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clarifié qui en a été tiré , 10193, Avant qu’il foit
clarifié , il contient encore une petite quantité
de matière caféeufe, qui en trouble la tranfpa-
rence , & qui y eft fufpendue en flocons. Par une
chaleur douce & contiuuée quelque tems, il s'éclaircit
& dépofe ces flocons. Il eft au fil , dans
cet état , trouble, d’une pefanteur plus grande
qu’après fa clarification. La denfité de cette liqueur
purifiée prouve qu'elle eft très-différente de l’eau,
& fa faveur, fa couleur, confirment cette vérité}
auffi le petit lait eft-il un liquide très-nourriffant.
Outre l’exemple des malades que l’on foutient
& que l’on nourrit même quelquefois trop fortement
avec cette liqueur animale, i’hiftoire de l’art
préfente deux faits remarquables par cette propriété
, & que fourniffent deux hommes célèbres.
Boerhaave a vécu plufieurs mois de fuite fans autre
aliment que du petit-lait 3 & Fergufonen a fait pendant
dix-huit ans entier fa nourriture, en y ajoutant
une limple déco&ion d’orge. Le petit-lait de
ferme eft employé aufïi à la nourriture de plufieurs
animaux.
31. L’a&ion du feu fur le petit-lait donne des
réfultats différens de ceux que préfente le lait.
Évaporé dans des vaiffeaux ouverts ou diftillé au
bain-marie, il s’en fépare une grande quantité
d’eau peu odorante, & qui ne contient rien de
fenfible aux réa&ifs , quoiqu’elle s’altère & fe
pourriflej le petit-lait fe colore, brunit, fe trouble
, s’épaiflit, devient vifqueux , & fe prend
comme au miel grenu. S i , dans cet état, on le
pouffe au feu dans une cornue, il ne fournit pas
les mêmes produits que le lait entier} ils ne font
point de la même fétidité} ils ne contiennent pas
une égale proportion de carbonate & de zoonate
d’ammoniaque : on y trouve au contraire de l’acide
pyromuqueux & du pyromuçite ammoniacal} le
gaz eft moins hydrogène carboné, qu’acide carbonique
; le charbon qu’ il laiffe, eft léger & fe
brûle facilement. On trouye dans fa cendre un
peu de carbonate de potaffe, de muriate de foude,
& plus de muriate de potaffe & de phofphate de
chaux.
32. Lorfqu’on évapore le fertim du lait jufqu’à
la confiftance d’un firop, & lorfqu’on le laiffe en-
fuite refroidir lentement, il s’en dépofe des crif-
taux irréguliers d’un jaunerbrun , d’apparence
grafîe & on&ueufe, qui, rediffous dans i’eau, &
purifiés par deux opérations fucceflives , paffent
par la nuance jaune, & arrivent enfin à l’état de
criftaux blancs en parallélipipèdes réguliers. Cette
matière eft ce qu’on nomme le fe l ou 1 e fucre du
lait ; fubftance bien remarquable par fes proprié-
té s , & qui mérite d’être étudiée avec foin.
Kempfer affure que les Bracmanes connoiffent
depuis long-tems l’art d’extraire lè fucre de lait.
Fabr. Barthollet ouBartholdi, médecin italien,
en a fait le premier une mention expreffe en 1619.
Etmuller, Guterman, Tefti, Werlofchnigg, Wal-
Jerius, Fickius* Cartheufer, Vulgamoz 8c Licb- 1
L A I
] tenftein en ont fucceffivement fait I’hiftoire &
j examiné les propriétés. Rouelle le jeune, Schéele,
I Hermftadt, MM. Deyeux & Parmentier, fe font
I fpécialement occupés de fa nature 8c de fa com-
pofition chimique. On verra que, malgré les travaux
de ces hommes habiles, il refte encore quel-
ue chofe à defirer fur cette fingulière fubftance ,
ont la formation & l’exiftençe dans le Lait of-
| frent des confidérations d’une grande importance
: au phyfiologifte.
33. On-prépare affez abondamment le fucre de
lait dans les montagnes de l’Helvétie , lieu fi re*
: nommé par l’excellence,,de fes pâturages & par
celle du lait de fes vaches, ainfî que de fes divers
produits. On prend le fertim obtenu du lait derémé
! d’abord & coagulé par la préfure} on le cuit &
! on l’évapore frais & non aigri, jufqu’à lui faire
i prendre la confiftance de firop épais, & jufqu'à
| ce qu’il fe fige en matière g-renue par le refroidif-
fement. On le verfe dans des moules de terre
comme le fuc de cannes cuit} il s’ y prend en une
: maffe que l’on fait fécher au foleil : quelquefois
: on le coule dans des vafes plats à rebord, où il
prend la forme de tablettes. Il eft fort impur dans
cette première opération : on le raffine en le fai-
fant diffoudre dans l’eau } on clarifie cette diffo-
lution au blanc d’oeuf} on la cuit de nouveau en
confiftance de firop épais, qu’on laiffe criftallifer
lentement par le refroidiffement : on obtient ainfî
. des criftaux blancs en parallélipipèdes rhomboï-
daux. L’eau-mère qu’on décante de deflus les criftaux
en dépofe de nouveaux d’une couleur jaune
ou brune qu’on purifie ou qu’on raffine fucceflive-
ment. On n’obtient que très-difficilement en petit
dans nos laboratoires quelques rudimens de criftaux
de fucre de'lait;■ mais on a ce corps fous
forme grenue & mieîleufe. Il paroît, en prenant
le terme moyen des proportions, que les auteurs
en ont indiqué dans les di ver fes efnè'ces de lait,
que le maximum de fa quantité eft -f^y & le minimum
du lait.
34. M. Lichtenftein a fait l’examen analytique
des différentes variétés ou plutôt des différens
états du fucre de lait que l’on vend à divers prix
dans la République helvétique. Voici les principales
qu’il en diftingue :
A. Le fucre de lait bique & pur, retiré du ferum
purifié}
B. Le fucre de lait acefcent, extrait du petit-lait
aigri. Il eft coloré, gras, humide, impur}
C. Le fucre de lait mêlé d'éau-*mêrc ou départies
graffes, comme l’auteur les appelle } c’eft celui
qui fe fépare dans la première criftaliifation}
D. Le fucrç de lait mêlé d*huile & de muriate de
foude , qui criftallife le dernier}
E. Le fucre d.e lait mêlé de parties graffes , de muriate
de foude & de muriate dl ammoniaque ; celui-ci
eft gluant, humide} il donne de ^ammoniaque
par les alcalis fixes }-
F. Enfin une vaiiété fie fucre de lait, mêlé de
toutes
L A !
toutes les fubftances déjà indiquées1, 8c de plus j
d'une partie extraétive & de matière caféeufe. Ce j
dernier, le plus impur de tous, fe rancit} il eft
âcre 8c malfaifant dans cet état. On ne connoît
point en France les diverfes variétés de ces fucres
de lait.
3 y. Le fel ou fucre de lait3 bien pur, bien criftal-
Jifé , offre au chimifte des propriétés qui n’appartiennent
qu’à-lui. Il eft blanc, criftallin, d’une faveur
fade , & comme terreufe malgré le nom qu’il
porte, inaltérable à l’air 5 il eft bien moins foluble
que lé fucre , puifqu’il faut quatre parties d’eau
chaude pour en prendre une : il en faut plus de
douze d’eau froide. Placé fur des charbons allumés,
ili>runit, fe fond moins bien 8c moins vite
que le fucre, exhale une fumée blanche & d’une ;
odeur piquante de caramel, qui reffemble à celle
de ce dernier > fe bourfoufle, s'enflamme, 8c laiffe
un charbon noir moins léger, affez facile à incinérer
, donnant r-fj- ( trente grains par livre) du 1
poids du fel primitif, où Rouelle a trouvé un mélange
de trois quarts de muriate de potaffe & d’un
quart de carbonate de potaffe. Diftillé dans une
•cornue 3 il fournit de l’eau chargée d’acide acéteux
•empÿreumatique, quelques gouttes d’huile rouge
feulement, beaucoup de gaz acide carbonique mêlé
de gaz hydrogène carboné, & un charbon léger,
de la nature déjà indiquée. D’après fes propriétés,
Rouelle 8c Vulgamoz l’ont regardé comme de véritable
fucre. Schéele a confirmé cette opinion en
convertiffant cette matière en acide oxalique par
le moyen de l’acide nitrique.
• 3 6. Mais une découverte particulière de Schéele
fur ce fucre dé lait a cependant fait voir que cette
efpèce de corps muqueux préfentoit une différence
effentielle d’avec le fucre proprement dit. En lè
traitant par l’acide du nitre, il remarque qu’il en
falloit davantage pour le changer en acidé oxalique,
qu’il ne fourniffoit qu’un peu plus du huitième
de fon poids de cet acide, & qu’il s’en fépa-
roit à mefure une poudre blanche , peu foluble ,
à laquelle il a trouvé les caractères d’un acide particulier,
qu’il nomme acide,du fucre de lait, qui
depuis a été défigné dans notre nomenclature par
-le nom de fachiaclique} 8c dont j’ai fait l’ hiftoire ,
'fous celui dé acide muqueux , à l’article de la gommé
ou du muqueux végétal, parce que cette matière
a , comme le fucre de lait 3 la propriété d’en fournir
par l’aêtion de l’acide nitrique. On a vu dans
cet article, que M. Hermftadt, qui a inféré dans
les Annales de Chimie de Crell deux Mémoires fur
le fucre de lait, avoit cru que l’acide muqueux ou
fachhétique étoit de l’oxalate de chaux mafqué par
•pne matière graffe ; mais Schéele, qui avoit déjà
eu ce foupçon, n’avoit pas pii le vérifier, & nos
expériences ne l’ont pas confirmé'davantage. D’après
le peu de faveur, de diffolubilité du fucre de
lait, & fa propriété de former de l’acide muqueux
comme la gommé, je le regarde comme une fortè
d’être moyen entre le corps, gommeux 8c le fucre}
Ch im i e . Tome iTG ,
L A I 595
je le crois le produit du travail de la digeftion,
car il fe forme chez les carnivores, dans le lait
defquels il eft même abondant, comme dans les
frugivores, 8c il eft difficile de croire qu’il paffe
immédiatement de l'eftomac aux mamejles par le
chyle. Peut-être eft-ce ce compofé mucofo-fucre
qui fe. trouve dans les urines des fujecs attaqués de
diabétès miellé. MM. Deyeux & Parmentier croier t
que le fucre d e lait, qu’ils a {furent être plus diffo-
luble dans le lait que dans l’eau, eft une combi-
naifon de fucre & d’acide fachla&ique, & qu’on
peut le faire artificiellement en unifiant ces deux
matières. Je n’ai point connoiffance & je ne puis
rien dire dés expériences fur lefquelles ils Fondent
cette affertion, qui me paroît cependant, je ns
dois pas le diffimuler, peu d’accord avec ce qu’on
fait des propriétés des deux fubftances qu’elle admet
combinées.
37. Quand on a obtenu tout le fucre de lait contenu
dans le ferum, le liquide qui refte en eau-
mère eft brun, vifqueux, épais, collant} il donna
par le refroidiffement, fuivant la remarque de
Rouelle le jeune, une .gelée prefque tranfparente ,
& il fe prend en une maffe tremblante comme uns
décoélion animale. C ’cft dans cette eau - mère
qu’exiftent auffi plufieurs matières falines qu’on
peut en féparer , fi , après l’avoir étendue d’uns
petite quantité d’eau, on l’évapore très-doucement
& avec les attentions qu’on doit apporter
dans ce génre d’expériences. Ce font des cubes de
'muriate de potaffe qui fe dépofenr ainfî fous forme
criftalline : les phofp’nates de foude & de chaux
qui en font partie, &. que d’autres effais y font
retrouver, y font très-peu abondans & trop maf-
qués par les premiers criftaux, pour pouvoir y être
fenfibles. Les réaétifs qui,les annoncent, préfentent
1 des phénomènes particuliers avec \e-petit-lait entier,
avant qu’il foit évaporé ou concentré : ce font
les diffolutions alcalines & métalliques. L’eau de
chaux, la diffolution de ftrontiane & de baryte,
précipitent très-fenfiblement le ferum du lait ; le
précipité eft un phofphate pulvérulent & infoluble.
La potaffe , la (oüde & l’ammoniaque y forment
un nuage, léger, qui n’eft que du phofphate de
chaux précipité. Parmi les fe!s métalliques, les nitrates
de mercure & d’argent font ceux dont on a 4e mieux examiné l’aêtion fur le ferum du lait. Le
premier y forme un précipité blanc-grifâtre quî
devient d’unè couleur rofée en fe féchant à l’air}
le fécond, en le précipitant, refte en pouffière
-blanche. L’un & l’autre de fes précipités donnent
des veftiges de phofphore quand on les diftillé feuls
ou avec du charbon en poudre à une température
affez élevée. Ils font compofés de muriate & de
phofphate métalliques colorés 8c falis par une matière
animale gélatineufe. L’aétion des acides fur
Ile petit-lait n’a rien de remarquable ; le fulfurique
concentré le colore & le charbone } le nitrique le
change en oxalique & en fachlaêtique. Le petit-lait
I concentré verdit le firop de violettes. RoueiE le
Ff f f