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I. Quoique les botaniftes' aient jnfqu’ici donné , j|
peu d’application'à reconnoître les propriétés des
plantes , même celle? qui fe décèlent d’une manière
prompte & fi commode ,.parle feul attouchement
des papiers réaCtifs, cependant on ne peut douter
que la plupart des végétaux contiennent, dans .j
quelques-unes de leurs parties , un fuc dont l’acide f
eft affez développé pour-rougir fur-le-champ le
papier coloré par l’infufion de tournefoï ; m aires
obfervations n’ayant été ni allez étendues, ni rapprochées
méthodiquement pour en déduire quelques
conféquences fur la formation de ces acides, 1
fur les époques où il deviennent manifeftes,fur leur ,
analogie entre eux , & avec les"acides plus connus
du même règne, je me garderai bien d’en entre- :
prendre ici l’énumération,8c il fuffira d’en donner
quelques exemples.’
On fait que le giroflier jaune, la lardane, la fi- ■
hpendule , le crejjon d’ eau , Yhcjbc à Robert,8cc. & c . ?
rongiffent très-fenfiblement le papier bleu ; il en eft
de même des feuilles de la grande valérienne, des !
fruits de Yalkékènge , du cornouiller, &c. &c. , dé '
l’écorce de bourdaine, de la racine d’ariflolochc, 8cc.
J’ai mol même obfervé cette altération du papier
coloré par le tournefoï fur plufieurs fruits , & ce
qui m’aie plus étonné , fur des pommes reinettes
cueillies nouvellement, & fur des figues ; ces dernières
à la vérité n’étant pas en pleine maturité.
Pour reconnoître l’analogie & la différence
qui exigent entre les acides du règne végétal,
M. Monro efl parti de ce principe, qu’un acide
identique doit donner confiant ment le même fel
neutre avec le même alkali, & il a communiqué à
la fociêté royale de Londres en 1767 , les réfuitats
d’un grand nombre d’expériences faites de cette
manière avec la foude ou alkali minéral fur les
acides végétaux naturels , fermentés & diflillés.
( Tranfaêl. philof . vol. 5 7 , pag. 4 7 9 . )
Ayant pelé & coupé en morceaux deux dou- ■
zaines de pommes d’été, il verfa diffus de l’eau dans
laquelle il avoit fait diffoudre auparavant deux
onces de fo u d e 8c laifiâ le tout en repos pendant -x
fix jours ; la liqueur fe trouva prefque neutre , ne
faifant effervefcence ni avec les acides ni avec les
alkalis ; elle fut filtrée, évaporée jufqu’à pellicule, (
& mife au frais; & dix jours après, elle fournit j
un très beau fel cryftallifé en petits feuillets ronas, •
très-délicats, tranfparens, pofés de champ. M. Léon- !
hardi ajoute, qu^avec le fer & les pommes de Bors- |
dorf on prépare une teinture martiale.
Le jus de mure clarifié'par les blancs d’oeuf, & j
• faturé de feu de', a donné à M. Monro un fel pul- j
vérulent, fans figure régulière, qui, par des diffo- »
lutions & évaporations répétées, a enfin laiffé des (
cryftaux allongés, les uns'plus minces , les autres
plus épaiç., & qui s’entrecroifoiebt.,
Le même académicien a obtenu de la pêche &
de Y0rangei toujours avec l’alkali minéral, de petits
'cryftaux cubiques ou rhomboïdaux.
La prune verte lui a.donné , -après plufieurs diflb- ;
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lutions 8c cryftallifations, un fel neutre qui à la
fin s’eft cryftallifé, fans évaporation j er. greffes tables
hexagones , & partie en larges rhombes. Ce
fel avoit une faveur chaude, & étoit foluble dans
trois ou quatre fois fon poids d’eau fioide. *
Il a eu avec la grofeille rouge , par 'évaporation
& -refroicliffément, de petits cryftaux rhomboïdaux
fort durs , ne s’altérant point a l’air, & dont
là faveur reffembloit à celle du fel neutre réful-
tant de la combinaifon de l ’acide cifronien avec la
même bafe.
La grofeille verte a produit une croûte faline formée
de petits cryftaux rhomboïdaux 8c couverte
d’éçailles minces brillantes.
Le raifin verd a donné à M. Monro, par le même
procédé & au moyen des diffoiutions répétées, un
fel neutre en petits cryftaux cubiques, rhomboïdaux
ou parallélogrammariques, fuperpofés &
s’entrecroifant les uns les autres.
Le fuc de cïgu'è adonné à M. Baume un fel de
couleur rouffe, en'petits cryftaux irréguliers , prefque
fans faveur , peu foluble , dont là diffolution
rougiffoit l’infufion de tournefoï, précîpitoit en
blanc les nitres d’argent & de mercure, donnoit
par l ’addition de ’’alkali fixe en liqueur un préc pité
blanc très-abondant, bruloït an feu en exhalant
une odeur herbacée , & laiffoit une cendre grlfe
qui communiquoit à l’eau une légère faveur ft-, pti-
que, & la propriété de verdir le firop violât. Eléments
de pharmacie.
A l’article fel volatil de l’Encyclopédie, il eft
fait mention de l’acide fpontanè, nud du mavum,
M. Rinman , dans fon hiftoire du fer, met les
fruits du forbier & du prunellier au nombre des fü'bî-
tances qui peuvent décaper ce métal, à caufe de
leur acide. (.Part. 1 , §. 15 .)
Je ne fais pas ici mention du tamarin ni du fu-
mach,- parce qu il eft maintenant bien prouvé qu’ils
contiennent le même acide que le tartre. ( Voyeç
A c id e t a r t a r e u x . ) I L y a lieu de croire qu’il
eu eft de même de Y épine-vinette ( berberis ) ,
puifque, fuivant l’obiervation citée par M. Léon-
hardi, le jus qui en eft exprimé, mêlé avec le
jus de limon , mis en digeftion au feu de fable,
puis porté au frais , donne un fel acide concret de
la nature du tartre. D ’après ce que dit Angélus
Sala , du fel formé dans le jus exprimé de la me-
lijje, des fels effentiels acides ou acidulés du
chardon - béni, du houblon ( humulus lupulus ) , de
la racine d’arrête-boeuf ( ononis ) , de la gerrr.andrée
d’eau ( teucrium feordium ) & de la Jauge, on
peut conjecturer que toutes ces plantes donneroient
un vrai tartre. On en trouvera certainement bien
d’autres par la fuite qui mériteront d’être rapprochées
à raifon de l’exiftence de cet acide, lorf-
qu’après avoir enfin fixé fa langue, la botanique
s’occupera à établir aufii des divifions par les
parties conftituantes & les propriétés chymiques.
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'M. Hérmftàdt s’eft appliqué en dernier lieu à ;
reconnoître les caraCtères de l’acide de la c cri je j
aigre, dont il avoit exprimé le jus avec l’attention
dé ne pasbrifer les noyaux, pour n’y pas porter de j
l’huile. ( Cke'mifche annal. 1785 , part. 5. )
Cette liqueur mêlée avec l’eau de chaux a pris j
une couleur rouge tournant au v iole t, 8c. il y a
eu un peu de précipité.
Mêlée à la diffolution acéteufe de plomb,il y a
eu fur-ie-chnmp un précipité d’un beau bleu ; l’addition
de l’acide nitreux a non-feulement fait dif :
paroître le précipité, mais a rétabli la couleur }
rouge plus belle qu’auparavant.
< Elle n’a pas troublé tout de fuite la diffolution
nitreufe d’argent ; mais, après quelques minutes,
le mélange eft devenu brun, il s’eft formé un .précipité
de même couleur, qui n’a pas été rediffous par
l ’addition de l’acide nitreux.
La diffolution nitreufe de mercure a été précipitée
d’un rouge pâle , l’acide nitreux a rediffous
le précipité.
Une diffolution pâle de zinc eft devenue , par
le mélange , d’un rouge brun qui s’eft encore un
peu foncé par l’addition de nouvel acide nitreux.
La diffolution de muriate mercuriel coirofif a
donné un précipité d’un rouge pâle.
M. Hermftadt a cherché enfnite dans cette liqueur
1 acide faccharin qui eft , fuivant lui , le principe de
tous les acides végétaux, 8c l ’a traitée à la diftillarion
avec l’acide nitreux. Après, plufieurs effais infructueux
pour porter à la cryftallifation ce fel acide
qui s’etoit déjà manifefté , en formant avec la terre
calcaire un précipité que l’acide vitriolique n’avoit
pu décompofer , ce Chymifte prit le parti de dif-
tiller d’abord à la cornue deux livres de jus de ce-
rife exprimé , pour le débarraffer de.fon eau fura-
bondante ; le réfidu qui ne pefoit plus que huit
onç^s étoit rouge , épais & fenfiblement plus acide
qu’auparavant ; la liqueur du récipient n’avoit rien
de fp iritueux.
Ces 8 onces de matière épaiffe furent remifes
dans une cornue, au bain de fable avec égale
quantité d’acide nitreux foiblè mais très-pur ; le
mélange bouillonna considérablement, fournit une .
grande quantité de vapeurs rutilantes , perdit fa J
couleur rouge, & devint d’un beau jaune. Après ■
la diftillation de la plus grande partie de l’acide '
nitreux , il fe trouva dans la cornue environ 4 t
onces de liqueur encore un peu brune qui, pen- |
dant le rerroidiffement , dépofa une matière ter- ji
teufe , mêlée de quelques petits cryftaux. M. Herm- u
fladt crut d’abord que ces cryftaux pouvoient être I
formés de l’r.cide nitreux uni à la bafe alkaline ,
qu’il foupçonnoit'elans le jus de cerifes en partie neu-
tralifée par l’a c te tartareux comme dans le*tartre ;
mais ils .n’avoient aucune des propriétés du nitre.
La liqueur de nouveau évaporée donna une rnaffe*
ialme du poids g. gros, compofée de cryftaux >
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partie en prifmes, partie en pyramides, qui avoient
la faveur d’un fel effentiel, acide , qui cou 1 oient
au feu, donnoient abondamment des vapeurs piquantes,
& laiffoient après leur combuftion un peu
d’alkali fixe. i f . y
La îiq ueur reftante fut encore traitée avec l’acide
nitreux, & en répétant les diffoiutions, lesévapc-
rationS 8c les cryftallifations par refroidiffement ,
çe,Chymifte parvint à féparer 5 gros de cryftaux
qui manifefterènt toutes les propriétés du véritable
acide faccharin pur.
Ainfi , 2 livres de jus de cerife ont donné par
cette opération 2' gros d’acid nie tartareux , 5 gros
d’acide faccharin 8c environ 20 grains de terre qui
s’en font féparès dans le commencement. Cette terre
examinée s’eft trouvée, après l’édulcoration, blanche
, légère, fans faveur, non îoluble dans l’acide
nitreux , rpugiffant au feu du chalumeau fans
donner de vapeurs & fans éprouver aucun changement.,
M. Hermftadt avoue que la nature de
cette terre lui eft abfolument inconnue ; il n’ofe
même décider fi elle eft effentielle au jus de cerife
, ou ft elle ne s’y trouvoit que par accident j
il remarque feulement qu’elle ne peut avoir été
portée dans le mélange par fon acide nitreux qui
étoit très-pur , que dans ce cas la féparation n’ert
eut pas été aufii difficile , de même que fi ç’eût été
du tartre calcaire.
Si cette terre fingulière n’eft pas le produit de l’altération
des vaiffeaùx , comme il arrive dans la
diftillation de l’acide firüpeux , il eft sûr qu’elle mérite
toute l’attention des Chymiftes ; mais il faut
attendre le nouvel examen que M. Hermftadt défi
re lui-même.
Les autres conféquences que ce Chymifte tire
de fes expériences fur le jus de cerife font : i° . que
fa matière colorante n’agit pas moins que fon acide
pour la décompofition des fels métalliques, puifque'
cette matière fe fixe dans les précipités.
20. Que pnifqu’il n’a point obtenu d’efprit en
diftillant le jus de cerife fêtai, ni d’alcohol nitreux
en let.aïtant avec l’acide nitreux, ce jus n’avoit
fubi aucune fermentation , & qu’ri n’y- a rien de
fpirrmèux dans le fuc végétaux avant la fermentation.
30. Que l’acide des cerifes n’eft que l’acide
faccharin , ou plutôt l’acide tartareux qui devient
acide faccharin par déphlogifticarion. Ce que j’ai
dit au commencement de cet article annonce affez •
comment on doit entendre cette conclufion, 8c
qu’en admettant la converfion même plus entière ,
elle ne prouve encore que l’identité d'un principe
commun aux bafes acidifiables de ces divers;
acides.
Il refte donc à favoir ft ce n’eft réellement qu’un
feul & même acide qui donne les propriétés aux
végétaux que no»JS difons contenir un- acide mani—
fefte , & m quel état il s’y trouve , ou fi, au contraire
,.ce font autant d’acides, actuellement différens