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d’après notre analyfe de l’air : un peti de foufre fê-
paré en nature, le métal calciné, le refte du foufre
paffé en partie à l’état de fulfure métallique, en
partie à l’état de fulfure alkalin tenant oxide métallique
; en un mot, l’oxigène pris au foufre par le
métal, & hors de là rien autre que ce qui réfulteroit
du mélange du foufre lui-même avec la potaffe &
le métal oxidé d’avance par fa combuftion dans l’air
( Mém. 6* Obferv. de Chymie, &c. page 2fp ).
La chaleur du creufet n’eft pas toujours néceffaire
pour décomposer l’acide fulfurique ; il fuffit de porter
dans cet acide concentré une fubftance qui recèle
le principe charbonneux, il repaffe bientôt à
l’état d’acide fulfureux ; & qu’eft-ce que l’acide ful-
fureux, finon de l’acide fulfurique dans lequel il
exifte une portion de foufre privé d’oxigène ? M. Ber-
thollet a bien démontré la préfence de ce foufre foit
dans le fulfite de potaflé ou fel fulfureux de Stahl,
foit dans l’acide noirci par le charbon, puifqu’il a
formé de même un acide fulfureux en diftillant l’acide
folfurique fur le foufre ; puifqu’en brûlant le foufre
forabondant, il a ramené à l’état de fulfate de potaffe
tous les fels réfultans de l’union de cet acide fulfureux
avec la bafe alkaline (Me/», de l’Acad, ann.
1782, page Ï97).
Enfin jufques dans la diflblution des métaux par
Facide fulfurique concentré, il fe forme de l’acide
fulfureux, quelquefois même du foufre, ainfi que
M. Baume l’a remarqué dans la diflblution de l’étain ;
c’e ft - à -d ir e que le métal qui ne peut être diflous
qu’en état d’oxide, qui ne peut s’oxider ici qu’aux
dépens de l’acide, en décompofe une partie. Ainfi l’on
n’apperçoit toujours que ces deux réfultats uniformes
& confians : la bafo acidifiable rendue à fon premier
état par la privation de l’oxigène, & l’agent de la
décompofition formant avec cet oxigène un compofé
abfolument femblable à celui qu’il donneroit par fa
combinaifon direéle avec l’air vital.
IV. Le charbon ayant le pouvoir de décompofer
tous les produits que nous formons par la combi-
naifon de l’oxigène avec les fubftances acidifiables
& métalliques, c’eft-à-dire d’enlever l’oxigène à ces
fubftances, il eft tout Simple qu’elles ne puiflent le
lui reprendre, du moins par affinité Simple ; c’eft une
conféquence des loix conftamment obfervées dans
la marche des attraéfions éleâives, qui répugnent à
cette réciprocité ; & d’après cela, on ne doit pas
être étonné que l’art ne foit pas encore parvenu à
décompofer le gas acide carbonique.
Cette conclusion eft bien différente de celle que
j’ai cherché à établir en traitant du même acide
( § . I I I , n. 4 ) ; mais, je l’ai déjà dit & je ne crains
pas de le répéter, on ne fe rend guère difficile fur
les preuves des faits qui fe lient au fyftême que l’on
à adopté; & , tout en avouant les difficultés que me
préfentoient la plupart des obfervations d’après lef-
quelies on avoit admis cette décompofition , l’analogie
phlogiftique entraîna pour-lors mon jugement.
Je me trouve'donc aujourd’hui dans l’obligation plus
A I R /
étroite de les foumettre à un examen impartial, afirt
de mettre le Leéteur en garde contre les indurions
que l’on en pourroit tirer.
M. Achard avoir annoncé que l’on pouvoit décompofer
Yair fixe en le faifant paffer fur du nitre
en fufion ; mais M. Hermftadt remarque très - bien
que ce gas eft Simplement délayé dans l’air vital qui
fe dégage du nitre. AuSfi ce dernier ayant fubftituê
Y air inflammable à l’air fixe n’eut - il, au lieu d’air
amélioré ou refpirable, qu’une explofion qui brifa
les vaiffeaux ( PkyfikaVfche- Che mi fiche ver Juche , &c.
part. /, pag. 278 ).
M. Hermftadt a tenté lui-même par divers moyens
cette converfion, dont la poflibilité lui étoit indiquée
par fes principes, & il a cru y avoir réuifi en privant
d’a ir, autant qu’il étoit poffible par le feu,
l’oxide noir de manganèfe, & faifant paffer le gas
acide carbonique fur cet oxide entretenu rouge dans
un tuyau de terre. Mais il avoue en même temps
qu’il n’a jamais pu parvenir à convertir la totalité
de ce gas en air vital; d’ailleurs le fluide aériforme
étoit reçu & comprimé alternativement-dans des vefo
fies attachées aux deux bouts du tuyau, & nous avons
vu ( ci-devant page 673 ) que cet appareil étfoit très-
infidèle"; on en a ici une nouvelle preuve, puifque
600 pouces cubiques fe trouvèrent réduits à 150;
l’eau J e chaux en abforba encore 106 ( L. cit. p. 280
L’altération qu’éprouve le gas acide carbonique par
l’étincelle éleâriqtre & qui s’annonce par le volume
& l’inflammabilité qu’il acquiert,, a été mife au rang
des preuves les moins équivoques de fa décompofition
; M. Monge a répété l’expérience, il a v a
qu’il y avoit calcination de l’excitateur ; que les décharges
multipliées difpofoient à l’oxidation le mercure
lui-même ( qu’il avoit vu dans d’autres cir-
conftances fe tenir en diffolution dans l’air); & i l en
a conclu avec beaucoup de vraifemblance i°. que
cette oxidation s’opéroit par l’oxigène de l’eau que
recèloit le gas acide ; 20. que la portion de gas inflammable
qui occafionnoit l’augmentation de volume
n’étoit que l’hydrogène de l’eau décompofée par
l’oxidation du métal; 30. qu’une partie du gas acide
étoit reprife alors par l’oxide mercuriel (Notes fur
le Traité du Phlogiflique , &c. de M. Kirwan, p, 226 ).
M. Van-Marum vient de me communiquer le réfultat
d’une expérience qu’il a faite au mois de Novembre
dernier avec M. le Chevalier Landriani, dans la
vue de vérifier cette explication ; leur premier objet
a été de fe procurer de l’acide carbonique parfaitement
fec , qui, dans cette fuppofition, ne devoit
plus être altéré ; ils l’ont préparé exprès en traitant
à la cornue du charbon , qu’ils avoient fait rougir
auparavant , avec de l’oxide mercuriel par l’acide
nitrique ou précipité rouge , qu’ils avoient eu de
même la précaution d’échauffer, ainfi que les vaiffeaux
, pour en chaffer toute l’humidité ; enfin ils
avoient pouffé à rébullition le mercure fur lequel
ils fe difpofoient à recevoir ce gas. Malgré cela, il
y eut augmentation d’environ un 10e. du volume
de ce gas , lorfqu’il eut été éleétrifé pendant 15 mi-
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mites ; la potaffe n’en abforba que trois ÿ s. les deux
autres 5 ” . s’enflammèrent à l’approche d’une bougie.
En s’arrêtant à ces premiers réfultats , on auroit,
ce femble , é.té fuffifamment aürorifé à penfer que
Facide carbonique parfaitement fec avoit fubi lui-
même une altération , & qu’ainfi ces phénomènes
étoient indépendans de toute humidité étrangère ;
mais ces deux célèbres Phyficiens prirent la réfolu-
tion de les obferver encore avec plus d’attention, &
ils ne tardèrent pas à s’appercevoir que le gas qu’ils
avoient cru fec ne l’étoit pas ; que pendant^ia rè-
duéfion de l’oxide mercuriel par le charbon, il s’éle-
voit une vapeur aqueufe qui fe condenfoit en gouttes
fur les parois des vaiffeaux ; ils jugèrent que cette
eau ne pouvoit être que le produit de la combinai-
fon de l’oxigène du mercure avec l'hydrogène du charbon.
D’où ils conclurent i°i que cette éxpérience
prouvoit feulement que le charbon tenoit une portion
d’hydrogène, dont il ne paroiffoit pas qu’il pût être
entièrement privé ; 20. qu’elle étoit fort éloignée de
démontrer l’exiftence du phlogiftique, puifque fi cet
hydrogène eût été le phlogiftique, le principe mé-
îallifant, il fe feroit uni- paifiblement à la chaux métallique
au lieu de former de l’eau.
Lorfqifon veut imprégner l’eau de gas acide carbonique
, il refte prefque toujours une portion de
fluide élaftique qu’elle refufe de prendre ; on a ob-
fervé un femblable réfidu, même en employant du
gas qui avoit été précédemment abforbé par l’eau,
& qu’on en avoit dégagé; on a cru appercevoir enfin
que ce réfidu étoit peu propre à la combuftion : il
n’en a pas fallu davantage pour faire admettre la
converfion de Y air fixe en air phlogiflique. Mais il
arrive, fréquemment que ce réfidu n’eft autre^ chofe
que de l’air commun ou d’une qualité peu inférieure
à l’air commun : M. Prieftley l’affure pofitivement
d’un femblable réfidu qui, après avoir été expulfé
de l’eau, refufoit de s’y unir, ainfi qu’à l’eau de
chaux ( Expér. part. 4 , feEl. 2 ) ; il s’enfuivroit par
Conféquent que dans le même temps une portion de
l’air fixe auroit été convertie en air vital & une
autre portion en air phlogiftiqué : il feroit difficile
fans doute de propofer une hypothèfe qui pût concilier
ces deux effets. Il faut remarquer encore que
Fon s’eft peu mis en peine d’expliquer comment l’eau»
que Fon a toujours fuppofé ne point tenir & ne
point attirer le phlogiftique, pouvoit néanmoins en
donner ou en prendre au gas acide. Il y a plus, ce
réfidu immifcible à l’eau n’a jamais été que d’une
foible quantité r -les expériences de M. Cavendish
ont prouvé qu’il n’excédoit pas le fixièmé de la
totalité du gas; & l’on, ne s’eft pas demandé qui
eft - ce qui pouvoit borner cet effet, tandis qü’on
avoit à fii difpofition les moyens de le porter au
dernier degré.
Cette circonftance nous indique aflêz clairement
ce qui fe paffe dans cette opération : le gas que l’on
déplace par les acides ou par" le feu eft toujours I
mêlé avec une portion dé Fair des vaiffeaux.;. celui |
A I R 7Iï que l’oti obtient en faifant bouillir Feau qrni en eft
chargée, eft mêlé de l’air qui étoit tenu en diffolufion
dans l’eau ; il n’éft donc pas fupreriant que la totalité
de ce fluide expulfé ne puiffe être réabforbéë par Féâtj
suffi- promptement & de là même manière que fi
c’étoit dé l’acide carbonique pur, & que , malgré
l’agitation, il refte un peu d’air commun. Oh conçoit
également que cette quantité doit être plus confidé-
rable quand on emploie , pour abforbér lé gas, de
l’èaü qui n’a pas été privée auparavant de tout foiî
air, parce qu’il faudroit dans ce cas quelle en reçût
une double dofe, & que tout cè qui s’opère paÉ
affinité a néceffairçment une mefure déterminée.
Avant que de propofer cette explication, j’ai prévu
que l’ori pourroit m’oppofer avec affez de vralfem-
blaricé que l’eau , en fe faturant d’acide carbonique,
étoit forcée d’abandonner l’air commun dont éllé fo
trou voit chargée, & j’ai réfôlu i’objëiftiou par l’expérience.
J’ai faturé de l’eau dé pluie de gas acide
carbonique, je l’ai tranfvafée dans un cylindre de
verre, j’y ai verfé, jufqu’à excès, de la potaffe caufe
tiqué, & fur-le-champ j’ai placé ce vaiffeau fous
le récipient de la machine pneumatique ; j’ai vu par
ce môyérî s’en dégager des bulles âuffi greffes & eii
auffi grande quantité que de la même eau de pluie
non chargée de gas acide, & qui né pouvoit être
que de l’air c®mnum , le gàs étant certainement fixé
par l’alkali : ce qui démontré que l’âir & le gas
peuvent très-bien cohabiter dans la même eau.
Il eft vrai que dans l’expérience rapportée par
M. Prieftley, ce Phyficien avoit eu là précaution de
faire bouillir auparavant l’eau qu’il voiïloit faturer
de gas; mais, indépendamment de ce qu’il né faifoit
par là qu’écarter une des càufes qui concourent àt
la production du réfidu aériforme, on fait que l’ébullition
ne fuffit pas pour expulfer entièrement l’air de
l’eau, & il eft aifé de s’en convaincre èn pompant
l’air d’un récipient fous lequel ôri a placé un vaiffeau;
rempli d’eau tenue long-temps à la plus forte ébullition.
Ajoutons que l’eau de chaux dont il fe fer voir
pour réabforbér plus promptement le gas, repro-
duifoit line, nouvelle caufe accidentelle de ce réfidu^
puifqu’il eft certain que l’eau faturée de cliaux recèle
encore une affez grande quantité d’àir ; on a
déjà vu à ce fujet le témoignage de M. Prieftley (ci*
d e v a n t p a g e 7 4 6 ) , & je puis le confirmer d’après;
mes propres effais^
Ainfi le phénomène réduit à fe jufte valeur né
peut fervir qu’à mettre dans un plus grand jour ce
que nous étions déjà fur la voie de feupçonner ::
que l’eau retient très - fortement une portion d’air
que l’air & le gas acide carbonique ont une certaine
tendance à s’unir. Ces affinités de l’eau avec les gas
& des fluides aériformes entre eux , jufqu’ici trop peiv
connues, recevront probablement dans la fuite, biea
d’autres applications.
Un dernier fait, & qui n’étoit pas le moins impo^
fent, eft celui de l’altération du gas. acide carbonique
par le mélange de foufre & de fe r , dont nous de