
fur-le-'champ du Tel ammoniac ordinaire. Quelle
peut être la caufe d’une différence auffi marquée ?
Seroit-ce, comme le croit M. Berthollet, l’a&ion
direâe de l’alkali volatil fur l’air vital ? mais fi cette
a&ion eft nulle quand les deux principes font
refpeftivement l ib r e s i l eft hnpoflible qu’elle devienne
plus puiffante , par cela même que l’un des
deux fe trouve déjà confbiné. Dira-t-on, au contraire
, que cette différence eft produite par l’affinité
fi m pie de i’alkal.i volatil avec l’acide riuiriati-
que ordinaire ? mais il faut donc nous faire concevoir
comment la plus foible des bafes de ce genre
acquiert dans le cas particulier la fupériorité fur
toutes les autres, comment elle la conferve dans
l’état de fel méphitique, comme dans l’état çaufti-
que » au point de rompre l’union de l’acide muriatique
, & d’en dégager l’air vital qui fe maintient
•contre l’aélion des alkalis fixes , même cauftiques.
I l eft évident que cela ne peut avoir lieu que par
affinité double, & dès-lors je de«ande que l’on
me nomme la fubftance qui exerce ces nouvelles
forces conspirantes néçeffaires à l’effet. Cela ne
fera pas difficile à ceux qui admettent avec nous
le phlogiftique , puifque de toutes les bafes - dont
il s’agit , l’alkali volatil fe trouve précifément le
feul qui jouiffe des propriétés des corps combufti-
bles,qui forme du foufre avec l’acide vitriolique,qui
convertiffe l’acide nitreux en gas nitreux &c. &ç.
f Mémoires de chymie de M. Schéele , édit. frt part.
• » PaS- 94- ) y revivifie fubitement la chaux
d’or à la moindre chaleur , &c, &c. ; & fi on
ajoute qu’il y a réellement une portion d’alkali
volatil décompofé dans l’aâe de fa çombinaifon
avec notre acide , il paroîtra peut-être fuffifamment
démontré-qu’il fournit quelque chofe de fa fubf-
' tance qui fert tout à-la-fois à dégager l’air vital,
& à reftituer à l’acide ce qu’il avoit perdu.
2.0. L’acide muriatique déphlogiftiqué , même
en liqueur & à froid , transforme le foufre en acide
vitriolique. A ne confidérer le foufre que comme
un élément chymique qui ne fait que recevoir
' fans rien donner. , l’acide muriatique comme un
élément du même genre qui fe fépare fans rien
■ emporter , nous retombons dans le cas abfolu-
ment infoluble d’une attraéiion éleâive nulle quand
elle devfoit agir plus efficacement , puifqu’il eft
bien certain que l’air vital n’agit pas à froid fur
le foufre. Ce q u e j’ai dit ailleurs de la bafe aciçli-
fiable phofphorique qui ne fe charge d’air vital
qu’en communiquant du phlogiftique, & que l’on
peut obtenir dans un état qui ne foit réellement
ni phofphore, ni acide phofphorique , eft donc
la feule manière d’expliquer cette décompofition
d’une manière fatisfaifante. "
3?. Cet argument s’applique à bien d’autres
faits , & leur difparité ne fert qu’à en fortifier, les
conféquences : Vefprit-de-vin n’a pas une aâion
(direâe fenfible fur l’air v ita l, & il faudroît fup-
pofer pourtant qu’il peut le reprendre inftantané-
* -mept à lucide muriatique. Il en eft de même par
rapport à la décompofition totale & fubite de l’acide
muriatique déphlogiftiqué par l'huile eJJ'entielle
de thérébenùne ; & ce font tout juftement de ces
corps que tant d’autres propriétés bien conftatées
nous ont fait nommer phlogiftiques.
4°. La décompofition par le gas inflammable
nepeut guère , à la vérité , être co'hfidérée que
comme affinité fimple , puifque ce fluide n’eft que
le phlogiftique même, mis en état de gas par la
matière de la chaleur , & que cette matière fe
trouve déjà en excès dans l’acide muriatique déphlogiftiqué
; mais après tout ce qui précédé , il
eft aifé de juger quel eft véritablement le fujet de
cette affinité: ce n’eft point l’air vital qui a fi peu
de tendance à s’unir avec le gas inflammable, que
le fimple çontafl ne fuffit pas pour procurer cette
union, que hors de la combuftion , c’eft plutôt
mélange que çombinaifon , en un mot, qu’il n’en
réfulte pas même équipondéranee parfaite , puif-
que le gas inflammable s’élève dans l’air vital par
fa légéreté fpécifique* C ’eft donc l’acide muriatique
qui tend à fe faturer de phlogiftique , & l’air v ital,
qui devient libre au même inftant, forme avec le
gas inflammable le mélange détonnant,
5°. La couleur de Vacide vitriolique noirci par
des matières phlogiftiques ne peut être aflimilée
aux couleurs végétales que par Pexiftencemême
du principe inflammable, quoiqu’il s’y trouve dans
un état très-différent ; cependant cette couleur ,
fur laquelle l’air ambiant n’a aucune aélion ni rapide
ni lente , eft effacée comme les autres par
l ’acide muriatique déphlogiftiqué , auffi-bien que
par l’acide nitreux; c’eft donc encore ici le phlogiftique
qui eft principalement attire , ou fi l’air
vital concourt à l’a&ion , s’il n’eft pas purement
dégagé en totalité, il ne vient qu’en fécond ordre
régénérer la portion d’acide vitriolique qui appro-
choit de l’état fulfureux, précifément comme nous
l’avons vu dans la décompofition même du foufre,
6°. Enfin, pour juger de ce qui fe paffe dans
une opération, il ne fuffit pas d’examiner unepar-
tie des produits : il eft bien démontré préfentement
!• que l’acide muriatique paffe dans cette diftillation
| chargé de l’air vital qui étoit uni à manganèfe ;
mais celle-ci, en le cédant , na-t-clle rten reçu en
échange ? La théorie ne faiiroit être complette ni
fûre qu’après la résolution de cette queftion : o r ,
les -nouveaux faits qu’elle nous conduit à confidérer
forment le complément de la preuve du
concours du phlogiftique.
Il eft bien connu que les diffolutions acides de
manganèfe préfentent des différences très-marquées
, fuivant qu’on la prend en état de régule 9
en état de chaux blanche, ou en chaux noire.
Le régule donne avec les acides vitriolique 8ç muriatique
du gas inflammable, avec l’acide nitreux
du gas nitreux. Ces deux produits -gafeux ont né-
ceffairement quelques rapports , comme dans les
diffolutions de tous les autres métaux: je me bornerai
à cette feule conféquence évidente peur ne pas
trancfif?,
trancher ce qui eft en queftion , en obfervant cependant
, à cette occafion , que la diffolution du
fer & du zinc dans l’acide déphlogiftiqué , fans
produ&ion de gas inflammable , qui paroît à M.
Berthollet fi favorable à la fécondé hypothèfe,
trouve dans celle-ci une explication bien plus na- i
turelle : l’acide reprehd ce qu’il a perdu.
La chaux blanche fe diffout très-bien dans les i
acides, & ne leur communique aucune couleur i
quand elle n’eft pas mêlée de fer; il ne s’en dégage
plus ni gas inflammable ni gas nitreux , mais feu-
lement du gas acide méphitique ; ce qu’il faut
bien remarquer , elle ne rend pas l’acide muriatique
déphlogiftiqué.
La chaux noire eft à peine attaquée par ces acides
à la digeftion , ils n’en prennent qu’une très-petite
quantité, ils forment des diffolutions rougeâtres.
Que l’on n’imagine pas qu’il n’y a ici de différence
que par rapport à la quantité de terre diffou-
te ; on auroit bientôt la preuve du contraire ,
puifque les diffolutions de chaux blanche , de
même que celles du régule, font précipitées en
, blanc parles méphites àlkalins,& les diffolutions dé
chaux noire en brun ; puifque la diffolution de
chaux noire dans l’acide muriadque'eft décompofée
par l’eau feule » tandis que la même diffolution à
fa chaleur de la diftillation , ainfi que celles du
régule & de la chaux blanche , ne peut être décompofée
que^par les alkalis ( Bergman, opuf. &c.
tom. 2-,pag. 21 y & fiiiv. ). Je conferve depuis plus
d un an des cryftaux de muriate de manganèfe
dans un bocal Amplement couvert de papier.
A la chaleur de la diftillation , l’acide vitriolique
recohobé forme à la fin une diffolution non colorée
, où l’aîkali occafionne un précipité blanc. Dn
1 obtient egalement de l’acide muriatique, & alors
une portion de cet acide paffe en état de gas acide
muriatique^ déphloftiqué. L’opération eft plus difficile
avec l’acide nitreux ; on atteint cependant le
point de faturation à force d’ajouter de nouvelle
chaux noire , & nous avons vu que l’acide nitreux
phlogiftiqué., c’eft-à-dire , chargé de gas nitreux ,
Opéroit très-facilement cette diffolution.
, Enfin ,1e fucre, la gomme , l’huile , le charbon
, un métal ou toute autre matière appellée
phlogiftique ajoutée à l’acide nitreux pur, décide
fur-le-champ la diffolution ; ajoutée à l’acide muriatique
, il n y a plus de gas muriatique dèphlogifii-
^ la diffolution eft auffi parfaite que quand
1 acide fubit cette altération.
Je demande maintenant fi , même en abandonnant
les preuves que nous avons d’ailleurs de la
nature phlogiftique, du gas inflammable & du gas
nitreux, il n’en refteroit pas encore affez pour
et^lir pcxiftence & le concours d’un principe
îfférent de l’air vital , ou > pour mieux dire , de
nature oppofée j au point qu’ils ne cohabitent pas,
femblent même s’exclure réciproquement. Que
îeroit donc , dans rhypothèfe contraire , cette
£naux blanche, qui ne produit plus de gas nitreux
Çhymie, Tçme I r
dans 1 acide nitreux , qui ne fournit plus d’air vital
a 1 acide muriatique ? Dira - t - on que c’eft le régule
Amplement mafqué par le gas acide méphi-
nque qu’il a reçu de l’alkali précipitant? Si cela
e to it, il faudroît qu’après avoir abandonné le gas
méphitique dégagé par l’aâion d’un acide plus puif-
fant, il fournit encore a la diftillation pneumatique
du gas nitreux dans l’acide nitreux , du gas inflammable
dans 1 acide muriatique ; car les diffolutions
du régule & de cette chaux fe trouvant à la fin
absolument dans la même condition, il fuit nécef-
fairement qu’elles ont dû prendre & retenir les
memes principes : o r , la chaux blanche ne donne
en aucun temps ni gas nitreux ni gas inflammable :
le régulé a donc de plus ce qu’elle n’a pu ni garder
in fournir dans*l’opération.
i -A-ill)eJ'a‘ t_on mieux fuppofer que la chaux blan-
che n eft autre chofe que la chaux noire elle-
meme deguifée par fa furcompofition avec le gas
acide méphitique ? Cela ne fe peut encore , & 'la
I raifon en eft tout auffi évidente : l’exiftence d’une
matière dans/un corps étant donnée , il fautqu’elle
fe retrouve, loit dans l’un , foit dans l’autre des produits
de fon analyfe : ici l’air vital ne fe retrouve
ni dans la cornue, ni dans les récipiens ; la chaux'
blanche ne recéloit donc pas la portion de ce fluide
que la chaux noire fournit toujours dans les mêmes
circonftances a 1 acide muriatique aèrifbrme ?’
Ira-t-on jufqu’à admettre que cet air vital fe
transforme pour lors en gas acide méphitique, &
fe dégagé au premier inftant avec celui qui préexif-
toittout formé, fans que l’on puiffe les diftinguer*
Je ne nierai pas la poffibilité de cette converfion
qui s opéré réellement dans plufieurs circonftances
analogues ; mais cette converfion ne s’opère
que quand l’air vital rencontre la bafe acidifiable
propre à cette compofition ; il faudroit donc toujours
une autre matière quelconque, & l-’objeâron
refte dans fa force ; il faudroit une autre matière
du genre de celles qui conftituent les combnfti-
blés , & l’obje&ion tourne en preuve.
Il refte un dernier parti , .c’eft de dire que la
chaux blanche ne retient précifément d’air vital
que ce dont elle a befoin pour être foluble dans
tous les acides j’obferverai en faveur de cette
explication , que rien ne s’oppofe, à ce que l’on
rende raifon des divers phénomènes, auffi - bien
Par ( la différence des proportions, que par la variété
des principes , puifque dans notre troifième
hypothèfe, c’eft auffi la dofe de phlogiftique qui
différencie le régule & la chaux blanche , & que
l’air vital n’entrant dans un çompofé qu’en èn
chaffant le phlogiftique, & réciproquement, la
quantité de l ’un doit décroître en effet à mefure
que celle de l’autre augmente, Mais il n’en eft pas
moins vrai qu’en ne mettant en jeu dans ces opérations
d’autre fubftance que l’air vital , il eft im-
poffible d’indiquer que fi-ce qui donne lieu à la pro.
duéfion du gas inflammable & du gas nitreux pendant
la diffolution de la manganèfe en régule dans