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(mon devrait être d’autant plus grande, & la com-
biuaifon d’autant plus intime , que les corps feraient
plus fluides , & leur aggrégation plus diminuée ;
o r , le contraire arrive en une infinité de cas.
Qu’on applique la chaleur à un mélange d eau &
d’acide, d’eau & d’alcohol ( qui font de vraies com-
binaifons par affinité ) , on ne fait qu’augmenter leur
état de raréfaélion , & cependant .c’eft un moyen
de les féparer ; il en eft de même des chaux métalliques
auxquelles la feule a (lion du feu enlève le
principe acidifiant, & de tous les compofes falins ,
dont une partie eft plus fixe que l’autre. Il en réfuterait
enfin que les fluides les plus fubtils, les fubf-
tances gafeufes , principalement, devraient exercer
l’un fur l’autre une aâion plus marquée dans l’état
de çondenfation ou de fluidité, quelque fbible que
fût | d’ailleurs^, leur affinité ; il s’en faut de beaucoup
que cela s’accorde avec l’ohfervation : l’ether
lui-même a moins de difpofmon à s’unir avec l’eau
qu’avec un corps réfineux concret ; la plupart des
fias ne forment pas non plus des combinaifons bien
intimes, à en juger par ce principe que, plus deux
corps s’unifient étroitement, plus ils laiffent dégager
de-chaleur.
En remontant aux vrais principes, on apperçoit
bientôt que ce n’eft pas toujours l’intenflté dç l’ag-
grégation qui rend l’affinité nulle, ou fa fbibleüè
qui la rend efficace , mais que cette efficacité dépend
for-tout de ce degré d’attraélion qui produit la com-
binaifon, & qui maintient l’équipondérance. On en
a la preuve en ce que plufieurs fobftances font dil-
foutes, finon aufiï promptement, du moins aufïi
complètement en malle d’aggrégè, que quand elles
ont été atténuées par quelque préparation ; on en a
la preuve en ce que l’on voit tous les jours fe féparer
fpontanément deux fluides, dont une violente
agitation avoit rompu, quelques inftans, .ou du
moins confidérablement afïoibli Paggregation. Il faut
ajouter, ce qui eft encore plus important, que la
matière de la chaleur a elle-même fes affinités ; elle
doit dès-lors être confidérée comme toute autre
fobftance aéluellement fluide, qui ne relâche K g -
grégation d’un corps folide que parce qu’elle fe
combine avec lui. A u d i, de même que l’eau , qui,
en tant d’occafions , favorife le jeu des affinités,
produit quelquefois un effet oppofé, & fait cefler
une diflblution en verni de fon affinité propre avec
le diffolvant ( comme dans- la précipitation du fpat
pefant diffous dans l’excès de fon acide ) , il doit arriver
aufli que la matière de la chaleur produife,,
foivant les circonftances, l’un & l’autre de ces-effets.
Le- premier, en écartant les molécules d’un corps
auquel elle n’adhère que très-foiblement ; le fécond>
parce que fa combinaifon opère un plus grand obf-
lacle à une compofition nouvelle, que1 la- force d’ag-
grégation qu’elle a fait cefler.
■ Ce ferait, par conféquent, une fonde maxime
que celle qui exprimerait- qu’en général l’affinité de
compofition eft en raifon inverfe de l’affinité d’ag-
grégation. Plus il impopt^ de déterjnispi; & de çoni-
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parer rintônfité de chacune de ces deux puiflance?,
comme étant les élémens nécefîaires du calcul des
forces divellentes & quiefcentes ; plus on doit éviter
de les repréfenter par des mefures inexa&es, ce
qui arriveroit infàillement fi l’on fuppofoit que l’une
s’accroît rigoureufement dans la même proportion
que l’autre décroît.
V e. L O I.
Deux ou plufieurs corps qui s’unifient par affinité de
compofition, forment un être qui a des propriétés nou--
vdles & diflinêtes de celles qui appartiennent à chacun
de ces corps avant la combinaifon.
M. deFourcroy, de qui j’emprunte cette règle,
a très-bien prouve què les anciens Chymiftes fe font
trompés lorfqu’ils ont avancé que les- compofés par*
ticipoient toujours des propriétés des corps qui en*
troient dans leur compofition, & qu’ils en avoient
de moyennes entre celles de leurs principes.^ Cette
opinion , cependant, leur paroiffoit fi- indubitable,
qu’ils annonçoient en conféquence les propriétés des
parties compofantes des c o rp s a v a n t que de les
avoir féparées par l’analyfe. _ C ’efi ainfi que StahL
enfeignoit que les fels étoient formés d’eau & de
terre , parce qu’il croyoit y appercevoir des propriétés
moyennes entre celles de ces deux fubftances. I
Cette do&rine avoit fait une telle impreffion,
qu’on la retrouve jufques dans les Ecrits des-meilleurs
Chymiftes modernes. Le célèbre Macquer,
après avoir dit en termes fort énergiques, que de
l’adhérence des parties hétérogènes par affinité , il
réfulte un nouveau compofé qui a des propriétés différentes
de celles des deux principes dont il ejl formé y
revient, dans le même article, à cette prétendue
maxime; il l’adopte comme loi fondamentale, très-
générale & d’un très - grand ufage pour reconnaître,
même fans décompofition , les principes dont les corps
font compofés ; & tout en convenant que cet»
règle eft fujette à un très-grand nombre de refînerions.,
qu’il arrive fouvent que l’union fade- difpa-
roître abfolument quelques propriétés, ou en développe
de nouvelles, il conclut «que ces-changemens,
» qui ne dépendent que. de l’aggrégation,, ne foîiè
» ordinairement pas affez. complets pour- faire en-
» tièrement méconnoîfie les principes , & qu’ainu
r> ils n’empêchent point que la règle ne demeure
» affez générale pour être un excellent guide dans
v bien des. recherches chymiques. » ( Dittionn. aru
AFFINITE).. • •
Je ne dois pas diflîmulèr que ce Savant l’â exprimée:
dans des termes encore plus indéfinis que- tous ceux
qui l’ont précédé ; qu’il l’a étendue à toutes les propriétés,
telles que la- fixité , la. volatilité, la pefan-
teur, l’opacité , la tranfparence, la du&ilité, la dureté,
la fluidité , &c. & même aux. affinités,. En fup“
pofant ( dit-il } qu’ôrp connoijfe parfaitement lès propriétés
des principes, d’un compofé,.en pourra ,.en examinant
les propriétés de ce compofé, reconnaître quels finit
fis principes 9 quand uiçm [unalyfi en fitoit
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H paroît que cetté règle a été rejetée par Bergman
, au moins ferôit-il difficile de la concilier avec
ce qii’il dit ( Diffenat. X X X I I I , § . 46 ) , que Ton
trouve quelquefois dans les compofés des propriétés
qui n’appartiennent à aucun de leurs principes.
En effet, pour ne parler ici que des propriétés
les plus générales de celles qui fe manifeftent d’une
manière plus fenfible : on connoît un alliage de trois
métaux, qui fe fond à un degré fort inférieur à celui
qu’exige le plus fufible des trois ; les vitriols, les
nitres , les muriates alkalins ne participent nullement
ni de l’a&ion diffolvante de l’acide , ni de la caufti-
cité de la, bafe ; l’arfenic, pafîant à l’état d’acide, acquiert
une fixité qui ne convient ni à ce métal, ni
au principe qui l ’acidifie ; le fer & la platine jouif-
-fent féparément d’une affez grande ductilité, ils forment
, par leur union , l’alliage le plus aigre ; l’acide
tartareux,& la potaffe font très-folubles dans l’eau,
elle diffout à peine une quantité fenfible de tartre
acidulé de potaffe ; la.couleur des chaux métalliques
ne rappelle ni celle des métaux qui les ont produites,
ni du principe acidifiant qui les a mis en cet état ;
le foufre & la potaffe n’exhalent à l’air aucune particule
odorante , & l’hépar qui en réfulte eft d’une
odeur infupportable ; au contraire , l’acide odorant du
benjoin forme avec la chaux un fel qui ne manifefte
ancune odeur , quoiqu’elle ne foit que mafquée par
la combinaifon & non détruite-; pourroit-on dire
avec vraifemblance que la tranfparence du gas acide
fluorique permet d’y foupçonner la préfence du fi-
lex? Celui qui n’auroit connu que la pyrite ou la
chaux de fe r , pourroit-il avoir la moindre idée de
fon magnétifme ? Enfin , la denfité elle-même & la
capacité de chaleur des compofés font fouvent très-
éloignées du tèrme moyen qu’indiquent celles de
leurs parties cbmpofahtes. : -
Il feroit facile de multiplier ces exemples, même
fans perdre de vue la condition que j’ai cru devoir
în’impofer, de ne les _ prendre que dans la claffe des
laits qui ne préfentent que l’union la plus fijnple,
& fans qu’il y ait lieu de croire qu’aucune des parties
compofantes éprouve en même temps quelqu’alté-
tation ; condition fans laquelle ils feroient fans doute
peu concluans.
Mais ce qui me femble fournir un argument encore
plus décifif, eft cet axiome que j’ai établi ailleurs
comme le fondement de toute faine doctrine
tfn Chymie, qu’il n’y a de corps femblables que ceux
qui ont toutes leurs propriétés femblables : or , fi une
■ feule propriété differente bien vérifiée conftitue un
corps différent,' il eft invincible que les propriétés
communes ou moyennes d’un compofé ne peuvent,
;en quelque nombre que ce fo it, annoncer la vraie
nature de fes élémens ; puifque l’affinité, l’une des
propriétés les plus effentielles, né peut jamais être
fomblable , ni même dans lé rapport des proportions
de la compofition : il réfulte de notre IIIe. loi que
cette inégalité a lieu jufques dans l’affinité d’excès ;
ceft-à-dire , que l’affinité d’un . compofé pour l’un
®e *es principes par excès, différé très-fenfibiement
A F F J71 ae faftînitè de faturation de ces principes l’un par
l’autre.
Au refte,.efl proferivant cette erreur ancienne,
on doit fe garder de tomber dans une autre, en rejetant
d’emblée toute analogie de propriétés entre le
fimple & le compofé , lorfqu’elle fe trouve conftam-
ment vérifiée par l’obfervation. J’avouerai fans peine
avec MM. Buquet & de Fourcroy, que la plupart
des propriétés moyennes données en preuve de l’opinion
de Stahl n’ont qu’un rapport éloigné avec
celles de leurs compofans , & qu’il eft impoflible de
ne pas remarquer une forte de gêne dans les explications
que fes Seéîateurs ont voulu affortir à ce
principe. Mais en eft—il moins évident que la fluidité
de l’eau fe décèle au premier coup d’oeil dans
les diffolutions aqueufes ; que tout alliage préfente
des fignes très-apparens de l’éclat, de la pefanteur,
de la folidité des fubftances métalliques ; que tous les
fels ammoniacaux participent à un certain point de
la volatilité de leur bafe, puifqu’ils fe fubliment ou
fé décompofent par la chaleur plus facilement que
les fels formés du même acide & d’une autre bafe,
&c. &c. &c. ? Rappelions encore ici cette penfée
ingénieufe de M. Monge , que le diffolvant eft celui
des deux corps qui donne fa forme à l’autre ; cette
forme n’eft-elle donc pas une propriété bien caraéié-
riftique , qui fe manifefte malgré la compofition, qui
devient d’autant plus fenfible, que le diffolvant eft:
plus abondant, ou ce qui eft la même chofe en
termes plus exa&s, que la première diffolution eft
plus furcompofée de l’excès du diffolvant ? Il y a
des fels avec excès d’acide, d’autres avec excès de
bafe; j’ai fait voir que quelques-uns fe formoient
conftamment avec excès de bafe au milieu de leur
propre acide ; dès-lors c’eft une vraie combinaifon
par affinité avec faturation déterminée, & non une
feuillure accidentelle ; cette compofition conferve
néanmoins la propriété de réagir fur les couleurs
bleues végétales, à la manière d’un feul de fes principes
; refufera-t-on donc de regarder en cette occa-
. fion l’altérafion en rouge comme un indice de la
préfence d’un acide, & l’altération en verd comme
le caraâère ordinaire de l’alkalinité ?
A in fi, pour fe renfermer dans de juftes bornes,'
c’eft feulement la généralité de la thèfe de Stahl,
qui doit être rejetée , & non la poffibilité d’une analogie
de propriétés du fimple au compofé, démontrée
par le fait, en tant de circonfiances ; qui peut
être fort utile pour diriger des recherches; en un
m o t, qui fé concilie parfaitement avec la loi que
nous' adoptons : la êoiifervation d’une ou de plusieurs
propriétés d’un corps fimple , foit au degré
moyen, foit au deffus ou au deffous de ce terme,
n’empêchant nullement que le compofé ne foit un
être différent, & qu’il ne poflede en conféquence
d’autres propriétés diftinétes.
V K l o i .
I l y a pour les affinités une condition de température
C c c c ii