
five avec une diffolution de fui fa te de fer & d’a-
Jun, à fe fervir d’acide muriatique pour aviver le
bleu, qu’on Iavoit à-grande eau. Ce très-bon procédé
eft encore en grande partie fuivi aujourd’hui
dans les ateliers. On nomma lejfîve du fang la liqueur
provenante de l’alcali traité avec cette fubf-
tanpe, puis diffous dans l'eau, & difpofée-a précipiter
le fer en bleu.
87, .Les chimiftes travaillèrent à l’envi fur ce
procédé, & cherchèrent d’abord jes moyens variés
de rendre l'alcali fufceptible de produire cette
couleur. Brown, en 1724, trouva que l'alcali traité
avec la chair acquéroir cette propriété comme
avec le fang, & il effaya d'expliquer fa formation ,
à l’aide d'un principe bitumineux du fer dé veloppé
par le fang & fix é fur l’ alumine. Geoffroy l:e médecin
découvrit en 1715, que l'huile ,.la laine ^ la
corne de cerf, l'éponge , le thim même calcinés
avec l’alcali, lui donnoient la même adtion fur le
fulfate de fer j il expliqua par-là le bleu déjà décrit
dans la foude , traitée à l'aide des acides par
Henckel, & il adopta la théorie de Brown. Neumann
effaya de traiter l’alcali avec beaucoup d’huiles
différentes, & parvint à lui communiquer la
nature teignante par ces corps inflammables. Me-
non donna , dans les Mémoires des favans étrangers
de l’Académie des fciences dé Paris, une nouvelle
théorie du bleu de Pruffe ; il prétendit que
le bleu étoit la couleur naturelle du fer, & que le
fang la mettoit à nu en purifiant ce métal ou en
l’ affinant. Ainlï quarante ans fe paffèrent fans
qu’on ajoutât d’ autre notion à la première découverte
, que la poffibilité d’obtenir du bleu avec
? nieux travail de Macquer, fans qu’on ait rien
ajoute a fa doétrine, qui fut adoptée par prefque
tous les chimiftes, & qui les fatrsfaifoit alors. On
; fe contenta de continuer les recherches fur les
; corps capables de phtogifiiquer, comme on le di-
. fort, l’alcali. Weifman trouva cette propriété dans
; les huiles empyreumaciques 5 Model, dans la fuie 5;
; Cartheufe^, dans plufieurs cendres végétales j
Jacobi, dans le charbon de vigne ; Spielman, dans
les bitumes, & Goetling, dans les champignons.
Jufqu'en 1775 on ne propofa aucun changement,
aucune modification a la théorie de Macquer.
diverfes matières différentes du fang, furtout des
fubftances animales.
88. En 1752, Macquer, dans un excellent Me- ;
moire inféré parmi ceux de l’Académie des fcien- ;
ces, fît faire un pas beaucoup plus avancé à la i
théorie de cette préparation, en découvrant la \
décoloration du bleu de Pruffe par les alcalis ; i l j
fit voir que, les Ieffives alcalines, faturées de cette '
matière colorante , en les faifant paffer fur du bleu
de Pruffe jufqu’ à ce qu’elles ceffaffent de le décolorer,
reformoient du bleu pur & abondant lorf- |
qu’on les verfoit dans une diffolution de fulfate |
dé fer ; que ces Ieffives faturées étoient dans un :
autre état que la leffive immédiate du fang, puif- .
que celle-ci ne précipitoit pis immédiatement le :
fer en bleu , mais en gris ou én vert, à caufe de .
la portion alcaline non faturée. Il entrevit que la ;
matière, colorante faturoit les alcalis à la manière :
d’un a ci de 4. qu’elle y adhéroit beaucoup, ainfi
qu’au fer, puifque les acides Amples, fuivant lui, I
ne l’en dégageoient pas ; que , pour la leur enle- J
vef.fi?'la porter fur le fer, il falloir employer une
affinité double. Il fubftitua à la théorie vague de
Brown &\de Ménon celle de l'àlcali faturé par le
phlogiftique5 ceîui-ci fe reportoit fur le fer, qu’il
fûrehargeoit en le réparant des acides.
'8y. Plug de vingt an$ s'f'çoiüèfent après Tingé-
90. A cette dernière époque,. Bergman , dans
: fa U'ijfsrtaiio.ï fur les attrapions électives, commença
à jeter quelque jour nouveau fur cet objet,
i en préfentant la matière colorante du bleu de
i Pruffe comme un'acide diffinét, ayant fes attractions
particulières. Plufieurs chimiftes, entr’au-*
; très Deliiis & Scopoli/firent beaucoup plus d’attention
aux produits du bleu de Pruffe par le feu ;
i ils remarquèrent qu’il donnait beaucoup d’ammoniaque,
MM. Deyeux & Parmentier obfervèrenc
que, traité par la chaux & les alcalis fixes, il dé-,
i gageoit une 'forte quantité de cet alcali volatil.
On foupçonna dès-lors qu’ il en contenoit les matériaux
comme lès fubftances animales, & cette
idée a fans doute guidé les chimiftes, qui ont en-
fuite entrepris des recherches' fur cet objet. Fon-
tana trouva que l ’acide fulfurique, diftillé fur le
bleu de Pruffe, paffoit a l’état firlfureux, & q.ue
■ ce corps coloré détonoît avec le rtitre. M. Laü-
■ driani découvrit que dans fa diftillation il don-
inoit, outre l’ammoniaque, un mélange de ga^
j azote & de gaz hydrogène brûlant en bleu, & ne
I détonant pas avec le gaz, oxigène.
! 91. On préludoit eh quelque forte ainfi aux inv-
; portantes découvertes de Schéele, qui s’eft élevé
j tout à coup au deffus de tous ceux qui s’étoient
j occupés de cette matière. Ce célèbre chimifte en*
• treprit de connoïtre, & les compofés dont l’acide
pruffique faifoît partie, & les propriétés de cet
j acide qu’on n’avoit pas pu parvenir à ifoler avant
j lu i, & fa nature intime, foit en le décompofant
! foit en le produifant de toutes pièces avec des ma*
! tériaux moins compliqués que les fubftances anima*
î Ses découvertes fur ces points divers font con*
fignées dans deux Mémoires inférés dans les trimef-
| très de l’Académie de Stockholm,.de décembre
1751 & janvier 1783. Il commença par examiner la
: leffive du fang; il vit quelle s’altérôit par le contadB
de l’acide carbonique gazeux ; que cet acide en' dé-
gageoir une vapeur qui changeoit en bleu du fui*
fate de fer placé fur un bouchon au haut de l'a-p-
pàreil 5 que l’ acide fulfurique l’en féparoit auffi à
l’aide de la diftillation 5 que le bleu de Pruffe, dif-
tillé avec cet acide, donnoit un fluide élaftique
qui teignoit l’oxide de fer en bleu > que, diftiliè
ïe u l le . bleu* de Pruffe donnoit une portion de
cette vapeur teignante, & de l’ammoniaque qui
cfi écojc faturée ; <ju§ la leffive du fang diffolvoiç
un peu d’oxîde de fe r , qui la rendoit plus folide
& plus permanente 5 que le fer avoit éminemment
la propriété de fixer l’acide pruffique ; que le feu
& les acides étoient néanmoins fufceptibles de
volatilifer cette matière colorante > qu'une leffive
alcaline, en décolorant le bleu de Pruffe, en difr
folvoit une petite portion toute entière, & pre-
noit ainfi un caraétère plus durable que la leflive
du fang ; qu’un acide diftillé avec le pruffiate provenant
de la décoloration du bleu de Pruffe , en
précipitoit une quantité abondante de véritable
bleu de Pruffe, parce qu’il n’étoit décompofabîe
que dans fa portion de pruffiate alcalin, & non
pas dans fon pruffiate ferrugineux.
92. Après avoir trouvé la poffibilité d’obtenir à
part la matière cplorante du bleu de Pruffe, & de
pouvoir en obferyer les propriétés dans fon état
pur 3 il rechercha Les moyens les plus prompts &
les plus fûrs de faire cette réparation inconnue juf-
que-la aux chimiftes, qui n’avoiènt encore èu cette
matière que combinée aux alcalis & aux métaux :
Schéele préféra le procédé fuivant qu’on met depuis
lui en ufage. On fait;bouillir dans fix pintes
d’eau deux parties de bleu de Pruffe & une partie
d’oxide de mercure rouge, jufqu’à ce que tour foit
décoloré : on ajoute à la leffive une demi-partie de
limaille de fer & un peu moins d’acide fulfurique ;
on diftillé & l’on retire un quart à peu près de la
liqueur que l’on rédifié en la rediftillant fur de la
craie, pour abforber la portion d’acide fulfurique
qu’elle peut contenir. Dans cette opération l’oxide
de mercure enlève l’acide pruffique à celui de fer,
& fe diffout en.pruffiate de mercure blanc , crif-
tallifable, &c. Le fer, à Tétât métallique qu’on y
ajoute, réduit l’oxide de mercure ; & au moment
ou il s’unit à l’acide fulfurique ajouté en même
tems, la chaleur qu’on emploie volatilife l’acide
pruffique féparé du mercure redevenu métallique.
L’acide pruffique ainfi obtenu en liqueur & en
partie en gaz, produit, quand on l’unit aux .alcalis,
les mêmes effets que les Ieffives du fang & du bleu
de Pruffe décoloré. On reviendra bientôt fur fes
caractères diftin&ifs.
93. Ce n’étoit pas affez pour Schéele d’avoir
trouve Je moyen d’ifoler & d’obtenir pure la matière
colorante du bleu de Pruffe ou l’acide pruffique
; il vouloit encore reconnoître de quoi il
étoit compofé, & favoir conféquemment comment 1Q5matières animales le formoient. Pour déterminer
fes parties conftituantes , il obferva d’abord que
dans le procédé de fouftraétion, l’air du récipient
étoit inflammable 5 qu’en décompofant les pruf-
fiates par le feu , il obtenait de l’ammoniaque &
de l’acide carbonique ; que quelques métaux fe
trouvoient enfuite réduits par la diftillation de ces
prufliares métalliques. Il foupçonna dès-lors que
cet acide étoit compofé d'ammoniaque & d’huile,
& dirigea fes recherches ultérieures fur ce foup-
çon : mais il ne put parvenir à former le compofé
colorant avec de l 'ammoniaque 5c différentes huiles {
ou graiffes chauffées enfemble. Voyant que l’eau
étoit un obftacle à cette formation de l'acide prui-
fique, il conduifit fes expériences d’une autre ma-
nière, eu unifiant l’amnioniaque avec le principe
; inflammable fec qu’il admettoit dans les huiles, &
avec l’acide carbonique également fec. 11 vit le
charbon feul, chauffe fortement avec les alcalis
fixes ; leur donner la propriété de colorer le fer
en bleu. Ayant chauffé ces deux matières dans des
creufets, il ajouta dans l’un du muriate d’ammoniaque
au moment où le premier mélange étoit
rouge-blanc j & il continua à le chauffer jufqu'à ce
qu’il ne fe dégageât pas de vapeur. Ce procédé
lui fournit une leffive qui produisit beaucoup de
bleu de Pruffe, tandis que 1 opération où il s'étoit
contenté de chauffer l'alcali & le charbon fans addition
de muriate d'ammoniaque., n'en donnaqu’une
quantité.inappréciable.
94. Schéele conclut de ces dernières expériences,
que l’acide pruffique 011 la matière colorante
du bleu de Pruffe étoit un compofé d’ammoniaque
& de charbon tres-fubeil, très-attenué ; que ce
compofé, devenu fixe par la forte chaleur à la-
quelle il fe formoit, s’uniffoit à l’alcali fixe qu'il
rendoit capable de précipiter du bleu de Prude,
ou que le pruffiate alcalin, l'alcali pfuffien, n'étoit
qu’un compofé d'alcali de charbon & d'ammonia-
,que ; que dans la diiliiiation du bleu de Pruffe, le
feu abforboit le principe inflammable, & lailfoit
dégagerl acide carbonique & l’ammoniaque ; qu'un
peu d’acide pruffique fe féparoit indécompofé ;
enfin, que l’oxide de manganèfe chauffé avec lui
en rendoit la décompofition complète. L'acide
pruffique, extrait par fon procédé, avoit, fuivant
lui, pour caraétères une odeur de fleurs de pêcher,
une faveur douceâtre d’abord, âcre & brûlante
enfuite; la propriété de ne pas rougir les
couleurs bleues , mais de précipiter le favon &
les fuifures alcalins; celle de s’unir auxmlcaiis, &
de former des fels capables de précipiter les diifoi
luttons métalliques, & fpécialement celles dû-fer
en bleu, Il diftingue parmi les compofés falins de
cet -aritte le pruffiate de chaux, qu’il concilie
comme rres-pur, pour fervir de liqueur d’épreuve
propre à reconnoître & à indiquer le fer fans er- ’
reur dans les eaux, &c. ; liqueur que les chimifles
cherchent avec beaucoup de foin depuis un grand
nombre d’années. Deux ans avant le travail de
Scheele , en 1780, je me fervois de ce pruffiate
calcaire dans mes cours comme liqueur d’épreuve
pour reconnoître le fer.
9J- Tel étoit l'érat de la fcience à l'égard de la
matière colorante du bleu de Pruffe ou de l'acide
pruffique, lorfque M. Berthollet communiqua , à
la fin de 17S7, à l’Académie des fciences un nouveau
travail où il employa avec une grande fagacité
à l'aide des données nouvelles de la doélrine pneumatique
françaife , les expériences de Schéele
en y en ajoutant plufieurs autres , & convertit la
théorie encore incertaine & inadmiffible du chi