
III. L e fel neutre , connu fous le nom i'alkali
phlogijliqué, i'alkali prujjique , que l’on retire dé la
leflive de fang, fut elîayé par M. Schéele dans ce
deffein: il reconnut que ce fel étoit compofé du
principe colorant, de chaux de fer & d’alkali. 11
en fit diffoudre une once dans quatre onces d’eau,
& le mit dans une cornue de verre avec-trois gros
d’acide vitriolique concentré ; .dès que le mélange i
commença à bouillir, la liqueur s’épaiffit par la
quantité de bleu de PruJJè qui fe fépara ; une odeur
femblable à celle de l’eau chargée du principe colorant
fe fit féntir à travers le lut ; l’air du récipient
étoit eftèélivement imprégné de ce principe ,
&. la liqueur reftée dans la cornue en étoit com-
plettement épuifée , quoique la diftillation eût été
arrêtée après qu’il eût paffé une once d’eau. Le bleu
de Prujfe qui s’étoit dépofé fut féparé par le filtre ,
mis à digérer dans la diflolution de potaffe, & cette
liqueur traitée de même à la diftillation avec l’acide
vitriolique fournit encore une portion de
précipité de bleu de Prujfe, & du principe colorant
dans l’air & dans l’eau du récipient. Cette portion
de .bleu de Prujfe, remife endigeftion dans l’alkali,
& diftillée une troifième fois avec l’acide vitrio-
. lique préfenta les mêmes phénomènes: il étoit .
donc évident qu’après plufieurs extradions & dif-
tillations répétées , tout le bleu de Prujfe ferait enfin
détruit, & le fer réduit à l ’état de chaux martiale
ordinaire.
Je fupprime plufieurs autres expériences , dans;
lefquelles ce- célèbre Chymifte ré u/fit également-
i dégager le principe colorant, & qui feront mieux
placées ailleurs. Ayant remarqué dans un de fes
elfais, i ° . que le muriate mercuriel doux devenoit
noir dans l’air imprégné du principe colorant vola
til, ainfi que dans l ’eau qui en étoit chargée,
& que cette liqueur prenoit un goût acide mercuriel
; a9, que cette faveur acide venoit de l’acide
muriatique , dégagé , de fa bafe par le principe colorant
; 3 °. que le bouveau compofé formé de ce
principe uni à la chaux de mercure , avoit la pro-'
priétë de laiffer aller à la diftillation ce principe
pur ; il s’arrêta au procédé fuiyant, qui lui parut
le plus expéditif & le plus avantageux.
§ . I I I . Procédé de M. Schéele, pour obtenir
/’acide pruffique libre pur.
On met dans une cucurbite de verre deux onces
lâe bleu de Prujfe pulvérifé, une once de précipité
rouge ou chaux de mercure préparée avec l’acide
nitreux , & fix onces d’eau. On fait bouillir ce mélange
pendant quelques minutes, en les remuant
continuellement ; alors il prend une couleur jaune
tirant au yerd. On verfe le tout fur un filtre, &
on jette fur le réfidu deux onces d’eau bouillante
pour en faire l’élixation complette.
Cette liqueur eft une diflolution de pruflite mercuriel
, qui a en effet la faveur métallique , qui n’eft
précipitée ni par les acides . ni par les alkalis, donc
le mercure eft réduit par une longue digeftion avec
d’au très fubftançes métalliques, àcaufede la double
affinité. , :
Oti verfe cette difTolution dans un flacon, dans
lequel on a mis une^demi-once de limaille de fer,
récente & non rouillé.e; on y ajoute trois gros
d’acide vitriolique concentré , & on agite fortement
pendantquelques minutes : le mélange devient
tout noir par la réduction du mercure ( j ai éprouve
que le mercure fe revivifioit dans cette opération au
point de tacher l’ or fur-le-champ) la liqueur fe
trouve avoir perdu toute fa faveur mercurielle , elle
manifefte rôdeur particulière à la leifive colorante,
que l’on compare à celle de la fleur de pêcher.
Après l ’avoir biffé repofer quelque temps, onia
décante- on la met dans une cornue -, a laquelle
on adapte un récipient bien lutté , & on diftillé
à un feu très-doux. Il fuffit de faire paffer le
quart de la liqueur, parce que le principe colorant
eft bien, plus volatil que l’eau, & qu ils elève en
conféquence le premier.
Le produit de~cette première diftillation tient
ordinairement un peu d'acide vitriolique, on le
reâlijie en leredillillant toujours à un feu très-doux
fur de la; craiepulvérifée qui retient 1 acide vitriolique
& on a pour lors Vacide prujjique dans fa
plus grande pureté,. ■
il n'y a pas à craindré que dans cette rectification
la terré calcaire retienne Vacide prujjique ;1 a-
cide méphitique qu’elle porte avec elle a la propriété
de le dégager de la bafe terreufe, tout de
même que de la bafe alkaline.
3VL Schéele recommande de lutter avec fpin les
vaiffaux dans ces diftillations, pour empecherla perte
de l’acide qui eft très-fugace, de me erre un pen
d’eau dans les récipiens, d’employer de petits ré-
cipiens pour que l’air qu’ils contiennent n en ah-
forbe pas une trop grande quantité, enfin de Iqs
difpofer de façon que la matière volatile foit promptement
abforbée dans l’eau froide. On voit par-là
qu’il feroit très-avantageux «d’environner ces récipiens
de glace, & que ce feroit le moyen d obtenir
Vacide prujjique dans un état de concentration plus
favorable à l ’éxamen de. fes propriétés.
§. IV . De la nature 6* des propriétés de
/’acide pruffique,
I. La liqueur obtenue parie procédé qui vient
d’être décrit a une odeur particulière qui n’eft pas
défagréabîe, une faveur qui tourne.au doux, qui
eft un p eft chaude à la bouche,. & qui en meme-
temps, excite la toux. ,
Cette liqueur ne produit fur les papiers réactifs
aucune des altérations,qui annoncentla prefence de.s
fubftançes acides où alkalihes ; elle na pas plus de
vertu que l’acide méphitique pour enlever aux
alkalis , lors même qu’elle y eft par excès , la
propriété de verdir les couleurs bleues végétales ;
cependant elle trouble les diffolutions defavon&
(Fhépar de foufre. Voilà donc une nouvelle preuve
de ce que j ’ai dit à l’article atide, que l’altération
du bleu en rouge par les acides étoit fim-
plement une propriété & non un caractère , puif-
qu il eft d’ailleurs évident que le principe dont il
s agit fait ici & en plufieurs occafions fonction d’acide,
& qu’il jouit de la force diffolvante, qui eft ,
leur qualité efferitielle.
Wous avons vu jufqu a préfent que tous les acides
le rapprochoient par une condition qui les carac-
terife encore plus fpécialement, celle d’admettre
dansleur compofition une portion d’air vital , que
nous appelions par cette raifon, principe acidifiant
commun; on ne peut pas douter qu’il n’exifte
auffi^ dans notre liqueur colorante ; & quoique M.
Schéele ne le dife pas précifément, je n’irai pas
en chercher les preuves ailleurs que dans les belles
expériences que ce grand Chymifte a èiitreprifes
Pourj réfoudre ce compofé en fes parties conftituantes.
Cette analyfe fervira en même-temps à
concilier les obfervationsdiverfes dont j’ai fait état
dans le premier paragraphe, à fixer les opinions
fur les problèmes que leurs auteurs ont biffés, à
diriger la préparation & la rectification d’une ma-
tierè devenue précieufe comme réa&if ou liqueur
^épreuve, à déterminer enfin le degré de confiance
, quelle mérite, & les applications utiles que
i on en peut faire.
II. L ’alkali volatil eft une des parties conftituantes
de 1 acide prujjique : pour s’en aftùrer, le célèbre académicien
de Scockolm ne s’eft .pas borné à diftiller
le bleu de Pruffe du commerce ou la liqueur d’épreuve
ordinaire , il a préparé exprès du bleu de
Prujfe très-pur de la manière fuivante.
11 avoit remarqué que Vacide pruffique dégagé
par le procédé ci-devant décrit étoit en quelque forte
mieux faturé par la chaux que par les bafes alka-
lines , quoique cette eombinaifon reftituât encore
la couleur bleue au papier de tournefol, altéré en
rouge c’eft-à-dire qu’il donnât des fignes d’alka-
Iimte. 11 adopta en conféquence cette préparation
pour fa liqueur colorante d'épreuve, que j appellerai
déformais prujjite calcaire fuivantnos réglés de dénomination;
il le purifia de la portion de chaux que
leau elle-même avoit prife pendant b. digeftion
en la précipitant par une jufte quantité d’eau chargée
d acide méphitique; il filtra de nouveau la liqueur,
& il obferva de la tenir'dans des flacons
exactement bouchés pour la défendre du contaél
du gas méphitique qui la déeompofe facilement.
■> ce PruÆt^ calcaire , en liqueur,
a la diflolution de vkriol de mars, il y eut fur-le-
champ dëconipofition par double affinité- & il fe
l a l & fé c h î" ieaU MeU de PrUffe>
M. Schéele mit ce lieu de Pruffe dans une
rnue de verre; il y adapta un récipient, dans
r S M 'fM ay°IC un Peu d’eau. & pouffa le feu
a faire rougir le fond de la cornue. Après la
Affiliation , il trouva que l’eau du récipient étoit
chargée1 d’acide prujjique & à'alkàli volatil fans an-
cune trace d huile ; que l’air du récipient étoit imprégné
à acide prujjique & d'acide méphitique; que
je rehdu dans la cornue étoit noir & attirails à
1 aimant.
, Pour confirmer ceréfultat, M. Schéele fournit
a la même operation différens métaux précipité*
de leurs diffolutions par le pruflite calcaire c'eft-
a-dire , d’autres pruflites métalliques. Le pruflite
mercuriel lui donna à peine quelques traces d’al-
kali volatil, mais les pruflites de zinc , de cobalt &
d argent lui en donnèrent autant que le pruflite
martial, ou le lieu de Prujfe , & le pruflite de
cuivre eh quantité plus conlidérable.
Deux autres expériences ingénieurs du même
auteur appuient cette conclufion par fvnthèfe.
i». Il fit deux mélanges, chacun de trois cuille-
■ B B h B P u l v é r i f é , & de pareilfe quantité
d âfltah du tartre ; Il les mit dans deux creufets
pareils , qu il plaça en même-temps au milieu de*
charbons ardens ; après les avoir tenus rouges pendant
un quart d’heure , il en prit un qu’il ien -
verla tout de fuite dans huit onces d’eau ; il mit
dans, l ’autre une demie-once de fel ammoniac en
petits morceaux, qu’il remua promptement, en le*
preflant vers lé fond, & remit fur-le-champ le
creuiet au feu. Comme il vit qu’au bout de deux
minutes il ne donnoit plus de vapeurs, ammoniacales
fenfibles, il jetta toute i'a maffe encore rouge
dans huit onces d’eau. La leflive delà, matière du
premier creufet ne donna prefque point de traces
de bleu-avec lé vitriol de mars , même en y ajoutant
des acides ; la leflive de la matière du' fécond
le comporta comme la meilleure leflive de fang &
donna beaucoup de bleu dans la diflolution de vi-
ftriol de mars par l ’addition d’un acide.
* . Au lieu de charbon, M. Schéele employa
de la plombagine pulvérifée, qu'il traita avec la l-
kali du tartre, comme dans la fécondé préparation
de l ’expérience précédente , en y ajoutant
de même du fel ammoniac , & il obtint une liqueur
qui précipita le fer comme une leflive de
fang tin peu foible.
Ainfi 1 alkali volatil - eft très-certainement une
des parties conftituantes de l'acide prujjique.
E L L'huile exifte-t-elle auflïeffentiellement dans
fa' compofition ! Nous avons vu que les Chymifte*
étoient très-partages fur cette queftion, & Fft.
Schéele a été porté à croire qu’il y avoit au moins
quelque chofe d’huileux ,.fur-tout lorfqu’il vit qu’en
faifant diffoudre un peu de vitriol de mars dan»
l’efprit de corne de cerf nouvellement diftillé &
y ajoutant de 1 acide muriatique , il fe formoit un
précipité de lieu de Prujfe; mais ayant diftillé à
ficcité du fang de boeuf defféebé & pouffé le feu
jufqu a faire rougir la, cornue, la liqueur du récipient
, féparée par le filtre de l'huile empireu-
macique, lui donna de meme un précipité bleu