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fuite le fel par lixiviation ; il eft évident que ce
procédé ne pourroit être avantageux que dans le
cas où l’on n’auroit be'oiti de l’acide que pour en
former tout de fuite un fel neutre à bafe alkaline.
Cet acide eft propre à Tefpèce des fourmis ;
Lifter avoit aftùré avoir retiré un femblable acide
des guêpes -& des abeilles ; MM. Ardviflon &
Oehrn n’en ont point obtenu , de forte que jufqu’à
préfent il ne s’eft trouvé dans aucun autre animal.
Uacide formicin eft un acide particulier de fon
genre. Margraff, & la plupart de ceux qui l’ont
traité depuis, ont dit qu’il avoit une grande analogie
avec le vinaigre : mais qu’entend-on par cette
analogie ? Veut-on dire par-là qu’il a à-peu-près le
même degré d’acidité , qu’il eft fufceptible du même
degré de concentration, qu’il fe détruit de même •
au feu , qu’il peut enfin lui être fubftitué dans les
n'âges économiques ou médicinaux lorfqu’on ne
cherche qu’un acide de pareille intenfité ? Tout
cela eft vrai, fans doute ; mais il n’y a rien à en conclure
; car en ce fens toutes les fubftances ont en-
tr’elles de l’analogie, parce qu’il n’en eft aucune
dans la nature qui fe diftingue de toutes les-autres
par toutes fes propriétés. Qui eft-ce qui ne fait que
la plupart de ces rapports exiftent dans tous les
acides qui admettent dans leur compofition une
portion d’hùile, qui les met à l’état d’huiles eflen-
tielies, d’acides fluides ou concrets ? Il faudroit donc,
dans ce fyftême , les regarder tous comme un feul
& même acide.
Veut-on dire au contraire que l'acide formicin eft
exa&ement de là même nature que l ’acide acéteux,
qu’il en a toutes les propriétés? Cette afîertion eft
démentie , comme on le verra , par les réfultats
difterens qu’il donne dans les mêmes circonftances,
& en s'unifiant avec les mêmes bafes.
V-eut-on dire enfin que Y acide formicin n’eft que
l’acide acéteux déguifé par une furcompofition ?
Cela n’eft pas même probable, puifque le furcom-
pofé eft ordinairement plus foible St que Y acide
formicin déplace le plus fouvent l’acide acéteux ;
mais il rf’eft pas ici queftion de probabilités , . &
quand elles fe réuniraient toutes en faveur de cette
opinion, elles feroient encore infiiffifantes ; ceux
qui portent en.Chymie les règles de la faine logique
penseront toujours, avec MM. Ardviflon &
Oehrn, que .tant qu’on ne fera point parvenu à
convertir Y acide formicin en acide .acéteux, on doit
regarder le premier comme un acide .de fon genre ;
c’eft ainfi que s’expriment ces deux auteurs, après
avoir recherché avec beaucoup de foin tout ce qui
pouvoit fonder la prétendue analogie.
. Suivant M, Tiiouyenel^ ce ri’eft plus avec le
vinaigre, c’eft avec l’acide plie 'phorigue, ou, comme
il l’appelle avec Xacide micro cofmique , que Y acide
formicin fe trouve avoir beaucoup de rapport ; comme
il n’a point publié les expériences qui lui ont fait
découvrir ces rapports, on eft réduit à les imaginer,
& j’avoue que je n’en apperçois point d’autre
CHie d’appartenir tous les deux au règne animal ;
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J il n’y a peut-être pas au furpîus deux acides pîuâ
éloignés de fe reflembler ; le premier fondent le
feu de vitrification, & l’autre fe détruit au feu de
diftillation; celui-là forme , avec le calce & tin fel
infoluble ; celui-ci. un fel eryftallifable & îoluble ,
& c . , &c.
Laiflons-donc toutes ces opinions enfantées fans
doute par un refte de préocupation pour le fyftême
d’un acide univerfél dont tous lés autres ne dévoient
être que des modifications ; nous avons vit
qu'au lieu d’un, acide univerfel, il n’y avoit réellement
qu’un principe acidifiant commun,qui, en
s'unifiant à des bafes différentes, conftituoit tous les
difterens acides; ( Voye{ Acide. ) ce principe ejft
l ’air, & il exifte bien sûrement auflî 'dans Y acide
formicin , il n’en faut d’autre preuve que l’effervef-
cence que donne le réfidu de la d ftillation dufôr-
miate de potafle. Margraff, qui le premier a ob-
fervé ce phénomène, avant que la théorie des gas
ne fût connue, s’étonnoit, avec raifon, que l’acide
de fon fel eût entièrement difparu , qu’il n’eût laiffê
qu’un fel qui avoit toutes les propriétés alkalines,
qui faifoit 'effervescence avec fon propre acide.
Nous fàvons préfentement tout ce qui fe pafle dans
cette opération ; fi l’acide n’eft que foiblement engagé
dans fa bafe, il fe dégage; fi l’union eft plus
intime, il faut un degré de feu plus fort, ce feu
détruit, par fa violence, la compofition même de
l’acide, & l’air principe acidifiant, affranchi pour lors
de fes liens, fe convertit en gas acide méphitique,
& s’uniflant à l’alkali, le rend effervefeent. Voyer^
les mots Acéte calcaire , Acéte de potasse.
On ne fauroit douter encore que Y acide formicin
ne tienne du phlogifiique, & même qu’il n’y foit
bien moins adhérent que dans le vinaigre , puifque
celui-ci diflbut très-bien la chaux de mercure, au-
lieu que , fuivant l’obfervation de MM. Ardviflon
& Oehrn, Y acide formicin la réduit, c’efl-à-dire ,
qu’il eft obligé de le céder à l’afiinité plus puiflante
de la terre mercurielle; il le cède de même à l’acide
muriatique; déphlogiftiqué.
Voici les propriétés de Yacide formicin , fuivant
les obfervations de MM. Ardviflon & Oehrn : il retient
l’eau fi avidemment,qu’il ne peut en être féparé
entièrement par la diftillation ; lor qu’il eft Je plus
reâifié, fa pefanteur fpécifique eft à celle de l’eau : :
1,0453 : 1,0000.
Il affecte le nez & les yeux d’une manière particulière,
qui -n’eft pas fléfagréable ; il a un goût
piquant & brûlant lorfqu’il eft pur , & flatte le palais
lorfqu’il eft étendu dans l’eau..
Il rougit les couleurs bleues végétales , il altère
même le papier qui enveloppe les pains defucre,
& le fait pafler înfenfiblement à un rouge jaune,
lôrfqu’il eft un peu concentré. Unepartie de cet acide
mêlée à 75 parties d’eau diftillée, rougit encore, à
la) vérité foiblement, le fyrop de violettes :: étendu
de 430 parties d’eau, il produit des taches rougeâtres
lur le papier coloré par l’infufton de tour**,
%
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taefol; lorfqu’il eft noyé dans 1300 parties d’eau,
il n’altère plus que l’infufton de tournefol.
Il s’unit facilement aux autres acides ; il noircit
lorfqu’on le fait bouillir avec l’acide vitriolique ;
aufli-tôt que le mélange s’échauffe, il donne des
vapeurs blanches piquantes , & quand il bout, il
s’en élève un gas qui s’unit difficilement à l’eau
diftillée & à l’eau de chaux ; en diftiikmt ce mélange,
on> retrouve Y acide formicin , mais en moindre
quantité.
L’acide nitreux bouilli avec Y acide formicin donne
des vapeurs phlogiftiques, & une efpèce de gas
qui trouble l’eau de chaux, qui fe diflbut difficilement
& en petite quantité dans l’eau. L'acide formicin
eft entièrement détruit dans cette opération,
fur-tout lorfqu’on a employé .une grande quantité
d’acide nitreux très-concentré.
L ’acide muriatique n’altère pas Y acide formicin
& on les fépare lans perte par la diftillation. Il
n’en eft pas de même avec l’acide muriatique de-
phlogiftiqué , il décompofe Y acide formicin , en lui
enlevant fon phlogiftique.
' U acide formicin ne paroît pas fufceptible de former
une combinaifon immédiate avec lé phlogiftique.
Il forme , avec les autres bafes, des fels que
Rappelle formiates. Voye^ F Formiate barotique, ormiate d e potasse , &c.
MM. Ardviflon & Oehrn ont déterminé fes
affinités dans l’ordre fuivant : le barote , la potafle ,
la fonde , le calce,' la magnéfie , l’ammoniac , le J
zinc , la manganèfe, le fer , le plomb, l’étain, le j
cobalt, le cuivre, le nickel, le bifmuth, l’argent, |
l’alumine , les huiles effentielles & l’eau.
Cet acide , quelque foible qu’il paroifle, a cependant
l’avantage fur les acides acéteux, boracin, !
vitriolique , nitreux fumant & méphitique; i l l ’em- ]
porte même en quelques occafions fur l’acide ar-
fenical auquel il enlève le nickel & le cobalt. j
- § On n’auroit pas foupçonné que cet ordre d’affi- j
nités pût changer à un degré de chaleur incapable I
de détruire l ’acide ; cependant l’acide boracin le
dégagé au degré de l’ébullition, qui devient ainfi,
dans cette circonftance, le terme différentiel delà
voie humide & de la voie sèche,
M. Bergman avoit placé dans fa table l ’ârfenic
après le nickel, l’antimoine après le bifmuth , &
la platine après l’argent; mais les auteurs , tant de
fois cites dans cet article, ont reconnu que farfelue
n etoit pas attaqué , que fa chaux ne fe di-fïbl-
voit dans Yacide formicin que comme elle fe diffol-
voit.dans l’eau; qu’il ne contraâoit aucune union
ni avec l’antimoine, ni avec fa chaux; & que la
petite portion de précipité de platine que cet acide
prenoit d’abord fe dépofbit bientôt, fur - tout à
l ’aide de la chaleur, fous là forme d’une potiflière
ferhigineufe. .
Get acide fe m èle parfaitement à l’efpritrde-vin.
y VoyeI ALCOHOL FORMICIN & ETHER FORMI-
C.LN- ) .11 s’llI\ù difficilement aux huiles graffes & cfientielles ; car l’acide qu’on retire de ces mélanges
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après la digeftion, ou par la diflillation , n’a pas
changé de couleur, quoiqu’il foit imprégné de
l’odeur de ces huiles, & qu’après l’évaporation
il laifle des marques d’un réfidu ; il diflbut cependant
complètement l’huile empyreumatique des
fourmis.
f A l’aide de la chaleur, il attaque la fuie de cheminée
, prend une couleur fauve & laifle tomber en ré-
froidiflant un fédiment brun; fi on diflille ce fédiment,
il pafle une liqueur d’une couleur jaunâtre , d’une
odeur défagréable, accompagnée de vapeurs élaf-
tiques ; on n’obferve rien de femblable , lorfqu’on
fait -bouillir cet acide avec la pouflière de charbon. Acide galactique. C ’eft le nom que je donne
à l’acide libre & développé- que contient le petit
lait ou la partie féreufe du k i t , & qu’il faut’ fe
garder de confondre avec l’acide particulier du fucre
de lait dont il fera queftion à l’article Acide S acch-
LACTIQUE.
Le petit lait & les parties fenfibles dans lefquelles
il fe divife fpontanément, dévoient naturellement
fixer la première attention des hommes les plus
grofliers, & Pline s’étonnoit, avec ra ifo n q u e le
fromage eût pu refter inconnu pendant plufieurs
fiècles à quelques nations barbares ; mais ces mêmes
peuples en retiroient déjà une liqueur acide agréable.
Le petit lait eft donc bien certainement î’uns
des premières fubftances employées comme aliment
& comme remède. Hyppocrate, Columelle, Diofcoride,
Pline, en un mot tous les anciens parlent très-clairement
de la férofité du lait,de la manière de la féparer
du lait par Pagitation, par la coélion, par le mélange
des rameaux de figuier, d’un peu de mou
ou de vinaigre, Si. des propriétés de ce qu’ils ap-
pelloient oxigala, & qui étoit préparé par l’addition
de quelque, fel, ou plus Amplement par le
mélange du lait aigri avec le lait récent.
Hoffman , Boerhaave , plomb erg & Geoffroy ont
publié quelques expériences entreprifes pour faire
connoître la nature du lait & de les parties conf-
tituantes ; mais l’analyfe des matières animales étoit
.Je leur temps encore fi imparfaite , qu’il n’y a que
bien peu de chofe à recueillir de leurs 'travaux.
Le dernier a traité à la cornue le réfidu de l’évaporation
du petit lait, il en a retiré du flegme, un
acide de couleur citrine, puis de l’huile épaifle ; il
eft refté une matière charbonneufe déliquefeente
à l’air, dont l’examen lui a prouvé que le petit
lait contenoit un fel neutre qu’il a cru reconnoître
à fa cryftallifation pour du fel commun.
Deux très-habiles Chymiftes , MM. Rouelle &
Baumé ont tenté depuis la même analyfe ; fuivant
M. Rouelle le petit lait ne contient que du fel ef-
feutiel fort approchant du fucre candi, qu’011 nomme
fucre de lait, du fel de fylvius, ou muriate de po-
ta/Te, un peu de muqueux, une portion de matière
extra&ive, & une quantité prefque infenfiblê
d’alkali fixe.
‘ Suivant M. Baumé, le petit lait fournit d’abord
beaucoup de fucre de lait, qui lui parôît fe rap