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de ne pouvoir, en ce moment, m’occuper de ces ]
préparations, pour les confier au travail lent de la
nature & attendre l’évèneinent ; il ne fervira pas j
feulement a déterminer i d’une manière plus pré- •
elfe, la vraie compofirion des acides végétaux , ;
il contribuera de plus à répandre des lumières \
fur quelques parties encore obfcures de la Chymie j
des gas.
Cependant nous pouvons conclure, dès-à-pré-
fent, que le tartre eft véritablement un fel neutre
avec excès d'acide, qu’il tient, à-peu-près, -§. de
potaffe , qu’on peut retirer parle feu , par les acides
& par la décompofition fpontanée ; que fon acide
tient effenrieliement une portion d’huile affez con-
fidérabîe ; que par l’aétion du feu il fe réfout ab-
folument en gas méphitique & inflammable ; qu’il
fe détruit à la longue complettement dans la dif-
folution aqueufe , ne.laiffant de réfidu fenflble, j
qu’une pellicule muqueufe ; qu’à la chaleur de la
diftillation , il abandonne l’a lkali, fe décompofe
en partie, en ,fourniffant de l’huile et beaucoup
de gas acide méphitique, & s’élève en partie en
état d’acide empyreumatique, ayant des propriétés
&. des affinités différentes ; qu’il fe rapproche fen^
fib!ement4de l’acide acéteux,. qui éprouve comme
lui la décompofition fpontanée ; en un mot, qu’il
diffère eflèmieUement de l’acide oxalin , en ce
que celui-ci eft bien moins chargé d’huile, qu’il
ne fe décompofe pas dans fa diffolution aqueufe ,
& paffe à la diftillation fans s’altérer.
Je ferai voir ailleurs que l’acide du tartre eft
encore très diftinâ des acides citronien & faccha,-
rin , qu’il n’y a actuellement ni acide faccharm
dans le tartre, ni acide tartareux dans le fucre ,
& que les Chymiftes qui ont admis la converfioa
de l’un en l’autre, fans nouvelle compofition, n’ont
été conduits à cette hypothëfe, que parce qu’ils
n’ont pas vu que le fucre ne fournit réellement
à la compofirion de l’àcide fàccharin qu’une fubfi-
tance qui exifte dans fa partie huileufe , & qui fe
rencontre dans bien d’autres huiles. | Voyeç
A c id e V é g é t a l .& A c id e Sa c c h a r in , §.. V . )
Pour ce qui eft de la terre , que quelques-uns
ont trouvée dans le tartre , & à laquelle ils ont
attribué l’indiffolubilité de ce fe l , il eft certain- ,
comme le dit M. Pæcken, que ce n’eft qu’un
mélange étranger qui peut y être porté d’autant
plus ailément, même dans les opérations par lef-
quelles on le purifie, qu’il diffout très-bien la
terre alumineufe*
Il ne nous refte plus qu’à confidérer l’acide du
tartre, foit libre, foit en partie faturé par la potaffe,
et fes affinités dans ces deux états.
§. V . De F acide tartareux libre.
Il ne paroît pas que perfonne ait obtenu l’acide
tartareux libre ayant M*. Schçele >il. communiqua
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fon procédé à M. Retzii.s qui le publia dans les
Mémoires de Stockolm en 1770.
On fait diffoudre 2 livres de cryftaux de tartre
dans l’eau bouillante , on y jette peu-à-peu de la
craie lavée , fêchée er réduite en poudre, jufqu’à
ce qu’elle n’occafionne plus d’effervefcence , &
que la liqueur n’altère plus en rouge le firop de
i violettes. M. Pæcken en employé pour cela 9
j onces , M. Bergman feulement 8 onces .5 gros | ;
| on fent que cela doit varier , fnivant la pureté &\
1 le degré de defficcation de la craie..
La faturation faire & la.liqueur refroidie, on
la décante fur un filtre , pour féparer le précipité
pulvérulent qui s’y «ft formé ; ce précipité eft
un -fel infoluble, compofé de l’acide tartareux &
de calce, c’eft-à-dire , du tartre calcaire ; lorfqu’il a
été lavé et féché , il a l’apparence d’un fable blanc
très-fin, il craque fous les dents & ne manifefle
aucune faveur ; il pèfo de 32 à 33 onces , c’eft-
à-dire , près de quatre fois autant que la craie. La
liqueur filtrée tient environ moitié , du poids du
tartre employé, détartré dé potaffe , ou fel végétal
, que l’on peut en retirer par l’évaporation.
On met le tartre calcaire bien lavé daus une
grande cucurbite, e t on verfe dessus un mélange
de 9 onces | d acide vitriolique le plus concentré
avec 5 livres 5 onces d’eau ; on fait digérer
le tout pendant douze heures., en ©bfervant de
remuer de temps en temps avec une fpatule d®
bois : l’acide vitriolique s’empare de la terre calcaire
, forme avec elle un fel peu foluble qui fe
précipite , & l'acide, tartareux refte libre..
On décante la liqueur, on lave le réfîdu dans
plufieurs eaux froides jufqu’à çe qu’il ait perdu
toute faveur acide ; on réunit toutes les eaux à la
liqueur pour les faire paffer par le filtre, on les
fait évaporer fur le feu ; & ou obtient environ onze
-onces d'acide tartareux concret.
Pour qu’il ne refte point d’acide vitriolique dans
la liqueur, M. Pæcken confeille d’en employer
plutôt trop peu que tro p p a r ce qu’on ne rifque
alors que de laiffer une portion de tartre calcaire
non décompofé, mêlé avec la félénite; & l’on re-
connoît que l’on a atteint ce but en projettant
fur les charbons un peu de ce précipité . féléni-
teux qui, dans ce cas, répand une odeur de tartre
brûlé.
MM. Retzius & Bergman indiquent une autre
manière de s’affurer fi F acide tartareux n’eft pas
mêlé d’un peu d’acide vitriolique. Elle confifte à
y laiffer tomber une ou- deux gouttes de diflbluriôn
d’acète de plomb ou fucre de fatijrne qui y forment
fur - le - champ un coagulé blanc, parce que
1 acide tartareux lui-même s’empare de la chaux de
plomb & fe précipite avec elle; mais en ajoutant
du vinaigre dans le mélange , on fait difparoître
tout le coagulé fi ce n’eft que du tartre de plomb,
au lieu que s’il s’eft formé du vitriol de plomb il
demeure infoluble. M» Retzius ayoit d’abord proÂ
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pofé de rediffoudre ce précipité par l’acide nitreux,
mais il ne tarda pas à reconnoître que cette épreuve
«toit moins fure que celle par l’acide acéteux, en
ce que l’acide nitreux, fur-tout lorfqu’il y en a une
certaine quantité, peut diffoudre un peu de vitriol
de plomb.
On purifie àifément F acide tartareux de Facide
vitriolique que cette épreuye y fait découvrir
en le faifant digérer fur un peu de tartre calcaire.
S i, au lieu de crafe, on emploie de la chaux
vive pour, obtenir Facide tartareux -, elle décompofe
complettement le double de fon poids de tartre,
& l’on trouve par conféquent l’alkali libre dans
la -liqueur, au lieu de tartre de potaffe comme
dans la première opération. Cette différence vient
de ce qüe la chaux prend non-feulement l’acide
furabondant à la faturation, mais aufli celui qui
eft en combinaifon avec la potaffe , ce que ne fait
pas le méphite calcaire.
L 'acide tartareux obtenu par l’un ou par l’autre
de ces procédés, purifié de tout mélange de félénite
par des évaporations & filtrations répétées, effayé,
comme je l’ai dit, par l’acète de plomb , doit être
rediffous & évaporé avec précaution, pour être
réduit en cryftaux, foit pour l’amener encore à
line plus grande pureté, foit pour le conferver.
M. Retzius dit précifément que fans cela il eft
très-fujet à la moififfure, c’eft-à-dire, qu’il éprou-
veroit une décompofition fpontanée comme le
tartre même ; j’ai lieu de croire cependant que cela
n’arrive que quand la liqueur eft très-étendue, car
je coaferve depuis trois ans un flacon à demi
rempli de cet acide qui n’a éprouvé aucune altération
4 à la vérité, fa pefanteur fpécifique eft à
celle de l’eau diftillée : r 1 : 1 ,0 8 4 , & il s’y forme
fpontanément des cryftaux.
M. Bergman confeille d’évaporer la liqueur en
confiftance de ftrop clair, & de la porter au frais
pour obtenir des cryftaux réguliers ; fuivant
M. Pæcken, il fuffit de conduire doucement l’évaporation
, & quand on opère fur une certaine quantité,
on voit bientôt fe former des cryftaux affez
gros & réguliers.
La figure de ces cryftaux n’a pas encore été bien
déterminée ; M. Retzius les décrit comme des che-
veu,x entrecroifés, M. Pæcken dit qu’ils préfentent
différentes formes, que'cependant ce font le plus
fouvent desprifmes allongés en pointes ; MM. Spiel-
man & Corvinus ont obtenu par refroidiffement
des cryftaux groupés en forme de lances , les uns
en aiguilles , les autres en pyramides ; M. Bergman
les repréfente comme des feuillets affemblés
par une de leurs extrémités & divergens. Les cryl-
taux que j’ai trouvés dans un flacon où je con-
fervois cet acide étoient comme des aiguilles.
Les premiers cryftaux font très-blancs , ceux
qui fe forment les derniers font plus ternes ;
AJ. Wiegleb affure qu’ils font tous de la plus grande
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blancheur, fi, dans la décompofition du tartre, on
fubftitue à la craie des écailles d’huitre bouillies
& réduites en poudre.
Les cryftaux d'acide tartareux n’éprouvent aucun
changement à l’air ; expofés au feu , ils noirciffent
bientôt & laiffent un charbon fpongieux qui blan-,
chit à un plus grand feu, & diminue confidéra-
blement de volume.
Au feu du chalumeau, cet acide fe fond tout
de fuite à l ’approche de la flamme extérieure, il fe
botirfouffle, il noircit, il produit de la fumée &
une flamme bleue, il laiffe enfin un charbon fpongieux
qui fe change en une cendre calcaire. Pour
bien obferver ces effets, il faut que la combuflion
s’opère lentement par la. partie la plus foible de la
flamme QBergman, opufe. tome I I , page 47/, édit
Fr.)
Ces cryftaux traités à la diftillation dans une
cornue donnent un peu de flegme à peine acide
& de l’huile; le réfidti charbonneux tient une
petite portion de terre, mais on n’y trouve pas un
atome ni d’acide ni d’alkali. M. Bergman de qui
j’emprunte encore cette obfervation , ne paroît pas
avoir fait l’examen de ce flegme acidulé, fans
doute parce qu’il avoit opéré fur une trop petite
quantité, mais il n’y a pas de doute que le peu
d’acide qu’il receloit n’étoit plus Facide tartareux 9
mais l’acide empyreumatique du tartre, dont j’ai
parlé dans le § . m .
MM. Spielman & Corvinus ont diftillé à l ’appareil
pneumatique deux onces de cryftaux FF acide
tartareux dans une cornue de v erre, ils ont obtenu
d’abord 431 pouces de gas acide méphitique, en fuite
120 de gas inflammable ; la cornue qui fe fondit alors
par la violence du feu ne leur permit pas de continuer
l’opération, mais c’en étoit affez pour les
autorifer à conclure qu’il y a peu de différence
dans les quantités de produits gafeux que donnent
le tartre crud & F acide tartareux cryftallifé ; elle
ne peut venir en effet que de la proportion même
de Facide tartareux qui s’y trouve, puifque c’eft
toujours lui qui fe réfout en gas & que l’alkali
n’y a aucune part. L’odeur de fouffre que ces chymiftes
ont. remarquée dans le réfidu de cette
diftillation étoit due infailliblement à un refte de
vitriol de potaffe, dont leurs cryftaux fe troti-
voient accidentellement chargés, & , comme le dit
très-bien M. Léônhardi, c’eft encore ce mélange
étranger qui leur en a impofé, lorfqu’ils ont cru
que la petite portion de vitriol.de potaffe trouvée
dans le réfidu de la diftillation de Facide tartareux
avec l’acide vitriolique, venoit de la converfion
du premier en alkali.
Il réfulte de ces obfervations que Facide tartareux
libre eft auffi chargé d’huile que lorfq .’il eft en
partie faturé d’àlkali dans le tartre, & c’eft une
nouvelle preuve de ce que j’ai dit, que c-.t acide
étoit abfolument le même. Ce feroit donc use
particularité remarquable que cet acide traité avec