
les yeux & dans la gueule. La finguhrité du phénomène
me fie continuer mes expériences* & elles
me démontrèrent que je me ferois trompé.
" J'enlevai un grand morceau de la peau fur la
poitrine a un pigeon , 8c j’y appliquai environ cent
gouttes d’efprits peu après il tomba dans les convulfions
& mourut.
»»Je découvris à un autre pigeon les mufcles
de 1a jambe j & je les bleffai en plufieurs endroits.
Je les baignai plufieurs fois avec l’efprit, & je l’y
tins pendant huit minutes : il ne parut pas fouffrir
dans le moment, mais, deux minutes après, il
tomba fur la poitrine & mourut.
« J’ouvris un grand trajet de peau fur le dos à un gros cochon d’Inde’, 8c je bleffai légèrement
les mufcles en quelques endroits} j’infinuai
à travers la peau l’efprit en grande quantité & à
plufieurs reprifes, & je l’y tins pendant plufieurs
minutes ; il eut à peine quelques lignes de con-
vulfions, mais bientôt il tomoa fur la poitrine
fans pouvoir fe foutenir, & mourut en peu de
tems.
»> Je découvris bien 8c dans un grand trajet, les
mufcles de la poitrine à un pigeon , & je les bleffai
profondément en plufieurs endroits > j’y appliquai
l’efprit de manière qu’il ne put couler jufqu’à
toucher la peau ; je renouvelai cette application
fur les blefïures plus de trente fois, & je l’y tins
au moins douze minutes de fuite : il vomit à la fin,
tomba enfuite dans de fortes convulfions, 8c mourut
peu de tems après. '
»» C’eft donc une vérité de fait, quel’efpritde
laurier ce ri Je tue, même lorfqu’il eft appliqué aux
blelfures, quoiqu'il foit vrai aufli qu’ il tue plus
tard que quand on l'applique aux yeux, à la gueule
& à l’eftoroac, où il tue à moindre dofe & plus
promptement ; de forte qu’il eft toujours vrai
qu’une telle quantité qui tue , par exemple, un
pigeon fi on la lui applique dans le bec, ou fur
les yeux ou dans l’efiomac, ne lui procure aucune
maladie fenfib’e lorsqu'on la lui met dans des
blelfures j ce qui ne lailïe pas d’être fort lln-
gnlier.
Efprit de la troijïeme difiillation,
»» Je donnai une demi-cuillerée de cet efprit à
un gros cochon d’Inde ; il ne parut pas fouffrir fen-
fnlement, & ne mourut pas; mais trois pigeons,
auxquels j'en fis avaler à peine trois gouttes, en
moururent, ainfi que trois lapins & quatre cochons
d’Inde, auxquels j'en fis prendre une cuillerée à
calé. Un gros cochon d'fnde & un gros lapin n’en
moururent cependant pas , quoiqu’ils paruffent
en fouffrir l’un & l’autre.
Efprit de laurier cerife de h troijïeme difiillation ,
■ en n/elant une quantité de f i l marin décrépite
avec l efprit de la fécondé difiillation,
« II. étoit à peine odorant & prefqu’infipide :
| j’en donnai à un pigeon à peine la valeur d’une
j petite cuillerée à café ; il tomba à l'inftant dans
de légères convulfions, & mourut en peu de tems.
I Deux autres pigeons moururent pour avoir pris.
! une dofe encore moindre de cet efprit; en forte
qu’il ne paroît pas que le fel marin lui ait enlevé
fa qualité naturelle de poifon.
Phlegme de la troifiéme difiillation , a peine odorant
& fapi de.
*> Je donnai trois gouttes de cette eau à un pigeon
, & il ne donna aucun ligne de mal.
>» J’en donnai une cuillerée à café à un très-
gros cochon d’Inde, qui tomba auflitôt dans les
convulfions, mais enfuite il fe releva de lui même
& n’eut point d'autre mal.
*> J’en donnai autant à un cochon d’Inde de
moyenne groffeur, & il n’en éprouva aucune incommodité.
» J’en donnai une cuillerée à un très-petit cochon
d’Inde ; il n’en fouffrit aucunement.
« J’en fis avaler une cuillerée & demie à un gros
cochon d'Inde j il vomit un peu de matière verte
8c jaune, mais i! ne mourut pas.
>» J’en donnai autant à un petit cochon d’Inde :
il tomba auflitôt dans les convulfions, mais peu
de tems après il fe releva & n’eut point d’autre
mal.
» J’en donnai une cuillerée à un pigeon , qui
tomba auflitôt dans les convulfions, 8c mourut en
moins d’un quart d’heure.
Huile de laurier-cerife, donnée intérieurement.
»» Il me reftoit i examiner les huiles de laurier-
cerife. Mais après m’être affuré, par des expériences
réitérées, qu’il n’y avoitaucune différence
effentielle entre ces huiles, quoiqu’elles fuffent
de la première, ou de la fécondé, ©u de la troi-
fième difiillation , je n’ai pas cru devoir les dif-
tinguer , & je les ai employées toutes indifféremment.
Ce. qu’il m’importoit le plus , c’étoit de
favoir fi l ’huile étoit aufli un poifon, & fi elle
l’étoit plus ou moins que l’efpm. Je rapporterai
en conféquence quelques - unes des expériences
que j’ai faites avec cette huile fur différens animaux
, & qui fuffiront pour décider de fa nature
vénéneufe , 8c pour montrer les anomalies fréquentes
qui fe rencontrent en pareille matière.
»» Je fis avaler à un gros lapin deux gouttes
d’huile, jointes à peut-être deux gouttes d’efprit :
le lapin mourut au bout de quelques momens, 8c
dans de légères convulfions.
»» Je fis avaler à une tortue de terre du poids
d’une livre , environ deux gouttes d’huile pure :
deux heures après, elle étoit fort foible ; au bout
de fix heures, elle paroiffoit à peine vivante, 8c
en effet elle mourut peu de tems après avec tous
les lignes de la perte de l'irritabilité.
» Je donnai à un très-gros cochon d’Inde quatre
gouttes d’huflè, mais il n’eut aucun mal.
»J’en donnai à peine trois gouttes à un pigeon,
& au bout de deux minutes il étoit déjà mort.
» J’en fis boire une demi-cuillerée à café à un
gros cochon d Inde : pendant plus d’une demi-
h'nire il parut n’avoir aucun mal, mais enfuite il
tomba dans les convulfions & dans les tourmens, ;
& une demi-heure après il mourut.
» Je donnai un tiers de cuillerée d’huile à un
pigeon : peu de tems après il ne fe foutenoit
plus fur fes pieds, 8c il mourut en moins d'une
demi-heure. :
» Je fis boire environ fix gouttes d’huile unies
avec quarante gouttes d’eau commune, à un gros
cochon d'Inde i il commença auflitôt à paroître
inquiets il donna plufieurs fois des figues d’envie
de vomir , mais peu de tems après il devint tranquille
, & n’eut plus aucun mal.
» J’en donnai fix gouttes avec quarante gouttes
d’eau , à un très-petit cochon d’Inde ; il fut très-
inquiet , mais il ne tomba pas, ni ne convuifionna
ni ne mourut.
» J’en fis avaler trois gouttes à une grenouille,
qui au bout de deux minutes fut tout-à-fait morte :
le coeur fe mouvoit bien encore, & les pattes
remuoient dès qu’on lui flimuloit les nerfs cruraux.
»» Cette expérience fut répétée fur deux autres
grenouilles avec à peu près le même réfultat.
»» Malgré le peu de conformité de toutes ces
expériences, il paroît qu’on peut en conclure que
1 huile du launer-cerife eft un poifon violent, &
qui tue, tant les animaux à fang froid, que ceux à
fang chaud. 11 paroît encore qu’on peut dire que
non-feulement elle n’eft pas plus aaive que l’efprit,
mais encore qu'elle l’eft beaucoup moins,
& que les circonftancts & les différences les plus
accidentelles dans les animaux fuffîlènn pour
qu'elle ne leur foit pas meurtrière. Il eft en effet
bien étrange qu’elle tue plus promptement, comme
on a vu, un animal à fang froid, qu’un animal à
fang Chaud.
Huile de laurier-cerife , appliquée a la gueule.
»3 J’étois curieux de voir fi l’huile de laurier-
cerife , qui eft un poifon violent quand elle eft
avalée & introduite dans l’eftomac, feroit encore
meurtrière fi l’on en enduifoit feulement la gueule
& le palais, fans en faire entrer dans l’oefophage.
'Les expériences que j’ai rapportées fur l’efprit de
la fécondé difiillation pouvoient faire foupçonher
que cela fût ainfi. ■
» J’humectai légèrement un linge de cette huile,
8c je l’introduifis dans la gueule à un très-petit
cochon d’Inde ; j’empêchai l’animal de fermer fa [
gueule, quoiqu’il n’eût pu exprimer du linge rien j
'qui pût parvenir dans fon eftomac; je laiffai ce v
; linge dans fa gueule pendant deux minutes. Cet
j animal parut n’avoir rien fouffert.
» Je répétai cette expérience fur un autre petit
cochon d’Inde, & je lui frottai plufieurs fois l'intérieur
de la gueule avec le linge. Peu de tems
après, cet animal parut fort trifte, mais il ne
mourut ni n’eut de convulfions.
» Je répétai cette expérience fur deux autres
cochons d'Inde a fiez gros : ni l’un ni l’autre ne
donna figne de mal-aife ; mais ces expériences ne
font pas décifives, parce que ces animaux font
difficiles à mourir, & peut-être y auroit-il fallu
une plus grande quantité de ce poifon. J’eus donc i recours aux pigeons, qui meurent fi facilement.
»j J’imbibai d’huile le linge ordinaire, & je l’in-
! finuai dans le bec à un pigeon , de manière qu'il
ne pût en couler dans l'eftomac ni même dans
l’oefophage. Ce pigeon mourut bientôt après.
» Je répétai cette expérience fur quatre autres
pigeons : il en mourut trois très-promptement ;
le quatrième donna à peine quelque figne de mal-
aife.
» Je croirois donc pouvoir conclure que l’huile
de laurier-cerife eft un poifon , lors même qu’elle
ne touche ni Toefophage ni l ’eftomac, & qu’il
fuffit pour cela qu’elle foit en contaèl avec l’intérieur
de la bouche.
» Ces expériences 8c ces réfultats font entièrement
analogues à ce que nous avons vu ci-deffus
en faifant ufage de l’efprit de laurier-cerife.
Huile de laurier-cerife , appliquée fur les blelfures.
' »9 On ne peut plus douter que l’huile de laurier-
cerife ne foit un poifon , & même des plus vio-
lens, quand elle eft prife intérieurement. Il nous
refte cependant à favoir fi elle empoifonne aufli
lorfqu’on en met fur les parties bieffees d un animal.
L’expérience feule pouvoiten décider. Mais
nous avons déjà des expériences fur l’efprit de la
fécondé diftillation , qui peuvent nous faire préfumer
qu’elle eft aufli un poifon dans ces circonf-
tances.
99 J’infinuai dans une jambe à un pigeon, un
morceau de bois bien enduit de cette huile , 8c
voyant qu'au bout de quinze minutes 8c plus
l’animal ne paroiffoit pas malade, j’ôtai le petit
bâton de la jambe , 8c j’ introduifis de l’huile abondamment
dans la bleffure , qui étoit profonde ;
mais malgré cela le pigeon ne mourut ni ne
tomba dans les convulfions.
» Je fis une bleffure à une petite tortue, vers la
queue, & j’y infînuai.abondamment de cette huile :
elle ne parut avoir aucun mal.
9» Je fis à un pigeon une bleffure à la jambe; je
la baignai plufieurs fois avec cette huile , & je
couvris encore la bleffure avec un linge imbibé
d’huile : le pigeon n’eut aucun mal.
» Je bleffai en plufieurs endroits les jambes à
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