
l’exception de quelques flocons jaunes : la cornue
contenoit alors deux liquides d’un jaune un peu
différent; celui qui nageoit & paroiffoit être huileux
j avoit une couleur jaune-brune ; celui du
fond étoit de couleur citrine. Le. refroidiflement
fit congéler -le fluide fupérieur : c’étoit une matière
brune j indifloluble dans l’eau, fufible par la
chaleur ; une efpèce de graifle cireufe comme celle
que l’acide fulfurique avoit réparée ; elle pefoit
une once un gros* & paroiffoit contenir beaucoup
d’humidité : on en avoit fépare un gros & demi de
flocons jaunâtres j qui avoit tous les caractères de
la fubftance fibreufe & charnue. Le gaz obtenu
dans cette opération éteignoit les bougies * précipitait
l’eau de chaux & les fulfures alcalins*
rougiffoit fenfiblement la teinture de tournefol :
c ’étoit un mélange de trois parties en volume de
gaz azote* & d’une partie de gaz acide carbonique.
La liqueur acide fur laquelle nageoit la matière
graffe* contenoit de l’acide phofphorique * du nitrate,
ammoniacal & du nitrate calcaire : on n’a
point effrayé de l’examiner* & de déterminer les
proportions de ces corps, parce qu’elle étoit mêlée
de beaucoup d’ eau de la cuve, qui avoit été.
abforbée pendant les derniers inftans du dégagement
des fluides élafliques. Comme la détermination
des fubftances falines étoit le principal but de
cette expérience* on l’a recommencée avec plus
de foin.
» On a traité deux onces de matière graffe *
plus pure que celle de l’expérience précédente*:
avec deux onces du même acide nitrique. A la
cornue qui contenoit ce mélange * on avoit adapté
un ballon portant un tube recourbé* plongeant
dans un flacon plein d’eau de chaux 5 un fécond
tube , partant de ce flacon * fe terminoit à L’extrémité
de l’appareil fous une cloche pleine d’eau,
placée fur la tablette d’une cuve pneumato-chimique.
Le gras & l’acide nitrique n’ont prefque
point eu d'ailion .à froid l’un fur l’antre* mais
quelques charbons allumés , rois fous la cornue*
ont fait naître cette aition : il s’eft bientôt ma-'
niftfté une légère ébullition, mais il n’ y a point
eu un boiîrrouflement & une production d’écume
femblable à celle de l'expérience précédente * il
ne s’eft dégagé de gaz que bien plus.difficilement*
& feulement a l’aide d’une plus forte chaleur. Ce
gaz. troubloit l'eau de chaux à mefure qu’il paifoit
i travers ce liquide 5 mais il n’en anivoi.t qu’une
petite quantité dans la cloche* &. cette portion
çe prélentoit aucune trace de gaz azote..Cette f
différence^ très-notable d’avec l’expérience pré-
cédente tient à ce que legras, traité dans celL-ci*/
étoit pur'&.ne çont-noit point de refres.de fibres,
car nous avons reconnu que ces reftes feuls pou-’
volent fournir du gaz azote par Laeid^qitrique* i
84 que le gras feul & pur n’én nonhoit pas un!
! âtjôme.. Après,la ceffation du dégage,ment ,d.e J’a-{
eide c a,rbp pi que. & de Ftffervefcence, on a* trouvé ;
J* cornue y celle dp deffus. étoit.
jaune & nageoit comme de l’huile ; elle s’eft congelée
par le refroidiflement en une matière graif-
feufe jaune de foufre * femblable à du fu if, qui
pefoit une once un gros, comme dans l’expérience
précédente : la liqueur placée fous cette graifle
étoit d’un jaune-d’or ; elle a été réduite par l’évaporation
en un magma falin* où l’on a reconnu
la préfence du nitrate d’ammoniaque , du nitrate
calcaire & de quelques portions d’acide phofT
phorique* par l’addition de la potaffe, de l’ acide
oxalique & de l'eau de chaux. En traitant ce fel
par la chaux vive * on .en a retiré quarante grains
environ d’ammoniaque ; mais il faut obferver qu’il
y en avoit certainement une plus grande quantité
dans 1 q gras * i 9. parce qu’on l’a employé un peu
fec * & on fait qu’il perd fon ammoniaque par le
contait de l'air ; i°. parce qu’il y a toujours une
partie de ce fel volatilifée & perdue pendant le
mélange de la chaux & la difpofition dé l’appareil.
Dans une troisième expérience faite de la même
manière, & fur quatre onces de gras 3 on. a eu
plus de deux onces d’ une efpèce de graifle,grenue*
poreufe* retenant beaucoup d’eau fcc-un feul
gros d’ammoniaque. En général * toutes les expériences
faites avec les acides ont préfenté des
dofes diverfes d’ammoniaque ; ce qui prouve que
la proportion de cette matière varie fir.guliére-
ment fuivant l’état du gras des cadavres* l’époque
depuis laquelle il eft refté enfoui, & celle ou il
a été retiré de la terre. Il ne paroït donc pas pof-
fibls de déterminer avec précifion les proportions
d’ammoniaque & d’huile concrète qui conftituent
cette efpèce de favon.
» Un quatrième effai avec l’acide nitrique a été
fait plus en grand que les trois précédens : on a
délayé deux livres de matière graffe bien fèche* &r
broyée dans un mortier de marbre avec douze livres
d’eau diftillée bouillante > on a tenu le mélange
fur le feu, & on l’a agité-jufqu a ce que
l’eâu ait été bien également mêlée avec la matière
graffe; alors on y a verfé.de l’acide nitrique
foi b le , & pefant cinquante grains plus que
l’eau diftiilée par once , jufqu’à ce qu’il y en ait
eu un excès très-fenfible : il en a fallu onze onces.
Ç.et acide* en décompofant le favon ammoniacal*
a féparé. l’efpèce d’huile concrète qui en faifoit
lAbafe\? ;& tout le mélange ayant été aflez chauffé
pourcme cette huile ait été bien fondue & râffèm-
blee,à _ la. fur face :* on l’a laiffe figer* & on à filtré
pour recueillir là matière graffe & pour examiner
convenablement la liqueur. Celle-ci devoit,contenir
l’acide nitrique uni à l ’ammoniaque du favon
.animal*' à celui du phofphate ammoniacal & à la
chaux du phofphate calcaire mêles à ce favon,
ainfi. que l’acide phofphorique dégagé de ces fels..
i Notre intention étoit d’apprécier avec exactitude
les .proportions, de graifle & d’ammoniaque du, favon
, ainfi que .la quantité des phofphates ammoniacal,
& calcaire .qui y étoient mêlés. Pour cela,,
on a commencé par précipiter la liqueur nitrique
par l’acide fulfurique concentré * qui, en lui enlevant
la chaux * a formé du fulfate de chaux :
on a obtenu cent dix grains de ce fe l, qui annonce
entre cinquante & foixante grains de chaux.
On a dégagé enfuite l’ammoniaque dont on a recueilli
cinq gros & quelques grains du fel crif-
tallifé* qu’on a obtenu en évaporant convenablement
la liqueur ; enfin * le réfidu de cette crif-
tallifation ou la portion d’eau-mère épaiflie* ayant
été fortement chauffé dans un creufet, a donné
deux gros & demi de verre phofphorique , qui eft
devenu opaque en fe refroidi (Tant.
93 II ne peut plus refter de doutes* d’après cette
analyfe foignée, fur la nature de la matière graffe
des corps trouvés dans les foffes communes du
cimetière des Innocens. Cette matière eft un favon
formé par une huile concrefcible particulière*
dont nous examinerons la nature dans un
des articles fuivans* unie en différentes proportions
à l’ammoniaque, & ce favon contient de
.petites quantités de phofphate d’ammoniaque &
de phofphate de chaux; mais ces deux derniers
fels n’entrent point dans la compofition favoneufe*
& ne font qu’interpofés ou mêlés entre leurs molécules.
D’ailleurs * leur quantité varie finguliére-
ment. Quant à la proportion d’ammoniaque * il eft
impoflible d’affurer combien le gras des cadavres
en contient par fa nature même * outre que fa
proportion varie fuivant le tems depuis lequel il
eft tiré de la terre ; ce qui eft bien prouvé par les
expériences qui nous ont convaincus de fa décompofition
lente à l’air. Il eft vraifemblable que cette
proportion varie encore dans chaque corps à la
meme époque de fa transformation* & que cela
.dépend de la nature de chaque corps en particulier.
Aufli ne doit-on pq*regarder le gras des cimetières
comme une matière identique * & toujours
femblable à elle-même dans la proportion de fes
principes. L’état de chaque corps * Tépoque de
fon enfouiffement, le lieu* la hauteur qu’il occupe
dans les foffes, le nombre total, la difpofition
, le taffement plus ou moins grand de ces
corps dans la terre, doivent apporter des différences
dans les quantités des principes de ce favon.
Dès qu’il eft retiré des foffes & expofé à l’air, ces
proportions de principes varient encore fuivant le
lieu de fon expofition, la mafle des morceaux que
Ton conferve , la température & la fécheréffe de
l’air. Le point efl'entiel eft de fayoir que ce favon
tend continuellement à fe décompofer, que l’ammoniaque
s’en dégage peu à peu , & laiffe'enfin la
matière fébacée qui en fait la bafe, èntiérement à
nu & fous la forme d’Une concrétion huileufe jaunâtre*
derr.i-tranfparente, fèche, caflânte & gre-:
nue dans fa caffure. Un article particulier fera
d’ailleurs confacré à l’examen de cette efpèce fin-
gulière d’huile animale'concrète. ^
■ §:. III. Gras & acide muriatique,,
*Qn conçoit bien que l ’acide muriatique a opéré
fur le gras la même décompofition que les acides
fulfurique & nitrique ; mais la nature particulière
de cet acide influant fur prefque foutes les opérations
de la chimie * & fa propriété de ne pas fe
décompofer comme les dejjx précédens offrant
l’effet fimple & nu d’un acide, nous avons cru
devoir en examiner l’aition fur ce favon animal#
Une livre de gras * gardée depuis plufieurs mois
& délayée dans fuffifante quantité d’eau chaude,
a été traitée par l’acide muriatique foible qu’on
a eu foin de mettre en excès : on a filtré ; la matière
huileufe * reftée fur le filtre * a été lavée à
grande eau ; la liqueur filtrée, évaporée* a fourni
trois gros quelques grains de muriace d’ammoniaque
impur & noirâtre; l’eau-mère* qui donnoit
des traces de chaux par l’acide oxalique, a été
abondamment précipitée par l’eau de chaux, &
l’on a reconnu facilement ce précipité pour du
phofphate calcaire. Pour eftimer la proportion de
chaux contenue dans la matière graffe & liée à
l’acide phofphorique, on a fait une fécondé expérience
avec l’acide muriatique, & en précipitant
la diffolution féparëe de la graifle figée par le carbonate
de foude, une demi-livre àq gras a donné
cent grains de craie ; ce qui indique environ un
gros & demi de phofphate de chaux par livré de
gras; mais ce calcul ne doit pas être regardé comme
rigoureux * parce que la proportion des fels varie
dans cette matière. II en eft de même de la quantité
de fubftance huileufe. concrète qu’on en retire
il eft très-difficile de. l’eftimer 'exactement ÿ
ainfi que celle de l’ammoniaque *.'.1°. parce que
le gras eft dans des états très-variés, dé.defiîccatiorî-
& de décompofition fuivant l’époque de fa Formation
& de fon expofition à l’air ; 2.0. parte que la
matière huileufe qu’on en extrait par les acides
peut elle-même être plus ou moins fortement def-
fëchée , & retenir plus ou'moins dïeau entre fes
molécules. On en aura la preuve par le réfultat
des deux expériences faites avec l’acide muriatique
: dans l’une on a eu fept,onces d’Jiuile concrète
& grenue* d’ une demi-livre de gras ; mais à la
vérité on a pefé cette huile immédiatement après
l’avoir obtenue & fans qu’elle eut été fechée; dans
l’autre effai * une livre de gras n’a donné que deux
onces de matière huileufe concrète, fèche & caf-
fante. Ainfi le propre de la fingulière- fubftance
que nous examinons* c’eft d’être dans un état très-
variable., de n’être jamai^abfoluraent la même dans
fes proportions*, quoiqu’elle foit en général la
meme dans fâ nature on reconnoît bien à ce ca-
ra if ère une fubftance animale qui* malgré les altérations
qu’elle a fubies * conferve toujours facom-
binaifon compliquée & fa variabilité par toutes les
circonfiances acceffoires.
V I. À$-i,on de 1‘alcool fur le gras,
33 L’alcool bien reilifiéy& donnant 40 degrés
à l’aréomètre de M„ Baume, le thermomètreétanc
, à l’air à 18 degrés* ne touche point fenfibie^