
Là putréfaction s’eft faite prefque auffi promptement
& de la même manière que fi le bocal eût
été découvert ( cette expérience fut faite au mois
de juin ) j au bout de quelques jours la. chair étoit
dans un état de diffolution fanieufe, verdâtre,.dont
Codeur très-fétide tranfpiroit à travers les, pores
des deux ve/fies lorsqu’on les exprimoit.
Environ trois mois après, les deux veffies furent
attaquées par les rats , & même coupées
près des tuyaux fur lefquels elles étoient attachées ;
d’autres occupations ne m’ayant pas permis pour
lors d’examiner l ’état des matières, cet appareil-
eft refté cinq ans- &-• demi dans cet- état fur une
planche, dans une chambre non habitée, dont les
fenêtres- étoient au nord. Au bout de ce temps ,
j o$ms l’appareil, la- partie inférieure du bouchon
étoit couverte d’une légère moififfure blanchâtre,
la chair baignoit encore dans une liqueur ichoreufe
dont l’odeur n’étoit plus que-fade ; l’air ayant dû '1
fe renouveller, du moins à un certain point, dans
1-lntérieur, à la faveur des deux tuyaux ouverts ,
ne fut-ce que par les alternatives de raréfaétion
& de condenfadon , j’étois- très - perfuadé que la
terre calcaire feroit imprégnée de quelque peu de :
nitre •, je la 6s bouillir dans l'eau diftillée, & la
leffive filtrée ne donna-à levaperadonqu’un-peu de
terre calcaire qui n’attira pas même l’humidité de
l ’air , & qui provenoit d’une portion de chau-x vive
qui refte toujours dans la chaux éteinte, quelque
temps qu’on l’expofe à l’air, quelque précaution
qu’on prenne pour en mettre toutes le$ parties en
edntaéL avec-ce- fluide^.
J ’imaginai pour. fers. de jeter de la craie lèffi-
véê dans la liqueur dû grand bocal, pour effayer
fi cette matière animale putréfiée à la. longue juf-
qu’au point de ne plus donner que l’odeur fade,
recéleroit encore le principe radical'nitreux, &
fî elle ferpit difpofée à le tranfmetüre plus inftân-
taoément à.lâ terre calcaire-je la leifivai fùr-Iè-
cfiamp avec de l’eau tiède , mais la leffive évaporée
ne laiffa qu’une matière extraéttve jaunâtre, qui
une fois defféchée , n’attira pas même l’humidité
été l’air,.
A côté de l’appareil, qui.vient d’être décrit-,
pavois placé dans les mêmes, vues fept grands bocaux
remplis de différens fluides aéritormes, dans
cbacu.n defquels j ’àvois fufpen.du une once de pareille
chair maigre de. boeuf, qui > ayant été couverts
d’une veffie mouillée bien ficelée. > n’ont été
de même ouverts ..qu’après plus de cinq ans; j ’extrairai
ici ,. en. peu de mots, de mes obferva-
tions, ce qui peut être fufceptible de quelque application
utile.
Dans, l’air vital, l’odèur putride a-fubfifté plus
long-?temps:», ou du moins s’eft rendue plus fenfible
à; travers;,la. veffie que dans tous les autres fluides ;
■ elle étoit encore très-forte après deux mois, tandis
qu’a ïarrêferve du bocal plein- d’air commun*,
il, ne. ajexhaloit prefque .plus, rien des autres...
L ’onco de chair s’eft trouvé réduite , faVoièr*
Dans l’air vitalx à . . . . . . . • • *3.6 g*ains«L.
Dans l’air commun , . à ..................... 149
Dans le gas acide méphitique,.à . . 157'
Dans le gas inflammable, ,à „ .. • . . 163.
Dans le gas nitreux, à....................... 155.
Dans le gas ammoniacal, à . . . . . 242
Dans, le gas putride, à . ............ .. . .. 168
On voit que l’air vital & l’air commun ont icL
un avantage bien fenfible , & même dans des proportions.
qui peuvent correfpondre à.leur nature
déterminée par d’autres propriétés ; ce qui eft d’autant
plus-* remarquable ,. que la putréfaélion ne-
pouvoit s’opérer que par l’air IuLmême., chargé
féulèment du peu d’humidité qui . étoit refté dans
lès bocaux en tranfvafant les gas, ou qui avoit pu
y être_porté par les. veffies , & que tous les appareils
étoient à cet égard dans la même condfe
tionw
À. l’ouverture des appareils, toutes ces chairs ont
encore donné un peu d’ôdeur, à^l’exception de
: cejle qui avoit été mife dans le gas nitreux ; celle
1 de l’acide méphitique étoit la plus fétide, enfui te
celle du gas inflammable , enfuite. celle de l’air
çommun...
Toutes ces chairs'étoient'fèches, & tirant plus
ou moins au- noir ; la plus avancée vers cette
couleur étoit celle de 1*dir v ital, fur laquelle on
remarquoit de petits points jaunâtres irréguliers qui
avoiènt une apparence faline; celle de Voir corn--
mun étoit beaucoup plus rouge & couverte feulê-
ment de petits tubercules blancs ; dans le gas inflammable
, elle étpit devenue plus noire & pré-
fentoit les mêmes points blancs; dans l ’acide méphitique
ces points blancs étoient accompagnés-
d’ùne moififfure plus fenfible , ainfr que dans
gas.ammoniacal5& dans lè gas putridé ; lés chairs»
de ces derniers différoient néanmoins en ce qu’elles ?
paroiffôient fur les bords comme une gomme jaunâtre
demi tranfparente..
L ’humidité qui dans tous les-bocaux s’étoit rafe
femblée au fond , . avoit-pris dans les premiers.«
jours une nuance rougeâtre dans l’air vital, jaur-
nâtre dans la plupart des autres vaiffeaux, excepté *
dans celui du gas putride, où la chair fe conferva
manifeft&menx le plus long-temps faBS altération.
Lors-de l’ouverture, elle ne formoit qu’une tache
de même couleur plus ou-' moins épaiffe , & de
confiftance d’extrait prefque fe<x Le bocal du gas
nitreux fut le feul qui préfenta quelques petites
aiguilles »de-nitre , Sc non feulement des cryftaux
ifolés, mais auffi l’extrait jaune qui couvroit une
partie du fond, fufèrent fenfiblemenr fur/les charr
bons. Dans le bocal du gas ammoniacal,_il y . ai
bien eu auffi quelques petits-cryftàux en'aiguilles»
très - fines , mais ils font reftés fur le charbon fanfc
donner., fe.moindre figne de.déflagradao^
On ne fera pas étonné qu’il y ait eu de 1 racide
nitreux dans le bocal du gas nitreux , puisque
fôn radical y exiftoit* déjà , &. quil ne
lui- fallbit que de. l’air cfommun pour le régénérer
acide-; mais ©u avoit-il retrouvé la bafe
arlkaliner? ’C’eft ce qu’il n eft pas aîfé d’expliquer,
ce bocal étant toujours' refté couvert d’une veffie
bien ficelée. M. Thouvenel, qui paroît avoir'ob-
fervé un phénomène analogue , admet une époque
è ’alkalefcenee dans la purréfaétîon après celle à’a-
cefcence ; mais fans révoquer en doute la poffibilité
de la production d’un alkali fixe par la décompo-
fition des matières animales, il me fetnble que la
communication continuelle qui fe fait' entre les
deux règnes doit rendre bien difficile fur les preuves
de ce phénomène, fur-tout depuis qu’on fait
que l’alkali volatil, qui eft propre au règne animal,
fe; détruit fans laiffer aucune trace d’alkali fixe.
Ainfi , malgré toutes les' expériences , malgré
tous les travaux entrepris pour furprendre le fe-
eret de la nature , nous ne femmes réellement
guères plus avancés ; nous favons qu’il faut, pour
la production du nitre, de l’air vital & des effluves
putrides., mais nous ne favons rien de plus ; & ,
comme l-ont très-bien remarqué les. favans académiciens,
commiffaires pour le jugement du prix de
1 7 8 2 ,U rejle maintenant, pour obtenir des idées plus
exactes encore fur la compojivon du falpétre, à 'déterminer
la nature de Vair putride qui fe combine avec .
Voir vital pour le former»
M.. Thouvenel eft porté à croire qu’une portion
de gas acide méphitique ou air fixe eft néceffaire
à-oette opération , parce qu’il a remarqué que l’air
putride qui avoit pafleà travers l’eau dè chaux,
»’étoit plus propre à la nitrification ; la çonféquence
ne fera fondée qu’autant qu’il fe fera affuré en ,
même temps que l’eau de chaux n’avoit effective- !
ment d’autre aCtion fur le gas putride, qu’il n’at- *
taquoit aucun autre de fes principes car fi on
luppofe par exemple (ce qui me paroît très-vrai- •
femblable ) que ce gas tient néceffairement une j
portion' de 1-huile animale fétide volatilifée par
l ’alkali volatil, & que cette huile entre dans la
compofition du radical nitreux avec l’alkali ou
fins l’alkalfe il fera facile de. concevoir que l’eau
de. chaux retenant ce principe effentiel, il ne doit ;
point fe former, dè nitre , & que l’abferption du
gas méphitique n’eft plus dans ce cas qu’une cir- j
confiance accidentelle & étrangère. Ilpourroit arri- ■
ver, en un mot, que lé gas méphitique qui fe dégage . 1
en effet dans toutes les diffolutions putrides, fer- ]
vît ici par fen affinité, feit à décompofer le favon
ammonîaral,.foit à dégager d’autres combinaifens ;
dèsv gardes qui- ne peuvent s’unir, qu’après
avoir, été mifes en liberté,, fans entrer pour cela
Biatérièllèment dans là compofition du nitre.
©lais fi nous femmes forcés d’avouer qu’il, refte
encore bien-des recherches à faire pour déterminer
IL.nature, dii principe que.fe g^a. putridev fOurnit^à»
■ 1 *aciae nitreux, & diriger en confequènce le travail
de lâ nitrification, nous pouvons du moins
recueillir déjà cette vérité importante, qu’il existe
dans cet acide , comme dans tous les autres,
une bafé acidifiablè qui lui eft propre, qui le
conflîtù© tel , & qu’il ne peut recevoir que dè
certaines madères qui là recèlent. Ainfi en ne
fera plus tenté de regarder le gas nitreux ni comme
un acide complet mafqué par le phlogiftique, ni"
comme un être fi m pie qui ne perde rien en rece-'
vant le principe acidifiant ; on ne croira plus fur-
tout, que cet acide ne feit qu’une modification
d’un autre acide dont le radical eft fi different,.
& on fera fatisfait fans doute de retrouver ici
de nouvelles preuves de cette théorie lumineufe
qui embrafîe le fyflême général des acides.
Y . Indépendament de l’air acidifiant &. du radical
nitreux, cet acide tient encore effentieÜement
de beau, du moins, jufqua préfent, n’a-t-il pas
été poffible de l’obtenir pur feus un autre forme.
M. Fontana a obfervé que lorfqu’il a perdu ufier
portion d’air commun qui ne lui eff uni que comme
il l’eft à l ’eau, le feu le plus fort ne peut en dégager
aucun air permanent, mâis qu’il fe volatiüfe
comme l’eau, & conferve toutes fes propriétés dans
cet état de vapeurs. De là on a conclu qu’une
fois- privé- d’eau & de phlçgiftique , & combiné
avec une fuffifante quantité de la matière de fa
chaleur, il ceffoit d’être acide & dèvenoit air
vital;- mais nous venons de voir qu’il avoit né-
ceflàirement un principe caraélériffique , different
du principe acidifiant, commun : il n’y a donc
d’autre conféquence à tirer de cette observation-,
fi ce n’ett que le radical eft détruit ou décompofé
par l’a&ion de la chaleur, toutes les fois que tacide■'
nitreux ne fournit plus que de l’air-vitaL
L ’eau entre effentiellement dans la compofition
AeYacide nitreux \ la preuve en réfulte non-feulement
de ce qu’il ne peut en être entièrement pri1-
vé fans-fe décompofer ,mais encore de ce qu’elle
eft néceffaire pour le régénérer lôrs du mélange
du gas nitreux & de l ’air vital ; comme il eft, d’autre
part,,évident que le fluide aqueux.ne conflitue
pas par lui-même le caraélère acide, on pourroit-
fuppofer qu’il contribue à rompre l’union des
deux fluides élaftiques avec la matière de la chaleur
; au. refle, que ce feit de cette manière ou
de telle autre que. l’on voudra , il eft du moins très-
certain qu’il fert à décider , peut-être même à
entretenir la Gombinaifen qui produit l’acide , &
que c’eft pour cela qu’il ne peut exifter fans, eau*..
Ge fait une fois établi., « quelque en fût ^explication,
il n’étoit pas moins important de déterminer
la quantité d’eau que cet acide retenoit eflèntiel-
le-ment -, afin- 'de pouvoir juger fen. dernier degré ’
de concentration , de fe fervir enfuite- de cette
connoifiànce pont donner 1-anaîyfe, exaéle' de fes
fris-neutres,:.c’eft ce. qu’a fait le.célèbre-KirWan.