
trine j auffi, quoique les recherches chimiques
fur Y étain foient loin d'être épuifées, on verra
cependant que l’hiftoire de ce métal , préfentée
d'après les données exactes de la chimie pneumatique
, offre des réfultats précis & exaéts , & un
enfemble beaucoup plus parfait qu'ils ne l'étoient
dans les ouvrages fyftématiques écrits avant ou
même depuis cette heureufe époque.
7. U étain pur eft d'une couleur blanche, aufïî
belle & aufii éclatante que celle de l'argent; &
Il cette couleur n'étoit pas altérable, il feroit auffi
précieux que ce dernier métal par cette propriété.
On le regardoit autrefois comme le plus léger
des métaux, lorfqu'on faifoit une claffe particu-
culière & diftinête des demi-métaux. Sa pefanteur
fpécifique eft de 7,291 à 7,500, fuivant les expériences
comparées des phyliciens, depuis Muf-
chenbroeck jufqu’ à M. Brillon, 8c en prenant
différens étains. Il tient le douzième rang par cette
propriété.
8. C'ett un des plus moux métaux : on le raie
avec l'ongle, & il n’eft prefqu'aucun métal qui
ne puiffe entamer fa furface par la prelfion ou le
frottement. Il fe laiffe très-aifément couper au couteau
: on le ploie facilement, & il fait entendre
un bruit particulier que l'on nomme le cri de L'étain.
On lui a comparé le zinc par cette propriété ;
mais elle eft bien éloignée ou bien plus foible dans
ce dernier métal, que dans Xétain. Ce phénomène
paroît t :nir à l'écartement des parties, & à la
rupture lubite qu'elles éprouvent par le pli, quoique
Y étain ne fe brife que difficilement. Sa qualité
lonore eft foible 5 fa duétilite eft afîez grande pour
qu'on le réduife par le marteau & par les cy-iindres
du laminoir, en lames ou en feuilles très-minces,
qui font d'un grand ufage dans les arts. 11 tient le
cinquième rang parmi les métaux , par cette propriété
> il a peu d'élafticité & de ténacité : un
fil de ce métal, d'un dixième de pouce de diamètre
, foutient, fans fe rompre, un poids de
quarante-neuf livres & demie.
9. h*étain eft un des plus dilatables des métaux
par le calorique. Dans les expériences pyrométriques
de Mufchenbroèçk , un petit cylindre de
ce métal, de fix pouces de longueur,’ expofé à
la chaleur de l’eau bouillante , a donné une dilatation
égale à 164. Ce phyficien met l'étain au
premier rang des métaux dilatables, & il place le
fer au dernier rang : cela fembleroit indiquer que
la dilatabilité des métaux fuit la raifon de la fufi-
bilité. La propriété condu&rice du calorique y eft
auffi très-prononcée. Après le mercure, Y étain eft
la fubftance métallique la plus fufible; il vient
immédiatement avant le bifmuth 8c le plomb par
fa fufïbilicé. M. Guyton l'exprime par le degré
168 de la graduation de Réaumur. Quand il eft
fondu, il ne fe réduit en vapeur qu'à une très-
haute température j il a même été regardé comme
tin des métaux les plus fixes, & c'eft pour cela
que les alchimiftes le croyoient très-rapproché de
l'argent. Si on la biffe refroidir lentement » 8c fi,
lorfque fa furface eft figée , on la perce & l’on en
décante avec précaution la partie encore liquide,
le fond préfente des criftaux en rhombes allez
gros, formés par l’affemblage d’un grand nombre
de petites aiguilles réunies longitudinalement.
C'eft un de mes élèves, M. Hapel-Lachenaye,
occupé en ce moment à la Guadeloupe, où il eft
établi depuis plufieurs années à des recherches
précieufes pour les productions coloniales , qui le
premier a fait criftallifer ainfi de Xétain dans mon
laboratoire en 1782.
En agitant fortement Xétain fondu dans une boîte
fphérique, il fe fépate & fe fige en petites parcelles
, qui, paffées à travers un tamis de foie,
donnent une pouffière d'étain. C'eft ainfi que les
Anglais le préparent pour les ufages pharmaceutiques.
10. L3étain eft très- bon conducteur de l'éleCtri-
cité ; auffi l'emploie t-on fouvent pour garnir les
conducteurs , les bouteilles de Leyde. 11 en eft de
même de l'ëleCtricité animale ou galvanique , qu'il
excite fortement par fon contaCt avec les n rfs &
là communication avec un autre métal. Il a une
odeur très - remarquable , dont il imprègne les
mains & les corps qu'on en frotte. Il jouit auffi
d’une faveur très-lenfible, & il n’eft pas douteux
qu'ii ne puiffe avoir des propriétés médicamen-
teufes très-prononcées, comme je le ferai voir,
par l'expérience, à la fin de .cet article.
11. L'étain n’eft pas très-abondant au fein de la
terre , au moins en Europe. On connoît très-peu
ies mines d'étain de 1 Afie & de l’ Afrique. Il y en
a quelques-unes-en Sibérie ; elles font & plus fréquentes
& plus r iches en Cornouailles, en Bohême
& en Saxe. Les plus habiles minéralogiftes n’ont
diftingué encore que trois efpèces de mines d'étain
■ lavoir : i'étain natif, les oxides de ce métal
& fon oxide fulfuré.'
12. L étain natif a été un objet de doute & de
difeuffion en minéralogie. On a dit d’abord en
avoir trouvé en Saxe , en Bohême 8c à Malaca.
Quelques naturaliftes en aVoient nié l’exiftence ;
mais M. Woulf, chimifte anglais, a terminé cette
difpute feientifique en trouvant, en 1766, de IV-
tain natif à Cornouailles. Cet étain eft gris 8c brillant
dans fa fracture j il s’applatit, 8c donne des
lames brillantes & dudiles par le marteau. On le
trouve, ou en lames minces engagées dans une
gangue de quartz, ou criftallifé régulièrement.
Mi Quift a confirmé , par fes expériences, la nature
de ce minéral. On a cru en avoir trouvé en
France, il y a quelques années, près de la commune
d’Efpieux, dans le département de la Manche.
M. Schreiber, infpe&eur des mines, envoyé
fur les lieux par le confeil des mines, ayant examiné
avec foin les échantillons & les lieux d’où
ils provenoient, a décidé qu’ils n’y étoient qu’accidentels.
Ces morceaux étoient gercés 8c recouverts
d’oxide gris : on y voyoit de 'Xétain métab
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fique, dü&ile, adhérent à une fubftance blanche,
lamelleufe, criftallifée, qui a été reconnue pour
du muriate d'étain : ils n‘étoient que dépofés dans
un lieu particulier, fans aucune autre trace de mine
d'étain, cantonnés & ifolés de manière à faire
pen fer qu'ils n'avoient ni l’apparence ni les propriétés
d'une production de la nature, & tout
annonce qu'ils provenoient d'un ancien travail en
ttain qui avoit été enfoui dans la terre.
13. L'oxide d'étain natif eft la mine la plus fréquent
© de ce métal, &c en même tems la plus
variée. Quelque nombreufes que puiftent être ces
variétés, il faut les ranger toutes dans une feule
& même efpèce. On l'appelle en général criftal ou
criftaux d'étain. La forme primitive de ces criftaux
, fuivant M. Haiiy, eft celle d'un cube fai-
fant la fonction de parallélipipède, dont les dé-
croiffemens font différens, fur deux faces oppo-
fées, de ce qu’ils font fur les quatre autres faces :
celles-ci repréfentent alors les pans d’un prifme.
Ces criftaux .offrent fouvent un angle rentrant,
formé de quatre pans triangulaires, provenans de
la jonétion de deux portions d’un même criftal,
dont l’une eft appliquée contre l’autre dans une
fimation renverlee. C ’eft ce que M. Haiiy nomme
étain oxidé hémitrope ou à demi - retourné. Il y a
une autre variété de forme, qu’il appelle oxide
d'étain diftique ou à deux rangs de facettes, ayant
trente-fix faces, dont quatre font verticales. Les
couleurs grife, jaune - claire, blanche, un peu
jaunâtre, rouge , brune & noire, forment autant
de variétés d’oxide d'étain natif, que les minéralogiftes
ont diftinguées & décrites quelquefois
comme des efpèces. On a fouvent 8c pendant
long-terri^confondu le tunftate de chaux natif
ffous formeloctaèdre avec l’oxide dé étain blanc ;
mais outre ia forme oétaédrique, qui n’eft point
celle de ce dernier, le tunftate prend, comme on
l’a dit ailleurs, une couleur jaune - citriire par
l’aûion des acides nitrique & muriatique ; ce que
ne fait point l’oxide d'étain. La pelanteur fpécifique
de ces oxides d'étain va de 5,955 à 6,750.
M. Kirvan diftingué quatre variétés de cette efpèce
3 favoir :
a. L’oxide blanc , nommé mine d'étain blanche
ou fpatk d'étain , demi-tranlparente , criftallifée ,
blanchâtre, tirant fur le gris, le verdâtre ou le
jaunâtre, ne contenant pas d’arfenic comme on
l’avoit cru , trouvé déjà la plus pure des mines
d'étain par Margraff. Sa pefanteur eft de 6,007.
b. L’oxide opaque brun ou noir, la plus commune
de ces mines , fouvent criftallifé, contenu
dans du quartz, du mica, du fluate de chaux,
jamais dans du carbonate calcaire, nommé en gros
criftaux |fingraupen par les Allemands , 8c en petits
triftaux iini(witter3 contenant près de 0,80 d’étain,
toujours uni à du fer, pefant 6,750. M. Klaprorh
a donné l’analyfe de cette variété, venant d’Al-
terna en Cornouailles j il y a trouvé les proportions
fuivantes :
v E t a in . . ................................................ . 77,50.
Oxigène.......................... 21,50.
Silice........................................................ 0,75.
> F e r . . . , . . L .................. 0,25.
c. L’oxide dé étain rougeâtre ou d’un jaune-rougeâtre
, nommé mine d'étain en grenat par les naturaliftes
j il eft en petits criftaux quelquefois demi-
tranfparens, ou en-forme fphérique ftriée comme
1 hématite ou la zéolite ; il pèfe 5,000 à 5,800; il
contient plus d’oxide de fer que de celui d'étain.
d. L’oxide d'étain fableux , pierre d'étain , [ing-
flein des Allemands, & tinberg des Suédois : c’eft
de l’oxide d'étain de toutes les couleurs précédentes,
diffémné dans une terre quartze.ufe ou
fablonneufe plus ou moins tendre.
14. L’oxide d'étain fulfuré , ou Vétain minéralifé
par Le foufre des’minéralogiftes, a été découvert &
décrit pour la première fois par Bergman, parmi
des minéraux de Sibérie. Il en a trouvé de deux
variétés : l’une, de la couleur du zinc , d’un tiffu
fibreux, contenant 0,20 de foufre 8c 0,80 dC étain;
l’autre, enveloppant la première comme une in-
cruftation jaune, fort femblai L à ce que les chi-
miftes avoient nommé or mujfif3 contenant 0,40 de
foufre, un peu de cuivre 8c le refte en étain.
Depuis cette découverte, M. Klaproth a examiné
de Xétain fulfuré venant de la paroiffe de Sainte-
Agnès , dans le Cornouailles, en Angleterre. Sa
pefanteur fpécifique eft de 4,3 50.Sa couleur, nuancée
de gris-pâle 8c de gris-foncé, eft analogue à
celte de l’argent dans fes parties les plus pures. Sa
caffure eft grenue 8c métallique. Il y a trouvé les
proportions fuivantes :
; foufre.................... ................ . . . . . . 0,25.
Étdin................................-..........................0,34.
Cuivre. I ......................... .. 0,36.
F e r . ............................. .............. ... 0,02*
Le cuivre paroît ici plus abondant que Y étain;
mais fa quantité, qui varie, eft fouvent au deffous
de celle de Xétain.
15. On faifoit autrefois l’effai des mines d'étain
par le feul grillage & la réduction à l’aide de flux
réduétifs. Le grillage, que plufieurs docimaftiques
croyoient néceffaire à la volatilifation de l’arfenic,
ne l’eft que pour atténuer 8c divifer fes m nés
ordinairement dures 8c très-denfes. On le faifoit
dans une capfule couverte, afin d’éviter qu’il ne
fe diffipât de l‘étain. Quelques-uns confeilloient
d’y mêler un peu de poix réfine à la fin, pour empêcher
Xétain de fe trop oxider. On fondoit la
mine grillée très-promptement, avec trois fois fon
poids de flux noir & un peu de muriate de foude
décrépite. Les poids comparés de la mine avant le
grillage & après , ainfi que du culot métallique
que l’on obtient 8c de la feorie qui le recouvre ,
donnoient la quantité de métal qu’on pouvoit en
attendre.
16. Cramer, un des plus célèbres auteurs de