
6 9 8 A I R
rature, eft que le pouvoir diflblvant de l’air décroît
en plus grande raifon que fa chaleur ; enfin que fi
l’air tient habituellement un peu d’eau , elle n’eft
pas une de fes parties compofantes en tant qu’air,
qu’il pourroit en être privé fans perdre fes propriétés
effentielles»
La- Chymie a été fi long-temps bornée aux opérations
du creufet & ’de l’alambic, elle fe tenoit fi
fort à l’écart de toute fpéculation phyfique, que je
ne ferois pas étonné qu’il y , eût encore quelques
Chymiftes difpofés à confidérer la plupart de ces
queftions comme étrangères à leur fcience; ils feront
bientôt détrompés s’ils veulent nous fuivre dans
les applications que nous aurons fouvent occafton
de faire des principes que nous avons recueillis de
leur examen; pour ceux qui ont entamé la matière
de l’ana yfe rigoureufe , ces. difcufîions n’ont plus
befoin d’apologie..
§. I V . Suite des expériences analytiques fui**l'air
commun.
Maintenant que nous avons dépouillé l’air de toute
Peau qu’il tient en diflohition , o u , ce qui; eft la
même chofe, que nous avons indiqué les moyens
d’en déterminer la quantité & de tenir compte de la
portion qu’il recèle toujours dans l’état élafiique,
nous devons attaquer ce fluide lui-même pour, le
ré foudre en fes parties compofantes. Les corps com-
bujlibles feront ici nos inftrumens, car la combustion
n’efl: proprement qu’une décompofitiori de l’air par
des. fubftances. qui s’approprient un de fes principes,
en vertu d’uiïe affinité fupérieure , avec la condition
toujours fûppofée de température. Mais n’anticipons
point fur ce qui ne doit venir qu’en ordre
de. çonféquences des faits : ce peu de mots fufiit pour
annoncer que nous avons à traiteç ici les queftions
lés plus ardues de la Chymie fublime, où il y a'
encore grande diverfité de témoignages fur les expériences,
contrariété d’opinions fur la nature &
Pexiftence des principaux agens , combat d’hypo-
thèfes fur les caufes, & où notre tâche, eft tout à
& fois d’expliquer & de prouver.
E x p é r i e n c e V I .
On fait fondre de l’étain pur en petits cylindres;
©n en pèfe très-fcrupuletifement une certaine quantité
, comme de huit onces ; on l ’introduit dans une
très-grande cornue .de verre blanc ; on fait tirer en j
pointe le bec de la- cornue, fans cependant la fer- ]
mer tout-à-fait, mais de manière qu’elle puifte être j
fermée facilement au premier coup de chalumeair,
& on en prend le poids en cet état.
La cornue ainfi préparée eft préfentée à un feu
de charbon , en la tenant d’une main par le- col, à
une diftance convenable du feu, & en ayant foin de
chauffer lentement & par- degrés,. jufqu’à. ce que j
A I R
l’étain commence à entrer en fufion. Alors y fans
retirer la cornue du feu , 011 fcelle hermétiquement
l’ouverture capillaire que l’on a laiffée au col de la.
cornue, & on l’éloigne infenfiblement du feu pour
la refroidir fans accident.
Lorfque la cornue eft revenue à l'a température
de l’athmofphère, on la repèfe-de nouveau. Si l’ô.pé-
ratiop a *été bien faite, on: trouve une diminution
de poids, qui doit être d’environ le tiers du poids
d e . l’air que conte noi-t la cornue à la température
ordinaire, & qui en avoit été chaffé par la. chaleur
au moment où elle a été feellée : cette précaution de
faire fortir une portion tl’air eft indifpenfable pour
prévenir la fra&ure du vaiffeau & même les exploitons-
que la raréfaéUou de l’air par la chaleur ne manque-
roit pas d’occafionner dans la fuite de l’expérience.
Tout étant ainfi difpofé , on , place-la . cornue fur
un fe\i de charbon l’étain ne tardq pas à fe fondre,
il fe forme , à fa ftirfaee une pellicule qui fe
ride & fe change bientôt en une poudre noire „qui
gagne la partie inférieure & même fe dépofe fous le
métal; on. donne de temps en temps un petit mouvement
à l'a cornue pour favorifer le contaél dé l’air,,
folt avec la poudre, fo.it avec le métal. En moins de
trois heures, la calcination eft achevée au point que
la furface de l’étain demeure tranquille & à peine
ternie : on laifle refroidir.
Si le vaifleau qu’on a employé eft d’une certaine
capacité , par exemple , de 250 pouces cubiques, &
qu’avant de le fceller, on en ait- fait fortir une quantité
correfpondante à .34,.87 grains ( c’eft-à-dire
75,8 à raifon de 0 ,46 grains le pouce cube), on
obferve : i°. que la cornue refroidie & non. encore
ouverte fe retrouve du même poids qu’auparavant,
& qu’il n’y a d’autre différence que celle qui peut
venir de quelqii’accident,& qui eft d’ailleurs fi foi-
ble qu’elle ne mérite aucune attention..
2°. Que lorfqu’on caffe la pointe fine qui termine
le bec de la cornue, l’air y rentre avec un fiflement
qui dure quelques fécondes.
30. Que .la-cornue repefée y après-avoir été ainfi
ouverte, & le métal y étant encore, a^acquis une
augmentation de poids d’environ 10 grains.
4°. Que cët accrpiiTement de poids appartient uniquement
au métal, puifque les fragmens de la cornue
rafl’emblés avec foin , après l’avoir caffée pour en
tirer le métal, repréfentent très - exadièment foir
poids primitif.
Enfin, qu’au, lieu de 8 onces où 4608 grams'd’étain
, on trouve en effet d’une part 2480 grains de
métal non calciné, & d’autre part 1728 grains- de ce:
?. qu’on a appeilé chaux métallique, & que nous nommons
oxide d’étain, y compris quelques globules,
i qu’il eft difficile d’en féparer ce qui fait en totalité
I 470.8' grains.1 '
Remarques. C ’eft par cette belle, expérience (1 )
.„(.O, Le Journal. Phyfique- de Décembre- 1774, *’a fait connoitre par un extrait du Mémoire de M. Lavoifier , lu à. &
séance, publiée. de St, Martin. Ce Mémoire, a. été depuis, imprime dans le Recueil de .i’Académie, pour 1774»
A I R
Wûô M. Lavoifier ïi fixé enfin lé? opinions fur la
taufç de l’augmentation de poids des métaux calcinés.
Les hypothèfes prOpofées pour l’explication de
ce phénomène préfentoient tant de difficultés, qu’un
grand nombre de Phyficiens preféroit encore de
laiffer le fait en queftion; je crois avoir contribué à
©n établir la réalité par les "expériences nombreufes
que je publiai en 1772 ( Dïgrejjions académiques, &c.),
expériences q u i, par la conformité des refultats obtenus
des divers procédés de calcination & par llee*s
propo; tiens déterminées de cet accroiffement de poids •;
luîvant la nature de chaque métal, ne pennettoient •
plus de l’attribuer à quelqu’aeeident. Mais quoique j
Hauxbée eût bien cooftaté que l’air qui avoit paffé |
fur du cuivre tenu rouge au feu, éteîgnoit la bougie,
quoique l’onf eût obfervé encore plus anciennement .
que le filex Frappé par l’acier clans le vuide ne don- |
noit plus d’étincelle ; quoique M. Cigna eût annoncé
dès 1761 dans les Mémoires de Turin (tom. 2,p. 176) , -
d’après une expérience du P. Beccaria, que la 'portion
de chaux métallique qui fe formoit dans des .
vaiffeaux fermés hermétiquement croiffoit en proportion
de leur Capacité , on étoit loin encore de
pouvoir fe rendre un compte exàél de ée qui fe
paffoit dans cette opération : l’explication très-jufte
de J. Rey n’avoît pas fait affez d’impreffion pour
échapper à l’oubli qu’un intervalle de 140 ans aVoit
rendu abfolü; & perfonne n’a voit imaginé que la même
•expérience qui avoit conduit Piüuftre Boy le à attribuer
cette augmentation de poids aux particules ignées
qui fe fixoient dans les métaux, pût fer vif à établir
folidement des conféquences tout-à-fait différentes.
Depuis cette époque, j’ai tenu pouf démontré que'
t ’étoit réellement de l’air athmofphérique qui-fe
fixoit dans les métaux pendant la calcination, & comme
le difoit déjà M. Lavoifier dans le Mémoire cité,
qu’il n’y avoit qu’une portion de cet air fiifee'prible
d’une pareille conlbinaifon,, tandis que le furpius s’y
refufoit coriftaiiiment ; tellement que les progrès de
la calcination ceffoient abfolument, quand une fois
cette portion étoif confimtée.
Comme les preuves d’une vérité aufîi. importante
ne fauroient être fendues trop familières , il ne fera
pas inutile d’indiquer ici le procédé que l’on fuit pour
cet objet dans les-Cours de l’Académie de Dijon ,
dans lequel il n’y a point d’explofion à craindre , &
•qui eft moins borné pour l’obfervation des réfuUats.
E x p -é r i e n c e V I I .
On prend une cornue d’une caps cité moyenne,
comme de 2 $ "à 30 pouces cubiques, de bon verre
& fans défaut'(le verre un peu v-erd eft moins fu-
jet à cafter). Après l’avoir exactement pefée, on y
introduit 4 onces cfétain coupé en morceaux. On
place cette cornue fur'Un fourneau & encore mieux
A I R
fur un- réchaud, au défions duquel eft une lampe à
mèche circulaire de 15 lignes de. diamètre fuivant les
principes de M. Argant ; au bec de cette cornue
où ajufte un tube de verre de 18 à 20 pouces de
longueur, dont l’extrémité courbée eft reçue dans
un robinet adapté à . la tubulure d’un très - grand
récipient, que l’on a placé d’avance fur la table
d’une- cuve hydropneumatique. ( Voye^fig., 77 des
appareils pour les gas.)
Les jointures étant bien lutées, & le récipient
plein d’eau ( ce qui fe fait de la manière la plus
commode , en l’enfonçant dans la cuve le robinet
ouvert ) avant que de l’adapter au bec de la cornue,
on éprouve les luts, en tenant quelque temps le robinet
ouvert : l’eau du récipient baiffe d’abord un
peu par la dilatation de l’air de la cornue- & du
tuyau de communication, qui n’eft plus comprimé
que par lé poids de Tathmofph.ère’ moins le poids de
là colonne d’eau an defïus de fon niveau, ainfi qu’il
a été dit ci-devant §. 2. Mais après ce premier effet,
il n’y a plus aucun abaiffement , fi les jointures
ne laiffeiit aucun pàd'âge à l’air. Quand on
s’èn eft affuré, on allume la lampe, en obfervant
de donner d’abord peu de mèche & même de tenir
la lampe éloignée de la cornue pour ne l’approcher
qu’infenfiblement. On a foin d’ouvrir le robinet au
moment même qu’on applique la première chaleur,
on rifqüeroit fans cela de voir éclater la cornue, ou
tout au moins de forcer les luts des jointures. On
s’apperçoit bientôt de l’effet de la dilatation qui fait
bailler l’eau dans le récipient , mais il diminue dès
que le métal eft entré en fufion , ce qui n’exige
pas plus de 20 à 25 minutes au feu de lampe; elle
remonte enfuite, & quand lés vaiffeaux font refroidis
, elle s’élève jufques dans le tube qui communique
à la cornue; ce qui donne la facilité de déterminer
avec préeifion la quantité d’air abforbé,
en fuppdfant les capacités de la cornue & du tuyau
de communication bien connues , & faifant toujours
la réduction- du volume apparent au volume réel.
S i, au lieu d’eau commune, on a rempli le récipient
d’eau de chaux, l’abforption n’eft ni plus ni moins
confidérable, & on ne la voit pas changer de couleur
ni fe troubler en aucune manière, fi ce n’eft que le
métal contînt quelques parties charbonneufes.
On conçoit /que fi là cornue avoit plus de capacité
, l’eau y remonte roit néceffairement ,■ & la feront
éclater, ou du moins empêcheroit que l’on ne
pût comparer le poids du métal avant & après la
calcination. Nous verrons ' ailleurs que cet appfffëil
donne la faculté- de porter bien plus loin la calcination
que de toute autre manière, en introduifant
dans le récipient, autant dé fois qu’on le juge à propos
, des quantités déterminées a’air femblable à la
portion qui a été confumée (1).
,(i) Cet,^.appareil pout-roît égalernent férrir à mèfarcr lés : degrés de chaleur, que les différens métaux exigent pont
leur RiÉo'h, -puifqiië le réripient portai voee échelle gradCiée* de^i^dioit vhî véritabje thermomètre à air, & par con*
•fe<îu.em ub très4»oîi -p^romètre. T 11 £ i j