
-détaillé ; le premier, dans fon traité des alkalis,
imprimé à Berlin en 1774 ; les deux autres, dans
leurs differtations latines fur l’origine de l’alkàli
végétal, 8c fur l’analyfe du tartre , publiées en
1776 & 1779.. Dès 17 73 , M. Bayen avoit en-
feigné une autre manière de décompofer le tartre
par affinité double* en employant le nitre mercuriel,
& d’en féparer ainfi l’alkali. {Récréationsthym*
de Jvlodel, édit: franc. tome I I , page 30. )
Ces ouvrages fembloient ne rien laiffier à defi-
rer fur cette matière ; cependant la queilion a été
Tenouvellée depuis pzirMM.. SpielmanSi Corvinus ,
qui ont confidéré le tartre comme un pur acide
formé, par l’organifarion végétale , tenant du calce
8c de l’huile ? différant du vinaigre feulement en
ce que celui-ci manquoit du principe terr-eux, &
que fon huile étoit atténuée par la fermentation ;
fufceptible enfin de fo convertir tout entier en
alkali lorfqu’il étoit privé de fon eau , foit par le
feu , foit par la chaux v iv e , qui de toutes les-
terres étoit le plus avide de ce principe» ( ÀnaleEla
de tart&ro, & c . argentorati, iy8o. )
Je ne m’arrêterai pas à examiner tous les raifon-
nemens , toutes les expériences même qui en ont
împofé au célèbre profeffeur de Strasbourg ; il
fuffira de remarquer qu’il étoit encore fortement j
préoccupé de l’ancienne opinion que la chaux ne
pouvoir enlever aucun acide à l’alkali, & que
c ’eff-là principalement ce qui l’a empêché de re-
connoître l’acide du tartre dans le réfidu infohible
d e fa décompofition par la craie , quoiqu’il eût
fous les. yeux les démon fixations, fi précifos de j
MM. Schéele & Retfius ; mais les exemples de la
décompofition des fels neutres alkalins par la
chaux fe font tellement multipliés, font actuellement
fi familiers à. tous les Chymiftes, que je ne
puis croire qu’il y en ait un feul qui foit tenté
déformais de révoquer en- doute la préfence de
l ’alkali végétal tout formé dans le tartre* auili-
-fcien que dans le fol d’o feille, lorfqu’il aura fuivi
avec quelqu*attention ce qui fe paffe dans les expériences
que je vais rapporter»
i ° . Que l’op mêle à froid une diffolution de
nitre calcaire avec une diffolution de tartre raffiné
ou apidule tartareux ( vulgairement crème de
tartre) dans l’eau diftillée froide & filtrée avec
foin : à l’inftant du mélange, les. deux diffolution
s parfaitement limpides deviennent laiteufes ,
&c il fe forme un précipité terreux : fi l’on filtre
la liqueur , 8c qu’apf ès l’avoir fait un peu évapo-
ser on la porte au frais, on trouve le lendemain
du vrai nitre en cryflaux prifmatiques, qui fufe
parfaitement fur les charbons. Ce n’eft pas le feu
qui a produit ici l’alkali néceffaire à laproduâion
du nitre, puifqu’on n’emploie pas même la chaleur
de l’ébullition..
2-p., Que l’on fàffe diffoudre dit tartre raffiné
dkns l’eau bouillante , qu’on y ajoute affez de craie
eu poudre pour la {aturation *. 8c. qu’aprèst avoir
filtré la liqueur, on y verfe peu-à-peir de Fa eide
vitriolique délayé, on verra bientôt fe précipiter
One portion confidérable de tartre, ou, pour mieux
dire, à'acide tartareux ; 8c quand on fora parvenu à
en épuifer la liqueur par les évaporations & filtrations
ré p é té e so n obtiendra, en pouffantl’éva^
poration , du vrai vitriol de potaffe qu’il fora facile
de purifier par une nouvelle cryflallifation.
M. Rofenfîiel en a retiré par ce procédé 2 once»
& -j gros d’une livre de tartre , & M. Wiegleh
affure qu’en employant autant d’acide vitriolique
que de tartre , on réuffit à lui enlever à quelques
grains près, tout l’alkali qu’il peut fournir pas
la combuftion.
- 30. Si au lieu d’acide vitriolique on emploie
dans cette opération de l’acicle muriatique, il fe
précipite d’abord du tartre ; mais on obtient à la
fin , par des évaporations & cryftallifations répétées
, dit vrai muriate de potaffe. 6. onces de tartre
précipité dans cette opération*, retraitées fucceffi-
vement avec le même acide, ont fourni àM .R o -
fenfiiei n onces 3.0. grains de muriate de potaffe >
c’eft-à-dire, autant d’alkali qu’on en auroit .retirer
par combuftion.
4°. L’acide acéteux a donné à M. Rofonftiel,
par le même -procédé, 4 onces f: d’acète de potaffe
ou terre foliée',. à la vérité chargé de couleur,,
même après avoir été plüfieurs fois rediffous 8c
cryftallifé, mais conforvant d?ailleurs toutes les;
propriétés ordinaires de ce fo l, fo diffolvant facilement
dans l ’eau & dans l’efprit-de-vin, & attirant
l’humiditê de l’air.
%°. Les acides nitreux 8c. muriatique mis eix
digeftion fur le tartre pulvérifé., fans aucun intermède
terreux, fourni fient également du nitre &
du muriate de potaffe : la bafoalkaline exiftoit donc
d’avance dans le tartre, & la terre ajoutée dans
les précédentes expériences n’étoit nullemenrné-
ceffaire à fa production. -
6°. Lorfqu’on a faturê le tartre avec la craie,le
précipité qui fe forme dans la liqueur noircit au feu,
même après avoir été lavé en» plufieurs eaux ; ce
n’eft donc plus une pure terre calcaire, elle s’efi
emparée d’une portion de Y acide tartareux
7°. Nous verrons enfin que cet acide peut être
dégagé de la terre calcaire, & ce qui eft encore
plus- décifif, que cet acide ainfi rendu libre régénère
avecl’alkali végétal, non-feulement le tartre
de potaffe,, mais auffi le tartre raffiné, ou, çomme
nous le nommons, acidulé, tartareux, lorfqu’on en
ajoute au-delà du point de faturation de l’alkali :
cette régénération détruit par le fait l’objeâion de
M. Spielman ,. qu’un fol ne peut être rendu moins
foluble par l’excès de fon acide»
Ainfi il eft bien démontré que l’alkali exifte
tout formé dans le tartre, & même en affez:
grande quantité r 1920 grains de tartre en cryftaux
ont donné à M» Wiegiebi, par la combuftion,.
672. grains, de potaffe, qui r, faturés d’acide vitn®1:
lirtue, ont produit <$96 grains de vitriol de potaffe.
Nous aurons occafion de vérifier encore ces proportions
de l’alkali dans le tartre en traitant delà
manière d’en féparer l’acide libre.
I I I . Il nous refte à examiner quels font les
’autres produits de Vanalyfe du tartre•
Puifqu’avec Y acide tartareux pur & Palkali on
fégénère le tartre abfolument tel qu’il étoit après
la cryftallifation du tartre crud, il eft évident que
la terre que quelques Chymiftes affurent en avoir
retirée, n’y exiftoit qu’accidentellement.
La diftillation du tartre eft une des plus anciennes
opérations de la C h ym le , il en eft fait
mention dans les ouvrages de Geber, Raimond
tulle , Vigenerè, Elle eft décrite dans prefque
tous les traités de Chymie : Lemery conjeâure
avec affez de vraifemblance que l’efprit volatil de
tartre dont Paracelfe & Vanhelmont ont fi fort exalté
les vertus , étoit un produit de cette analyfe.
On remplit, à moitié, de cryftaux de tartre pul-
vérifés , une cornue de verre ou de grais, on la
place au fourneau de reverbère , & on y v adapte
un ballon percé d’un petit trou, ou encore mieux,
portant un fiphon recourbé qui s’engage fous une
cloche de verre remplie d’eau, comme dans les
diftiilations pneumatiques ; il paffe au premier degré
de chaleur une eau limpide , aigrelette , péné^
«rante, ayant un peu d’odeur 8c une faveur mêlée
de quelque amertume : en augmentant le fou,
©n fait monter une huile ténue, accompagnée de
vapeurs blanches & d’une prodigieufe quantité
d’air ; il s’élève bientôt après une liqueur acide ,
enfuite une huile noire empireumatique , enfin de
i ’alkali volatil, avec une portion d’huile épaiffe.
Ce qui refte dans la cornue eft une maffe fa-
îine qui s’échauffe avec l’eau , qui attire fortement
l’humidité de l’ air, c’eft-à-dire, l’alkali qui exiftoit
tout formé dans le tartre, 8c q u i, comme l’on
v o it , n’a pas befoin de l’incinération, ou de la combuftion
avec le concours de l’air, pour recouvrer
toutes fos propriétés ordinaires dans l’état, de v
berté.
• La quantité de gas ou fluide aériforme qui fo
dégage dans cette, diftillation eft vraiment étonnante,
elle a frappé tous les auteurs qui, même
avant que de foupçonner fa nature, recomman-
doient déjà dé ne pas oublier de dohner iffue à ces
vapeurs, pour éviter la rupture des vaiffeaux.
Haies avoit trouvé qu’un pouce cubique , 011
543 grains de tartre de vin du rhin, fourniffoit
304 pouces cubiques , ou 144 grains de fluide
élaftique, c’eft - à - dire, très-près du tiers de fon
poids. M. Berthollet porte à 1 % gros le poids de
ce fluide dégagé de 2 onces de tartre.Suivant M.
Spielman ( dans une thèfo foutenue par M. Corvinus,
dont j’ai déjà fait mention ) , 32 oncès de
tartre crud formant un volume d’à-peu - près 48
pouces cubiques , traitées à la diftillation avec l’appareil
pneumatique , ont donné d’abord ç 350'pouces
cubiques de gas acide méphitique, dont environ
une dixième partie étoit de l’air vicié ; il paffk
enfuite 4514 pouces cubiqües de gas inflammable
mêlé encore dè gas acide, 8c fur la fin de l’opération
.-1677 pouces cubiques de gas inflammable
pur , c’eft-à-dire , en totalité 11741 polices cubiques
de fluide aériforme, 8c plus de 244 fois le
volume de la matière employée. Enfin l’illuftre
Prieftley a retiré de 583 grains de tartre cryftallifé
2123 8 pouces cubiques de gas acide méphitique,
8c 6114 pouces cubiques de gas inflammable#
brillant avec une grande flamme blanche, mais
à la fin avec flamme bleue 8c légère, 8c probablement
mêlé encore d’un peu de gas méphitique
f continuation des obfervations , &c.tome I , part. I l ,
fefi, 12 ) ,* 8c ce phyficien obferve que la maffe
reftante retient toujours une portion de gas méphitique
, puifqu’après la calcination au rouge ,
l’acide muriatique verfé deffus occafionne encore
une vive effervefcence»
U huile que l’on retire de cette diftillation eft,'
fuivant Lemery 8c Spielman , un feizième du poids
du tartre, c’eft ce que l’on nomme huile empireumatique
du tartre, 8c quelquefois huile fetide,
à caufe de fa mauvaife odeur ; on la fépare de
l’efprit, en faifant pafler le mélange par un entonnoir
garni de papier gris qui retient l’huile plus
épaiffe. Boerhaave parle d’une huile très - fubtile
qui monte prefqu’en même-temps que le gas, qui
eft de couleur jaune, d’une odeur affez agréable
8c prefque aromatique , d’une faveur amère 8c
chaude ; il ne doute pas que ce ne foit-là l’efprit
volatil dont Paracelfe 8c Vanhelmont vantent les
qualités 5 mais quelques tentatives qu’il ait faites
pour le contenir, il n’a pu y réuflir ; le bec de la
cornue étant engagé de 5 pouces dans le col du
récipient, cette huile volatile s’élevoit jufqu’au
lu t , 8c le traverfoit, de forte qu’il n’eut d’autre
moyen que de placer au-deffous une foucoupe où
il en recueillit en effet quelques gouttes. Lorfqu’il
voulut rendre le lut impénétrable, les vaiffeaux
éclatèrent.
On pourroit être tenté de croire d’après cela
qu’il y a en effet deux efpèces d’huile dans le
tartre ; mais en réfléchiffant fur les temps diffé-
rens de ces produits 8c fur l’effet de la chaleur,
on reconnoît bientôt qu’il n’y a ici qu’une feule
huile plus ou moins altérée, comme il arrive dans
toutes les diftiilations des matières végétales 8c
animales ( voye\ H u ile em p ir e u m a t iq u e ). I l eft
poffible que l’abondance du gas qui s’échappe avec
impétuofité favorife la diffipation d’une portion dé
l’huile qu’il rencontre en vapeurs , 8c qui doit être
le moins altérée, parce qu’elle a moins éprouvé
l’afrion du feu. Une portion de la même huile fe
condenfo avec l’efprit, 8c refte mêlée avec lui
dans le récipient; enfin celle qui eft rôtie par le
feu fo précipite, comme plus pefante 8c moins diflo