
la chair par exemple, du blanc d'oeuf, du fan g
épaiffi , dans de l'acide fulfurique concentré, &
quand on laiffe fpontanémeut agir ces deux corps ,
on voit d’abord la matière animale fe colorer fuc-
ceffivement en fauve , en rouge, en brun & en
noir, fe ramollir, fe divifer-, fe tondre, former
une efpèce de pâte- Le mélange s'échauffe, il ne
fe dégage ri. n 5 & en l ’examinant quand l’aélion
eft terminée , on trouve l’acide fulfurique affoibli
par de l'eau qu'il ne contenoit pas d’abord } la
matière animale eft charbonée , & des molécules
ou glèbes graiffeufes s’en détachent. Si l'on ana-
lyfe l’acide fulfurique, on le trouve en partie fa-
turé d’ammoniaque & de foude. On reconnoit ainfi
qu'il a décompofé la fubftance animale, qu’il en"
a féparé de l’hydrogène & de l’oxigène , qui fe
font unis pour former l’eau néceffaire à fa fatura- .
don j qu’une autre portion a compofé de l’ammoniaque
, une troifième a paffé à l’état de graiffe ,
& une quatrième à celui de réfidii charboné.
- 57. En étendant enftiite l’acide d’une aflez
grande quantité d’eau, en le filtrant pour féparer,
la graifte 8c la matière cherbonée, & en anaîyfant
la liqueur filtrée, on y trouve du fuifate d’ammoniaque
, du fulfàte de foude, dufulfate de chaux,
& une quantité plus ou moins grande d’acidè-
acéteux qu'on peut obtenir par la diftillation.
Il eft donc prouvé par-là que l'acide fulfurique a
décompofé les fels de foude & de chaux contenus
dans la matière animale, qu'il l'a convertie en ammoniaque,
en acide acéteux, en eau, en corps
graifteux & en charbon. On trouve ici une analogie,
avec fon effet fur les fubftances'végétale s , décrit
dans la précédente fe&ion 5 & pour différences
bien remarquables la formation de l’ammoniaque,
celle de la graifte, & la produ&ion des fulfàtes de
foude & de chaux. Il feroit fuperflu d’expliquer
en détail les caufes de ces différences, puifque ce
qui a été dit juCqu'ici montre aftez qu’elles réfident
dans l’azote des matières animales , dans la proportion
plus grande de leur hydrogène , & dans
la préfence des fels phofohoiiques.
5 8 . S i, au lieu de laiffer agir fpontanément l’a- i
eide fulfurique furies fubftances animales, on aide I
fon a&ion par la chaleur, fon effét devient & plus i
rapide 8c plus profond. Ce n’eft plus feulement,
comme dans Je premier cas, la tendance de l’acide
à fe faturer d’ eau qui opère la décompofition de ces
fubftances , & qui met en jeu les attrapions compliquées^
propres à changer leur nature. Les principes
mêmes de l'acide fulfuriqué: tendent à fe fé-
parerî l’attraPion de l’hydrogène & du carbone
des matières animales pour l'oxigène de l’acide ,
croît par l’addition du calorique 5 un plus profond
changement aLerç leur nature & leur compofition.
Il n’y a plus de corps huileux formé, d’éau fim-
plement conftituée.pour la faturation de l’ acide
qui ne conferve plus fon caraPèie > la matière animale
approche beaucoup plus du dernier terme
fa décompofition. Auffi voit-on naître une effeiv
vefcence qui fe prolonge, fe dég'ager de l’acide
carbonique, du gaz acide fulfureux,du gaz hydrogène
fulfure & carboné. Il paffe beaucoup d’eau
en diftillation , car on doit taire l’expérience dans
un appareil diftiilatoire ; l’acide acéteux eft détruit j
on obtient du i'uifite d’ammoniaque, & la quantité
du réfidu charboneux eft moindre que dans le
premier cas.
59' L'acide nitrique le comporte tout autrement
avec les matières animales, parce qu’ il eft beaucoup
moins fort 8c moins permanent, comme acide,'
que le fulfurique ; parce que furtout il eft infiniment
plus décompofable & beaucoup plus oxigéné.
On avoit remarqué autrefois qu’il coloroit ces
fubftances en un jaune-citron,& qu’il ne lescharbo-
noit pas comme le précédent. Sa manière d’agir fur
les végétaux, expliquée aftez longuement dans un
des articles de la feétion qui les concerne, va me
fervir ici à rendre compte de celle qu’il exerce fur
.les matières animales: on y verra une action plus
compliquée j on y remarquera les importans résultats
que la dodrinepneumatique a permis d’en tirer..
Lorlque Bergman eut fait connoïtre la formation
de l ’acid; du fucre ou oxalique par l’acide nitrique,
M. Bertholiet trouva, en 1777, que la fo ie, la
laine, les mufcles, la peau, les tendons, les cheveux
, en fourniffoient plus que le fucre, & que
cette quantité alloit même quelquefois jufqu’à plus
déjà moitié de leur poids, tandis qu’ à peine pouvoir
on en obtenir un quart des matières végétales.
Il découvrit en même tems, & comme on voit,*
à une époque déjà très-éloignée ( il y a aujourd'hui
près de trente ans), qu’il fe féparoit une huile,
pendant la formation de l'acide oxalique, des /raa-
tières animales, & que cette huile donnoit de l'ammoniaque
à la diftillation. C'étoit déjà une différence
taillante obfervée dans l'action de l'acide nitrique
iur ces matières,
60. Huit ans après cette première découverte,
le meme favant en lit une autre bien plus importante
encore dans l'aâion de l'acide nitrique fur
les matières animales. Ayant vu qu'elles donnoient
par cet acide aflez- foible, & prefque fans l'addition
de la chaleur, une grande quantité de gaz
azote , il remarqua que cette propriété étoit dfic-
cord avec celle de donner de l'ammoniaque ; que
quand elles avoient perdu leur azote, elles fem-
bloient rétrograder vers l'état végétal ; que toutes
les fubftances qut fourniffoient de l'ammoniaque
exhaloient auflî du gaz azote par l'aôion de l'acide
nitrique; que dans cette atftion ilfe dégageoit après
ce gaz du gaz acide carbonique, du gaz nitreux;’
qu'alors l'acide oxalique fe formait, & la matière
graffe fe féparoit ; qu'en évaporant la liqueur jaune
mur en obtenir l'acide oxalique, il reftoit dans
'eau-mère du phofphate acid,e de chaux : il établit
amh une différence très-eflèntielle entre lès matières
végétales & les matières animales. J'ai examiné,
peu de tems après cettè découverte, toutes
les circonftançes du dégagement de l'azote deces
dernières
dernières matières; par l'acide nitrique ; j'ai prouvé
que cet acide n etoit pas décompofé tant que ce
dégagement durait, & qu'ainfi il étoit bien dû à
la matière animale ; que les fubftances gélatineufes
en fourniffoient moins que les albumineufes, &
celles-ci moins encore que les fibreufes ; que le gaz
azote, ainfi obtenu, avoit une odeur fade particu-
16re \ anal°gtie à celle des matières animales qui
commencent a fe gâter, à celle du mui iate d'am-
on.!atftle foblimë , de l'ammoniaque décompofée
par 1 acide muriatique oxigéné, Sec.; que fa proportion
fuivoit exactement celle de l'ammoniaque,
j,0110.®6 par chaque madère animale $ que loribu'on
avoit feparé d un compofé animal » celui-ci n’é-
oit plus putrefcible comme auparavant $ que ce gaz
etoit tres-déletére, qu’il paroiffoit avoir une in-
uence furla produétiondes maladies putrides chez
. hommes expofés à. fon aétion. Depuis ma pre-
mi,.re affertion on a effayé de faire un point de-
theone medicale de cet objet, & on en a confit
re e relultat par le nom de gar fepton. donné au
gaz azote. 1
61. En 1790, une autre découverte s'eft pré-
enree a moi dans la fuite de mes expériences relatives
a I aétion de l'acide nitrique fur les fubftances
anima es ; c eft la formation dè l'acide pruflique &
ion dégagement en vapeur, très-reconnoi(Table par
ion odeur apte d'amandes ariières : comme il en
fera queftion plus en détail dans le paragraphe X I,
je n en parle ici que pour compléter le tableau
des principaux effets de cet acide. On voit 9ue ces effets confident dans une coloration .en
jaune ou en rouge, dans le dégagement de l'azote
en gaz, dans la formation de l'acide pruflique, de
J acide oxalique, de l'acide carbonique & d'une
nf^t,er® gr:>fle, La différence d'avec celle de l'acide
fulfurique confiile dans la réparation del'azo-
te , la formation de plus d'huile épaiffê, de moins
d eau, 1 abfence de l'ammoniaque , la non précipi-
tation du carbone, la formation de l’acide oxalique;
elle dépend évidemment de la diffolubilité plus
grande de la matière animale dans cet acide , de fa
grande quantité d’oxigène, qui, fe portant fur les
principes de cette madère, en ifole & en brûle le
carbone, en emploie l’hydrogène avec une portion
de ce carbone même & de l’oxigène à la conftiru-
tion de 1 efpèce de graifte , &c.. Ces effets réunis
lont encore plus nombreux & plus difficiles à bien
expliquer que ceux qui font produits par l’acide
fulfurique , parce qu’il y a plus d’attra&ionsa.gif-
fant a la fois } ils font néanmoins très-propres à
faire connoïtre. la nature des fubftances animales
& a confirmer ce qui en a déjà été expofé.
k acide muriatique ne préfente rien de particulier
dans fon aélion fur les fubftances animales,
non plus que les acides phof|)horiques& les acides
végétaux >/eulement elle a un peu plus d’énergie
que celle de ces derniers. Ils d:ffo!vent tous la partie
fibreufe & mufculaire, la réduifent en une efpèce
de gelée ; ils finiffent par la décompoferSc en
Ch im ie , Tome
convertir une partie en ammoniaque qui les fa tare,
lis coagulent les liqueurs albumineufes, ramollif-
fent & décompofent en partie les o s , ainfi que îes
tendons ou les cartilages ils diflblvent auffi les
tiffus membraneux. On croit que cet effet arrive 5
pendant la vie, par l’abus des acides végétaux, do
l’acide acéteux & de l’acide nitrique , & que c'eft
pour cela que les perfonnes qui en prennent abondamment,
maigriffent, perdent même une portion
de leur torofité ou de l'épaiftsur de leurs mulcles.
Quant à l’acide muriatique oxigéné , fon action eft
d'une toute autre énergie fur ces matières. Au moment
même de fon connaît fur les liquides animaux,
il les épaiftit, les coagule, les condenfe en flocons,
en glèbes muqueufes, & confirme ainfi ce que j’ai
dit de la coagulation de cette humeur par l’union
ou la fixation de l'oxigène. Il durcit les folides,
les fait reflerrer & contracter, affoiblit leur couleur
fans la détruire, avive même celle de plufieurs.
On verra par la fuite, que fon énergie fur les humeurs
& les organes des.animaux vivans eft de nature
à répandre quelque jour fur leurs fondions &
fur la phyfiologie.
§. V I I I . Des c ara Hères des matières animales , tirées
| de leur altérabilité par les alcalis.
65.11 y a long-tems que les chimiftes ont obfervé
’ LaCtion violente 4es alcalis cauftiques furies madères
animales ; mais ne connoiflant alors ni l’état
pur des alcalis, ni la nature intime des compofés
organiques, ils, n’ont pu ni expliquer cette aCtion,
ni s’en fervir pour concevoir la compofition deces
madères. C ’étoit un fait qu’ils avoient vu fans pouvoir
en tirer des conféquences utiles à l’avancement
de la fcience, & ils s’étoient contentés d’en
faire quelques applications avantageufes à plufieurs
procédés des arts, tels que l’emploi des alcalis fixes
rendus cauftiques par la chaux, pour ouvrir des
cautères, pour enlever des tumeurs indolentes &
graiffeufes, pour dégraiffer les laines, &c. Ce
n’eft que depuis là naiffance de la doCtrine pneumatique
que l’on a commencé à connoïtre i’aCtion
des cauftiques alcalins fur les madères animales, 8c
à s’en fervir pour déterminer leur nature.
(34. On a d’abord remarqué que ces réaCtifs agif-
foient d’une manière beaucoup plus forte fur les
fubftances animales que fur les végétales , & que
tandis qu’ils ne diffolvoient que lentement & difficilement
celles-ci, ils ramollifforent promptement
8c fondoient rapidement les premières j auffi s’ap-
perçut-on que tous les tiffus animaux, traités par
des leffives d’alcalis cauftiques, perdoient de leur
force & de leur poids, tandis que ceux de filamens
végétaux n'en étoient que peu altérés. C ’eft à cette
aélion qu’il faut rapporter l’efpèce de taèt gras &
oh&ueux que font éprouver les leffives cauftiques
qu^nd on les frotte entre les doigts : phénomène
qui a fait donner le nom d'huile de tartre à la diffo-
ludon concentrée delapotaffe. Cette diffolubilité
T t t t