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foible ; la fécondé portion étoit de mèmè nature ,
la troisième , de l’air phlogiftiqué. * • !
L e nitre mêlé à demi-partie d’étain a donné de
l’air vital peu différent de celui qu’on retire du
nitre feul, avec partie égale d’étain , de l’air à-peu-
près pareil àf l ’air commun ; avec deux parties d’étain,
il y a eu vive détonnation , flamme brillante ;
l’étain s’eft difperfé en poiidre blanche , le produit
gafeux ne contenoit que très-peu d acide méphitique
, beaucoup d’air phlogifliqué 8c un peu d air
commun.
Le pajfage de la décomposition fimple du nitre à
Yinflammation & à la détonnation eft , comme le
dit ce favant académicien , une circonftance très-
propre à faire connoître ce qui fe pafle dans ces
opération^, & c’eft fans contredit avoir faifi un point
de vue aulfi neuf qu’utile , que d’avoir fait ces premiers
eflais pour déterminer le terme précis auquel
l’inflammation commence , fuivant la nature & les
dofes des matières employées dans ces cluffys. 11
rend raifon de cette inflammation , en difant qu'il
fe dégage alors trop de phlogifliqué pour que le gas j
nitreux le prenne en entier dans facombinaifon ; que !
s'en trouvant furchargé, il s3enflamme, & quïl efl
décompofé par cette déflagration: il ajoute que s'il
étoit poffible de recueillir les produits, lorfquune plus
grande partie de foufre détonne avec le nitre , on ne
retrouvéroit fans doute plus de gas nitreux, mais de
l'acide fulfureux.
11 eft bien évident que toutes les fois que l’on
ne trouve plus le gas nitreux , il a été détruit, ou
plutôt le radical nitreux qui le conflâtue tel par
une vraie combuflion -, H eft certain encore qu’elle
eft déterminée par l’excès de phlogiftiqué : mais
eft-il bien décidé, que ce foie le phlogiftiqué qui
s’enflamme ? Quoique je fois d’accord avec tous les
Stahîiens fur tous les principaux points de leur
doélrine, je ne crois pas que l’on puiffe fe contenter
aujourd’hui de cette raifon ; car fl le gas nitreux
ne peut être détruit que par combuflion , fi
la combuflion n’a lieu que par le phlogiftiqué des
mélangés, que devient donc le radical nitreux, 8c
pourquoi n’en recueille-t-on point quand on traite
le nitre feul à la diftiîlàtipn ? Pourquoi n’en obtient-
on jamais dans le clyflusavec le charbon , avec le fer,
& c l Je ne vois qu’une manière d’expliquer ces
phénomènes, & qui nous ramène à l’hypothèfe de
M. Crawford , à celle de M. Lavoifier , réconciliée
avec le phlogifliqué de Sta’n l , ainfi que le doéleur
Jslliot en a fait un des premiers l’application à la
détonnation du nitre , pour expliquer la chaleur
qu’elle produit. ( Eléments o f the branches o f natural
phylofophy. )
il me paroît donc que le phlogiftiqué des mélanges
ne produit l’inflammation que par l’affinité
qu’il exerce fur l’air vital, principe acidifiant, &
dont la décompofition met en liberté une grande
! quantité de calorifique ou matière de la chaleur:
- quand on n’a mêlé au nitre que peu de phlogifli-
que ,; il ne fe dégage à-la-fois que la quantité'de
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chaleur néceflaire pour mettre le radical nitreu#
phlogiftiqué en état de gas nitreux ; quand on mêle
au nitre beaucoup; de phlogiftiqué , la chaleur produite
inftantanément atteint le degré que nous
nommons inflammation , 8c qui détruit le radical
nitreux.
Mais ce radical eft auffi détruit dans là diftilla-
tion du nitre feul ; il l’eft, comme nous 1 a fait
voir 'M. Berthollet, dans fa décompofition fimple
du nitre par le charbon à petite dofe , de meme
que par le fer, le cuivre &. l’étain : je dis , dans
le premier cas , que c’eft la chaleur- du dehors ,
celle qu’on applique aux vaifleaux qui eonfume le
radical nitreux , ou, pour parler plus chymique-
ment, qui le réfout en fes élémens incoercibles,
pendant la décompofition du nitre, & tandis qu il
eft encore retenu par fon adbefion à la baie alka-
line ; décompofition qui ne s’opère elle - meme
que par le phlogiftiqué de la chaleur \ auffi exige-?
t-elle un feu bien plus violent *, auffi fournit-elle
une portion d’air vital qui ne paroît plus appartenir
à l ’analyfe du nitrè , & dont la production eft fi favorable
à Thypothèfe de M. Schéele. 5
Je dis , dans le fécond cas , que comme il n y a
incomeftablement d’autre différence dans la décompofition
fimple du nitre par le charbon ou par le
foufre, que celle qu’y apporte la nature propre
de ces matières phlogiftiques 9 c eft dans cette différence
qu’il faut trouver la raifon des produits
différens- : or , étant bien démontre que le nitre
peut être décompofé par le phlogiftiqué fans inflammation
& fans qu’on recueille du gas nitreux,
j ’en conclus que le phlogiftiqué feul a’eft pas un
moyen fuffifafrt d’analyfe du nitre dans le procédé
dont il s’agit, & qu’il faut encore avec le phlogif-
, tique une fubftance capable de dégager de la bafe
alkaline le radical nitreux prefque fubitement, ou
-du moins avant qu’il y ait éprouvé une chaleur
capable de le détruire ; c’eft précifément ce qui ne
I fe rencontre point dans lé charbon, même en y
! admettant l’acide méphitique tout formé, puifqu il
j*ne décompofé pas le nitre phlogiftiqué., puifque
j fes affinités font fi foibles par la voie fecbe; c eft
| ce qui ne fe rencontre pas non plus dans les chaux
| de fe r , de cuivre, d’étain, qui n ont pas un ca-
l raélère acide affez marqué , qui n’agiffent par con-
i. féquent que foiblement fur la bafe alkaline \ cette
I fubftance au contraire exifte manifeftement dans le
I foufre &. dans la chaux arfenicale : les^effets cor-
refpendent donc parfaitement avec l’explication
j propofée, 8c on voit aflez clairement pourquoi le
! charbon & les autres métaux ne donnent jamais
de gas nitreux en décompofant le nitre par la voie
| fèche, quoiqu’il foit bien certain qu ils en donnent
J par la voie humide avec Y acide nitreux.
I Lorfqu’on confidère féparément ces queftions ,
on ne peut difeonvenir que les travaux des m©-
I dernes n’aient déjà répandu de grandes lumières
| fur ce fujet; mais lorfqu’on veut en raffembler les
! rayons pour définir le principe qui caraétérife 1 acide
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nitreux , on ne tarde pas à s’appércevoir que 1 élément
effentiel de cette compofition eft encore dans
des ténèbres : tout ce que que l’on peut conclure
de ce qui précède , ç’eft que le radical nitreux eft
une fubftance qui a la propriété de s’unir au phlo-
giftique 8c à l’air vital, qu’elle ne quitte 1 un que
pour s’unir à l’autre, qu’elle fe détruit a un certain
degré de chaleur 8c fe réfout en élemens
infenfibles, qu’elle fe rapproche par-ce caraélère
des matières organifées, dont elle tire probablement
fon origine ,"^c peut-être qu’elle admet Ialkali
volatil dans fa compofition. Ce dernier fait, qui a
été apperçu par M. Wenzel, me paroît mériter
l ’attention des Chymiftes , d’autant plus que M.
Schéele a fait voir que l ’alkali volatil fe réfolvoic
lui-même en gas f Voyet^ ÀLKALl v o l a t il ). Je
ne fuis pas étonné que M. Berthollet n’en ait pas
fait mention, le but de fes expériences le forçoit
d’opérer fur des quantités trop foibles pour que ce
produit fe rendît fenfible.
Puifque les recherches par la voie d’analyfe n’ont
pu jufqu’à préfent fatisfaire complettement notre
curiofité , voyons fi celles qui ont été dirigées par
fynthèfe ou dans la vue de produite Xacide nitreux
ont été plus heureufes.
Tel étoit fans doute l’objet que dévoient fepro-
pofer les afpirans au prix de l’académie, puifqu’il
étoit d’ailleurs fuffifamment acquis , comme nous
l ’avons vu , que l ’air vital entroit matériellement
dans la compofition de Y acide nitreux , 8c que pour
fe rendre maître de hâter fa production , iî ne ref-
toit plus qu’à déterminer la nature de l’autre partie
conftituante. Le mémoire couronné n’eft encore,
connu que par un extrait ; je vais en tirer ce qui a
trait à la queftion.
.« On favoit depuis long-temps que le faîf être
p ne pouvoit fe former fans le contaét de l’air,
p 8c d’un autre côté , que la fermentation putride
p des matières végétales & animales favorifoit fa
p formation:». ( Extrait du mémoire de M. Thouve-
nel9 &c. j
M. Thouvènel a mis dans différens vafes de l’air
dégagé des matières en putréfaéliôn avec les divers
fluides aériformes , il a placé dans ces vaifleaux dés
alkalis & des terres, dans la vue de fixer par lèur
moyen les particules à'acide nitreux qui pourroient
fe former , & il a obfervé ,
i®. Qu’au bout de quelques mois il y a eu du
falpêtre dans l’appareil contenant le mélange d’air
vital ou atmofphériqüe avec l’air dégagé des matières
qui fe putréfioient, & quil rie s’en eft formé
que dans ce feul mélange.
2P. Que la craie èxpofée dans ce mélange a
eonftamment donné du falpêtre, que les autres
terres folubles 8c les alkalis en donnent rarement.
3 9. Que le fan g eft de .toutes les matières animales
celle qui fournit le plus long-temps & le plus
abondamment l’efpèce d’air propre à la formation
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du falpêtre , que l ’urine n’eft bonne que dans les
derniers temps.
Kunckel, Vieuflens & Homberg avoient déjà
remarqué que le fan g putréfié , defleché 8c expo fé
à l’air donnoit du nitre. Juncker rapporte ainn 1©
procédé de Kunckel : « Il faifoit putréfier du fang
p jufqu’à ce qu’il fut réduit en terre, il le lefli-
» v o it, il faifoit évaporer la leflive jufqu’à pelli-
» cule, 8c il obtenoit des cryftaux de vrai nitre,
» iqo livrés de fang lui ont donné un peu plus
p de cinq livres de nitre p.
Mais l’expérience la plus fimple , la plus direéte,
& qui mérite le plus de confiance , eft celle qui
a été faite par MM. les commiflaires de l’académie
, 8c qui eft décrite dans l ’extrait du mémoire
de M. Thouvenèl, en ces termes :
« Ils ont mis de la craie, préalablement bien
p leflivée à l’eau bouillante , dans des paniers à
p claire voie , qiwls ont expofés à la vapeur du
» fang de boeuf en putréfaélion. Il y avoit envi-
* ron deux pieds de diftance entre la furface du
» fang de boeuf 8c la craie , .& cette dernière étoit
p fufpenduê de manière que le falpêtre n’y pou-
» voit parvenir par voie de communication. Au
p bout de quelques mois la craie s’eft trouvé con-
» tenir quatre ou cinq onces de falpêtre par
p quintal »:
Les favans académiciens font donc fondés à
conclure que /’acide nitreux fe forme en vapeurs par
la réunion des deux airs , c’eft-à-dire de 1 air vital
8c de l’air putride ; que dis qu’il efl formé , il efl
faifi par la terre calcaire qui fe trouve à fa proximité
y pourvu que ces matières foient dans un milieu
flagnant & tranquille, dans lequel Pair fe renouvelle
, mais lentement & peu à peu.
Les expériences que j’ai faites moi-même pendant
plufieurs années fur la nitrification , me mettent
dans le cas d’appuyér fur cette conféquence,
que le fang a un grand avantage fur les autres
matières animales pour en hâter les produits ;
celle que je vais rapporter fuffira pour en faire
juger.
J ’ai mis dans un très-grand bocal de verre quatre
onces de chair de boeuf maigre 8c coupée en morceaux.
Dans ce bocal, j’en ai enfermé un autre
beaucoup plus petit rempli à moitié de chaux
éteinte à l’a ir, légèrement humeélée ; le grand bocal
à été bouché avec du liège trempé dans la cire ;
ce liège étoit traverfé par deux tuyaux au bout
defquels étoient attachées en dehors du bocal deux
1 très-groffes veffies, l’une vuide , 1 autre remplie
d’air commun. Par le moyen de ces deux veines,
8c en lès preflant alternativement ; je communi-
quois de temps en temps un peu de mouvement
aux fluides aériformes renfermés dans cet appareil,
qui devenoit par-là très-propre à conferver tous les
’produits, tous les réfidus des produits , 8c fur-tout
à prévenir tous les accidens qui atrroient pu induire
en erreur fur la manière dont la nature compofe
réellement Yacide nitreux,
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