
près de cinq onces & demie, en y comprenant la
portion qui fe fondit ou qui fe diffîpa en vapeurs
pendant qu'on la tranfvafoit du récipient dans un
flacon. Cette quantité de fel concret eft en proportion
plus confîdérable que celle que l'on obtient
dans la première diftillation : cela dépend
de ce que l’appareil n'étant point luté dans l'opération
précédente, il s'échappa une grande quantité
de vapeurs blanches qui furent retenues &
condenfées dans celle-d. Le fluide élaftique, raf-
femblé dans les cloches & refroidi à la température
de l’atmofphère ( douze degrés ) , occupoit
le volume d’erçyiron fîx pintes d'eau > il paroiffoit
contenir un peu d'air vital, car la bougie y brû-
loit un peu mieux que dans l'air atmofphérique.
« La liqueur qui reftoit dans la cornue après
la volatilifation de ce fel concret , étoit preique
blanche j elle contenoit une petite quantité de
poudre de la même couleur que dans la première
opération ; elle pefoit une livre dix onces fept
gros : on y adapta un ballon fans le luter , & on
le chauffa à feu nu : il s'en dégagea d'abord des
vapeurs blanches moins épaiffes que les premières,
& qui difparurent allez promptement ; bientôt il
diflilla des gouttes un peu brunes, & qui perdirent
peu à peu leur couleur. On entretint le feu
pendant près de deux heures, pour achever cette
diftillation jufqu'à ficcité : on obtint une livre dix
onces deux gros & quelques grains de liqueur, &
il fe diffîpa par les jointures des vaiffeaux un peu
moins de cinq gros. Ce produit étoit de l'huile de
vitriol un peu brune, & conféquemment bien plus
colorée qu'elle n'étoit' avant cette fécondé diftillation.
Je crois devoir attribuer cette couleur aux
vapeurs blanches qui fe font diffoutes dans cet
acide $ il pefoit fept gros quarante-neuf grains plus
que l'eau fous le volume d’une once. Il reftoit au
fond de la cornue un enduit très-blanc , & qui
étoit auffi peu abondant que celui de la première
expérience.
« Cés rélïdus fecs, adhérens au fond des cornues,
pefoient enfemble quinze grains : cette matière
n'a pas paru fë diffoudre dans deux onces d'eau
diftillée froide qu'on laiffa féjourner plufieurs
heures dans les cornues. On fit bouillir ce fluide ,
& l'on parvint, par ce moyen, à détacher en lames
la matière fèche contenue dans ces vaiffeaux.
L'eau avec laquelle on l'enleva, étoit acidulé j on
la fépara de la poudre par le filtre. Elle tenoit en
diffolution une petite quantité de la fubftance fa-
lins î celle-ci,, féchée fur le filtre, préfentoic quelques
lames brillantes. Mife fur un charbon, elle
n’y éprouva d'autre changement que de. blanchir
& perdre le peu de cohérence qu*èlle avoit; on
la trouva acide & légèrement ftipcique : l'eau filtrée
donna des précipités en flocons légers, par
l'eau de chaux, h diffolution de magnéfie, l’alcali
volatil cauitique & l’alcali fixe; elle tenoit donc
en diffolution de l'alun, puifqu’il n’y a que ce fel
qui préfente toutes ces propriétés réunies. S’il ne
s*eft point fondu en entier dans feati, c'eft qu'il
avoit été calciné par la chaleur forte qu’on avoit
donnée à la fin de l'opération. Ce fel venoit fans
doute du vitriol, d'où l'on retire cet acide en Saxe.
Expérience troisième*
» Comme le fel volatil concret que j’avois obtenu
de.ces deux diftillations, paroiffoit fe fubli-
mer à une douce chaleur, & que pour peu qu'on
augmentât le feu fans précaution, les vapeurs trop
raréfiées, & fe fuccédant trop rapidement, fe diflî-
poient par les jointures auxquelles l'accident que
j*ai décrit, ne nouspermettoit pas d'appliquer aucun
lut, je crus devoir traiter le même acide par
le bain-marie.; On en mit huit onces dans une
cornue de verre que l'on plongea dans l'eau jufqu'à
la moitié de fa hauteur * & à laquelle on
adapta un grand récipient fans le luter. On chauffa
peu à peu l'eau du bain-marie jufqu’à la faire
bouillir, on l'entretint dans ce degré de chaleur.
Après une demi-heure d'ébullition, le ballon fe
remplit de vapeurs blanches, femblabîes à celles
qu'on avoit obtenues par la diftidation au bain de
fable. Ces vapeurs fe fuccédèrent fans difeonti-
nuer pendant dix-huit heures de fuite que l'on
foutint couftamment i'ébulJition de l’eau du bain-
marie. Cependant je ne voyois point paroître ces
criftaux blancs, lamelleux & foyeux que m'avoient
fournis les deux premières opérations, & je n'obtins
de tout ce travail que deux gros d’un acide
brun non fumant, fans apparence de fel concrer.
Il fe dégageai la vérité une fi grande quantité de
vapeurs blanches & d'une odeur fulrureufe par
les jointures, que je trouvai dans le réfidu de
cette opération, fix gros de perte, tandis que je
n'avois que deux gros de produit. 11 fe diffipa
donc quatre gros de vapeur blanche qu’il fut im-
pofîible de condenfer, quoiqu'il foit très-vrai-
femblable que c'eft cette vapeur qui, par le refroidiffement,
fe criftallife en fel. L'acide refté
dans la cornue étoit un peu moins coloré que dans
fon état naturel ; il pefoit fept gros dix-huit grains
plus que l'eau fous le yolume d'unè once, & il
s’étoit concentré, puifqu'il ne pefoit que fept
gros de plus avant cette opération. Quoique cet
acide fût encore très-fumant, & que , par la diftillation
à feu nu, il donnât beaucoup de vapeurs
blanches, je n'en pus obtenir aucun fel concret,
ai il paffa dans lé ballon fous la forme d'un liquide
brun. On foutint le feu pendant plus de douze
heures pour diftilier jufqu'à ficeité. On obtint fept
onces un gros & quelques grains d'un acide vi-
triolique un peu moins foncé que Vhuile de vitriol
de Saxe t qui ne fumoit point du tout, & qui
perdit par le refroidiffement la légère odeur ful-
fureufe qu'il avoit étant chaud. Il refta trois ou
quatre grains de réfidu blanc, d'alun calciné ,,
comme dans les deux premières opérations^
Expérience quatrième«
» l ’attribuai le peu deréufiite de cette expérience
à ce que les vapeurs avoient paffé.trop vite & n a-
voient point été refroidies. Ouoiqu'en traitant cet
acide à la chaleur plus forte d’un bain de fable, &
fans prendre plus de précautions pour refroidir le
ballon, j'avois eu du fel concret. Je me déterminai
à recommencer la diftillation du bain-marie en re-
froidiffant le récipient. Pour cet effet, on mit quatre
onces d huile ae vitriol fumante de Saxe dans une
petite çornue de verre , à laquelle je fis joindre
affez exactement, quoique fans lu t, un flacon de
criftal alongé au lieu de ballon, afin de refroidir
plus facilement cette efpèce de récipient. On éleva
un petit mur de briques entre le fourneau & le
flacon, & l’on plongea celui-ci dans un bocal de,
verre rempli de glace pilée- On fit bouillir i eau
dans laquelle plongeoir la cornue ; on obtint les
vapeurs blanches ordinaires, mais beaucoup moins
abondantes que lorfqu'elles paffent dans un grand
récipient qui contient beaucoup d air; car je ne
puis douter, comme je le dirai ailleurs, que le conta#
de l'air contribue beaucoup a rendre ces vapeurs
très-fortes. On vit au bout de quelques heures
une petite quantité de fel grenu, grifatoe, bien
éloigné de la belle forme criftailine qu’il avoit dans
les premières opérations : il s'en dépofa suffi un
peu fur le bec de la cornue ; mais quoiqu'on entretînt
l'ébullition du bain-marie pendant près de
douze heures, il ne s'en dégagea pas plus de quelques
grains, & quand on eut remarque qu il paffoit
un acide liquide coloré & non concrefcible par le
conta# de la glace, on abandonna l'opération,
bien convaincu que fi elle pouvoit fournir quelques
parcelles de fel volatil concret, elle nuiroit beaucoup
plus à fa formation, qu’elle ne la favorilè-
roit.
» Cette expérience, que j'ai faite avec tout le
foin & l’attention dont je fuis capable , prouve
donc que la chaleur moyenne de 1 eau bouillante
dégage très-facilement la matière vaporeufe blanche
, qui eft la bafe du fel concret que l’on obtient
en chauffant plus fortement Y huile de vitriol fumante
de Saxe 3 puilque, quand cette vapeur eft une
fois dégagée de cet acide, il ne fournit plus ce fel
concret en le traitant au bain de fable bu à feu nu.
Mais pourquoi cette fumée le diffipe-r-elle par ce
degré de chaleur, fans fe condenfer en fel acide
concret, auffi facilement que lorfqu’on la traite a
une plus forte chaleur ? J’avoue que je ne puis répondre
à cette queftion que par des hypothèfes, 8c
enfuppofant, ou que cette matière vaporeufe eft
trop rare & trop divifée par la chaleur moyenne
de l’eau bouillante pour prendre enfuite une forme
concrète, ou bien que cette chaleur en fepare
les principes, en raifon de leur volatilité differente,
tandis qu’ ils doivent être volatilifés enfemble
pour fe criffallifer parle froid. Pour rendre cette
dernière hypotbèfe vraifemblable, il fembleroit
néceffaiue que la vapeur dégagée de Y huile de vitriol
fumante par la chaleur du bain-marie, lût differente
de celle qui eft élevée par une chaleur plus
forte ; mais rien ne m’a démontré cette différence,
puifqu’elle avoit la même forme, lamêmeépaiffeur
& la même odeur que dans les premières expériences.
La première hypothèfe eft prefqu’aufli peu fa-
risfaifante, puisqu'on ne conçoit pas comment on
ne pourroit pas donner la forme concrète à une
vapeur trop rare & trop divifée, endétruifantcet
état parle refroidiffementfubit. Ces réflexions me
portent à croire que fi je n'ai pas obtenu une quantité
notable de ce fel concret dans la fécondé expérience
au bain-marie, c'eft que la vapeur qui le
conftitue par fa condenfation, lorfqu’elle eft volatilisée
parla chaleur moyenne de l’eau bouillante ,
paffe trop facilement à travers l’appareil ordinaire
qu’il m’a été permis d’employer, ne fe raffemble
point en affez grande quantité dans le récipient,
&c n'y prend pas complètement cette efpèce de den-
fîté vaporeufe qui eft fans doute un paffage nécef-
faire de fon état élaftique à fa forme foljde 8c cri f-
talline, comme on l'obferve dans les gaz marin &
alcalin, dont la çombinaifon offre un nuage blanc
très-épais avant de devenir concrète. Pour confta-
ter avec certitude lefuccès de cette expérience, il
faudroit un appareil affez folide pour que le bec
de la cornue s'ajuftât avec le ballon, comme un
bouchon de.criftal ; il faudroit encore un tube de
verre épais & recourbé, femblable à ceu^ dont on
fe fert dans les appareils fi connus aujourd'hui, qui
s’ajuftât également avec une autre tubulure du ballon,
& qui pût conduire la vapeur ou les fluides
aériformes dans des cloches remplies d’eau ou de
mercure. Je ne crois pas devoir obferver que cette
manière de réunir les vaiffeaux diftiliatoires fera
très-utile pour un grand nombre d’opérations où
les luts font fouvent capables de faire naître des
erreurs préjudiciables à l’exa#itude des réfultats
chimiques. On a déjà employé des cornues de criftal,
jointes par ce moyen à des récipiens ; mais je
n’ai jamais vu cet appareil qu’ en petit, & d’ailleurs
on n’y a jamais joint les tubes de communication
avec les machines pneumato-chimiques qui en affu-
reront les avantages en prévenant les accidens que
la raréfaction & l’élafticité des vapeurs & des fluides
aériformes doivent toujours faire craindre. Auffi
ces appareils ont-ils plus contribué jufqu'aétuelle-
ment à l’omemeut des laboratoires & des cabinets
de phyfique, qu’au fuccès des opérations chimiques.
Meyer annonce dans l’endroit de fes -Efais de
Chimie fur la chaux vive que j’ai cité ( i ) , que fi
l’on étend d’eau une huile de vitriolfumante, &
qu’on concentre cet acide par la chaleur, on en
retire une huile de vitriol qui ne fume plus, mais
! ( i) Tome I , pag. a 8 i de YEjfai, 8cc. en a vol. in -12 ,
1 édition de 17GG.
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