J’ai ftiffifiunment annoncé que*mon intention, en
donnant cette T ab le , étoit plutôt de foire foifir au
premier coup d’oeil les différences des proportions
indiquées par ces trois grands Chymiftes, que d’en j
tirer des réfultats que l’on pût durement foire fervir
de règle dans les analyfes ; cependant, j’ai efpéré
qu’elle pourrait être encore de quelqu’udlité, doit
pour guider dans le choix des moyens d’arriver à des
déterminations plus rigoureufes, foit en offrant des
approximations qui fumfent quelquefois , & dont il
fout bien de contenter, judqu’à ce qu’on ait quelque
chode de plus pardait. C’eft ce qui m’a engagé à les
réunir & à les ramener toutes à des expreffions auffi
comparables qu’il étoit poffible. Je paffe maintenant
à l’examen des confëquences que l’on peut tirer de
ces proportions de compofition pour ou contre le
dyflème du davant Anglois , & en général pour la
folution de ce grand problème de la détermination
des affinités. _ J
i° . M. Kirwan a le premier apperçu le peu de.
concordance de des rédultats avec ceux de Bergman,
&. il avoue que cette comparaidon l’a long-temps inquiété
, ayant la plus haute confiance dans da dextérité
& dans don jugement ; mais il croit pouvoir
affurer que la différence eft plus apparente que réelle,
parce que Bergman n’a diftingué que l’eau de
cryllallidation, & non celle qui demeurait unie à;
l’acide, dans don plus haut degré de concentration;
de dorte que ce qu’il a nommé acide, duivant l’udage,
n’étoit déjà qu’un mélange de Vacide réel & d’une
portion d’eau (i) . On conçoit aidément que cette
circonftance, jointe à l’incertitude de l’égalité de ded-
ficcation des produits, peut dervir à diminuer les différences
de quelques rédultats ; mais cela ne touche
pas à l’article le plus imparent, je veux dire la quantité
d’alkali que les trois acides minéraux prennent
pour leur daturation. Suivant Bergman, ioo d’acide
vitrioliqueprennent 127,5 de potaffe, 56,5 de doude.
D ’autre part, 100 de potaffe pure exigent, pour leur
daturation , 7 5 , 5 d’acide vitriolique , 64 d’acide nitreux
& 5 1 ,5 d’acide muriatique: comme il n’ell
pas poffible de douter que cë Chymifte n’ait toujours
employé dans ces expériences le .même acide,
tenant par condéquent, à poids égal, la même quantité
quelconque d’acide réel ; qu’il n’ait toujours mis
les bades alkalines dans la même condition, ou du
moins à très-peu de différence près, il relie pour
confiant qu’à cet égard fes réfultats s’éloignent considérablement
de ceux de M. Kirwan. Le témoignage
du Profeffeùr d’Upfal devient encore plus imposant,
lorfqu’on fait attention que les quantités de divers
acides pris par une même bafe, fe trouvent préci-
fément dans l’ordre inverfe de leur puiffance ; de
forte que leur état habituel de concentration , loin
de lui faire illufion, ne pouvoit que le conduire à
une conclufion toute oppofée. Perfonne ne doute
en effet que l’acide muriatique le plus fort ne contienne
beaucoup moins d’acide réel que l’acide nitreux,
& celui-ci moins que l’acide vitriolique ; fui-
vant M. Kirwan, lés proportions feroient, pour ces
trois acides , au plus haut degré de denfité qu’ils
aient pu être portés, : : 4 8 , 7 •* 3 9 3 : 612,05.
a0. M. Kirwan reconnoît que les expériences de
Bergman font oppofées aux fieones , en ce qu’elles
annoncent que les alkalis prennent pour leur Maturation
plus d’acide vitriolique que d’acide nitreux , & plus de
celui-ci que d’acide muriatique ; mais il compte M.
Wenzel au nombre de ceux qui ont attefté le fait
contraire, & je ne vois pas fur quel fondement,
puifque fes expériences indiquent ces rapports de
quantité comme il fuit :
100 de potaffe puïe prennent pour leur faturation
(fuivant M. Wenzel}
D ’acide vitriolique....................... 82,63
D ’acide n it r e u x .« .............. 107, o
D ’acidb muriatique . . . . ............ 54» 4^
,ioo de foude pure prennent pour leur faturation
D ’acide vitriolique.............. .. 125,87
D ’acide nitreux..............................16®, 6
D ’acidé muriatique............83,91
Je n’ai fait ici. mention que des deux alkalis fixes,
i parce qu’il efl bien plus facile fie les amener.au même
point de pureté, au degré précis de faturation, &
parce que c’efl principalement par rapport à ces fubf-
tances qu’il s’agit de vérifier .u elles faturerit, chai
cune refpeélivement, une égale quantité des trois
acides minéraux. On voit que fi les expériences du
Chymille Allemand ne font pas entièrement conformes
au principé de Bergman, fuivant lequel les
alkalis doivent prendre moins d’atide nitreux que
d’acide vitriolique, elles ne correspondent pas mieux
aux réfultats de M. Kirwan ; puifque, dans ce cas,
une même quantité de potaffe ou de foude devroit
prendre autant d’acide vitriolique que d’acide muriatique,
autant de celui-ci que d’acide nitreux, & que
(1) M. Kirwan fe fait ici un argument de ce que Bergman, après avoir donné, dans le Ier. volume de fes Opufcules,
la compofition du vitriol de f e r , comme je l’ai rapporté dans la Table précédente, dit ( § ./ £ d e f a D ijfe r ta p io n furlts
p r o d u i t s d e s v o l c a n s ) que ce fel tient 2 4 d’a cide, 2 4 de fer Ôt 52 d’eau. Cela fuppoferoit que cette détermination corrige
l ’autre ; & c’eft précifément le contraire , comme on. en peut juger, foit par la comparaifon des dates de ces • Ouvrages,
(oit par l’ é.flition de la Differtation-fur les produits volcaniques , qui fait partie du 3e. volume des Opufcules , imprime
ên 1783 , fous les yeux de l’A u teur , & dont il m’a envoyé un exemplaire ligné de lu i , où il a indiqué pour le vitrio^
de fer les m èm è s proportions de compofition que dans la Differtation fur l’analyfe des e aux, & dans ces termes remarquables
: a ç i d i v i t r io l i c i f i c c i 39. L’erreur de M. Kirwan vient fans doute de ce qu’il n’aura pas fait attention à ce f 1}
eft dit dans l’avertiffement qui eft à la tête du 3*. volume des Aftes d’Upfal, que les fix premiers Mémoires a voient e
imprimés dès 1777 ; o r , la Differtation fur l’analyfe des eaux n’a paru, pour la première fo is , qu’en Juin*778, »•
paragraphe X Ie. qui traite de la compofition des T els , n’y a été ajouté que lors de fa rétmpreffioa dans le l ! ‘. volul
des Opufcules en 1779.
le s différences qui s’y rencontrent vont du quart à
h moitié : ce qu’il eft impoffible ^attribuer uniquement
à des accidens de manipulation.
D’après la manière d’opérer de M. Wenzel, on
ferait porté à penfer que l’erreur eft plutôt dans
les réfultats qui • s’écartent du principe de Bergman
II a- eftiiné l’acide le plus fort par le poids qu il
confervoit après la plus forte calcination du fel neutre;
U a employé dés alkalis obtenus par la detonnation
des nitres de potaffe & de foude I & il a foigneu-
fement tenu compte & de la 'terre infoluble qu us
contenoient, & du gas acide qu’ils laiffoient aller
pendant la faturation j de forte que le poids du lel
neutre calciné, moins le poids de l’alkali reprefen-
toit la quantité d’acide pur ou privé d’eau. Il ne fe-
roit pas étonnant qu’il eût plus approché de la vérité
pour les vitriols & les muriates alkalins , qui
font peu fufceptibles d’être décora pofés par le feu, que
pour les nitres qu’il fe contentoit de pouffer a la
M o n , & qu’en conféquence il eût ajouteà la forame
d’acide réel, la portion d’eau encore aflez confide-
rable qu’ils tiennent en cet état.
On verra dans un inftant que les obfervations
d'Homberg & de Plummer ne font guère plus favorables
au fyftême de M. Kirwan.^
30. M. Berthollet a cherché à vérifier, par 1 expérience
, le principé de M. Kirwan for la faturation
des alkalis par une égale quantité des trois acides
minéraux, & il ne lui a pas été poffible de les concilier
avec fes obfervations. ( Obfervations fur l eau
rivale, dans le Recueil de l’Acad. Roy. des Sciences,
ann., 1787.) r
J’ai bien éprouvé ce que dit a cette occalion ce
célèbre Chymifte, qu’il eft difficile d’avoir fur cet
objet des réfultats conftans , & qu’une legere différence
de defiiccation fuffit pour foire beaucoup varier
les proportions. Je fupprimerai donc, a fon exemple,
les détails d’un grand nombre d’expériences que j ai
entreprîtes dans les mêmes vues ; mais il en eft quelques
unes où je crois être parvenu a refferrer les
limites de ces variations ; elles embraffent d ailleurs
tous les points fondamentaux de la théorie des affinités
de M. Kirwan ; elles peuvent fervir à fixer les
idées fur les grandes quéftions agitées par ce Phyfi-
Premïere expérience.
J’ai fait diffoudre 10 grains de foufre dans de la
potaffe pure en liqueur ; la diffolütion étant achevée
& complète, je l’ai introduite, encore chaude , fous
un flacon renverfé fur la tablette de la cuve à mercure
, & dans lequel j’àvois foit paffer auparavant
52,6 pouces cubes d’air vital, ‘retire de la chaux
noire de manganèfe.
Lorfque l’abforption eut totalement ceffe, ce qui
n’eut lieu que le 8e. jour, je marquai exactement
le niveau de l’élévation de la liqueur fur les parois
du flacon ; la liqueur fut tranfVafée avec précaution;
elle ayoit perdu prefque toute fa couleur »elle n’exhaloit
pas la moindre odeur fulfùreufe 9 lors meme qu’on
y verfoit de la diffolütion d’acète barotique. On a
ajouté de cette diffolütion jufou’à ce qu’elle nocca-
fionnât plus aucun précipité, & il fe régénéra dans
cette opération du fpât pefant, q u i, bien édulcoré
& féché , pefoit 9 5 ,7 grains.
Il y avoit eu 9,3 pouces cubes d’air vital ab-
forbés , qui, à o , 5 grains par pouce cubique, forment
un poids de 4,65 grains. a
D ’où réfulte la compofition fuivante de l’acide
vitriolique fe c , fuppofé, comme je 1 ai ^ dit, qu il
n’y ait aucune portion d’eau effentielle a fon état
faïiji.
Soufre ou bafe aci(Jifiable . . . 10 grains.
Principe acidifiant fourni par l’air 4 ,6 5
T o t a l , .................
On voit en même temps que 9 5 ,7 grains de
fpat pefant font formés d’une quantité d acide vitriolique,
qui a pour bafe acidifiable 10 grains de foufre.
Seconde expérience.
Comme la converfion du foufre en acide par le
contaClde l’air vital eft très-longue, & que par cela
même on n’eft jamais fur qu’elle foit entière, j’ai eu
recours à un procédé plus expéditif pour avoir une
confirmation de l’expérience précédente.
J’ai foit diffoudre de même 20 grains de foufre
dans la potaffe en liqueur ; j’ài verfè cette diffolu-
tion, encore chaude, dans un flacon appareillé à la
manière de M. Woulfe , pour recevoir le gas acide
muriatique déphlogiftiqué. Il y avoit un flacon intermédiaire
vuide pour recevoir l’acide s’il en paffoit;
& le flacon qui contenoit l’hépar portoit fiphon fous
un récipient dans la cuve pneumatique.
Quelques minutes après que le gas eut commencé
à paffer , l’hépar fe trouva complètement décoloré.
La diftillation frit arrêtée avant qu’il montât une
feule goutte d’acide muriatique. Le i er. flacon étoit
tellement rempli de gas, qu’ayant été fur-le-champ
plongé dans l’eau , elle occupa en quelques jours plus
des trois quarts defo capacité. L’eau du récipient avoit
•à peine l’odeuf d’acide muriatique déphlogiftiqué, ce
qui prouvoit bien fenfiblement que la très-grande
partie du gas ayoit été abforbée en traverfent la
diffolütion du foufre.
Je verfai pour-lors dans ce flacon de la diflolution
d’acète baretique , en quantité fuffifente pour s emparer
de tout l’acide vitriolique qui s’y étoit formé,
& j’eus du fpat pefant, qui, bien édulcoré & féché?
pefoit exactement 187,6 grains.
Il eft bon de remarquer que, pendant toute cette
opération, il ne fe dégagea pas la moindre odeur
hépatique, ce qui , joint à la décoloration de l’hé-
p ar, annonce la converfion totale des 20 grains de
foufre en acide. Mais une’ circonftance migulière
que je ne crois pas devoir omettre, quoiquétrangère
j à l’objet de l’expérience, c’eft que la liqueur qui
paffoit par le' filtre fur lequel j’ayois jeté le mélange