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» Il réfulce de cette différence de préparation,
ou peut-être auflî d'une variété dans la plante ,
.que l’on doit diftinguer deux efpèces de garance ,
qui diffèrent par leurs propriétés tinéforialès.
” ka première , qui eft cultivée à Smyrne, dans 1 île de Chypre & dans le Levant, eft connue fous
-le nom de li^ari : la culture s'en eft établie dans
-nos départemens méridionaux, & elle n’y eft point
inférieure. Nous allons donner un précis de la préparation
qu’on lui fait fubir dans nos départemens
méridionaux, d’après des notes que nous devons
a M. Chaptal} nous parlerons enfuite de la préparation
de la garance ordinaire.
» On fèche les racines à l’air, fur un fol pavé
-ou fur une claie } on les remue avec une fourche,
& on les bat légèrement pour en réparer l’épiderme
& la terre. Ce qui refte fur le fol, compofé
de terre, d’épiderme & de menues racines, eft
criblé, & ce qui eft retenu fur le crible forme ce
qu on appelle billon 3 garance commune, qui n’eft
propre qu’ainc couleurs obfcures. Les racines de
garance air.fi épluchées, font broyées, foit fous une
meule de pierre , foit fous des couteaux fembla-
bles a ceux des moulins à tan : on fépare , au moyen
du van ou bluteau, après une première mouture,
la. garance appelée non-robée , & qui eft compofée
d’un refte de terre, d’épiderme & d’écorce. Après
une fécondé mouture , ce qu’on fépare eft appelé
garance mi-robée. Enfin , après une troifiènie mouture,
on a h garance robéej c’eft la meilleure qualité.
La mi-robée eft cependant préférable lorfqu’elle
provient de racines un peu groffes. Lorfqu’on moût
pour fon ufage, on ne fait qu’une qualité j ou, fi
l ’on veut avoir.une couleur très-brillante, ôn fépare
la plus mauvaife qualité par une première
mouture, & l’on emploie le produit de la fécondé,
connue dans le Midi fou* le nom de grappier.
*> Les racines de bonne qualité font de groffeur
médiocre, peu rameufes, & leur caffure eft d’un
jaune-rougeâtre v i f } celles qui font ridées par
fuite du defféchement, ne font point bonnes. —
Pour que la garance foit convenablement nourrie,
il faut qu’elle ait atteint fa troifième année, &
qu’on l’arrache dans la quatrième.
*> La préparation des garances fe fait, dans les
départemens du Rhin , par des opérations plus
nombreufes.
» On fèche lès racines dans une étuve échauffée
au moyen d’un fourneau, & dans laquelle on ne
donne iffue a 1 air que par intervalle, au moment
où l’on croit lair faturé d’humidité. Le fourneau
occupe une grande partie du fol : au deffus font
.trois étages à claire voie, fur lesquels on difpofe
les racines par couches d’environ deux décimètres
d’épaiffeur. Au bout de vingt-quatre heures , celles
qui fe trouvent fur le premier fol, diredement au
defius du four, font fèches : on les retire, on lés
remplace par celles des étages fupérieurs : cette
.manoeuvre fe répète toutes les fois que les racines
qui font au deffus du four font fèches. Les racines *
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fèches font battues au fléau, puis paffées à un
taiard femblable à celui qu’on emploie pour le
blé} enfuite on les paffe dans un crible très-grof-
fier. Ce qui pafle eft encore battu ,ralardé & criblé
à un crible plus fin que le premier. On répète
cinq fois ces opérations, en paffant fucceflivement
a des cribles de plus en plus fins , & mettant chaque
fois à part ce qui refte fur. le crible. Ce qui
pafle à travers le cinquième eft rejeté comme fable
& pouflière. Après ces opérations on vanne avec
des vans ordinaires toutes les racines qui font ref-
tées fur les cribles, & des femmes en réparent toutes
les fubftances étrangères qui ne l’ont point été
jufque-là. Pour divifer enfuite les racines en différentes
qualités, on fefert de tamis faits en laiton
, & dont les réfeaux ont de fix à trois millimètres
de grandeur. On rejette ce qui pafle à travers
le plus fin, & l’on regarde comme de meilleure
qualité ce qui a été féparé par le plus gros
tamis. Ces racines ainfi féparées font portées dans
une étuve d’une conftruétion un peu différente de
celle de la première. On les étend par lits d’environ
un décimètre, fur de grands châftis garnis
en treillis : on reconnoît que la defliccation eft
complète lorfqn’en en prenant une poignée. & la
ferrant dans la main, les racines fe brifent facilement.
Lorfqu’on fort la garance de cette étuve , on
la porte encore chaude dans une machine ou-elle
eft râpée : on fépare par un crible la partie de
1 écorce réduite en poudre} on répète cette opération
trois.ou quatre fois, puis on pafle à un bluteau.
Ce qui pafle par l’étamine ou les fils de laiton
du bluteau eft regardé comme garance commune,
& ce qui fort par l’extrémité du bluteau eft
appelé la fleur ; enfin , ce qui fort du bluteau eft
broyé dans un moulin à meules verticales, puis
pafle à travers des tamis de diverfes groffeurs : ce
qui refte deflus eft toujours fupérieur à ce qui
pafle. • .
” La garance d’Alface eft réduite en poudre extrêmement
fine , & on en extrait la matière colo-r
rante par une ébullition beaucoup moins longue
que celle qui eft néceflaire pour le lizari. On.doit
preferver avec foin de 1 humidité les garances prér
parées, parce qu’elles s’en imprègnent facilement,
& qu’alors la fermentation altère leur couleur.
»MM. Dambourney & Beckman ont prétendu
qu’il étoit plus avantageux d’employer la racine
fraîche de la garance, qüe lorfqu’elle a été foumife
à la defliccation, furtout par le moyen des étuves,
mais dans 1 état de fraîcheur ,.fon volume devient
embarraffant dans le bain de teinture, &.une ob-
fervation confiante paroît prouver qu’elle s’améliore
par la vétufté. D’ailleurs, il faut qu’elle puiffe
être confervée, & d’un tranfport facile.
» Le célèbre Watt a fait fur, une garance de Zélande,
bien choifie, des expériences propres à
faire connoître les propriétés de Tes parties colorantes.
Nous allons les rapporter,
fe; a- Cette garance eft d’une couleur, orangée,
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tirant fur le brun , en poudre groflièré un peu cohérente
} elle attire- l’humidité, & dans cet état
elle perd fes propriétés, de manière qu’enfin elle
ne peut fervir à. la tèinture.
■ . b. Elle donne avec l’eau une infufion de couleur
orangée , tirant fur le brun : il faut.beaucoup
d’eau pour en extraire la partie colorante. Margraff
prefçrit trois lflre$ d’eau pour fix grammes de garance.
L’eau en extrait les parties colorantes, foit
à chaud, foit à froid} mais elle paroît donner une
couleur plus belle à froid : fa décoétion eft plus
brune.
. » c. Lorfque Tinfufion ou la décoétion eft lentement
évaporée dans un vaiffeau ouvert, il Te forme
à fa furface une membrane qui tombe peu à peu
au fond du vafe j» après cela,il fe forme encore de
nouvelles membranes, qift feTuccèdent jufquala
fin dé l'évaporation.\ g
» d. L’extrait ainfi formé eft d’un brun fombre;
il ne fe diffout qu’en partie dans l’eau , à laquelle
il communique une couleur qui tire légèrement
fur le brun.
» e. L’infufion, mifè à digérer pendant quelques
jours dans un vaiffeau qui doit être élevé,, pour
que la liqueur qui eft réduite en vapeur puifle retomber,
& dont l’extrémité être ouverte,
laiffe dépo.fer des pellicules d’un brun-foncé : la
liqueur refte légèrement brune, & les pellicules
fe diffolvent difficilement dans l’eau.
» ƒ. L’alun forme dans Tinfufion (b ) un précipité
d’un rouge brun-foncé, compofé, de pellicules,
& la liqùeur qui fumage eft d'un.jaune tirant
fur le brun.
J m g- Les carbonates alcalins précipitent de cette
dernièrediqueur une laque d’un rouge de fang, dont;
la couleur a plus ou moins d’intenfité, félon la quantité
d’alun qui y avoit été diffoute. On peut obtenir
de cette manière une laque d’un rouge de fang 5
mais tous les moyen’s connus jufqu’à préfent n’ont, j
pu lui donner;le brillant de la laque de cochenille^:
elle eft ttanfparente flans l’huile , mais dans l’eau
elle eft opaque & fans beauté.
» h. Si l’on emploie une furabojadanqe d’alcali,
le précipité fe, rediffout, & la liqueur devient
rouge.
_ » i. L’alcali minéral ne, précipite pas une laque
d’une fi belle couleur que la potaffe.
. » k. La. terre cal ça ire précipite une laque d’une
couleur plus, fombre 8>f plus brune que les alcalis,
particuliérement fi elle,forme de l'eau de chaux.
» 1. Si l’on ajoute quelques gouttes .d’klcali à ;
l’eau dont on fe fert; pour faire Tinfufion:.(^),
cette infufion extrait beaucoup de parties colorantes
d’un rouge-foncé | tirant fur le brun.
^ » i°. L’alun.précipite de cette infufion une flaque
d’un brun-foncé ;
* » 2°. Les acides qu ori y ajoute en* petite quan-'
tit^.la fpnt tirer fur le. jaune, &,en plgs grancle
Quantité j ils la rendent cfun jauné-biun , mais ils,
n’en précipitent rien 5 : •
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| *’ 3** Cette infufion étant évaporée jufqu’à defficcacion,
forme un extrait gommeux qui fe diflout
facilement dans l’eau.
/ Si l'on fait l’infufion (A) dans une eau très-
légér.e/nent acidulée par un acide minerai, eüe’eft
jaurfltre.
. M i.°. Si l’on fait une longue digeftion, cette
liqueur devient d’un brun-verdâtre, & le jaune
en paroît détruit}
» 2°. L’addition d’un alcali rétablit la couleur
rouge, & l’infufion donne alors, par l’évaporation,
un extrait qui fe diffout facilement dans
Teau.
» rc. Si l ’on met du carbonate de magnéfie dans
Teau dont on fe fert pour faire Tinfufion (£), cette
infufion eft d’un rouge clair de fang, & , en l'évaporant
elle forme un extrait d’un rouge-foncé,
qui fe diffout facilement dans l’eau.
» r°. La folution de cet extrait étant employée
comme une encre rouge, & étant expofée à la lumière
du foleil, elle devient jaune j
» 20. L’ alun précipite de cette infufion une petite
qtjantité d’une laque mal colorée 5
; $°* Tes alcalis lui donnent une couleur plus
rouge & plus fixe.
' » o. L’infuûon faite dans une diffolution d’alun
eft d’un jaune-orangé.
” ,1°. Cette infufion étant précipitée par un al-
i cali, donne une laque femblable à (ƒ ) , mais dont
la couleur n’eft pas fi bonne.
v ” Une folution d’acétate de plomb, ajoutée
à Tinfufion ( b ) , forme un précipité d’un rouge-
brunâtre.
» i° . Une folution de mercure dans l’acide nitrique
, un précipité d’un brun-pourpré; .
» 2°. Une folution de fulfate de fer, un précipité
d'un beau brun v i f ; ,
» $Q. La folution de fulfate de zinc n’a pas été
! éprouvée;
» 40. Une folution de fulfate de manganèfe a
fait un précipité brun-pourpré ;
M 5°; Une diffolution d’étain dans l’acide nitro-
tnuriatique n’a pas été éprouvée. -
; | î . Li’infufîon ( f ) ayant été mêlée toute chaude
avec Tinfufion de cochenille, il s’eft formé un
précipité rouge-brunâtre, tirant fur le pourpre-
‘ foncé , qui ne fe diffolvoit pas facilement dans
(’eau.: en.continuant. la digeftion , il s’eft formé
une plus grande quantité de ce précipité,
j l lp f f i m échantillon trempe dans la préparation,
des imprimeurs en toiles, ayant été teint dans
ce mélange, il prit , une couleur rouge-brunâtre,
& , après avoir bouilli dans une folution defavon *
fa couleur fe trouva affez bonne ;
;5? 20.,La folution de favon devint très-rouge,
qiais elfè ne doniia au papier qu’ une couleur très-
médiocre..
Un peintje’qui cherche à rendre Ies.connoif-
fances phyfiques'utiles à fon art, Mérimé, a fait
Tuj; la garance, des. expériences intéreffantes, dont