
laffes, dans lefquelles l’huile fe montre plus à nu,
parce qu’elle n’eft plus que dans un état favon-
neux imparfait, & prefque aufli groflier que celui
que nous produirions par le {impie mélange
de l’huile avec un acide. Si on augmente le feu ,
une partie de l’huile fe brûle, & probablement
aufli une portion de l’acide fe détruit, ce qui
donne à tous les produits l’odeur empireuma-
tique, & occafionne en même-temps le dégagement
d’un fluide aériforme affez abondant. Ce
g a s , que M. Schrickel n’a pas recueilli, a été reconnu
par M. Prieftley pour un mélange d’environ
j d’acide méphitique, & f d’air nuifible ou
phlogiftiqué ; il y a lieu de croire que fi l’appareil
dont fe fer voit M. Prieftley lui eût permis
d’achever la décompofition par le feu ,' il eût
aufli trouvé du gas inflammable, comme dans l’a-
nalyfe des huiles, mais il n’y a pas de doute pour
le gas acide méphitique, & l’on fait que ce dernier
eft fouvent de l’air vital acidifiant qui prend
ce cara&ère par une nouvelle compofition dans
l ’aâe même du dégagement. Par rapport à la
c^antité de fluide élaftique dégagée, l’expérience
de Haies fupplée à l’omiflion de M. Schrickel, &
prouve que ion eftimation par la perte de poids
n’eft pas trop forte, puifque le phyficien Anglois
ayant diftillé à l’appareil pneumatique 373 grains
de fucre groflier, recueillit 126 pouces cubiques
ou 36 grains d’air , c’eft-à-dire, à -peu-p rès le
dixième du poids total. Le célèbre Prieftley, a en
effet remarqué que le produit aériforme étoit plus
considérable avec la caffonade. Il refte enfin dans
la cornue une matière qui n’a que l’apparence
charbonneufe , qui eft une vraie plombagine, dans
laquelle eft difféminée la petite quantité^de terre
calcaire qui mettoit le fucre en état d’hépar.
I I . Après avoir fait connoître ce qu’il y a de
plus certain fur les parties conftituantes du fucre,
je vais expofer fes propriétés.
La capacité de chaleur du fucre furpaffe de
beaucoup, comme je l’ai déjà remarqué, celle du
tau re ,e lle eft même fupérieure à celle de l’eaur
la chaleur fpécifique d’une diffolution de fucre brut
a été trouvée par M. Crawford, dans le rapport
avec celle de l’eau : : 1 ,0 8 6 : 1,0 0 0 .
Le fucre pur, c’eft-à-dire bien raffiné, n’éprouve
aucune altération à l’air tant qu’il refte fous forme
sèche ; il en eft de même de celui qui eft en cryf-
taux ou fucre candi. Le récit de Tavernier qu’il a voit
appris dans le royaume de Bengale, que le fucre
gardé pendant trente ans devenoit un poifon très-
dangereux , avoit fait croire qu’il étoit au moins
changé en quelque manière ; M. Baumé a achevé
de détruire ce préjugé par l’obfervation contraire,
yapportée dans fes élémens de pharmacie.
Le fucre dans fon état de fluidité naturel, ou
diffous en fuffifante quantité d’eau, éprouve, comme
le moût ou jus de raifin, le mouvement de fermentation
dans les mêmes çircpnftances, & donne
les mêmes produits. Voye^ A lcohol 6* Fermenta
t io n .
Nous avons déjà vu que le fucre étoit très-fo-
luble dans l’eau: fuivant M. Wenzel, l’eau à 7
degrés au-deflùs de la glace (échelle de Réaumur )
prend une quantité de fucre raffiné égale à fon
poids.
Si après avoir diffous le fucre fin, on évaporé
la diffolution en confiftance de firop , & qu’on la
laiffe enfuite en repos, il s’y forme de gros cryf-
taux tranfparens, blancs ; c’eft le fucre candi blanc«:
La cryftallifation fe feroit de même quand la diffolution
feroit moins rapprochée, elle exigeroit
feulement un peu plus de temps: je fuppofe néanmoins
qu’elle ne fut ni affez étendue , ni a une
température affez chaude pour déterminer la fermentation.
La diffolution de fucre brut ou de la
caffonade donne aufli des cryftaux, foit par 1 évaporation
fpontanèe , foit à l’étuve; ils font communément
roux, fur-tout les derniers. On détermine
cette cryftallifation dans les formes en les
traverfant par des bâtons auxquels s’attachent les
cryftaux.
Cappeller a décrit les cryftaux de fucre , & les
repréfente comme des prifmes hexaèdres comprimés
, qui ont deux côtés fi étroits , que le prifme
paroît quadrangulaire, dont les fommets diedres
oppofés font à plans qui paroiffent rhomboïdaux.
Suivant Linné, ce font des prifmes oblongs, te*
I traèdres, terminés par deux pyramides d’ièdres placées
en fens contraire : mais M. de l’Ifle regarde le
type de Çappeller comme une des variétés de ce
fel ; il rapporte à une autre variété la description
incomplette de Linné ; & pour lui, il croit que la
forme ejfentielle & primitive du fucre eft un oc-,
taèdre rectangulaire dont les deux pyramides font
tronquées près de leur bafe, d’où refulte un de*,
caèdre formé par deux plans quarres ©u rectangles
oppofés l’un à l’autre, & par huit trapèzes en
bifeau ; il convient néanmoins que cette figure^
qui lui paroît la plus régulière, n’eft pas celle qui
fe rencontre le plus fréquemment. ( Voye^Planche
DES CRYSTAUX DES SELS , la figure de Cappeller
& la forme primitive de M. de l’Ifle). Les
cryftaux qui fe font formés fpontanement dans la
diffolution de caffonade dont j’ai parlé dans le paragraphe
précédent, n’ên differoient que par les
côtés qui fe trouvoient engagés ou dans la jpelli*
cule fupérieure, ou dans la maffe confufe an
fond du vafe.
Le fucre eft promptement noirci par les acides
concentrés , non-feulement par ceux qui peuvent:
agir fur fon principe huileux, mais encore par
ceux qui peuvent s’emparer de fon eau effentieîle*
M. Prieftley a mis du fucre raffiné en conta# avec
le gas muriatique, il l’abforba lentement, il en fut
entièrement pénétré, devint d’une couleqr brune
foncée, & acquit une odeur fïn^uljéremetit
quante.
Suivant M. Wenzel , une demi - once ou 1 40
grains d’efprit-de-vin bouillant diffolvent feulement
59 de fucre fin.
Ce fel effentiel fe mêle aux huiles, & les rend
mifcibles à l’eau ; il empêche la coagulation du lait.
On s’en fert pour épaiflir l’encre, pour délayer
les couleurs ; il forme une affez bonne colle , &
même , fuivant M. Léon hardi, mêlé avec la craie,
i l peut - être employé à maftiquer quelques petits
yaiffeaux.
Plufieurs perfonnes font encore dans l’opinion
que le fucre favorife la génération des vers chez
les enfans; le doéleur Murrai a attaqué ce préjugé
par des expériences direéles dans fa differtation de
dulcium naturd9ôc il a obfervé que ces vers jettés
dans le fucre y mouroient fur -le - champ, qu’ils
mouroient au bout de deux heures dans l’eau fu-
crée, au bout de trois heures dans l’eau miellée ,
tandis qu’ils vivoient de vingt cinq à trente heures
dans la décoftion d’abfynthe & la diffolution
d’aloës.
0 . I I I . Des diverfes maniérés d’ être du fucre dans
les végétaux.
Le fucre n’eft pas un principe particulier à une
plante , ni même à un genre de plantes ; il exifte
dans tous les végétaux qui font fufceptibles de fermentation
, dans tous ceux qui font appellés nour-
riffans ; il eft facile de le reconnoître dans les fucs1
des fruits qui prennent le nom de fucsfucrés ; cette
faveur ne le manifefte pas à la vérité dans les farineux,
où le principe nutritif eft le plus abondant ;
mais, comme le remarque M. Parmentier dans fes
recherches fur les végétaux nourrijfans, lorfqu’on
fuit le développement des fubftances graminées &
légumineufes, on trouve avant leur parfaite maturité
une époque où elles font fucrées & mu-
queufes. Voye{ àm il a c é & Muqu eu x .
Je ne m’attacherai pas à indiquer nommément
toutes les efpèces qui peuvent être rapprochées
par cette propriété ; mais pour completter cette
partie de l’analyfe végétale, je recueillerai des observations
de Kalm, Cartheufer, Margmjf, &c. ce
qui peut fervir à faire connoître les plantes où le
fucre eft affez abondant pour qu’on les emploie
comme les cannes à la préparation de ce fel effentiel
, ou de quelque liqueur analogue, les différens
états dans lefquels il exifte dans les différens v égétaux
& les moyens appropriés, par lefquels on
parvient à l’en féparer.
M. Odkelius a décrit dans les aftes d’Upfal de
17 7 4 , une fubftance concrète de la groffeur d’un
grain d’orge , qu’il a trouvée dans le neétaire de la
bai famine fauvage ( b al famine impatiens) , & qui
ctoit un vrai fucre natif, dur, tranfparent ; on ne
doit pas être étonné de cette produftion de l’évaporation
fpontanèe, on le feroit bien plutôt de ce
Sqe ce phénomène ne fe préfente pas plus fouv
e n t , f i, Comme le dit cet académicien, on rte
pouvoir l’attribuer aux pluies qui emportent la
plus grande partie de ce fucre, lorlque les plantes
font en plein air.
Les fauvages du Canada & des autres parties
de l’Amérique feptentrionalc, climats trop’’rigoureux
pour la culture des cannes, font leur fucre
avec une liqueur qu’ils tirent d’une efpèce d’érable
, que les Anglois nomment pour cette raifon
fugar-maple, c’eft - à - dire, érable de fucre. Ray l’appelle
acer montanum candidum , lés^îroquois lui
donnent le nom d'oçeketa. On tire aufli du fucre
d’une autre efpèce d’érable, acer folio palmato an-
gulato , flore fere apetalo, fejjili ,fruttu pedunculato 9
corymbofo. Gronox.flora Virgin. 4 1 , & Linn. hort.
upf. 94.. Les François le nomment érable rouge,
plaine ou plane, & les Anglois maple. Le fucre que
fournit cet arbre eft d’une très-bonne qualité ; mais
c’eft l’érable à fucre qui en donne le plus abondamment.
Il fe plaît dans les parties les plus fep<-
tentrionales, & les plus froides de l’Amérique 9
& devient plus rare à mefure qu’on s’approche
du midi. Alors on ne le rencontre que fur de
très-hautes montagnes, & du côté qui eft expofé
au nord, d’où l’on voit que cet arbre exige un
pays très-froid.
Voici la manière dont les fauvages & les François
s’y prennent pour en tirer le fucre. Au printemps
, lorfque les neiges commencent à difpa-
roître, ces arbres font pleins de fuc ; alors on y
fait des incifions, ou bien on les perce avec un
foret, & l’on y fait des trous ovales ; par ce moyen
il en fort une liqueur très-abondante qui découle
ordinairement pendant l’efpace de trois femaines ÿ
cependant cela dépend du temps qu’il fait, car la
liqueur coule en plus grande abondance, lorfque
la neige commence à fondre, & lorfque le temps
eft doux; & l’arbre ceffe d’en fournir lorfqu’il
vient à geler , & quand les chaleurs viennent. La
liqueur qui découle eft reçue dans un auget de
bois qui la conduit à un baquet; quand on en a
amaffé une quantité' fuffifante , on la met dans
une chaudière de fer ou de cuivre que l’on place
fur le feu ; on y fait évaporer la liqueur jufqu’à
ce qu’elle devienne épaiffe, au point de ne pouvoir
être remuée facilement : alors on retire la
chaudière du feu, & on remue le réfidu qui, en
réfroidiffant, devient folide, concret, & fembla-
ble à du fucre brut ou à de la melaffe. L’on peut
donner telle forme que l’on veut à ce fucre, en
le verfant dans des moules après qu’il a été épaifli.
On reconnoît que la liqueur eft prête à fe cryftal-
lifer ou à donner du fucre lorfqu’on s’apperçoit
qu’il ceffe de fe former de l’écume à fa.furfacey
il y en a beaucoup au commencement de la cuif-
fon, on a foin de l’enlever à mefure qu’elle fe
forme. On prend aufli du firop épaifli avec une
cuiller, & l’on obferve fi en fe réfroidiffant il fe
convertit en fucre ; alors on ôte la chaudière de
deffus le féUj, & on la place fur des charbons ;