
pour dérober la trace des moyens direéls ; car ce
font conftamment les cémens maigres qui agirent
(iir la fonte, ce font les charbonneux qui déterminent
la converfion du fer : les premiers adoucirent
la fonte, les derniers rendent le fer plus fufible , plus
fufceptible de durcir à la trempe ; une barre expofée
au même feu , dans le même creyfot, à moitié entourée
de cendre d’o s , à moitié d’un mélange de
cendre d os & de charbon en poudre, fo trouve après
1 operation, moitié acier duéÜle, moitié fonte, comme
auparavant ( n. 2 1 ) ; peut-on fo refiifer à dire avec
le célèbre Rinman, que, dans le mélange, l’un des
ingrédiens a véritablement empêché l’effet de l’autre ?
Pour'mettre la vérité de cette explication dans
un jour encore plus frappant, je m’arrêterai à con-
fidérer un inftant les cara&ères qui rapprochent ,-ou
our mieux dire, qui identifient le charbon & laplomagine
par rapport au phénomène qui nous occupe.
Si le premier acier eût été préparé ' par cémentation
du fer dans cette fubfrance micacée , non
incinérable, que nous appelions plombagine, on n’eût ;
pas tardé à foupçonner. que le fer en retenoit une
partie , & fl on eût obfervé l’augmentation de
poids du fer dans cette opération, on auroit penfé
qu’il n’étoit pas befoin d’autre preuve de la poffi-
bilité & de la réalité de cette union. Mais on n’èm-
ployôit, & on n’emploie même encore aujourd’hui
que le cément de charbon; on étoit fort éloigné
d’imaginer qu’il pût s’allier aux métaux, ou même
qu’il pût leur fournir autre chofe que le phlogifti-
que, ou principe métallifant : voilà fans doute ce qui
nous a jufqu’à préfont empêchés de reconnoître que le
fer n’acquéroit les propriétés de l’acier que par l’addition
d’une jufte dofe de cette matière.
On fait maintenant que la plombagine fait, détonner
le nitre comme le charbon, & qu’elle laiffe de
même l’alkali du nitre en état effervefcent, c’eft-à-
dire, qu’elle eft décompofée & qu’elle fe réfout en gas
inflammable & en gas acide méphitique. Les obfer-
vations que j’ai publiées dans les Mémoires de l’Academie
de'Dijon ( '783 > 1 a pafr 76 ) a prouvent
encore qu’il y a des matières charbonneufes qui en
ont toutes les apparences extérieures, & qui pourtant
ne font ni combuflibles ni incinérables comme le
charbon. Je raffemblerai ailleurs bien d’autres faits
analogues ( Voye^ Charbon & Plombagine ) ; il
en eft tin cependant qui me paroît devoir trouver
place ici.
Je faifois, au mois d’o&obre dernier , quelques
effais au chalumeau avec M. Tennant ; fatigués de
ne trouver que des charbons qui pétilloient dès qu’on
ÿ portoit le dard de la flamme, nous imaginâmes de
les expofor pendant une' heure, à un grand feu ,
dans des creufets bien fermés , pour leur enlever
l’humidité qui nous paroiffoit être la caufe de cette
décrépitation ; mais nous fûmes bientôt convaincus
que la defîication n’étoit pas lé feul effet de l’opération
que nous leur avions fait fubir, ils refufoient
apres cela de s’enflammer , & roùgifîbiént fans fe
confommer : ils s’etoient donc fenfiblemént approchés
de la condition de la plombagine. D e - là on peut
conclure que le charbon qui à fervi à une première
cementation , n’eft plus exafrement le même qu’au-
paravant, 8c* s’il efr également propre à convertir
du nouveau fer en acier, ainfi que l’affurent tous
les Métallurgifres, c’efr une preuve qu’il n’agit réellement
que comme la plombagine ; on en trouveroit
bien d’autres preuves en parcourant les effais de
cémentation faits avec des matières charbonneufes
animales qui fe refufent à l’incinération, & qui ont
par conféquent une reffemblance bien plus parfaite
avec la plombagine.
Lorfque je vis la première fois de la vraie plombagine'
fe féparer, par la fufion , dans l’eau bouillante
, de l’alliage de M. d’A rcet, que j’avois préparé
moi-même avec des métaux très-purs & bien fondus,
je pouvois répugner à croire qu’elle fût réellement
alliée à ces métaux ; mais en rapprochant de cette
obfervation ce que j’ai dit dans le même Mémoire,
de la plombagine des fourneaux ou l’on fond les
mines de fe r , des procédés qui m’ont donné un
vrai Eifemnan ou mine de fer micacée artificielle,
des expériences des Bergman, des Rinman & même
de l’analyfe fi frappante de la fonte grife par l’acide
vitriolique affoibli, que j’ai précédemment rapportée,
il me paroît impoffible de douter que les métaux,
même en état de régule, & fur-tout le fer, puiffent
s’unir à la plombagine ; ce fera une nouvelle exception
à cette règle trop généralifée, & qui nous
avoit déjà tant induits en erreur , que lés métaux
ne pouvoient s’allier qu’aux métauxl La plombagine
étant un foufre méphitique, ce phénomène ne doit
pas plus étonner que toute autre combinaifon pyri-
teufe. Voye{ A l l i a g e .
Je ne difrimulerai pas que M. Grignon, dans, fes
notes fur l’analyfe du fer de M. Bergman, s’élève
contre cette combinaifon de la plombagine avec le
fe r ; qu’il foutient que c’efr la chaleur foule qui, en
s’accumulant, opère la converfion; qu’il s’appuie fur
ce que le même charbon peut fervir à plüfieurs
cémentations ; qu’il penfo que la plombagine efr plutôt
difpofoe a abforber le principe ocièrant, comme la
terre calcaire '; en un mot, que la poudre noire qui
fe précipite de l’acier dans fa diflohrtion, par l’acide
vitriolique , n’efr probablement qu’ün corps ifolé,
interpolé , que ce qu’on appelle cendrufes& qui
n’en fait point partie intégrante & conftitutive ( Pag,
dp , 104, //4 ). Mais après avoir pefé toutes ces
objeélions, il m’écrivit le 18 novembre 1783 , qu’il
croyoit ces doutes peu fondés ; je rapporterai ici le
pafrâge de la lettre dans fes propres exprefrions, qui
me paroiflent faites pour infpirer la confiance, par
le témoignage de la conviélion ou il étoit lui-même
de l’exaétituae de fes expériences.
« La grande queftion entre mous regarde la plom-
» bagine, que M. Grignon a fibre être accidentelle
” dans le fer crud & dans l’acier. J’avouerai bon-
n nement ma faute dès qu’il pourra m’envoyer un
É foui morceau de fer crud & d’acier, qui en foit
n exempt. Je vous prie de même d’en chercher
» foigneufement
A C I » foigneufement quelques échantillons, & de m’eri
» envoyer , car ft j’ai tort, je fouhaite, mon cher
„ am; * ingénument d’être détrompé au plutôt pof-
» fible. M. Grignon eft peut-être prévenu en faveur
» de fon fÿftême, & alors je ne’ fuis pas étonné que
» ma plombagine lui ait lait de la peine ; mais fi le
» principe aciérant confifte dans le phlogillique &
jj dans la matière de la chaleur, il me femble que
» la plombagine , qui en contient beaucoup, & qui
JJ eft plus corporelle , ne doit pas être regardée
jj comme incompatible avec ce fyfteme. jj ^
Je ne vois pas en effet ce qu’on peut oppofer à
des expériences analytiques auflï multipliées , fi ce
n’eft une analyfe encore plus exaéte qui contredife
les premiers réfültats, ou du moins qui en change
les conféquences par une détermination plus précife
de la nature des produits ; c’eft ce que M.'Grignon
n’a pas entrepris , & même il confirme , par fes
propres obfervations, ce que j’avois dit de la plombagine
, qui fe trouve fréquemment dans les laitiers
des forges : la fonte, de fer furchargée de phkgïftique
(ce font fes termes) produit beaucoup d’une fub(lance
que la feule allion du feu en fépare , b qui reffemble,
à bien des égards , à ta plombagine... . qui.eft écail-
kufe , noire , foyeufe b légère , qui tache les doigrs en
la froiffant:, b qui a le glijfant de la plombagine. On
peut donc déformais regarder comme bien démontré,
que la fonte & l’acier tiennent réellement en quantité
fenfible une matière qui n’eft point du fer à
l’état métallique, & qui a la propriété de demeurer
unie au fer (i) .
Mais comment la plombagine : agit-elle dàns la converfion
du fer en acier ? Comment la plombagine &
le charbon devenu plombagine pénètrent-ils la mafie
entière des barres de fer à la cémentation ? Comment
enfin une auflï petite dofo de plombagine
peut-elle produire une fi grande différence entre le
fer & l’acier ? J’avoue que ces queftions ne font pas
encore fans difficultés, & la dernière fur-tout paroît
à M. Bergman le noeud gordien de la théorie de
cette opération. Cependant, en confidérant avec quelque
attention toutes les circonftances de ces phénomènes
, & rapprochant avec foin les faits qui né-
ceffitent cette conclufion, de ceux qui y réfifrent le
plus, on s’apperçok bientôt que ceux-ci ne nous
étonnent que parce qu’ils fortent de l’ordre de ceux
qui nous font le plus familiers ; ce qui n’eft afiïiré-
ment pas une railon pour en nier la poffibilité.
Il y a plufieürs manières de concevoir l’aâion de
la plombagine ; indépendamment du changement
'qu’elle apporte par elle-même à la compofition , elle
peut , ainfi que le charbon dont elle eft congénère,
s’approprier une portion de l’air vital qui reftoit uni
à une portion quelconque de la terre martiale, &
rendre ainfi la métallifation plus parfaite & plus uniforme
dans toute la mafie. D’autre part, M. Lowitz
a découvert que les matières charbonneufes avoient
la propriété d’enlever , même par la voie humide,
l’empyreume que nous ne pouvons guère attribuer
qu’à là préfence d’un principe inflammable fixe ; s’il
eft vrai que le fer, pour devenir acier, doive perdre
du phlogiftique, comme le penfo Bergman, comme
l’annoncent les quantités de gas inflammable qu’il a
obtenues de .l’un & de l’autre, ne feroit-il pas pof-
fible qu’à l’aide de la chaleur, le charbon produisît
(iVGet article étoit à l’impreflion, lorfque , par les foins obligeans de mon illuftre confrère M. .Kirwan , j’ai reçu le
dernier ouvrage de M. Prieftlçy ( Experiments and Obfervations, Scc. v o l. I I I , Birmingham, 178 6 ). Le lecteur jugera,,
par ce que je vais extraire de la feftion X X IV , de la' fatisfa&ion que j’ai eue d’y. retrouver quelques-unes de mes
expériences, & de pouvôir lui offrir encore un tel.garant de la vérité des faits qui fervent de bafe à la théorie que
j’ai adoptée. ~ , - , .
En examinant comparativement’ , foit avant , foit après la cementation , les clous ou chevilles de fer crud que l’on
cémente à Birmingham , dans le charbon , pour leur donner une forte de du&ilité, & qui portent alors le nom de clous
de’ fer cruel entrai fie (annealed) ; ce grand Phyfiçien a obfervé que 1000 grains de ce fer crud, ainfi perfectionné, laillbient
après leur diffolution dans l’acide vitriolique délayé , 68,75 grains de poudre noire- infoluble; que la diflolution fe faifant
très-lentement, il fe fépare des paillettes noires qui confervent la forme des morceaux ; que l’acier- en général donne
beaucoup plus de rélidu noir que le fer, ce qui poürroit le faire nommer fe r malléable engraiffé ; que ce rélidu noir n’eft
pas l'bluble dans l'acide ,muriatique ; que fi on expofé au foyer de la lentille 10 grains anglois de ce réfidu ( 8,u<) grains
de France ) , ils fourniffent 1 fL gôiàce^ cubique françois de gas méphitique, & 12,889- de gas inflammable détonnant,
quoiqu’il fe'diflïpê une grande partie de cette poüïïière légère-; que ce réfidu.s’eft réduit à de fon poids, lorsqu'il a été
fondu par la lentille à l’air libre , & qu’il reffembloit alors à une feorie ; en un mot, qu’il fe comporte comme la plombagine,
& fe réfout, comme elle, prefque entièrement en gas. acide méphitique & en gas inflammable. , .
En prenant; le terme moyen de feSiCxpériences, 011. voit que 98,38 grains français de fer crud , avant la cementation,
donnent 145 poucès cubiques françois die gas inflammable; que pareille quantité du meme fer crud cemente, en donne.
169 | pouces cubiques; qu’une pareille quantité d’acier en donne 155 ponces cubiques, ôc que 97,15 grains du fer dont
l’un des aciers avoit été préparé , en ont fourni 155 4»
C’eft l’opinion de ceux qui fabriquent l’acier (dit encore M. Prieftley), que le fer ne diminue, ni n’augmente de poids
dans l’opération, & ceux qui cémentent la fonte affurent qu’elle perd beaucoup; mais fes propres obfervations'font plus
conformes à celles que j’ai rapportées fur ce' fujet : il a vu 72 grains de fer. prendre à la cementation une augmentation
de 3 grains , elle a été de 6 pour 1440 de; fonte.
Quelques réfültats des expériences dé M. Prieftley femblent indiquer que le fer crud auquel on fait fubir cette cé-
mehtation à Birmingham , eft de la nature des fontes qu’on appelle blanches, ou du moins d’un gris clair ; car les fontes
d’un gris noir ont par elles-mêmes la propriété de fe laifler limer,, forer , & même refouler à un^ certain point ; elles
fournirent aùffi une bien plus_ grande quantité de plombagine ; elles, ne feroient donc fufceptibles ni de la même amélioration
, ni d’une. égale augmentation de poids, ?•
Chyniïe. Tome I. L U