
418 A C I puifque l’air vital exifle lui-même dans le gas acide
méphitique, & qù’ainfi ce feroit toujours le même
principe acidifiant, feulement dans un état de fur-
compofition; mais nous {avons d’un autre côté que
la combinaifbn qui produit ce gas , peut aufii bien
fe former à l’inftant du dégagement, & dès-lors ,
il n’y a plus de raifon fuffifante de croire à ce principe
acidifiant compofé, jufqu’à ce qu’on ait vérifié
qu’il fait comme tel partie conflituante de l’acide.
§•
Nous difons enfin qu’un corps efl acidifié, quand
nous le voyons fixer une portion d’air vital, & acquérir
en conféquence des propriétés nouvelles,
analogues à celles que préfentent les acides. L’un
des grands problèmes de la Chymie moderne , efl
de favoir précifément quel efl le corps acidifié, fi
c’efl le foufre & le métal tout entiers, ou fi ce font
les foufres & les métaux, moins le phlogiflique : la
derniere opinion nous paroît la plus fûre. On ne
doit jamais perdre de vue que le métal fournit un gas,
en s’unifiant aux acides, & que la chaux métallique
n’en fournit point, quoiqu’il en réfulte la même com-
binaifon aêhielle ; cette différence a néceflairement
une caufe q u i, quand elle fera bien connue, ne
peut manquer de mettre d’accord tous les Chymifles.
Lorfqu’une bafe quelconque, en s’unifiant à l’air
vital, n’en reçoit pas toute la quantité néceffa'ire à
fa faturation, les propriétés qu’elle âvoit auparavant,
font très-fenfiblemént changées, mais elle
n’efl qu’imparfàitement acidifiée; la chaux blanche
d’arfonic fe trouve dans cette condition, ainfi que
les acides que nous nommons phlogifliqués. Voye£ Acide vitriolique phlogistiqué, Chaux métalliques,
&c.
ACIDIFICATION. C ’efl une opération fpontanée
ou déterminée par l’art qui produit un acide, par l’union
d’une bafe acidifiable quelconque, aveç le principe
acidifiant commun. La combuflion des foufres,
la calcination des métaux, &c. font de véritables
acidifications ; il en efl probablement de même du
-paffage des huiles à l’état .de réfines, & peut-être
de bien d’autres altérations progrefîives qu’éprouvent |
quelques fubflances des trois règnes, & dont nous !
n’apperçevons que les effets. Ce n’efl que depuis la I
‘découverte de l’air vital, & même depuis très-peu
de temps, que l’on a une idée claire de ce qui fe
paffe dans ces opérations ; les anciens Chymifles con-
fidéroient les acides comme des fubflances plus {impies
& exiflant tout formés, principalement dans les
foufres. L’illuflre Macquer a encore confervé toute
cette partie de la doétrine de Stahl, dans la derniere
édition de fbn Diélionnaire ; cependant, on
voit par l’extrait qu’il donne -dans le Journal des
Savans, du mois de Décembre 17.83 (p. 867 ) de
quelques Obfervations de M. le Comte de Morozzo,
qu’il étoit alors moins éloigné d’admettre l’idée de
M. Lavoifier, fur l’exiflence d’un principe acV.ifiant
A C I
dans les chaux métalliques , puifqu’il avouoit prèci-
féjnent que ce Savant lui avoit déjà donné beaucoup de
vraifemblance par un grand nombre de très-belles expériences.
ACIDULE. On fe fert ordinairement de cette
expreflion, pour défigner les fubflances qui partir
cipent à un certain point de propriétés acides, .foit
qu’elles manifeflent naturellement ces propriétés , foit
qu’elles les- doivent à quelque préparation, comme
lorfqu’on mêlgL à quelques liqueurs une très-petite
quantité d’acide. Les boiffons acidulés ou acidulées
font d’un ufage allez fréquent en Médecine.
Lès eaux gafeufes naturelles, ou chargées artifi-
cielleinent de gas acide méphitique, font aufii nommées
par la même raifon eaux acidulés : avant que
l’on ne connût l’aciaè qui les conflitue telles, leur
faveur piquante les avoit fait diflinguer par ce ca-
raâère.
Le mot acidulé nous fert aufii à indiquer les fels
oii l’acide efl en partie faturég & qui font néanmoins
employés à la maniéré des diffolvans acides; dans
ce cas, il devient fubflantif, de même que le mot
acide. A in fi, nous difons Vacidule tartareux, Vacidulé
oxalin, &c. Il falloir bien un terme approprié,
pour qu’on ne fût pas. expofé à confondre ces fels
avec leurs acides libres & ifolés de toute bafe. Celui-
ci porte avec lui fbn explication; car un fel qui
efl en partie neutre, qui ne recèle qu’un léger excès
d’acide, efl véritablement acidulé. Voy, Acide
oxalin, Acide tartareux 6* Dénomination,
AC1D UM P IN G U E , CAUSTICUM; acide-gras,
en allemand, fett-faure. C’efl fous ces noms que Fréd.
Meyer, Chymifle d’Ofnabrùck, a fait connoître un
principe qu’il regardoit comme l’acide primitif, comme
une fubflance qui entroit dans la.coinpofition de tous
les corps naturels. ( EJJais de, Chymie fur la Chaux.s
&c. publiés en allemand en 17643 traduits par M. Dreux,
en 1766. ) Il efl inutile d’examiner laquelle de ces
■ dénominations efl plus conforme à nos réglés de nomenclature
, puifque l’être qu’elles indiquent tient à
une hypothèfe qui paroît maintenant abandonnée ;.
mais il faut fe garder d’en conclure que l’Ouvrage de
Meyer doive aufii être dévoué à l’oubli; il efl rempli
d’expériencès curieufes, dirigées avec fagacité, adaptées
à des vues profondes, & fagement raifonnées;
il a eu la gloire d’attaquer une des matières les plus
ardues de la Chymie fiiblime. La fenfation qu’à fait
fon fyflême, a marqué le but à de nouveaux efforts,
& contribué par-là à avancer l’époque des plus importantes
découvertes; c’efl cê dont on fera convaincu
par l’expofition abrégée que je vais donner
de fa doélrine ; & à ce feul titre, elle mériteroit
encore une place diflinguée dans' l’hifloire des opinions
qui ont frayé la route pour arriver au vrai.
Je ferai enfuite mention du même fyflêine renou-
vellé par un Chymifle plus moderne, quia donné à
ce principe le nom d’acide igné,.
§ •
Meyer avoit très-bien vu qu’il n’y avoit rien de
fatisfàifant dans tout ce qui avoit été propofé juf-
qu’alors fur la chaux % il entreprit de nouvelles expériences
pour en découvrir la vraie nature. Il prit
de l’eau de chaux, y verfa de l’alkali, & obtint
un précipité terreux qui n’étoit plus foluble dans
l’eau, & qui avoit recouvré toutes les propriétés de
la terre calcaire non calcinée; d’autre part, il reconnut
que dans cette opération, l’alkali avoit acquis la
cauflicité de là chaux; de là il conclut que cette
cauflicité étoit due à un acide particulier qui s’étoit
uni à la terre calcaire pendant la calcination, qui
lui étoit repris par l’alkali dans la précipitation ; c’efl-
à-dire, à Vacidum pingue.
Cet acide gras, que Meyer appelle aufii caufiicum,
efl, fuivant lui, une fubflance fubtile, élaflique, mixte,
analogue au foufre, la plus prochaine de la .plus pure
matière du feii ou de la lumière, compofé indeflruc-
tible d’un principe falin acide & de feu, expanfible,
compreflible, volatil, capable de pénétrer tous les
vaifleaux lorsqu’ils font chauffés , . & fenfiblement pe-
fant. Il a une force aflringente, -il s’unit p.ar. le feu
à la terre calcaire, aux alkalis, aux terres métalliques;
fa préfence conflitue le caraélère propre de
l’alkali volatil dégagé par la chaux. Enfin, il s’échappe
en partie dans l’air, pendant la combuflion du charbon
, & une petite partie fe combine avec les cendres.
On aura.peine à concevoir aujourd’hui que Meyer
ait pu croire ce fyflême fondé, après avoir connu
les belles expériences par lefquelles le célèbre Black
nous a appris à démontrer que la chaux n’efl qu’une
terre privée de l’air fixe qui la dulcifioit, & tout en
avouant lui-même quz les recherches du favant Ghy-
myfle d’Edimbourg étoient très-jufies en elles - mêmes,
& très-avantageufes dans leur vraie application; cependant,
fi l’on fait attention qu’indépendamment de la
privation de l’acide méphitique ou air fixe, la matière
de la chaleur, fixée dans là chaux, paroît réellement
contribuer à fes propriétés aéluelles ( Voyeç Chaux & Calorifique), on fera moins étonné
que Meyer ait perfiflé à penfer que la découverte
de Pacide méphitique ne fuffifoit pas à l’explication
de tous les phénomènes; d’autant plus que fon aci-
dum pingue n’étoit, dans fes propres exprefiions, que
la matière fécondé de la chaleur, admettant dans fa
compofition la lumière qui en étoit le premier élément.
Audi, M. Wenzel, qui efl celui de tous les
Chymifles, qui a examiné avec plus d’impartialité
la doélrine de Meyer, ne paroît-il pas éloigné, de
penfer qu’elle peut à un certain point fe concilier
avec celle de M. Black, fur-tout pour ce qui regarde
les chaux métalliques, dont il a déterminé
avec beaucoup de foin l’augmentation de poids dans
les calcinations & précipitations : à la vérité, M.
Wenzel n’a pas diflingué l’air vital de l’acide méphitique,
il n’a confidéré la chaleur que comme un
mode de la matière, & non comme une matière particulière;
après cela, il jugeoit très-fainement, en pro-,
nonçant qu’il étoit impoflible de dônncr une fblution
complette de toutes les queflions que préfentoient
ces phénomènes. ( Lehre von der Vzrwandfchaft der
Korper, &c. page zço. )
Il faut l’avouer avec M. Lavoifier, Meyer s ’ejl
un peu abandonné à la propènfion qu’ont tous ceux qui
croient avoir découvert un nouvel agent, & qui l ’appliquent
indifiinÜement à tout ; c’efl là le feul reproche
que l’on puifle faire à cet Auteur, & qui efl véritablement
fondé. En effet, il trouve l’acidum pingue
dans le quartz, dans le verre, dans l’acide nitreux;
c’efl lui qui donne la couleur rouge aux charbons
ardens, qui s’attache aux métaux précipités ou calcines
, qui difiout la chaux, le foufre, les huiles,
qui donne à l’acide vitriolique fumant fes propriétés,
qui conflitue le gas fuffocant de la fermentation &
! de la combuflion, &c. Il en fait la bafe de l’air,
la matière principale du fluide éleélrique.
§ •
Je n’ai pas befoin de faire obferver tous les rapports
qui fe trouvent entre le fyflême que je viens d ’ex-
pofer, & celui que M. Sage fait fervir préfentement
de bafe a la théorie particulière qii’il s’efl formée.
Son agent efl aufii une fubflance acide très-fimple
qu’on ne peut produire , ni décompofer, qu’il appelle
acide igné; qui déplace tous les autres acides de leurs
bafes, qui efl uni à la terre abforbante dans la chaux,
qui efl le principe de vitrification. On y reconnoît
la meme génération hypothétique de la plupart des
corps naturels; car, fuivant M. Sage, l’air vital, le
phlogiflique, ou principe métallifant, le gas inflammable,
le gas acide méphitique, les acides de trois
règnes, l’huile & l’éthèr ne font que des compofés
dans lefquels l’acide igné efl différemment modifié,,;
Si cet acide.igné efl la même chofe que l’air-vital,
ou le principe acidifiant, il efl évident que M.;
Sage n’a fait que fubflituer une dénomination plus
vague a une expreflion déterminée par les réfultats
immmediats des expériences, dénomination qui efl
même peu appropriée, puifque ce principe feroit
plutôt ignifiant qu’igné ; dénomination, en un mot,
qui ne ferviroit qu’à faire confondre dans un feul
élément deux êtres très - diélinéls, la matière acidifiante
ou oxigine, & la matière de la chaleur. Mais
M. Sage n’a pas voulu qu’on pût l’accufer de fuivre
la route frayéç par les autres Chymifles fes Contemporains;
car il admet l’acide igné dans la chaux,
dans les alkalis, dans le verre, & dans beaucoup
d’autres fubflances où aucun d’eux n’a encore ap-
perçu de traces de la préfence.de l’air vital, & il
déclare pofitiveinent que l’air vital n’efl lui-même
qu’une modification de ce qu’il appelle acide igné.
Le plus grand nombre des Phyficiens me paroît
aujourd’hui bien convaincu que toutes ces hypo-
thèfes , qui ne portent que fur des reflèmblances
des poflibilités, des rapports vagues, des analogies
apparentes , ne contribuent en rien à l’avancement
G g g i j