
l’étau ; fon grain étoit moins fin que le précédent,
mais d’une couleur plus fombre ; on voyoit.un peu
• de nerf dans un angle.
Le quatrième, trempé au mercure, en efi forti
moins décapé que celui trempé à Peau; il a cafle
net, fon grain tenoit le milieu pour la fin elle entre
.ce dernier & celui trempé à l’huile-, il étoit auffi
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un peu plus gris que celui-ci; & .fur deux de Tes
faces, on remarquoit line lame plus épaiffe de nerf.
J’avois fait rougir en même'temps, & au même
degré, un bout d’acier de fleuret de 21 lignes de
longueur, 3 de largeur, & 1 d’épaifiéur, & je le
trempai au mercure ; il efi fortit bien découvert, &
il. y avoit pris la trempe , au point de fe rompre facilement
entre les doigts; fon;grain étoit très-égal,
aflez fin, pourtant moins .que celui du barreau- quarré
ci-deffiis trempé au mercure ,& fur-tour plus blanc
& plus brillant. Je ne dois pas oublier que ce graiij
étoit auffi fenfiblement plus gros que celui du fleuret
dont le fragment avoit tait partie dans fon état élastique
, & qui avoit reçu néceffairement une trempe
plus douce.,
. 7 9. -On voit déjà par ce qui précède, que ce
n’eft pas Peau feulement qui durcit l’acier, :&>qu’il
peut recevoir la trempe .de-jout fluide, capable d’accélérer
fon reffoidiffement. Juftement'préoccupé de
cette idée, il n’efi guère :de liqueur fimple ou çom-
pofée, qu’on n’aiteffayée &,propofée, pour per-
reâionner la trempe de l’ac;er. Les uns fe fervent
d’urine pure nu mêlée; d’eau chargée de fel commun,
ou de nitre, où;de Tel ammoniac; M. Lau-
rætis confeille le jus d’a il, M. Jufti, une leffive
foible d e foude ou de potafle ; l’air rafraîchi par la
vapeur humide d’une çafcade, durcit- très-bien, fui-
vant M. Perret; on a recommandé le mélange de
glace o u d e neige , pour les ouvrages qui doivent
être très-durs; le fuif & les huiles., pour ceux qui
doivent être plus doux; on a imaginé de couvrir Peau
d’une couche d’huile,; pour empêcher Jes gerfures
à là furface.-ou la courbure des pièces; on à com-
pofé avec des fubftancesfalin.es & phlogiftiques differentes
pâtes deftinées à couvrir les ouvrages ayant
de les faire chauffer pour la trempe, &c. Mon objet
n’efi pas d’apprécier toutes ces recettes qui;-varient
dans chaque attelier, où on les conferve
! comme des fecrets précieux, dès qu’elles ont rêuffi
à un certain point; je ne cherche que les faits,
qui, par leur fimplicité, peuvent fervir à éçlairer la
théorie.
Suivant Réaumur, l’acier chauffé couleur de ce-
rifè, & trempé dans l’eau bouillante, prend pende
dureté ; mais chauffé au rouge foible, il y -a acquis
la dureté qu'il eût acquis, s'il eût été trempé dans Veau
froide., n ayant que la couleur de cerife. Au contraire,
M. Rinman affure pofitivement que la trempe dans
l’eau chaude ou tiède ne vaut rien. ( §. 277, n. 6.)
Il ajoute cependant qu’on peut y durcir l’acier, mais
qu’il faut lui donner un bien plus haut degré de
chaleur, ce. qui le rend plus fragile & plus groffier.
On. peut donc dire, à plus forte raifon, avec M.
Jufti, que la trempe au plomb fondu, indiquéé pour
les refforts de montre, ne produirait aucun effet,
puifqu’elle fuppoferoit un degré de chaleur qui en
détruirait le corps. Il en efi tout autrement du recuit
dans le plomb en fufion , qui a l’avantage d’être
parfaitement égal. La différence très-caraélérifée des
deux états, dans lefquels fe trouve le même acier >
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.après avoir été Amplement trempé dans le plomb
fondu, ou après avoir été trempé à l’eau froide &
recuit dans le, plomb fondu, jufqu’à revenir au bleu,
puis de nouveau plongé dans l’eau , femble nous
indiquer que, quoique la trempe paroiffe dépendre
en quelque forte de la proportion du reffoidiffe-
ment fubit, quoiqu’il y ait, comme le dit Réaumur ,
une forte de compenfation entre tremper une pièce mains
chaude dans une eau plus froide;, & tremper une pièce
plus chaud*. dans une eau moins. froide, il fe trouve
^néanmoins dans l’échelle des dçgrés de chaleur auxquels
on peut porter l’acier,, un ternie néceffiiire
pour lui' donner une certaine dureté, & dont l’effet
ne peut être détruit complètement, que lorfqu’il
aura été ramené à peu près .au même point. Je dis
à peu près, car c’efi une obfervation également certaine,
& tout auffi importante, que Varier j qui aura
été trempé blanc, fera entièrement détrempé, apres l ar
voir remis au feu, on lui fait prendre les premières
nuances de rouge. J’emprunte encore ici les termes
de Réaumur.
En parlant de la plus forte chaleur que puiffe
fouffrir f acier , je n’ai pas entendu un degré d’incan-
.defcence capable de l’altérer, ou même de le ramener
à l’état de fer; il refte. encore un intervalle aflez
confidérable , puifqu’on efi bien d’accord qu’un acier
efi d’autant plus dur, & qu’il a un grain d’autant
plus gros, qu’il a été trempé plus chaud , ce qui
n’arrive certainement pas au fer.
. C ’eft ce que confirme parfaitement une autre obfervation
de Réaumur. Que l’on trempe , d it-il, un
acier à un degré de chaleur, tel qu’il prenne un grain
blanc, qufon le caffe en deux morceaux, que l’on
conferve l’un , que fonctionne à l’autre un recuit
jufquW bleu, qu’on le caffe enfin lorfqu’il fera refroidi;
on trouvera la caffiire du morceau recuit,
d’un grain plus fin & plus terne que celui du morceau
non recuit, & ce Phyficien n’en conclut pas ,
contre l’évidence, que le grain obfervé dans l’acier
. recuit, foit celui que lui aurait donné la trempe à
un degré de chaleur égal à celui du recuit, mais feulement
qu’on a remis cet acier dans un état pareil à celui
ou il fe feroit trouvé, s'il eût été trompé moins chaud.
Si la chaleur du plomb fondu ne permet guère de
croire qu’une pareille trempe puiffe opérer le reffoidiffement
néceflaireà l’endurciffement de l’acier,
il h’en efi pas de même de celle que Réaumur dit
avoir tentée avec fuçcès , en faifant entrer des
pointes d’acier rougies dans du plomb , dans de l’antimoine
& dans du bifinuth ; ces métaux fe trouvant
à la température ordinaire, ont dû abforber fubite-
ment d’autant plus de chaleur, qu’ils en avoient plus
befoin pour acquérir la fluidité.
B °. Si les fluides, dans lefquels on plonge l’acier pour
le durcir, n’influoient que par la différence de leur
température a&uelle ,• avec celle que l’on a donnée
à l’acier, il s’enfuivroit que celui qu’on a laiffé refroidir
à l’air ambiant , devrait être plus dur que
celui qu’on aurait éteint dans de l’eau chauffée, à
.quelques degrés au deffus de la température de l’ath-
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mofphère ; o r , il s’en faut bien que ç.ela foit ainfi.
De l’eau à 20 degrés du thermomètre de Réaumur ,
donne une trempe feche quand l’acier efi bien rouge,
au lieu que dans un air à 12 degrés, l’acier ne duiv
cit nullement, même à l’aide de l’agitation , à moins
que ce ne foit une pièce très-mince ; encore n’y aura
t-il que l'extrémité ou la pointe qui aura pris un
peu de dureté.
Ce n’eft pas non plus la denfité du fluide qui détermine
entièrement reflet ; on en juge,bien par la
comparàjfon de la trempe du même acier-chauffé an
même degré, dans l’eau & dans le mercure. Il efi
donc probable que l’accélération du reffoidiffement
réfulte ici de plufieurs caufes combinées , telles, 1
que la denfité ou la quantité de matière que contient
le volume environnant ; 20. la figure des parties
cpnfti.tuantes de ces fubftances , qui les difpofe à
un contaâ plus ou moins parfait ; 3 0. la qualité plus
ou moins conduélrice de chaleur dont jouiflènt les
| molécules. Il m’eft arrivé de tremper en même temps
des morceaux de même acier , du poids de 6 gros,
l’un dans 10 livres de mercure , l’autre dans 24 onces
d'eau, tous les deux contenus dans des vaiffeaux pareils
de fonte; & , quoique bien prévenu par ce que
I Réaumur en avoit é crit, je fus extrêmement furpris
I de la différence de température à laquelle fe trou-
i vèrent, un infiant après, ces deux fluides ; l’eau n’a,-
! voit prefque pas changé, & la chaleur fenfible du
mercure étoit telle que j’avois peine à y tenir le
doigt. J’eus occafion de vérifier une autre différence
auffi marquée , & qui n’efi pas moins importante,
quoiqu’elle dépende probablement d’une antre cau-
f e , c’eft qu’un morceau de fer ou d’acier rouge de
feu , plongé dans l’eau , même chaude , occafionne
un ffémiffement qui dure quelques fécondés, au Heu
que l’immerfion dans le mercure fe fait fans le
moindre bruit.
Pour avoir un terme de comparaifon plus fixe de
la chaleur fenfible que prennent quelques-uns des
fluides dans lefquels l’acier seçoit la trempe , j’ai
pris trois morceaux pareils du même acier , chacun
du poids de 60 grains ; j’ai préparé d’une part trois
capfules de verre, dont l’une contenoit exa&ement
8 pouces cubiques de mercure, une autre 8 pouces
cubiques d’eau de pluie, & la troifième 8 pouces
cubiques d’acide nitreux, reéfifié à la maniéré de
M e y e r , aftoibli au point d’être en rapport de denfité
avec l’eau : : 1,113 : 1 , la température étant à
17 degrés au deffus de o ; je plaçai enfia dans cha*
cun de ces fluides un thermomètre bien gradué.
Ayant foit rougir pour-lors les trais petits barreaux,
auffi également qu’il étoit poflible, je les jetai dans
les trois capfules , à mefure que je les retirais du
fourneau, en commençant par l’eau , & finiffant par
le mercure , pour donner à celui - ci le défavantage
du degré de chaleur : le thermomètre plongé dans
l’eau, ne s’éleva qu’à 19 degrés ; celui qui étoit dans
Vacide nitreux , à 20 ; celui qui avoit été? fixé dans
la capfule contenant le mercure, s’éleva à 24 degrés.
Je ne dois pas omettre une circonftance qui contri