
& fur le p-oiib n-américalu-, qui eft encore plus puif-
fent que le premier, & apres avoir vu que ni l'un
ni l’ancre de ces deux pollens n'ont aucune aétion
fur les nerfs quand on les y applique immédiatement
, pendant q;V introduits dans le fang
ils tuent à l’iiiftant- les animaux les plus forts,
rien n’étoit plus naturel que d'inférer que le poi-
fon du Laurier-cerife , lequel eft innocent lorf-
qu'on l’applique comme les autres fur les nerfs,
doit tuer auflî lorfqu’il eft introduit dans le fang,
& cependant la chofe eft tout-a-fait différente,
tant il eft vr.ti qu'il faut fè défier de [ analogie,
lors même qu'elle paroït le plus uniforme.
« J'ai introduit de l'eau de laurier-cerifedans là
jugulaire d'un gros lapin. La première fois j'y en
ai introduit cinq à fîx gouttes de la même manière
que j'avois introduit le venin de 1a vipère & le
poifon-américain : l’animal n-a- donné aucun fig-në
de douleur. J'ai cru avoir mal opéré > j’ai cru savoir
rien introduit dans les vaifleauxj je me fuis
imaginé que la feringue s'étoit infinuée dans le
riffu cellulaire. J’ai répété cette expérience ; j’ai
introduit dè nouveau dans la jugulaire une quantité
de poifon, peut être trois à quatre fois plus grande.
Avant d'introduire le poifon , je me fuis afiuré que-
le bouc de ma feringue enrroic dans la jugulaire ,
& que le poifon ne pouvoit en aucune façon retourner
en; arrière ; mais l'animal n’a pas paru fout-
£lir pour cela, & il étoit àprès-aufti vif qu’aupa-
ravant. J’étois plutôt émerveillé que- fatisfait de
tout ce que j.ï voyois. Je ne pouvois- pas me per-
iirader que i'eau delaurier-cnifene fût pas un poifon
même un poifon très-violent au moment
ou il étoit introduit daiîs le fang, tandis qu’il étoit
fans aétion lorfqu'on l’appliquoit fur les nerfs.
Je revins dons, aux expériences, j introduifis d
cette fois dans la jugulaire une cuillerée à café
foute entière d'eau de laurier-cerife-. L'animal n'éprouva
rien, & demeura auflî l’ain qu'auparavant.
Je répétai cette expérience-fur un autre lapin : le
poifon in-roduit dans la jugulaire àllo-ità une-bonne
cuillerée à café. Le lapin ne donna aucun ligne de
fou France3 ni alors-; ni dans-la- fuite.
» Le réfultat inattendu de ces- expériences me-
jette dans la-plus grande incertitude relativement
à l'aétiôn de ce poifon , & je ne puis concevoir
non-feulement de quelle manière il opè^e-, mais
même-fur quelles parties- il agit quand -il eft; pris
intérieurement ou appliqué aux bîeffures. Ici
tout fe confond. L’on ne voit pas qu’il a-gifie fur
lis nerfs j il n’a aucune aéfcion fur le-fan g-, & cep en- ;
dant ilftue, Ôc tue'à l’in liant s'il s'introduit par la
gueule dans l’eftomae. La mort peut donc s'introduire
dans les animaux par une autre'rotité que-par
celles du fang-& des nerfs. Le mouvement-perdu j
en-peu-fécondés dans des animaux*, comme les :
anguilles f qui continuent- à- fe-mou voir-dès heures -
entières après q-ù-'6;n leur‘à cou'pé la- rêve, St- qu’on*: (
les a, mïfê-s en pièces*, ternit-croire que ce poifôn I
«ttfedle- l'irritabilité de- la fibre nvufeulalre. IbeftJ|
j vrai que le coeur continue encore à fe mouvoir
dans ces animaux, mais fon mouvement eft très-
diminué & de très- courte durée. Dans les animaux
à fang chaud qui meurent de ce poifon, le mouvement
fubfifte encore dans les autres mufcles ,
quoique t-rès-foi-biement, & fi le coeur dans çcs
«animaux continue à battre pendant quelquete ms,
if bat moins fortement que quand on les fait mourir
d'une autre1 manière. L’irritabilité'eft certainement
diminuée au dernier point dans beaucoup
d'animaux , & dans-beaucoup d’autres elle elt entièrement
détruite , de quelque manière qu’elle
puifte contribuer à la mort & tirer en fi peu de
te ms, & quelqu’obfcur que puiffe être leméca-
nifme par lequel la fibre mufculaire perd fon irri-
t ibilité.
*> 11 faut avouer notre ignorance dans les recherches
de la nature. Quand nous croyons avoir tout
: fait*, nous nous trouvons fouvent revenus au point
d'où nous étions partis. L'expérience eft le ft-ul
guide que nous ayions dans nos recherches ; l'expérience
, il eft vrai, eft un moyen fûr pour ne pas
tomber dans l’erreur ; mais- l’expérience ne nous
; approche pas toujours des vérités les plus éloi-
| gnées » elle ne nous fait pas toujours avancer vers
j la connoifta-nce des fecrets de la nature, & ne nous
I mène pas toujours où nous nous étions propôfés
| d'aller.
| » Mais fi nous ignorons comment opère l'eatt de
- laurier-cerife, & fur quelles parties ce poifon exerce
I fon aéiion quand il tue les animaux , nous favot s
i néanmoins que lorfqu'il eft appliqué immédiate-
i ment aux nerfs, même à leur pirtiemédullaire,
j il eft tout-à-fait innocent ; & tout- ce quêtantd’ex-
jpériences rapportées jufqu’ici nous ont clairement
j démontré, n'eft pas moins, vrai: favoir, que le
j venin de la vipère & le poifon-américain ne font
1 point meurtriers , de quelque manière qu’on les
j applique aux nerfs, mais qu’ils le font toujours-
jlorfqu’ils* font introduits dans-le fang. Ce font là:
jdes faits qu’on ignoroit auparavant. C e font des
-, vérités-maintenanc dévoilées , Se qui que-ce fort ne
; peut les révoquer en doute: Ces faits détruifent'
I tous les fyftèmes inventés par les écrivains fur
l l ’aélion de ces-poifons , & c'eft de ces faits que
.nous*devons partir pour l'intelligence de ces poi-
:fèbs*& de leur aétion.
j |f J:’aurois- probablement pu obtenir quelque
lumière fur l’aétian du-poifon de laurier-cerife*, fi
je i-etilïè'r appli qué à - di fféreri tes parties' du cerveau
dfms l’animal vivant; maisjeme réferve’de le faire
quand-j’aurai -pour cela plus de commodités-que je
n-en ai ma in tenant-: ce fera- pour lors, j’efpère,,
que-ce-poifon- pourra facilement me préfenter des
faits nouveaux-& plus interelfâns. H me donnera
peut-être dés lumières' moins équivoques fur fon
i cri en , me fera:juger fur quelles^parties de' l’animal^
vi v afit ■ i 1 ag i f q u a nd-!,i 1 ctièi
' >*:Jerï»e référve d'examiner dans cette"même'
oedafion-fi ce poifon agit fur les-vaifleaux lymphatiquçs
ou, pour mieux dire, fur la lymphe même.
C’eft là un fimple foupçon qui m’elt venu après
que j’ai eu fait mes expériences fur l’eau de laurier-
cerife, & les eirconftances où je me trouve, ne me
permettent pas de l’examiner actuellement. Mes
expériences fur ce poifon fe trouvent par confé-
quent moins complètes que je ne l’aurois defiré. Il
falloic les multiplier & lés fui vre plus que je ne l’ai
fait, ou pour mieux dire, que je ne l’ai pu faire,
& c’eft là précifément une raifon de plus pour que
je continue mes recherches fur cette matière, qui
ne laide pas d’être intéreffante.
» Peu de tems après mon retour à Florence, en
1780, j'eus occafion d’examiner de nouveau les
effets de l'cfprit de laurier-cerife fur différens animaux
J'ai cru devoir étendre à cet égard mes expériences
fur ce poifon , plus que je ne l’avois fait en
Angleterre, & mes travaux n'ont pas été tout-à-
fait fans fuccès. J'ai pu du moins établir des vérités
que j'ignorois auparavant, & j’ai exclu beaucoup
d'hypothèfés inutiles ou faufles, qui auroient
pu retarder les recherches de ceux qui voudront
travailler dans la fuite fur cette matière ; j’avois
très bien obfervé jufqu'alors qu'en diftillant les
feuilles de laurier-cerife fans eau, l'on obtenoitun
efprit capable de tuer les animaux en peu d'inftans,
quoiqu'il ne leur fût adminiftré qu'à petite dofe.
J’avois aufii obfetvé que fi l’on mettoit de l'eau
avec les feuilles, l'efprit pouvoit devenif tout-à-
fait innocent, & ne confer-ver qu'un goût agréa^-
ble » mais j’ignorois fi l’huile effentiellej qu’on retire
du. laurier-cerife par la diftillation., étoit-. entièrement
innocente, ou fi c’étoit un poifon; & fi,
fuppofé qu'elle fût nuifible, elle l’étok encore plus
que l'efprit. Ainfi, j'ignorois fi 1’efprit était meurtrier,
en tant qu'il tenoit en difiolution plus ou
moins de cette huile : c'écoic faute d’expériences-
ue j’ignorois toutes ces. circonlbmces& beaucoup
'autres que les auteurs qui ont écrit fur les -poi-
fons n'avoient pas examinées.. Aucun d’eux, que
jè fâche, n'avoir fait d’expériences fur l’huile em-
pyreumatique, & fur la partie extraélive du/^-
ner-cerife. Enfin, je n’avois aucune notion fur tout
cela, & je ne trouvois aucun écrivain qui eût fait
des expériences directes fur la plupart de ces points*
qui cependant me paroiffoient néceflaires pour bien
connoître la nature & les qualités d’un poifon
auffi fîn-guliex &r aufli aéfif.
M Pour procéder avec clarté, je donnerai en !
peu de mots le détail des divers produits que. j'ai
retirés du laurier-cerife& de la méthode que j'ai
fuiv;ie pour cet effet. En diftillant de la manière
ordinaire les feuilles du laurier-cerife dans des
Vraiffeaux de verre , fans y ajouter de l'eau, j’ai
obtenu leur partie fpiritueufe ( c’eft ce que les chi-
miftes appel le nç Y efprit redkeur )» Cet efprit étoit
tçanfparent,. odorant, piquant au goûc, & dans Je
fond du récipient il y avoit une certaine quantité
d, huile pefante , colorée., odorante, d'une faveur
amère, très-mordante & brûlante,, que je-féparai
avec beaucoup d'attention de l’efprit même,
moyennant un repos de plufieurs jours. J’employai
auffi l’efprit trouble & non entièrement privé
d'huile. J'appellerai cette huile, huile de la premiers
difiillation, & l'efprit, efprit de première difiilla-
non.?
■> Je pris une portion de l'efprit de la première
diftillation, & je le diftillai de nouveau, de manière
qu'il en refta environ le tiers dans la cornue.
Là partie d-i fi filée étoit tranfparente , odorante ,
: piquante , amère & brûlante à un plus haut degré
que l'efprit de la première difiillation. Étant reftéê
en repos dans une bouteille, elle dépofaüne huilé
! très-aiaphane, odorante, brûlante, & très-fem-
blable, par fes cara&ères extérieurs, à l'huile de
la première difiillation. J’appellerai cette féconde
huilé, huile de la fécondé drfiliation, & l’efprit qui
étoit forti, efprit de la fécondé dif iliation. Le rîfidii
qui étoit relié dans la cornue s'appellera réfidu en
flegme de la fécondé diflillaiion.lt préparai un autre
phlegme enlai (Tant évaporer au foleii deux tiers
de l’efprit de la fc-eonde diftillation.
: » J'unis à une portion de l'efprit de la fécondé
- diltill «ition, une égale quantité de fel-marin décrépité
& bien deftéché ; je diftillai ce mélange à un
feu lent, & j'en retirai la moitié , qui fut teinte
de la couleur de l’huile commune& qui étoit
moins fpiritueufe, moins mordante., moins odorante;
qu'au,pàravant ; & il s'en précipita une fubf-
tance huileUjfe colorée, qui paroilfoit comme ter-
reufe , & divifée en petits grains ou globules. Je
. continuai la diftillation , & il forti t un flegme ino-
; dore, qui n’étoit pas fenfibîement mordant, ou
, qui du moins l’écoit très-peu, quoiqu’on en mît
fur la langue ou autour du nez , & je l'appellerai
.plilegme de la troifieme difiliation. L’huile dont je
i viens de parler fêta appelée huile de la troifieme dij-
| dilution, & fa partie fpiritueufe,. fortie la première',
; s appellera efprit de la troifieme diftillation. Tant
■ l'huile que l'efprit ont l"odeur des amandes a mère s.
[ ” Jê tirai pareillement la partie extractive des
[ feuilles de laurier-cerife, füiva’nt les méthodes connues
des cfemiftes, & je préparai auffi une bonne
quantité d1 huile empyreumatiqite avec de nouvelles
[feuilles de laurier-cerife. À près m'être fourni de
toutes ces préparations, j'ai cru pouvoir commencer
mes recherches fur les animaux. J'ai employé
pour ces expériences, les lapins, les cochons d'Inde,
les pigeons * les grenouilles & des couleuvres. J’ai
cru devoir opérer fur des animaux de différente
nature, tant à fang .chaud qu’à fang froid, parce
que je fayois par expérience combien l’aftion des
venins varie d'ans les différens animaux, & furtout
dans les deux, grandes families dans lefquelles l’économie
des divers mouvemens eft fi différente. *
Efprit de laurier-cerife de la première difiillation±
donne intérieurement.
33 Je îai-fTai- en repos cet efprit pendant plufieurs