
le même acide , & en même tems ciilhlli fables
par le même procédé ; mais on n’a point encore
allez obfervé ces fingulières adhérences entre les
fels, & cet objet mérite toute l'attention des
chimiftes. -
i l . Enfin , pour terminer cette hiftoire abrégée
de la criJlaUïfation des fels , j’ajouterai qu’il y a
une autre manière de les obtenir ctiftalliles 5 c eft
de les précipiter de leurs difiblutioris par une fubf-
tance qui ait plus d’affinité avec l'eau, qu'ils n'en
ont. L’alcool, verfé dans une diffolution faline,
produit cet effet fur le plus grand nombre des fels
neutres: on ne doit en excepter que ceux qui font
diffolubles dans ce liquide. Le même phénomène
de précipitation des criftaux falins a lieu dans le
mélange de quelques fels dont la diffolubilité eft
très-différente, & même quelquefois par le mé-
lange de plufieurs diffolutions falines entr’elles.
En général, les diffolutions de fels alcalins font
précipitées en criftaux par la leffive de potaffe ou
la foude cauftique, pourvu ,que cette leffive foit
affez concentrée pour cela.
13. Quant à la criftallîfatïon des autres fubftances
que les fels, il y en a quelques-unes, comme celles
du fucre, qui ont lieu par le moyen de l’eau ; mais
la plupart des autres eft opérée, en chimie par le
refroidiffement modéré avec beaucoup de lenteur
& de précaution. C ’eft ainfi qu’on fait criftallifer
le foufreVlés métaux. On les fond dans un creufet,
on les retire du feu : lorfque leur furface eft figée,
on la perce avec une tringle de fer, on décante la
portion liquide , & la partie concrétée fur les
parois du vafe contient les criftaux qu'on a voulu
obtenir. Il faut quelquefois avoir recours, pour
réuffir, à plufieurs fufions & coulées fucceffives.
14. Il y a quelques matières qui fe criftallifent
par la fublimation lente ; tels font les métaux
volatils, quelques oxides métalliques, les acides
concrets & volatils du benjoin j de la noix de
galle , &c. Quelques fels ammoniacaux & métalliques
offrent le même phénomène.
i j . Il y a lieu de croire que la nature opère la
criflallifation des foffiles par l’ eau & par le feu. Le
tems & les maffes qu’elle ne compte pas, expliquent
le volume, la régularité, la tranfparence &
la dureté des criftaux naturels. On ignore comment
fe forment ceux des pier.es ou des compofés terreux
qui ne font pas folubles dans l’eau.
Le réfultat des belles recherches de M. Haüy
fur la formation des criftaux naturels & fur la
théorie de la crifiallifation doit trouver fa place
ici. Je choifirai, pour en rendre compte, l’extrait
qui en a été fait par un habile ingénieur des mines.
« Cette belle théorie , dit M. Tremery, repofe
toute entière fur un fait important, dont la côrl-
noiffance eft due à l’auteur. Le fait dont il s’agit
confifte en ce que ces petits folides , qui font
comme les élémens des criftaux, & que M. Haüy
appelle molécules intégrantes, ont, dans tous ceux
qui appartiennent à une même efpèce de.minerait
une forme invariable qui fubfifte, fans aucune altération
fenfible, indépendamment de toutes les
caufes qui peuvent faire varier les caractères ordinaires.
Ces mêmes molécules, Iorfqu’elles fe rapportent
à des efpèces différentes, ont auffi entre
elles des diverfités plus ou moins marquées, excepté
dans un petit nombre de cas où leurs formes
pnt des caractères de régularité, doù réfultent
comme des points de contact entre certaines
efpèces.
» Les molécules intégrantes, fuivant l’idée qu’on
peut s’en former, font les petits foiides que l’on
parviendroit à retirer d’un criftal en pouffant fa
divifion mécanique jufqu'à une limite, paffe laquelle
on ne pourroit plus continuer la divifion
fans analyfer en quelque forte ces petits folides,
c’eft-à-dire , fans féparer les molécules élémentaires
qui les compofent. Quoique les folides dont
il eft ici queftion foient imperceptibles à nos organes,
leur forme n’eft pas moins aflignable, parce
qu’elle eft repréfentée par ce lié des corps d’un
volume fenfible que l’on obtient à l’aide de la
divifion mécanique , & dont les faces font nécef-
fairement parallèles à celles des molécules intégrantes
qu’ils renferment.
. »Si l’ on ne favoit combien il y a de fimplicité
dans les moyens d’où dépendent en général les
opérations delà nature , on feroit étonné de celle
des formes fous lefquelles fe préfentent les molécules
intégrantes des minéraux. Ces formes , con-
fidérées dans tous les criftaux obfervés jufqu’ ici ,
fe réduifent à trois, qui font elles-mêmes les plus
fimples poflibles, c’eft-à-dire, au tétraèdre, au
prifme triangulaire & au parâllépipède j mais les
angles & les dimenfions refpeêtives de chacun
de ces folides varient d’une efpèce à l ’autre ,
ainfi que M. Haiiy l'a rigoureufement démontré
en combinant les réfultats du calcul avec ceux de
l’obfervation.
m D’après ce que nous venons de dire, il eft
facile de concevoir qu’il n’y avoit qu’une fuite
d’obfervations faites fur un grand nombre de
minéraux, & fécondées par l’ufage du calcul, qui
put démontrer l’invariabilité des molécules intégrantes
dans tous les corps d’une même efpèce,
& fervir à déterminer le nombre & les formes de
ces mêmes molécules dont l’exiftence avoit été
depuis long-tems comme entrevue par plufieurs
favans diftingués, & dont Marquer donne une
idée exa&e lorfque, dans fon excellent Dictionnaire
de chimie , il fait remarquer que , quoique
nous ne connoiflions point la figure des molécules
! primitives intégrantes d’aucun corps, on ne peut
douter néanmoins que ces molécules primitives
intégrantes des difrérens corps n'aient chacune
une figure confiante, toujours la même, & qui
leur eft propre.
>3 Si les formes des molécules intégrantes auxquelles
. l’auteur a été conduit, ne font pas celles
i des. vraies molécules employées par la nature,
elles
C R I
elles mérirent du moins d’autant mieux de les remplacer
dans nos conceptions, que c’eft avec une
auffi petite dépenfë de moyens, que nous parvenons
à établir une théorie qui embraffe tant de
réfultats divers. . ., ,
» Dans les premières applications de cette théorie,
M. Haiiy nes’étoit propoféque de lier les différentes
formes criftallmes , relatives à chaque
fubftance, foit eqtr’elles, foit avec leur forme
primitive commune, & de ramener à des lois fimples
& régulières cette multitude de rélultats de
la criftallifation, que l’on avoit regardés fi long-
tems comme de purs jeux de la nature î mais il
ne tarda pas à s’appercevoir que fa théorie avoit
encore l’avantage de pouvoir contribuer à la dif-
tinélion des efpèces minéralogiques, en indiquant
la réunion des corps qui avoient des molécules
intégrantes femblâbjes , & la Réparation de ceux
qui différoient par ce même élément. A cette oc-
cafionil publia us Mémoire intéreffant, où la ftruc-
ture eft confédérée comme caractère diftinêtif:
cette fîruélure, fuivant l'idée que l’auteur en
donne dans le même Mémoire, doit être regardée
comme un point fixe & invariable, relativement
à tous les corps d’une même efpèce, qui donnent
quelque prife pour le faifir & l’obferveri le nombre
& la difpofition des faces qui déterminent la
forme, les principes colorans & les différens mélanges
qui modifient les réfultats de l’analyfe chimique
5 tout le refte, en un mot, ofcille pour ainfi
dire autour de ce point fixe, en forte qu’il n’y a ,
relativement à la valeur des angles primitifs, aucune
gradation de nuances, tant que la fubftance
refte la même, & qu’ il y a un faut brufque dans
le paffage d’une fubftance à une autre.
33 L’expérience a démontré que, fans le caraêlère
qui fe tire de la ftruéture, il feroit fouvent im-
pofïible de rapporter au véritable type de l’efpèce
les variétés qui lui appartiennent.
33 Les changemens que M. Haüy a eu occafîon
de faire dans la claflification des minéraux, en
fuivant la marche favante qu’il s’eft tracée , méritent
d’autant plus de fixer l’attention , que très-
fouvent ils ont eu lieu avant que l’analyfe chimique
eût fait connoître la véritable nature des
fubftances qui en étoient l’objet. Le béril & l’émeraude,
par exemple, ont é té , dans la méthode
de l’auteur, réunis en une efpèce dans un tems
où F anal y f e , n’ayant pu trouver dans ces deux
fubftances les mêmes principes , ' tendoit à les
faire regarder comme effentiellement différentes.
Mv Vauquelin, en profitant à cet égard des réfultats
de la crifiallijation , parvint, à l’aide d’ un
nouveau travail, à retirer de l’émeraude la nouvelle
terre qu’il venoit de découvrir dans le bé^
ril, & de cette manière il confomma en quelque,
forte une réunion quiJ pour avoir été tardive ,
comme l’ajoute l’auteur , n’en eft que mieux cimentée.
9» Ce n’eft pas, au fur-plus, la première fois que
Ch im i e , Tome I V %
C R I 89
les chimiftes fe voient devancés dans leurs réfultats
par dés favans qui s’appliquent à des fciences
qui , au premier coup d’oeil, ne paroiflent avoir
aucun rapport avec, celles qu’ils cultivent particuliérement.
Newton, comme on fait, en cherchant
à déterminer les puiffances réfra&ives de
différens corps , avoit trouvé que le diamant
devoir être rangé parmi les matières combufti-
bles, & que l’eau renfermoic un principe inflammable.
33 La théorie de la ftruêlure des criftaux ayant,
par ces premiers réfultats , mérité dès fon origine
les fuffrages de plufieurs favans diftingués, parmi
lefquels fe trouvoit le célèbre Lavoifier, M. Haüy
conçut auffi tôt & exécura l’heure ufé idée de faire
intervenir dans la claflification des minéraux , le
caraélère qui fe tire de la ftruéture, & de faire
concourir vers un même but les fciences à l’aide
i defquelles la minéralogie peut fortir du cercle des
! phrafës purement defcriptives. De cette efpèce
; de fédération il eft réfulté, après un travail de
| quelques années,' un ouvrage entièrement neuf,
! qui auroit fans doute été du nombre de ceux qui
; font époque dans l’hiftoire des fciences fi l’auteur
l ne l’eût confervé manufcrit.
| 33 D’après le principe qu’une fcience fe compofe
nëceffairemént de toutes celles dont elle a befoin
pour approfondir fon fujet, l’auteur a affocié à la
minéralogie, non-feulement la géométrie, mais
.encore la chimie & la phyfique.
3> La première de ces deux fciences complète
en quelque forte la détermination des efpèces
, minéralogiques, en nous faifant connoître les molécules
principes dont les molécules intégrantes
font les affembiages : de là il eft aifé de fentir
combien il eft intéreffant que les recherches relatives
à ces deux fortes de molécules confpirent
vers un but commun, que le chimifte & le mi-
néralogifte s’éclairent mutuellement dans leurs travaux,
& que le géomètre qui fourbit des données
pour foumettre les formes criftal fines au calcul,
foit affocié à la balance, qui pèfe les produits de
l’analyfe.
33 Sans la chimie l’on ne pourroit rapporter les
êtres à leurs véritables caufes. On ignoreroit fi
un métal, fous l’apparence d’une fimple pierre,
ne cache pas une fubftance métallique ; ïgais fans
la minéralogie, aidée du caractère qui fe tire de
la flruéhire , les efpèces n’auroient aucune bafe
folide propre à fervir de point de ralliement aux
variétés qui les fous-divifent ; l’une, comme le
dit également M. Haüy, indique le premier anneau
de la chaîne, & marque le point où il doit
être attaché j mais l’intervention de l’autre eft né-
ceffaire pour continuer cette chaîne & en affortir
i ,les différens anneaux.
33 La phyfique à fon tour fournit au min éralogifte
des cara&èresdiftinêtifs, qu’il peut employer avec
avantage ; elle lui donne en quelque façon de nouveaux
organes pour pénétrer jufque dans les pro