L e phofphore eft décompofé biert plus complet-
temenc par la cotnbujlion lente. On place pour cela
les petits cylindres du phofphore fur les parois d’un
entonnoir de verre , dont le bout eft reçu dans un
flacon, pour que la liqueur s’écoule à mefure qu’elle
le forme; M. Sage recommande de couvrir 1 orifice
de l’entonnoir avec un chapiteau t 8e, de placer
dans le milieu de l ’entonnoir un petit tube de verre
pour donner palfage à l ’air du flaconif qui eft deplaoe
par Xacide phofphorique , parce que , fans ces précautions',
le phofphore s’enflamme avec explolion
dans l’appareil, lorfque le thermomètre eft à quinze
de«rés au-deflus de la congellation. (Afin. de l'Acai.
roy. des Sc. ann, 1777, pag, 43S- ) L ’inflammation
peut avoir lieu à un degré fort inférieur quand il
y a une certaine quantité de phofphqre , & que les
cylindres fe touchent, ou feulement font trop rapprochés
; c'eft ce qui eft arrivé il y a quelques années
, mèmè dans une cave de l’Académie de
Pijon,
Une onee de phofphore produit environ trois
onces d’acide phojphorique , fans odeur & tans coule
u r , ayant l’apparence huileufe de l ’acide vitrio-
lique concentré , qui retient encore un peu de
phofphore non décompofé , qui fe manifefte quand
On l’expofe au feu par des vapeurs blanches très-
acres & de petites exploitons lumineufes. Quoique
çette portion de phofphore foit bien foible , elle
peut cependant induire en erreur dans des expériences
délicates; il eft facile d’en débarrafler com-
plettement l’acide , en diftillant deifus de l’efprit-
fle-vin , qui ne le volatife pas ? & qui s’empare
flu phofphore.
L ’on donne à cet acide , ainlî préparé, le nqm
tTacide phofphoriquc par déliquescence ; mais ilëftaifé
de voir combien cette dénomination eft impropre;
ce n’eft pas fléau qui décompofé le pbofphore-&
le fait paifer à l ’état d’acide , elle n'eft attirée que
par l'acide tout formé , ou à mefure qu’il fe forme,
par une vraie combuftiqn qui ne diffère de la précédente,
que parce qu'elle eft Beaucoup plus lente;
pomme on peut en juger par l’odeur que le phofphore
ne ceffe d’exhaler , & la lumière qu'il répand
pendant toute la durée de l’opération, & qui,
quoique foible, eft néanmoins fenfible dans flobf-
curite. L’air eft donc'le feul agent de la décom-
pofition ; mais avant qued’en développer les preuves,
je dois indiquer encore une troifléme manière de
flogérer.
111. Le phofphore', ainfi que le foufre, eft fnf-
ceptible de paffer à la combinaifon acid e par le jeu
des affinités, dans la voie humide fans inflammation
vive ni lente, St peut ainfi dire , par une forte de
eombuftion froide. On l’obtient très-facilement par
le moyen de Yacide nitreux ; j’en donnerai ici le
prqçédé d’après les effais qu’en a faits Af. Lavoifier,
& auxquels ce célèbre Chymifte»a été conduit par
fes Vues <fe recherches fur l’air vital, & par lej
expériences de M, Berthollet fur la combinaifon de
l’acide nitreux avec le phofphore.
« J ’ai pris une cornue tubulée ( dit M. Lavoifier )
» de la contenance de fix à fept pintes; j’y ai in-
p troduit deux livres d’un acide nitreux, dont le
» poids eft à celui de l’eau diftillee , dans le rap-
p port de 129895, à iooooo; j’ai mis la'cornue fur
» un bain de fable ; j ’y ai adapté un ballon, & j ai
p échauffé lentement jufqu’à ce que la liqueur eut
p acquis environ quarante-cinq degrés d’un ther-
» momètre à mercure ; alors j’ai ouvert la tubu-
» lure , 8c j*ai jetté dans la cornue un morceau de
p phofphore du poids de dix à douze grains ; aufli-
y tôt il eft tombé au fond de la liqueur, il s eft
p fondu comme de la cire , 8c il a commence à
» fe diffoudre avec une effervefcence affez vive :
» le premier morceau diffous, j’en ai jetté un fe-
» cond, puis un troifième , 8c j’ai continué ainfi
p en allant très-lentement, jufqu’à ce que je fuffe
» parvenu à combiner ainfi avec l’acide tout ce qu il a p voulu diffoudre de phofphore;la quantité en a été
* de deux onces fix à fept gros,
» La diffolution , dans -le commencement, ^ fe
» faifoit avec une extrême facilité , & j.’étois obligé
p de ménager beaucoup le feu, dans la crainte que
» l’effervefcence ne fût trop vive ; mais fur la fin,
p l’aélion de l’acide fur le phofphore fe rallentif-
-p foit de plus en plus ; je ne pouvoisfoutenir 1 effer-
p vefcence &. la diffolution , qu’en hauffant le de-
p gré du feu, & j’ai été obligé de le porter fuc- p ceffivement, 8c par degrés, jufqnau-delà de 1 eau
p bouillante.
» Tant qu’il n’y a eu qu?un gros ou un gros &
. p demi de phofphore diffous, la liqueur na fubi
p d’autre changement, que de prendre une teinte
» jaune comme de l’eau régale ; ’enfuice elle eft
* devenue verte , en même-temps il s’en élevoit
p des vapeurs rouges très-épàiffes 8c très-turbides ,
p qui n’étoient que de l’air nitreux &• de l ’acide
» nitreux très-fumant ; ees vapeurs, qui formaient
p un nuage épais ,parpiffoient tomber 8c couler du
» bec de la cornue , comme aurôit fait un liquide;
p elles ont continué à paffer pendant tous le temps
p de la diffolution du phofphore : on conçoit que
p je n’ai pas du manquer de recueillir foigneufe-
p ment les produits qui paffoient dans la diftilla- p tion, 8c voici ce que j ’ai obtenu pendant dix-fept
p à dix-huit heures qu’a duré l’opération. p. J ’ai recueilli d’abord deux gros vingt-quatre
■ p grains d;un acide nitreux non fumant, prefque
» blanc & très-ifoible ; les vapçurs qui s’élevoient
p de la liqueur de la cornue , pendant tout le temps
p qu’a paffé cet acide, n’étoient prefque point co-
p lorées : à mefure que les vapeurs ont pris plus
p d’intenfité, l’acide qui paffoit étoit plus jaune ,
p. 8c il a commencé à devenir fumant ; la fécondé
p portion que j’ai mife à part peloit trois onces,
p.. cinquante grains. p Cette fécondé portion a été fuivie d’un acide
» nitrçux d’yn vert fonçé , jaunâtre, encore plus
p î'fumantque le précédent ; il pefoit fix onces deux
r» gros.
.p L ’-acide nitreux que j’ai obtenu enfui te étoit
c>p un peu moins vert & moins fumant ; ii pefoit
» éinq onces, cinq gros & demi : fur la fin du paffage
~p de ee ta c id e , rintenfité des vapeurs rouges a
p confidérablemem diminué, 8c. je n’ai plus obtenu
» que de l’acide nitreux blanc à peine fumant ;
-p cette -dernière portion pefoit quatre onces deux
p gros fix jgpains.
■ » La liqueur de là cornue étoit alors entièrement
jp faturée de phofphore, 8c les portions que j ’y ai
p ajoutées refüfoient abfolument de Ce diffoudre,
,y quoique .feufie hauffé beaucoup le degré du feu,
-y 8c que.j’euffe effayë de le continuer long-temps.
p Ayant défapareillé les vaiffeaux., j ’ai trouvé
.p dans la cornue treize onces quatre gros d’une
p liqueur un peu jaunâtre , qui avoit une confif-
p tance huileufe, à-peu-près comme l’acide-vitrio-
p lique concentré ou huile de vitriol ; elle confer-
v» voit encore un peu d’odeur d'acide nitreux.
Pour emporter les dernières portions d’acide
•w volatil qu’elle pouvoit contenir , je l’ai introduit
-#i dans une cornue de «verre enduite de terre, 8c
•*> j’ai pouffé à un féu gradué au fourneau de.réver-
v bère.
» ©’abord j’ai obtenu unacide nitreux foible 8c
i9> léger, qui eft devenu de plus en plus flegmatique,-;
.» puis il ri’eft plus paffé qu’un flegme de couleur
m rouffe, un peu amer, qui n étoit plus acide, 8c
fsr qui ne faifoit point d’effervefcence avec les alka-
a» lis : ayant pouffé le feu un peu davantage, •&
m jufqü’au point de faire rougir légèrement les
d» barres fur lefquelles repofoit la .cornue, il a com-
;»» mencé à paffer des vapeurs blanches très-péné-
-M trantes, qui fe font raflemblées dans le récipient.,
■ fit c’étoit de véritable acidephojpkQrlqite9 dans un état
b» cependant femi-volatil.
-» J ’ai jugé alors que l’opération étoit complet-
fif tement achevée ; j’ai donc laifle refroidir les vaif-
»» féaux; mais ayant voulu retirer la liqueur ref-
■ » tante dans la cornue , j’ai remarqué que la plus
r» grande partie étoit devenueépaiffe comme delà
thérébentine, qu’elle tenoit à l’intérieur du vaif-
?» feau, & il ne m’a été poffible de l’obtenir qu’en
p l’étendant avec de l’eau diftillee.; cette circonf-
p tance m’a empêché d’en reconnoître le poids aa*ec
-î» exaélitude,.. . . , . On peut évaluer à huit ou neuf
t» onces la quantité à?acide ph&fpkoriquc qu’on peut ■
-w obtenir de deux onces fix gros de phofphore, &
.» de deux livres d'acide nitreux, en fuppofant qu’on
-s» ne porte pas l’opération au point de réduire l’a-
eide à.confiftance de thérébentine épaiflie , mais
T» feulement à celle d’un fyrop un peu épais. {Mémoires
de V Académie royale des 'Sciences , ann. lySjy^
><«. jj®..) _
M. Lavoifier.croit qu’il y a eu environ deux gros
.•de phofphore emportés par l’acide nitreux pendant
3a combinaifon , & qui l’ont un peu altéré.
.Je ne doute pas que l’pn n’opère la mênje .déconw
thymie, T.ajn.L
. ■ poficion par d'antres acides. Suivant M. Bergman,
fi l’on jette un morceau de phofphore dans l'acide
arfenical, toute fa furface devient bientôt noire pat
:1a portion d’arfenic réduit qui s’y attache ; il ne
Çarle pas de l’état de la liqueur, mais il eft bien
évident qu’i l ,y paffe en même-temps -un peu de
phofphore à l ’état d’acide; cette circonftance eft
indépendante-fie la manière d’expliquer^ es phénomènes.
Le même Chymifte affure, ainfi.que M.Schéele^
que i'acide muriatique déphlogïjliqüé convertit dans
l ’inflanfle phofphore en une fumée blanche,; c’ eft
d’après leur témoignage que j ’ai rappelle cette ob-
fervation à l’article A cide muriatique dlphlo-
-GI-S.TIQU'É; mais je dois ajouter ic i, d’après mes
propres expériences , que l'acide muriatique déphïo-
giftiqué le plus .concentréen état de liqueur , même
celui qui eft ciré de la glace fous forme concrète
à la manière de M. Berthollet j[voyeç AciDÆ RÉ-
GALIN;) , n’a aucune aéfion fur le phofphore , à la
température moyenne ^ ni même à quinze -degré«
au-deffus de la congellauon ; ce qui m’a fait p enfer
que les deux Chymiftes fuédois a voient-opéré dans
le temps même de la diftillation, 8c que la chaleur
des vaiffeaux avoit déterminé Taélion de Tacide en
fondant le phofphore, comme nous avons vu -qu®
M. Lavoifier l ’avoit pratiqué avec l’acide nitreux.
Dans toutes les opérations dont nous venons de
parler, il eft aifé de voir que l’air vital, principe
acidifiant* eft l’agent effentiel de la convédion dit
phofphore en acide.; mais-n’eft-ce réellement-qu’une
•compofiticn par affinité fimple, comme le croit M.
Lavoifier ? Le phlogiflique n y joue-t-il pas un rôle
effentiel'î Je ne puis me difpenfer de -rappeller
encore ce graind problème de la théorie chymique.,
puifque le.célèbre académiciènqui s*eft déclaré con tre
la doétrine de Stahl a puifé quelques-uns de fes plus
■ forts argumens dans les expériences fur le phofphore
; mais ces queftions feront mieux placées
dans la feéHon fuivante ; il nous fuffit d!avoir fait
connoîtr-e ici les différentes manières de préparer
notre acide , & la facilité avec laquelle on le rectifie
, foit par une demi - vitrification au feu, foie
en le traitant avec l’efprit-de-vki, pour en feparer
les autres acides & la portion de phofphore qui
peut avoir éahappé à la décompofition.
•§, VIII. De la nature & des propriétés de /’acide
phofphorique.
U acide phofphorique fe trouve dansîes trois règnes
de la nature ; M. Gahn l’a trouvé dans la mine de
plomb ; & d’après ce qu’en dit M. Bergman ( Opufc.
tom. % s pag. 431, S04 9 édit, franc. ) * cette mine a
l’apparence calciforme, comme celle qui a l’acide
méphitique pour minéralrfateur ; on fait préfente-
ment que la fubftance qui rend le fer fragile à froid.,
& qui a été prife pour -un nouveau demi-métal ^
eft une combinaifon phofphorique du fer (voye^
.Acide jSYDÉfUTïQüfi 8c 5yd erote te ) ; .on -ae