
connoiffance réelle de la caufe de cette forte altération.
Depuis Tétabliffement de la do#rine
pneumatique 8c les découvertes qui l’ont fondée
ce phénomène eft un des faits chimiques les mieux
connus, On fait que le fer eft, dans Tordre des
métaux, le fécond, 8c immédiatement après, le
manganèfe, relativement à fa propriété côtnbuf-
tible , à fa tendance pour abforber & condenfer
à froid T oxigène atmofphérique. On en a la preuve
par une expérience auifi fimple que décifive. En
plongeant des fils de fer dans du gaz oxigène enfermé
dans une petite cloche au deffus du mercure
, on voit le volume de ce gaz diminuer au
bout de quelques jours, le fer fe rouiller à mefure,
fe gonfler ou fe bourfoufler en apparence, fe couvrir
d’une pouffière ou de fines écailles jaunâtres,
qui fe lèvent de deffus fa furface , qui ne tiennent
que peu à la couche métallique , & qui finiffent
par pénétrer dans fon intérieur fi la quantité du
gaz oxigène eft fuffifante , 8c le conta# entre les
deux corps prolongé affez long-te ms. Un peu d’eau
favorife finguliér.ement cette a#ipn., 8c Ton verra
plus bas pourquoi. Il y a un peu de calorique mis
en liberté,.8c la température s’élève fenfiblement
dans l’intérieur de. T appareil. Le fe r , en s’oxidant
ainfi à froid & fpontanément, augmente de poids
dans la proportion jufte de celui que le gaz oxigène
perd. Le même procédé ,, pratiqué dans le
gaz azote bien pur, ne produit rien deTemblable.
Ainfi, en considérant Ta#ion de. Tair entier fur
la fer 3 on voit qu’elle dépend du gaz oxigène qu’il
contient, 8c qu’elle confifte dans une combuftion
lente , dont le produit eft la rouille qui ronge ce
métal.
54- Autrefois on fe fervoit de cette oxidation
fpontanée du fer à l’a ir, pour préparer un médicament
qu’ on nommoit fafran de Mars apéritif. On
expofoit dans des vafes de terre ou de verre, neufs
de la limaille de fer à la rofée de mai. Les idées
que les alchjmiftes avoient conçues fur les- effets
de çette rofée, quoique chimériques fur leur caufe, ^
n’étqient pas-fans fondement fur leur réfultat. Il*
paroît certain que l’eau précipitée de l’air par fon
refroidiffement pendant la nuit, eft affez chargée
de gaz oxigène,-* pour agir avec une énergie très-
fenfible fur les corps qu’on y expofe. C ’étoit donc
par la, double a#ion de Toxigene atmofphérique
de l’eaiL,. que cetteoxidation s’opéroit. Le fer
ainffpxïdéabforboit peu à peu l’aciae carbonique
de Tatrnofphère, 8c jauniffoit en devenant du carbonate
: 8c en effet, la rouille dt fer 3 comme Tan-
çien fafran de Mary apéritif 3 qui n’eft qu’une ef-
pècede.rouille, traitée dans des vaiffeaux fermés
donne du gaz acide carbonique,. 8c paffe à l’écat
d’une poudre noire qui n’eft qu’un.véritable oxide,
comme on le prouvera bientôt. En raifon de cette
facilité avec laquelle le fer s’oxide fpontanément
& a froid à 1 air , on a. cherché depuis Iong-tems
à le préferver de la rouille & à le conferver avec
toutes fespropriétés, pour rendre.fon ufage plus ]
avantageux 8c fa durée plus'permanente.Les couches
de couleurs huileufes, Siccatives 8c de vernis, une
application d’huile fouvent renouvelée 8c toujours
entretenue, un enduit de carbure de fer rendu plus
ou moins adhèrent par la preflion 8c par les mord
e s , des lames mêmes de métaux beaucoup moins
oxidables fpontanément, comme l’étain , 8c même
de ceux qui font les plus précieux , comme l’argent
& l’o r , dont on réduit alors la condition à
fervir de confervateur 8c de foutien au fer y conf-
tituent les moyens les plus fûrs 8c les plus employés
qu’on a mis en pratique pour remplir ce but.
Jƒ• La propriété combuftible du fer s’accroît
beaucoup avec la température. On ne peut pas
chauffer ce métal avec le conta# de l’air.., furtout
jufqifà le faire rougir même obfcurémentfans
qu’il fe brûle. Lorfqu’on fait cette opération fur
de gros morceaux ou des barres de fer, elles fe
terniffent à leur furface ; elles deviennent d’abord
noires j enfuite cette furface fe fouléve, augmente
de volume , fe bourfoufle, fe fépare de la portion
àe fer non brûlée, fituée au deffous. Si on les laiffe
refroidir dans cet état, 8c fi on les, frappe, on
en détache des plaques noirâtres, caftantes 8c aigres
comme du verre, d’un tiffu très-ferré 8c très-dur
dans leurs dernières molécules, qu’on nomme ba-
titures de fer , à caufe du procédé qu’on fuit pour
les obtenir : -c’eft pour cela que les métallurgiftes
8c les ouvriers qui connoiffent bien cet effet, auquel
tient la deftru#ion très-prompte des plus
groffes barres de fer en grille ou en fupport dans
les fourneaux, penfent généralement qu’on ne peut
pas faire fondre du/krfans le brûler, 8c cela eft exa#
quand on le fond avec le conta# de l’air. Les ba-
tirures de fer bien broyées donnent une poüftîère
noire, attirableàTaimant.jFort femblables à l’oxide
oligifte ou oxidule , fi on les obferve avec foin,
on reconnoît qu’elles ont éprouvé une véritable
fufion au moins- pâteufe j que c’eft à cette fufion
qiTelles, doivent leur bourfouflement ou. leur foulé
ve ment ; que les molécules qui'les compofent,
fe font crifialiifées parle refroidiffement; que leur
rapprochement les rend plus dures 8c plus caftantes
que n’étoient celles dit fer3 8c que fi on les broie le
plus finement qu’il eft poflible, elles forment une
pouffière noire brillante. La portion de fer ainfi
brûlée ou oxidée, a augmenté de poids de vingt-
cinq à vingt-fept fur cent du métal. C ’eft elle qui
forme dans tous, les travaux où Ton chauffe, du fer,
ou on le. laiffe plus ou moins- long-tems plongé
rouge dans l’air, où on le frappe après l’avoir fait
rougir pour le. forger, le louder, ces lames, ces
feuillets, ces fragmens irréguliers , ces efpèces. de
fcories qui font fi fréquentes dans lés ateliers où
on traite ce métal. Il ne faut, cependant pas les
confondre avec le? véritables fcories mieux fondues.,
fritées ou. vitrifiées-, qu’on nomme mâche-
fer y 8c qui contiennent des-terres ou des cendres
de charbon de terre,, combinées avec l’oxide de
fér par la vitrification.
yé. Toùt.le monde a pu remarquer encore que
ces batitures de fe r , long-tems chauffées avec le
conta#de l’air,.ou plufieurs fois de fuiteexpofées
au feu , prennent-une nuance de rouge-brun très-
fenlible : c’eft une continuité d’ oxidation qu’on
opère bien mieux lorfqu’on fait chauffer 8c rougir
fortement du fer en limaille, qui, après avoir pris
la couleur noire, paffe enfuite au brun ou au rouge-
\foncé. Dans cet état, qu’on n’obtient que par une
agitation continuelle en même tems qu’à une haute
température foutenue pendant plufieurs heures de
fuite, l’oxide de fer. contient plus de 0.40 d’oxi-
gène , 8c il eft fous la forme de pouffière plus ou
moins tenue. On nommoit autrefois cet oxide brun
fafran de Mars afiringent. Les propriétés de cette
efpèce d’ oxide diffèrent de celles du précédent ou
de l’oxide noir. On peut y diftinguer deux portions
d’exigène, parce qu’elles y adhèrent avec des degrés
de force différens. Les 0.25 de ce principe y
tiennent bien plus que les c.iy à 0.2,0 qui y font
ajoutés dans l’état d’oxide brun : on pourroit appeler
la première portion oxidulante, 8c la fécondé
oxidante. Celle-ci peut être aifément enlevée par
le fer métallique , qui, en partageant avec le premier
cet oxigène oxidant, conftitue un oxide
noir uniforme dans toute la maffe. C ’eft ainfi que
M. Vauquelin a trouvé qu’en chauffant parties
égales de fer en limaille 8c d’oxide de fer rouge ,
on obtient, fans qu’il fe dégage rien, un total
d’oxide noir, qui ne contient plus qu’environ 0.25
d’oxigène , tandis que T oxide rouge en contenoit
auparavant 0.40 à 0.49. L ’oxide brun de fer n’eft
pas d’ ailleurs rédu#ible par la feule a#ion du feu,
& ne laiffe pas féparer fon oxigène par le feul
calorique.
' 57. Tous les phénomènes déjà indiqués d’oxidation
du fer n’appartiennent qu’à fa combuftion
lente j 8c il eft cépendant un affez grand nombre
de circonftances ou ce métal brûle avec une rapidité
8cune énergie qui repréfentent une véritable
déflagration , une inflammation plus ou moins
violente. Quand on jette , par exemple, de la limaille
de fer dans un brafier bien ardent, elle
brûle avec des étincelles 8c une décrépitation
très-fenfibles. La même chofe a lieu lorfqu’on la
fait tomber fur la flamme d’une bougie, ou lorfqu’on
lance à travers de la limaille très-fine. En
vifitant les fourneaux ou Ton fond ces mines, les
forges où Ton affine la fonte, les ufines où on
refond la fonte au réverbère, 8c où on la coule
dans de Vaftes moules , les ateliers où Ton donne
au fer une chaude pour le forger , en le frappant
à coups redoublés, on voit partour brûler ce
métal avec une flamme vive, avec des étincelles
très-brillantes 8c lancées au loin, comme des gerbes
de feu ou d'artifice. En faifant paffer à travers
des fils mêmes affez gros de ce métal l’étincelle
éle#rique foudroyante , au moyen d’une forte
batterie, on v o it , comme Ta le premier indiqué
le profeffeur hollandais Van-Marum, les fils
s’enflammer avec bruit, perdre leur tiffu 8c leur
folidité, fe pulvérifer avec fracas, & fe diftiper
dans Tair en une .fumée qui fe condenfe en pouffière
d’un brun noirâtre. Enfin , le- fimple art de
battre le briquet, fi ingénieufement imaginé pour
fe procurer au feu, n’eft fondé que fur la propriété
qu'a ce.métal, même à Tetat d’acier , de
s’ allumer 8c de s’enflammer dans Tair 5 8c les
étincelles que Ton' obtient ne font que des parcelles
àe fer détachées du briquet par la pierre
dure , fi fortement comprimées 8c percutées,
qu’elles rougiffent fur le champ , 8c qu’elles s’enflamment
à l’aide du gaz oxigène atmofphérique :
aufti, en recueillant, le produit de ces étincelles
fur des papiers blancs, on obtient une poudre
noire, dont chaque grain, fortement groflî par
la loupe , offre un petit boulet arrondi 8c creux
d’oxide noir de fer très-çaffant, quoiqu’encore
attirable à l’aimant.
y8. On augmente beaucoup encore l’énergie 8c
la rapidité de cette combuftion ardente lorfque
Ton plonge un fil de fer rougi dans un verre rempli
de gaz oxigène , comme Ingenhousz l’a ob+
fervé le premier. On a tellement varié 8c agrandi
fon expérience, qu’on en fait aujourd’hui une
de celles qui donnent le plus beau fpe#acle qu’on
puiffe voir. On remplit de gaz oxigène un flacon
de verre blanc, qui porte un fond maftiqué de cuivre,
en laiffant un peu d’eau fur fon fond : on attache
à un bouchon de liège, recouvert à fa face
inférieure d’une couche de fer-blanc pour empêcher
le liège de prendre feu , un fil de fer de
clavecin , ou un reffort mince de pendule, à
l’extrémité duquel on place un peu d'amadou allumé
: on remet enfuite le bouchon dans le goulot
du flacon ; l’amadou, plongé dans le gaz
oxigène, s’allume vivement, fait rougir l'extrémité
du fil ou du reffort 5 & celui-ci, une fois bien
rouge, fe fond 8c brûle avec des gerbes 8c des
étincelles très-brillantes 8c très-nombreufes. Chacune
d’elles , ainfi que la portion de fer fonda
8c rouge-blanc qui tombe goutte à goutte de l’extrémité
du fer, recueillie au fond de l’eau, eft une
petite fphè.re creufe d’oxide de fer noir fondu. Souvent
, fi le gaz oxigène eft bien pur 8c affez abondant,
tout le fer brûle avec cet éclat brillant
jufqu’à la dernière molécule qui y eft plongée.:
Lavojfiera conftaté qu’il augmentoit d’environ de
0,27 pour cent. On produit le même incendie
du fer en verfant, à l’aide d’un tube , du gaz
oxigène fur le fer fondu au chalumeau dans un
creufet de charbon. On donne encore naiflance à
un phénomène analogue fans avoir recours à l’action
du gaz oxigène, foit en enfonçant dans la
flamme d’une bougie ces fils de fer extrêmement
fins qui forment la bafe des plus petites branches
des carcaffes que les femmes emploient
pour leurs bonnets, foit en expofant du fer au
foyer des verres ardens , qui raffemblent les
rayons foiaires 5 enfin, on verra par la fuite que
S s. 2