
ques, parce qu’enfin, outre !es généralités, de
nouveaux détails ont été expofés à l’hiftoire de
chaque matière animale en particulier.
n o . Quoique l’abfence de la vie ait déjà été
annoncée au moins comme une condition effen-
tielle de la putréfaction, parce que l’énergie & la.
puiffance du principe vital s’oppofe en effet à ce
mouvement, on n’en admet l’exiftenee que lorfoue
cette énergie s’affoiblit, & dans quelques cas particuliers.
La mort n’eft pas la feule condition néceffaire
de la putridité 5 il faut encore la réunion de plusieurs
autres circonftances fans lefquelles elle n’au-
roit pas lieu. On peut les réduire à l’humidité &
à la chaleur modérée. Il eft prouvé, par un grand
nombre de faits , que les matières animales fèches
ne fe pourriflént point 5 les o s , les viandes Léchées
, les préparations anatomiques defféchées,
fe confervent fans altération ; les os ramollis par
l ’eau, les chairs molles, & furtout les liquides
animaux, paffent, au contraire, rapidement à la
putréfaction : elle fuit même principalement la
raifon de la quantité d’eau qui exifte dans las fubf-
tances animales. Il n’eft pas moins reconnu qu’il
n’y a nuile putrefcence à la température de la glace
& au deffous ; mais que l’altération feptique commence
à fix ou huit degrés au deffus, & fuit une
progreflion d’autant plus rapide , que la température
des matières-qui l’éprouvent, s’élève davantage.
Cette condition a cependant des bornes .‘ la
chaleur , voifine de l’ébullition, & celle même
qui paffe 4 ƒ à 50 degrés à la graduation de Réau-
mur, ne permet pas plus la putréfaction, que le
froid j elle défend même les fubftances animales
de ce mouvement, parce quelle tend , foit à la.
deffécher, foit à en condenfer le tiffu ou 3 en
congeler la maffe, foit à les décompofer par un
autre mode. La proportion des élémens. qui agif-
fent ici comme conditions de la putréfaction, y
apporte quelques modifications. L’eau l’accélère
par la quantité $ l’abondance du calorique joint
quelquefois les effets de la volatilifation partielle
à ceux de la décompofition putride. On a cru long-
tems que le contaCt de l’air étoit néceffaire à. la
putréfaction $ mais il eft certain qu’ayant lieu dans
le vide, & dans de petites proportions d’air non
renouvelé , le contaCt de celui-ci n’eft qu’un accident
qui hâte la putrefcence, non pas en influant
par lui-même fur la fubftance animale, mais feulement
en fe fervant de récipient pour diffoudre
& emporter les matériaux qui s ’élèvent en vapeur.
C'eft à la même claffe qu’il faut rapporter la diminution
de preffion, que quelques auteurs ont regardée
comme une des caufés de la putréfaCtion.
On ne doit point oublier, parmi les conditions de
la putréfaction, le mélange des matières fermentées,
& furtout de celles pourries avec les matières.
fraîches } ce-ferment agit, foulève la malle
accélère S: développe le mouvement putréfa&if.
i.i.i . Quand.les.conditions. de la gutréfaôion,.
favoir 3 une fubftance animale privée de la vie,
humeCtée & expo fée à une température au delfus
de dix degrés, fe trouvent réunies, ce mouvement
s’établit j la fubftance animale fe 1 amollit fi
elle étoit folide, devient plus tenue fi c’eft un
liquide} fa couleur change, & tire plus ou moins
vers le rouge^brun ou le vert-foncé} fon odeur
s’altère, & , après avoir été d’abord fade & défa-
gréable , elle devient fétide &: infupportable. Une
odeur ammoniacale fe mêle bientôt à la première,
& lui ôte une partie de fa fétidité : celle-ci n’eft
que temporaire, tandis que l’odeur putride exif-
tant avant elle, refte encore après, & fubfifte pendant
toutes lés phafes de la putréfaction. Les liquides
fe troublent & fe rempliffent de flocons}
les parties molles fe fondent en une efpèce de
gplée ou de putrilage} on obferve un mouvement
lent, un bourfouflement léger qui foulève la maffe,
& qui eft dû à des bulles de fluides élaftiques ,
dégagées lentement & en petite quantité à la fois.
Outre le ramolliffement général de la fubftance
animale folide, il s’en écoule une férofité de
diverfe couleur qui va en augmentant. Peu à peu
toute la matière fe fend ; ce léger bourfouflement
ceffe j la matière s’affaiffe} la couleur fe foncé } à
la fin l'odeur devient fouvent comme aromatique,
& fe rapproche même de celle qu’on nomme am-
brofiaque; enfin, la fubftance animale diminue de
maffe, fes élémens s’évaporent & fe diffolvent, &
il ne refte qu’une forte de terre graffe, vifqueufe ,
encore fétide..
La durée de cette décompofition putride, quoique
variée, préfente quatre tems bien diftinCts que
Boiffieu a diftingués avec foin : le premier, ou
celui de la tendance à la putréfaction, n’offre qu’une
altération légère encore j il ne préfente que
l’odeur de relent 3 le ramolliffement & la couleur
un peu changée }; le fécond , ou la putréfaCtion^
Commençante , donne quelquefois des lignes d’acidité
: le ramolliffement eft plus grand } la férofit#
commence à s’échapper des fibr’eS relâchées } leur
couleur eft plus altérée, & rôdeur fétide déjà
putride. Dans le troifième degré de la putréfaction
avancée y. l’odeur toujours fétide eft plus ou moins
ammoniacale} la matière diffoute en putrilage eft
très-foncée en couleur} elle a perdu beaucoup de
fon poids par le dégagement d’une grande quantité
de principes volatils. Le dernier degré , ou la putréfaction
achevée, ne montre plus d’odeur ammoniacale
}. la fétide eft fupportable, jfoible ou nulle},
une odeur aromatique la remplace fouvent} la
matière animale, a perdu une grande partie de fon
volume & toute apparence d’organifation} il ne
refte plus qu’un réfidu terreux , brun-noirâtre
gras fous le doigt, & qu’on nomme dans eet état
terreau animal'.
112.. Ces phénomènes varient'fuivant les diverfes
matières animales : leur différence de- nature & la
proportion différente de leurs principes en font la
fource.. On peut même dire que-chaque fubftance.
animale a fa manière particulière de fe comporter
en fe pourriffant : de là toutes les fçènes fi variées ,
fi diverfifiées , qui ont été-décrites par les différens
auteurs, & dont on trouve une expofition fidèle ,
foit dans le fingulier ouvrage du médecin Garman,
intitulé De miraculis mortuorum yoù font détaillées
les altérations lentes tk fucceffives de toutes les
parties du corps de l’homme dans les cimetières ,
foit dans YEjfai fur la putréfaCtion de madame Dar-
conville. Mais cet objet appartenant à l’hiftoire de
chaque fubftance animale confidéréeen particulier,
je ne l’énonce ici que pour établir le principe de
cette variabilité de phénomènes : il fera traité dans
chacun des numéros fuivans.
113. C’eft encore une variation indépendante
de la matière animale, & foumife feulement à celle
des corps environnans, que je dois confidérer ici
en général fous le titre d’influence des milieux
dans la putréfaction. La feule obfervation tirée des
ufages différens des peuples à l’égard de leurs
morts, ou de la pofition des cadavres, des animaux
placés dans diverfes circonftances fuivant les
lieux où ils perdent la vie , prouve (uffifamment
cette variation remarquable. On voit les corps
s’altérer autrement chez les peupladés de la mer
du Sud, qui expofent leurs morts dans l’air , fur
des lieux élevés, dans les cabanes de branchages
de leurs moraits , fur les cimes des arbres; chez les 1
nations qui les plongent dans les eaux, & chez j
les peuples plus policés qui les confient à la terre.
J’ai dit ailleurs que les parties animales placées
dans l ’eau s’y convertiffent en matières grades : il
fe .paffe une altération à peu près femblable dans
la terre humide } mais la plus grande différence
qu’il importe de confidérer ic i , c’eft ce qui a lieu
dans l’air relativement aux phénomènes qui accompagnent
la putréfaélion dans des vaiffeaux fermés.
J’ai fuppofé cette dernière circonftance , en
décrivant ( N®. 111 ) les phénomènes généraux de
l’altération putride. Dans l’air, une portion de la
fubftance animale entière eft enlevée & diffoute ■
par l’atmofphèrë ; les produits qui fe volatilifent
font également emportés & diffous par l’air. La
deftruCtion totale & complète de la matière animale
s’opère avec plus ou moins de rapidité. Tous les
événemens de cette décompofition font beaucoup
plus rapprochés' les uns des autres., parce que les
agens extérieurs contribuent à féparer les élémens
des matières qui fe poürriffent. Ici la matière animale
finit par difparoîrre complètement , parce
qu’après. ce que l’air reçoit des principes volatils ,
le peu de réfidu terreux qui échappe à cette diAblution
àériforme pénètre peu à peu dans la terre
où il eft enfoui & entraîné par la filtration des,
eaux.
114. Quoiqu'on puiffe ranger parmi les phéno-
mèdes de la putréfaction les matières qui fe dé--
gagent des fubftances.animales putrefcentes , je lès
eonfidère en particulier ici comme des- produits
farce qu’ils font dus à l’aCtion même de ce mouvement,
& parce qu’il eft important de les con-
noître.ayec plus d’exaCtitude & de précifion que
la feule infpeCtiop-ou l’obfeivation même de ces
phénomènes ne pourroit le permettre. Pour dé*-
terminer la nature deces produits',, pour fuivre
avec foin la férié & les époques de leur dégagement
, & pour favoir conféquemment en quoi
confifte la décompofition de la matière animale 9
il a fallu qu’une atialyfe fuivie des vapeurs putrides,
un examen attentif des matières pourries,
fuppléaffent à la théorie qui avoit effayé d’en deviner
les caraCtères. Ain fi l’on a cru long-cems que
l’ammoniaque ou alcali volatil étoit le feul produit
de la putréfaCtion , & c’étoit pour cela qu’on-
1 avoit nommé fermentation alcaline , en l’oppofant
à celle qui donne naiffance à l’acide acéteux. Mais
fi l ammoniaque eft en effet un des principaux
produits de ce mouvement fpontané , elle n'eft
pas le feul} il en eft d’autres dont la production précède
la fiem-ie , l’accompagne ou la fuit, & qui méritent
d'être connus & étudiés avec un foin égal, 16
eft meme quelques matières animales dont la décompofition
feptique commence par une acidification.
On n auroit qu’une idée incomplète & une
notion fuperfrcielle de ces.produits, f i, d’après
1 affuranee qu’ils ne font pas les mêmes nt dans ta
même proportion pour les matières animales diverfes
, on ne prenoit le parti de rapprocher tous
ces produits variés , de raffembler fous un feul
point de vue toutes les fubftances fournies dans
la putréfaCtion des différens compofés animaux, &
d’e'mbraflèr par-là tout l’enfemble de ces produits..
On reconnoït alors que la matière animale donne
fucceffivement naiffance, dans fa décompofition
• putride, à des gaz hydrogène carboné,fulfuré 8c
phofphore, qui en portent & en propagent au
loin l’infeCtion} à de l’eau qui fe dégage en vapeur
, à de l’ammoniaque, à du gaz. acide carbo-
nique. Tous ces corps s échappentCe diflipent &
fe volatilifent ; ils entraînent , combinés deux à
deux , les principaux matériaux primitifs du com-
pofé animal. D’autres produits, formés à des époques
variées comme les circonftances acceffoires
&r la compofition de chaque matière animale , diffèrent
des pré.cédens par leur fixité & refterrt
dans cette^matière plus ou moins foüdes & fixés?
tek font l’acide zoonique , une matière graffe
une efpèce de favon formé par cette graiffe &
l’ammoniaque} tel eft encore l’acide nitrique,
fouvent formé dans cette décompofition , & fixé
par une bafe terreufe ou alcaline } tel eft enfin le
terreau bnCl-ueux qui refte après la réparation & le
dégagement des produits précédons. Ainfi fe partage,
fe divife, fe détruit peu à peu le comporéanimai
: on va bientôt voir comment ces produits
fe forment & fe fuccèdent.
115. Il eft furtout utile de diftinguer, parmi les-
produits du mouvement putréfa&if, celui qui en
eft le dernier réfultat , celui qui, après le dégagement
de tous les matériaux volatils , refte fixe