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11 faut en effet voir avec l'a volatilité, dans la
caufe de l'Ddoriff.ation, la diffolubilité dans l'air ;
& , à cet égard, il ÿ a beaucoup plus de. diffolu-
tion dans l’air de la part des corps qu'on en croit
les moins fufceptibles, qu'on ne l'a même foup-
çonné jufqu'ici. C'eft ainfi que les métaux eux-
mêmes , frottés un peu fortement avec la main 3
s’attachent à la peau , & y biffent une couche affez
mince & affez divifée pour que, placée à quelque
diftance du nez , les molécules que l'air détache
Éi la peau fe portent fur les nerfs olfaétifs,
& y faffent naître la fenfatioh de l'odeur affez fortement
pour qu’on diftingue chaque métal à fon
odeur propre.-
9°. Cette odeur des métaux eft une des preuves
les plus fortes de la non-exiftence de l'arôme, car
on ne s’eft jamais avifé d’admettre un efprit reHeur
métallique , & cependant l ’odeur de plufieurs métaux
tft très-forte & très-fenfible, furtout celle du
cuivre , du fer, du zinc, de l'étain, & c. Ce font
donc des molécules mêmes de ces métaux qui font
diffoutes par l’air, & portées avec lui fur l'organe
blfaéiif.
io°. L'odoration métallique eft un des phénomènes
dont l ’application à celle de tous les corps
odorans , & fpécialement à celle des arômes végétaux
, eft la plus propre à faire bien concevoir
Comme à confirmer mes idées fur le prétendu efprit
reHeur.. En effet, comme l'odeur du cuivre
ii eft pas due à un principe particulier qui s'en
exhale , mais à des molécules de cuivre qui font
portées dans le nez , de même l’odeur des végétaux,
depuis la plus foible jufqu’à la plus fragrante,
n'eft pas produite par un principe fpéeial exhalé
d’eux , mais par une matière végétale toute entière,
un extrait, un mucilage, une huile; en un
mot, par un des matériaux bien reconnus des végétaux,
qui eft réduit en vapeur.
i i °. Comme chaque principe de l’odeur ou
chaque arôme végétal eft toujours un des matériaux
immédiats des plantes actuellement en vapeur
dans fa ir , l’eau, d’où il fe dégage le plus
fouvent, tenant ce principe en diffolution, tend
à l’altérer & l’altère véritablement^ comme di-
verfement, fuivant fa nature & fes compofâns :
de là la variabilité ‘même d’une eau odorante,
fuivant la température qui a été employée à fa for-
'mation, fuivant celle à laquelle on Texpofe après
fa préparation, fuivant le conta# de l’air & une
foule d’autres circonftances acceffoires ; de là auffi
les flocons, les précipités, les mucilages, &c.
qui accompagnent fa décompofition fpontanée.
12°. Il ne faut que très-peu de matière végétale
extraétive , muqueüfe, féculente , huileufe
ou autre, pour donner à l’eau , à l’huile , à l’alcool
, le caractère odorant ou la propriété à*efprit
reHeur. La quantité de cette matière odorifère
peut varier confidérablement ; auffi tantôt un efprit
reHeur donne-t-il des effets très-fënfïbles aux
réaftifs, tantôt n'en donne-t-il que de très-foi blés.
tantôt même a-t-on de la peine à les appercevoir
& croiroit-on alors que l'eau ou l'alcool ne tient
rien en diffolution?
13°. C'eft à cette dofe prefqu’inappréciable
de matière diffoute dans l’eau ou dans l'alcool,
&r fource quelquefois d'une odeur très - forte \
qu'il faut rapporter tous les réfultats des phyfi-
cieps fur la divifîbilité extrême du principe de
l odeur, fur la non-diminution de poids que les
corps très-odorans éprouvent pendant plufieurs
années , tandis qu'ils exhalent des volumes énormes,
ou qu’ils remplirent des efpaces immenfes
de molécules odorantes. Il faut en conclure que
les nerfs des animaux font des inftrumens infiniment
plus fenfibles que nos balances & nos différentes
machines de mefure; vérité que les médecins
ont tant d'occafions de reconnoïtre, &ç dont
ils ont peut-être trop forcé l’application, puif-
qu'elle les a conduits à défefpérer prefque des
progrès de la phyfique animale.
H 0* Quoiqu'il foit établi, par les données précédentes,
que toute matière végétale peut être
confidérée comme matière odorante par elle-
rijàëfiîéi & qu'il n’ y a point de principe immédiat,
ifolé & indépendant du refte de l'analyfe
des plantes, qu’on puiffe nommer efprit reHeur ou
arôme, il faut cependant diftinguer, parmi les matériaux
immédiats des végétaux, ceux d'entr eux
qui ^ comme plus volatils , plus diffolubles dans
l’air, plus expanfibles, plus prêts à prendre & à
conferver la forme de gaz , font réellement plus
odorans, & le font même à tel point ou avec une
telle énergie , qu’on a dû les regarder comme
conftituânt très-fouvent leur efprit recteur.
i En comparant la maffe & la nature des végétaux
odorans à-ceux qu'on nomme trop ftriéte-
ment végétauxl inodores , il eft hors de doute que
les premiers, défignés le plus fouvent fous le nom
de plantes aromatiques ou d’aromates , font lés
plus chargés d’huile volatile , en donnent le plus
à la diftillation , & que leur arôme eft véritablement
& entièrement cette huile volatile elle-
même, cette effence.
ié°. De là découlent très-naturellement tous
les faits relatifs à la préparation des eaux odorantes
ou diftillées aromatiques, des huiles-ef-
fentielles, de leur rectification, ainfi que la raifont
pour laquelle les plantes ne donnent plus d'eau
odorante quand on en a tiré l'huile, & donnent
plus d’effen.ee quand on les diftille avec leurs eaux
aromatiques.
17“ . Cette affertion, une des plus importantes
de celles qui font relatives à la nature du prétendu
arôme, conduit à reconnoïtre / dans les huiles
volatiles, des propriétés & des ufages qui n’ont
été ni affez bien exprimés ni affez utilement employés
jufqu’ici. Les huiles volatiles ou effen-
tielles fe volatilifent continuellement, & fe dif-
folyent fortement dans l’air : ce font, avec l’éther
& l’alcool , les corps les plus odoraps de Ja-nature
: elles font, comme ces deux derniers , entièrement
& complètement diffolubles dans l’eau,
quoique dans une proportion très-petite; elles,
font plus diflolubles à chaud qu’à froid : l’air les
fépare peu à peu de l’eau, ou elles s’échappent
en vapeur avec celle-ci, dans l’air qui les diffout en
même te ms avec unë grande promptitude.
Ifjfg On conçoit très-bjen , d’après ce dernier
expofé ( n°. 17) , pourquoi, en diftillant une matière
végétale aromatique avec de l’eau, celle-ci
eft trouble & blanche dans le récipient : ce n’eft
pas feulement de l’huile interpofée entre fes molécules,
comme on la dit, & qui fe fépare pour
fe raffembler. à fa furfàee ;; mais c’eft de l’nuile
volatile qui y é.toit bien diffoute à quatre-vingts
degrés & à quelques degrés au deflous, & qui
l'abandonne jufqu à ce qu'elle foit à quelques degrés
X o ; alors l’eau n'en retient plus que ce
qu'il en faut pour lui donner l’odeur aromatique,
& la conftituer eau diftillée, eau chargée à*efprit
relieur. Quand on refroidit cette eau — o , il s'en
fépare encore une portion d'huile, & les fabri*
cans d’effences précieufes peuvent tirer parti de
cette obfervation. A mefure que-l’eau eft ainfi
privée d’huile volatile par l’abaiffement de la température
elle perd de l’intenfité de fon odeur.
190. Ce principe, fur la vraie nature des èfprits
relieurs & des eaux diftillées aromatiques , fournit
un procédé très-fimple & très-économique pour
les préparer : il ne s’agit, au lieu de longues, dif-
pendieufes & fatigantes diftillations, que de jeter
dans de grandes maffes d’eau pure & fraîche,
quelques gouttes d’huile volatile; d’agiter quelque
tems ce mélange, & de le laiffer repofer
pour éclaircir la liqueur & féparer la portion
d’huile non-diffoute., Après cette fimple opération
, l’eau eft très-aromatique , très-odorante, &
quelquefois même plus que celle qu'on diftille-
roit en grande quantité fur une matière végétale
trop dépourvue d'huile. 11 n’y a dans ce procédé,
ni appareil diftillatoire, ni feu, ni tems à employer;
on peut l’exécuter partout & dans toute faifon:
de grandes bouteilles ou de fimples tonneaux fuf-
fifent. #
20°. Enfin fi, comme je crois l’avoir mis hors
de doute par les obfervarions précédentes, l’a-
rome n’exifte pas par lui-même, & fi l’odeur n’eft
qu’une propriété générale des matières végétales,
comme les autres productions de la nature, feulement
à des degrés plus ou moins marqués pour
chacune d’elles, fuppofé que les befoins de la
fcience, la néceftité d'avoir fouvent égard , pour
la médecine & les arts , à l'aCtion & aux propriétés
de l'odeur, forcent de la confidérer, à caufe
du rôle qu’elle joue, comme conftituânt une fuite
de modifications importantes à reconnoïtre & à
diftinguer, & obligent à elaffer & à caraCtérifer
ce qu%n a nommé les efprits relieurs des plantes,
il ne fera pas difficile aux chimiftes d’arriver à une
méthode exacte & facile pour cette claffification,
foit én examinant chacun de. ces corps une fois
préparé, foit en confidérant le mode même de
leur préparation, foit furtout en comparant les
différens végétaux d’où chacun fera tiré. J’offrirai
même ici une première ébauche de cette claffification
des corps odorans , relative à la nature de
la matière même qui porte l ’aétion odorifique fur
les nerfs olfaCtifs, car il peut y avoir quelque utilité
, fous le point de vue médical,, à diftinguer
les odeurs d’après les affections mêmes qu’elles ■
font naître, & les effets qu’ elles produilent fur
l’économie animale ; mais à coup fur cette divi-
fion , cette claffification eft arbitraire , incertaine
& vraiment caduque, puifque les impreffions protéiformes
de nos fens, & furtout dè celui de l’odorat
, iront rién de fixe , de permanent, d’égal,
ni pour tous les hommes , ni pour tous les tems
dans le même individu.
Je ne parle ici d’aucune odeur minérale qui
porte avec elle la nature comme le caractère du
corps brut, foffile ou inorganique qui l’exhale;
je ne veux tracer qu’un premier trait des produits
qu’on nommoit efprits relieurs des végétaux.
PR EMI E R GENRE.
Odeurs ou efprits relieurs extractifs ou muqueux.
CaraHéres. On ne les obtient que des plantes
dites inodores, par la diftillation des plantes elles-
mêmes au bain-marie., fans eau étrangère : elles-
font foibles, herbacées, peu durables. L’eau qui
tient cet extrait ou ce mucilage odorant en dif-
folution , fe trouble, fe remplit de fbcons muqueux,
&: exhale l’odeur de moifi au bout de
quelque tems.
! Efpéces. — Eau effentîelle de bourrache, de lai-
j tue , de plantain , &c.
S E COND GENRE.
Odeurs ou efprits relieurs huileux fixes.
CaraHéres. Ils font indiffolubles dans l’eau ; ils
ne paffent point à la diftillation : l ’oxigène, de
quelque part qu’il provienne, les détruit très-vite:
on ne les obtient qu’au moyen des huiles fixes
dont on couvre les plantes où ils font contenus.—
Un peu oxigéné , ils deviennent folubles dans
l’alcool ; mais cette diffolution , étendue dans
l'air, perd très-promptement fon arôme en s’oxi-
génant.
Efpéces. — Tubéreufe , jafmin3 narciffe, jonquille,
héliotrope, réféda.
T R O I S I ÈME GENRE.
Odeurs ou efprits relieurs huileux volatils, aromates
proprement dits.
CaraHéres. Ce font les plus abondans de tous /
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