
lieu dans les caveaux comme, dans la 'terre , ce j
fluide élaftique , comprimé dans ces fouterrains , ;
peut expofer à des accidens terribles les perionnes j
qui y defcendent imprudemment: on conçoit , i
d'après cela, la caufe de la mort des Balfâgettes 1
dans le caveau de S.mlieu.
» Nous aurions fort defiré connoitre , par des j
expériences, la nature de ce gaz, meurtrier5 mais
l’occafion ne pouvoir pas le p ré ten ter a nous ,
puisque l'on n’enterroit plus , depuis trois ans ,
dans le cimetière des Innocens, Sc püifque les
derniers cadavres qui y avoient été dépotés en
178a, étoient bien au delà du terme où le fait
f explotion feptique du bas - ventre, lin vain nous
avons engagé les foffoyeurs à nous procurer l'oc-
cafion d’examiner ce fluide élaftique dans d’autres
cimetières; ils fs font toujours refufes à nos inf-
tances , en afturant que ce n’eft que par un hafari
malheureux qu'ils trouvent dans la terre des cadavres
dans ce dangereux état. L odeur affreufe &
l’adivité vénéneufe de ce fluide élaftique nous
annoncent que s'il eft mêlé , comme on ne peut
en douter, des gaz hydrogène & azote tenant du
loufre & du phofphore en diffôlutïon , produits
.ordinaires & déjà connus de la piirréhidtion , il
peut contenir encore une autre vapeur deletere, ;
dont la nature a jufqu’actuellement échappé aux
.phyfîçiens, & dout l'énergie terrible fur la vie j
eft mal heu reu Cernent trop prouvée ; peut-être ^eft-
ce encore à un autre ordre de corps, a un être .
plus divifé , plus fugace que ne le font les bafes
des fluides élaftiques connus , qu'il faut rapporter
.la matière qui conftitue ia nature de ce fluide dangereux.
Quoi qu'il en foit, les hommes occupes i
au travail des cimetières recemnoiffent tous qu'il
n'y a de réellement dangereux pour eux que la \
vapeur qui fe dégage du bas-ventre des cadavres j
îorfque cette cavité fe rompt, comme nous l'avons r
décrit. Ils ont encore obfervé que cette vapeur
ne les frappe pas toujours d'afphixie ; que s’ils font
éloignés du cadavre qui la répand, elle ne leur
donne qu’un léger vertige, un fentiment de mal-
aile & de défaillance , des naufées : ces accidens
durent pl limeurs heures; ils font fui vis de perte;
d'aopétit, de foibleffe & de tremblement. Tous
ces effets annoncent un poifon fubtil qui ne fe développe
heureule.ment que dans une des premières
époques de la décomposition des corps. Ne peut-
on pas croire que c'eft à ce miafme feptique que
font dues les maladies auxquelles font expofés les
hommes qui habitent le voifinage des cimetières,
des voieries, Sc de tous les lieux en general où
des matières animales amoncelées font livrées a la
decompofition fpontanée? N'eft-il pas permis de
croire qu'un poifon allez terrible pour tuer fo r tement
les animaux lorfqu’il s’échappe pur &
concentré du foyer où il a pris naiflance , reçu Sc
délayé dans l’atmofphère, conferve affez de fon
activité pour produire fur les folides nerveux &
• fenfibles des animaux une' impreflion capable d'en
affoupir l’adtion, & d'en dérégler les moiivérriens?
Quand on a été témoin de là terreur que ce poifon
vaporeux infpire aux ouvriers des cimetières,
quand on a obfervé fur un grand nombre de ces .
hommès la pâleur du vifage & tous les fymptcimes
qui .annoncent l’adion d’un poifon lent, on
doitpenfer qu’il feroit'plus dangereux de nier entièrement
l’effet de l'air des cimetières fur les ha-
bitans voifins, qu'il ne l’a été de multiplier St dê
groliir les plaintes comme’on l'a fait, furtoïit depuis
quelques années , en abüfant des travaux &
des découvertes de la phyfique fur l'air & les autres
fluides élaftiques.
» Reprenons après cette dlgrëflion néceffaire
l'hiftoire de la deürudtion des co-ps. La diften-
fion &: la rupture du bas-ventre ôht également
lieu/& fur les corps eritafles dans les délies communes,
6e fur ceux qui font'enterrés en parneu-
lier ; mais les chahgemëns qui fucvèdent à cette
première époque de la décomposition fpontanée,
font, comme nous l ’avons déjà annoncé-, fort
differens dans les uns Se dans les autres. Lès cadavres
i foies j entourés d’une grande quantité de
terre humide, fe dérruil’ent'en entier eh éprouvant
tous les degrés fucceflifs de la putréfaction
ordinaire: cette deftruétion eft alors d’autant plus
pçompte, que le cadavre eft plus humide , que la
faifon chau le ou tempérée eft elle-même accompagnée
de cette humidité, premier principe de lar'
putréfaction. Si les corps ainfi i foies font fecs &
émaciés ; fi la terre où on les place, eft-fèche &
aride ; fi l’atmofphère eft fans humidité» enfin, fi
le foleil, dardant fes rayons fur le terrain, favürife
& accélère l'évaporation, toutes Cës circonftancés
réunies deffèchent les corps, en abforbent & en
volatilifent les focs, en rapprochent & en reflèrrent
les folides, donnent, en un mot, naiflance aux
efpëces de momies dont nous avons fait mention.
Mais tout fe paffe autrement dans lés foffes communes
: les corps amoncelés les uns fur lès autres
hé font pas, comme les premiers, expofés au con-
caét dlun fol qui puiffe en.abforber l ’humidité.
Comme ilsfe recouvrent les uns les autres , l’évaporation
due à l’atmofphère n’a point ou prefqtie
•point d’influence fur eux; ën un mot, ils ne font
point expofés aux circonftancés environnantes, Sc
l’ altération qu’ils éprouvent ne dépend que de leur
propre fubftance. Nous ne devons point entreprendre
ici de rechercher la caufe chimique de
leur converfion en gras : cette recherche ne peut
être convenablement faite que Iorfque nous aurons
déterminé par nos expériences la nature de
cette fingulière matière : notre objet étoit feulement
de trouver la caufe des changemehs généraux
qui ont lieu dans les vifeères & dans les différentes
parties organiques du corps.
» Lorfque la rupture des parois du bas-ventrë eft
faite, la putréfadion abdominale qui en eft la
caufe, a déjà déforganifé les vifeères mous de cette
! cavité i l’eftomac Sc les inteûins ne forment plu*
lin tube membraneux continu. Brifés en plufieurs
points & déjà fondus en férofités putrides, les
portions de membranes qui reftent encore, tombent
& s’affaiffent fur elles-mêmes : bientôt la putré-
fadion qui s’ y eft établie & dont la marché devient
de plus en plus rapide, en détruit Sc en déforga-
nife tout-à-fait le tilfu : il n’en refte donc, quelque
tems après la rupture du bas-ventre , que
quelques fragmens qui s’appliquent & fe confondent
avec les parois mêmes de cette cavité. Le parenchyme
du foie, plus folide, paroït réfifter à
cette fonte feptique : la putréfadion s’y ralentit,
& ne va point jufqu’à la 'deftrudion complète ;
l'humidité n’y eft plus affez abondante pour en faciliter
la décompofition- totale, Sc telle eft fans
doute la caufe de ces fragmens de gras que l’on
trouve à la place de tous les vifeères du bas-
ventre.
« On conçoit facilement qu’un mouvement putride,
excité dans les parties molles & humides
de la cavité abdominale, ne peut en altérer la nature
& en brifer le tiffu fans porter une pareille
atteinte fur ies fibres du diaphragme, qui fait la
paroi ou la voûte fiipérieure de cette cavité : ce
mufcle doit donc être déforganifé, furtout dans
les parties qui communiquent immédiatement avec
les cellules mu qu eu fes du bas-ventre. Ainfi, tandis
que la fonte putride s'opère dans celui-ci, il
s'en établit une pareille^ le long deToefophage Sc
des cellules muqueuft s qui rempliffent le médiaftin
poftérieur. Il réfulte de cette fonte unedeflru&ion
plus ou moins complète des vaiffeaux, des membranes
Sc de toutes les parties molles contenues
dans la cavité thorachique : tout annonce que
cette déforganifation des vifeères de la poitrine
fe fait en même tems que celle des vifeères abdominaux
ou au moins très-peu de tems après. La
rupture des fibres du diaphragme paroït accompagner
ou foivre immédiatement celle des parois
du ventre.. A mefuve .que lés liquides du thorax
s^épûifent, les portions folides du coeur & des
poumons éprouvent la même alteration que la bafe
de tous les autrès organes ; mais comme le tiffu
pulmonaire eft très-lâche &c contient beaucoup de
focs, les parois des cellules qui le condiment,
s’affaiffent Sc le compriment, de forte que fa
forme fe perd bientôt, & qu’ il ne refte plus de fa
fubftance que quelques mafles irrégulières de gras.
Quoique les cavités du coeur donnent aufli lieu à
l’afFaifiemont de fes parois mufeuiaires celles-ci,
étant d’un tiffu plus dénié, perdent moins de leur
forme générale , 3c donnent par leur converfion
en gras, naiffance à ces mafles irrégulièrement arrondies
que nous avons trouvées dans,la, cavité
:thorachique.
» Le même affaiflement, la même déforganifa
• tion ayant lieu avec plus ou.moins d énergie dans
toutes les parties.mufeuiaires, tendineufes ce uga-
.menteufes qui environnent les os'j^fuiyant fé|r:,
molleffe & la quantité de fuçs dont ils font penetrès,
la converfion en gras s'opère fuccelfivement
dans toutes ces parties : tout ce qui eft membraneux
Sc plus ou moins muqueux fe détruit & dif-
paroît; c’eft pour cela qu’on ne trouve plus de
trace de vaiffeaux, de nerfs, d'aponévrofe au milieu
des mafles de gras qui recouvrent les os des
extrémités : il paroit que ce n’eft que la bafe des
fibres charnues qui fe dénature &_ qui paffe au
gras.
03 Notre curiofité auroit été affez excitée par ces
premières obfetvations, pour nous porter à faire
quelques recherches dans d'autres cimetières.
Qiielques-uns de ceux où l'on enterre le plus de
corps dans des efpèces de foffes communes, go iis
ont présenté la même altération. Nous avons
trouvé du gras dans un affez grand nombre de
cimetières pour déterminer, comme nous le déferions,
que la formation de cette fingulière matière
n'appartenoit point exclufivement au fol où
nous l'avions obfervée la première fois, 8c qu’elle
a lieu dans la terre toutes les fois que les cadavres
y font dépofës en mafles & les uns à côte des
autres; toutes les fois que, moins expofés à l’aétion
des'circonftancés extérieures & des agens environ-
nans , ils font livrés à la feule réaétion de leurs
principes les uns fur les autres.
»Nos vilites d’un affez grand nombre de cimetières
dé Paris nous ont encore fait voir que le
defféchement des cadavres Sc leur changement en
efpèces de momies femblables à celles dont nous
avons dé à fait mention, Sc que l’on trouve dans
les catacombes de Rome Sc dans les caveaux de
Touloufe , fe rencontrent dans un grand nombre
de terrains, & font beaucoup plus communes
qu’on ne l’a penfé, même depuis que l’infiruétion.
plus répandue a fait difparoître les impoftures de
la foperftition, qui montroit autrefois au peuple
cette'confervatiôn des corps comme un objet
digne de fes hommages.
sa Le grand nombre de corps changés en gras
depuis des époques déjà fort anciennes , dans dés
foffes communes formées,quarante ans avant notre
obfervation, nous annonçoit qu’une fois parvenus
dans cet état, les cadavres pouyoient fe conferver
long-tems fans deftrudion ; mais il falloir bien que
la nature eut des moyens pour décompofer cette
nouvelle fubftance Sc la réduire à fes élémens.
Nous n’avons pu trouver aucun renfeignement
pofitif fur ce que deviennent les corps une fois
changés en gras : les foffoyeurs les plus exercés 8c
les plus vieux ne nous ont rien appris fur ce point ;
■ ce fera donc un des objets à déterminer pour ceux
qui nous fuivront dans ces recherchas ; cependant
quelques faits femblent nous aUtorifer à croire que
• flous avons'trouvé un des procédés dont la nature
fe fe i*t pour détacher cetre.fubftance des os qu’elle
enve lopps , & pour rédui re les corps ;11 état de
eue. Dans pUfi.ars foffes coron»unes 'qi?e
nous avons fait creuler , nous avons trouyé quefque
s bières dé rangées.'de le
p 'p p 1
;)iize orale