
vail de la vie, des propriétés bien différentes de
celles qu’ils avoienc primitivement. Outre que les
fubftances diverfes, entrant dans la formation du
corps des animaux, préfentoient, comme matériaux
immédiats, une réparation plus facile, parce
qu’elles étoient plus il'olées les unes des autres,
plus difpofées à être réparées, on reconnut encore
que celui de ces matériaux qui fembloit le plus
rapproché de quelqu’un de ceux du végétal, s’en
éloignoic cependant beaucoup plus par fa nature
intime, conîequemment par les phénomènes qu’il
offroit dans les expériences chimiques, qu’on ne
l’avoit penfé d’abord.
17. L’altérabilité des matières animales, déjà
depuis long-tems vérifiée, annonça que la complication
plus grande dans leur compofition en était
la principale caufe. On commença à concevoir
nettement pourquoi elles étaient moins permanentes
que les fubftances végétales ; pourquoi elles'
Le décompofoient, & plus facilement, & plus
promptementj pourquoi leurs changement étoient
plus rapides ; pourquoi elles ne reftoient jamais
dans le même état. Le nombre de leurs principes
primitifs plus grand, quand il n’auroit été augmenté
que d’un feulau-delà des trois qu’on avoit
bien reconnus dans les compofés végétaux ; fa-
voir : le carbone, l’hydrogène & l’oxigène, la
feule addition de l’azote à ces trois premiers élé-
mens conftituans de la matièie alimentaire végétale
, addition apportée par les phénomènes & la
pu«fiance de la vie , fuffit aux chimiftes modernes
pour expliquer leur altérabilité , en calculant la
multiplication des attractions que ce nombre de
principes devôit faire naître.
18. Cette dernière notion, acquife furtout par
la découverte de M. Berthollet, me conduifit à
_une autre non moins généra le "& non moins importante
fur la matière animale ; c’ eft que , privée
de l’azote qui en complique la compofition, fur- !
tout à l’aide de l’aétion foible de l ’acide nitrique, j
cette matière fembloit rétrograder & repaffer à :
l’état de fubftance végétale, telle qu’elle étoit
avant d’avoir fubi l’animalifation. C’eft ainfi que
je rendis facilement compte de la converfîon abonr
dartre du compofé animal en un acide femblable à
celui que fait naître également l’art chimique dans
les matières végétales, acide qu’il fournit même
plus abondant que ne le font les matériaux des
plantes, comme M. Berthollet l’avoic annoncé
quelques années après la découverte de la préparation
de l’acide du fucre ou oxalique par Berg-
mann.
19. Cette complication dans la compofition des
fubftances animales, fource commune de leurs
différences en même tems que celle de leurs analogies
avec les fubftances végétales, n’exifte pas
feulement dans l’addition de l'azote, mais encore I
dans celle du foufre & du phafphore. Ces trois I
corps combuüibles, réiïnis au carbone & à l’ hy- I
drogène J font le fbyer çommun des gaz fçtide? 1
que répandent les compofés animaux pendant leur
décompofition , par quelqu’agent que celle-ci foie
opérée. La tendance que deux d’entr’eux ont à
prendre la forme de gaz, 8c celle qu’ont les trois
autres pour fe diffoudre enfemble ou féparémênt ,
& à des dofes très-variées dans les deux premiers,
& furtout dans le gaz hydrogène, font les caufes
de cette fétidité qui a toujours été reconnue-pour
un des caraétères les plus marqués des fubftances
animales.
20. Il faut aufli compter parmi les importans
réfultats fournis par la chimie moderne , fur la
compofition des fubftances animales & fur leurs
différences générales, la préfence des phofphates
fi exa&ement établie par Schéele , par M. Berthollet
, & par mes propres, recherches dans ces
matières.- On verra bientôt que non-feulement
ces feis forment quelquefois le tiffîi prefqu’entier
de plu fieu rs organes, qu'ils donnent un cara&ère
plus, ou moins prorfoncé_à quelques-uns des liquides
des animaux, mais encore qu’ils jouent un
très-grand rôle dans les .phénomènes chimiques
que les uns & les autres préfentent à l’obferva-
teur, & qu’ils font naître quelques-unes des principales
propriétés qu’on y découvre par l ’ar.alyfe.
C'eft dans cette abondance des phofphates que
confifte une des plus faillantes différences qu’offre
au chimifte le compofé animal comparé au compofé
végétal.
21. Enfin, on doit rapporter à l’enfemble des
découvertes modernes & à l’analyfe nouvelle des
matières animales, on doit ranger au nombre de
leurs plus précieux réfultats la connoiffance qu’elr
les ont fournie fur la proportion ou le. rapport de
quantité entre les principes conftituans de ces matières.
Sans cette connoiffance toutes les autres
feroient ftériles ; c’eft elle qui les féconde en les
complétant. On a trouvé, que les matières animales
conienoient plus d’hydrogène & moins de carbone
que les végétales, plus de foufre & de phof.
phore, plus de phofphates de diverfes bafes, que
les compofés végétaux , & que leur paffage de
l’état de ces derniers à l ’état de compofés animaux
ne confiftoit pas feulement dans l’addition
de quelques principes & dans la complication de
leur compofition due à cette addition, mais encore
dans le changement de proportion de ces
principes.
22. Ainfi le réfulrat générai de tous les travaux
réunis fur i’analyfe animale , celui qui renferme
tous les autres réfultats particuliers, qui leur donne
naiiîance, qui en eft la fource commune, montre
les matières animales comme des compofés au moins
quaternaires, formés par i’ùnion de l’hydrogène,
du carbone, de l’azote &■ de l’oxigène, auxquels
font fouvent affociés, en proportion très-variable *
le fo u fre le phofphore , la chaux , la magnéfie &
la fou de. Ces compofés, moins carbonés , mais
plus hydrogénés que les fubftances végétales ,
font portés 3 l’état d’oxides par l’oxigène qu’üs
çoptiennent.
contiennent. La proportion de l’hydrogène y étant
plus forte, l’azote y étant très-abondant, le phosphore
& le foufre y réunifiant fouvent leurs at-,
traétions particulières, il en réfulte des matières
plus ou moins combuftibles, faciles à décompofer,
très-altérables, tres-fétides dans la plupart de leurs
altérations , très-difpofees à prendre le caractère
huileux, a fournir de l’ammoniaque. Voilà les
vérités bien établies par les nouvelles découvertes
: tout ce qui fuivra cette expofition générale-,
n en fera, ou qu’un développement, ou qu’une
application.
§. III. Des propriétés ou caractères chimiques. des
fubftances animales en généra/.
23. Il ne fuffit pas d’avoir énoncé, dans le para,
graphe précédent, la nature générale des compofés
animaux. Savoir de quoi ils font formés en
général donne bien une notion de leur différence
d’avec les végétaux, & de leur manière d’être en
particulier 5 mais cette notion ne peut être confi-
déréè que comme une introdu&ion à leur hiftoire
chimique, comme un premier moyen d’arriver à
traiter de celle-ci. Elle y conduit fans pouvoir y
fuppléer j elle peut la précéder, mais non la remplacer.
Une fois bien conçue, elle mène à l'intelligence
des véritables propriétés, chimiques dés
matières animales s mais jamais elle ne les cortfti-
tuera feule; elle doit même exiger qu’on pafie de
la confédération générale de cette compofition a
l’expofé des propriétés chimiques des matières
animales.
24. En effet, quand on connoît la nature des
principes qui entrent dans la compofition des fubf-
tar.ices animales, on peut expliquer les phénomènes
qu’elles préfentent lorfqu’on les met en
contaét avec différentes autres matières ; &: ce
font ces phénomènes, leur manière de fe comporter
avec les divers agens par lefquels on les
traite, qui conftituent les propriétés chimiques de
ces fubftances. Il y a deux manières- de confîdérer
ces propriétés': ou bien on peut traiter de celles
qui appartiennent également à l’enfemble de ces
fubftances, & qui fe trouvent dans toutes à un
degré plus ou moins marqué ; ce font leurs pro- ]
priétés chimiques générales; ©u bien on peut s’oc- j
cuper de ces propriétés par rapport aux matières j
animales particulières , & celles-ci contiennent les
cara&ères qui diftinguent chacune d’elles en par- !
ticulier.. Les premières, font l’objet des paragraphes
qui vont fuivre; les autres font examinées I
dans les. articles qui appartiennent à chaque ma- I
tière animale, comme ceux de lait 3 lymphe, muf *
clés 3 os, fang, urine 3 &c. i
2j. Par rapport aux propriétés qui appartien- :
nent ©n général à toutes les fubftances animales, ;
on ne connoiffoit autrefois qu’une bien petite
partie de celles qu’on a découvertes depuis une ^
douzaine dannées ; on ne s’occupoit guère que
Chimie. Tome IV .
de. l’iin des produits que l’on en obtehoit par l'action
du feu , & des phénomènes que monrroic
leur putréfaction ; la production de ce qu’on nom*
moit Yefprit & le je l -volatil, & qui n’eft, comme
on le verra bientôt, que du carbonate d’ammoniaque
par la diftillation. Ce n’étoit que par ce
caraCtère que l’on diftinguoit alors les fubftances
animales d’avec les matières végétalés ; mais depuis
les découvertes modernes il exifte un beaucoup
plus grand nombre de propriétés diftinCtives*
puifque le mode d’aClion de la plupart des corps
fur les compofés animaux fournit autant de caractères
propres à les diftinguer.
| 1{S. Quoique ces propriétés générales puiffent
etre aujourd’hui très-multipliées & divifées en
? autant d’efpèees qu’il y a , pour ainfi dire , de
coips qui agi fient diverfement fur les matières ani-,
males, il eft facile de les rapporter à un certain
nombre de chefs, que je réduis à neuf principaux.
: Je traiterai donc fous ce rapport, i°. de l’aCtion
du calorique fur ces matières 5 20. de celle de l'air j
30. de celle de l’eau; 4®. de celle des acides; y°. de
celle des alcalis ; 6°. des propriétés que les fubf-,
tances animales préfentent avec lesTels, les oxides
& les diffolutions métalliques 5 7°. de celles qui
naiffent de i’a&ion des fubftances végétales ; 8®. de
If ProPr^ £® acidifiable des fubftances animales, &
des principaux acides qu’elles donnent, furtout de
l’acide pruffique ; 90. enfin de leur tendance à la
putréfaction.
On doit voir que ces neuf tkres renferment
1 aétion de toutes les claffes ou de tous les genres
de^corps fur les fubftances qui m’occupent, &
qu’une pareille divifion ne doit rien laiffer à délirer
fur leurs propriétés générales & caraCtérif-
tiques.
§. IV. Des caractères tirés de iadlion calorique fur
les fubfiances animales en général.
17. Le calorique agit fur les fubftances animales
en les décompofant plus ou moins rapidement,
en changeant l’union de leurs principes, en en
féparant .des produits qui n'exiftoient pas tels dans
ces matières. Jufque-là cette aCtion générali ref-
femble à celle que cet agent exerce fur les fubftances
végétales ; elle s’en rapproche en tendant
egalement à leur deftruCtion, en ifolant leurs principes
, en les unifiant dans un autre ordre, en dé-
truifant la compofition homogène qui les formoit.
Mais cette analogie -difparoit bientôt en grande
partie , quand on examine avec attention ce qui
fe paffe dans cette décompofition ignée ; les phénomènes
font extrêmement différens, & les effets
plus compliqués qui ont lieu, font de nature à>
jeter le plus grand jour fur la nature même de leur
compofition primitive. Les découvertes auxquelles
l’obfervation attentive de ce phénomène a donné
lieu, & l’influence quelles ont eue fur la con-
noiffince des matières animales j font un des réful-r
Ss ss