
» Je répétai cette expérience fur un autre pigeon
: au bout de fix minutes il eut de très-fortes
convulfions, 8c il mourut un inftant après.
« Je fis une expérience de comparaifon pour
voir ce que pourroit opérer la pierre à cautère
feule, appliquée aux mufcles blefiés de la poitrine
à un autre pigeon ; il parut un peu troublé , mais
il fe remit promptement fans éprouver la moindre
convulfion, & il ne mourut pas.
J'appliquai la pâte empoifonnée dont je viens
de parler, à quatre autres pigeons préparés comme
ci-aeflus ; ils moururent tous dans les convulfions
en moins de cinq minutes*
» Il eft donc évident que l ’alcali cauftique -n’eft
pas un correctif des qualités meurtrières de l’huile
de Laurier-ctrife , non plus que de celles de l’efprit
de cette plante, fuivant les expériences que j’ai
faites fur cette fubftance, & que je me difpenferai
de rapporter, »
L AZULITE. C ’eft le nom donné par les minéra-
logiftes modernes à la pierre nommée dans les arts
lapis y lapis la^uli , pierre d'azur , &c. Le mot
laçuli ell dérivé du mot a^ur} par lequel les Arabes
defignent cette pierre.
Cette pierre a été rangée autrefois parmi les
zéolices, à caufe de fa propriété de faire une gelée
avec les acides.
Elle£& d’un bleu d’azur opaque, d’une calibre
mate grenue St à grain trés-ferré. Sa pefanteur
fpécifique eft de 2,76 à 2,94 ; elle raie le verre,
& n’étincelle par lé briquet que dans quelques
parties.
On a trouvé des criftaux o&aèdres de la^ulite.
Il varie dans fa couleur du bleu d’azur foncé au
bleu pâle j il eft fou vent mêlé de taches blanches
calcaires ou quartzeufes, de fulfure de fer. Il fe
trouve en Perle, en Chine, en Natolie, en Sibérie
, près du lac Baikal. Il par oît faire partie de
roches granitiques.
Suivant Kirwan, le la^ulite conferve fa couleur |
à ico degrés du pyromètre : à un feu plus violent
il fe bourfoufle., & fe fond d’abord en une maffe |
noire-jaunâtre, enfuite en un émail blanc.
M. Klaproth a trouvé par l’analyfe, que le laru- \
lite eft formé de 0,46 de filice , de 0,14 d’alumine,
de 0,28 de carbonate de chaux, de @,cé de fulfate
de chaux & de 0,03 de fer. Il paroi,t que les deux
fels calcaires n’y font qu’accidentels , & ne confti-
tuent pas la nature intime du Id^ulîte, dont la Jîlice,
l ’alumine & le fer font les vrais principes. Dans ce
fens on peut le regarder comme formé de foixante-
dix parties de filice, de vingt-deux d’alumine, de
près de cinq, de fer & de trois d’eau. On ne fait
point encore dans quel état eft le fer qui paroît
être la matière colorante de cette belle pierre.
Le préparé par un broiement & un lavage
bien foignés, forme le bleu d’outre-mer , fi précieux
& fi utile dans la peinture par fon inaltérabilité.
C ’ eft même pour cela.qu'il ceffe, après quelj
que tems, d’être en harmonie avec les autres cou*
! leurs qui font toutes plus ou moins altérables. On
le taille aufii pour en faire des bijoux, des coupes,
de petits vafes, des Codes, des plaques dont on
orne les autels, les meubles précieux.
LENTILLES. Je place ici ce mot parce que la
femence légumineufe qu’il défigne , eft devenue
le fujet d’une analyfe chimique allez intéreflante.
Dans un travail deftiné à éclairer les phénomènes
de la germination , de la fermentation & de la nutrition.,
nous avons examiné, M. Vauquelin & moi,
les principales graines céréales fk légumineufes,
St furtout les plus généralement employées. Je
donnerai à l’article orge ce qne nous avons fait fur
les graminées ufuelles. Je vais configner ici ce que
nous avons obtenu de l’examen chimique des lentilles
x des fèves de marais & de la farine de lupin,
Analyfe des lentilles.
Cinquante grammes de faine de lentilles,mi$ en
macération avec un litre d’eau j ont répandu une
odeur forte qu’on connoit dans cette femence
verte. Cette liqueur, filtrée une heure après, a
d’abord pafté un peu laiteufe, mais en la remettant
fur le filtre elle s’eft éclaircie. Elle avoit une faveur
fade & nauféabonde,' ne rougiftoit pas la teinture
detournefol, mais précipitoit abondamment l’in-
fufion de noix de galles & l’açide muriatique
oxigéné : la dijffolution de fulfate de fer y forme
auffi un précipité fort abondant de couleur grifâtrei
l’eau de chaux la rend laiteufe, mais n'y détermine
pas de précipité, au moins fur le Champ.
L’infufion de lentilles fe trouble d’elle-même très-
promptement , & prend un afpeét laiteux: cet effet
a lieu en moins de dix heures dans un air à 1 y degrés
de chaleur.
Les alcalis lui rendent fa limpidité en lui communiquant
une couleur jaune : les acides produifent
le même effet, mais un excès de ces derniers jr
©ccafionne un précipité ftoconeux très-abondant.
Ces phénomènes peuvent faire penfer que la
matière qui trouble ainfi la liqueur y etoit tenue en
diiïolution par un alcali , lequel, en fe faturant de
l’acide développé par la fermentation, laifïe précipiter
cette matière: c ’eft un foupçom à vérifier.
Par la chaleur de l’ébullition , l’ififufion de farine
de lentilles moufle comme une .eau de favon, & fe
coagule en flocons blancs comme l’albumine. Cette
eau, ainfi coagulée & filtrée, eft encore précipitée
: par les mêmes réaéfcifs, mais moins abondamment
î qu’avant j ce qui prouve que la chaleur n’a féparé
qu’une partie de la matière qui jouit de ces propriétés.
Le 17 floréal, je remplis un flacon de rinfufîoti
de lentilles y qui s’etoit déjà troublée fpontanément,
& je plaçai fur ce flacon un tube pour favoir s’il
fe dégageroit quelque gaz, & fi la liqueur deviendroit
acide, ou fi enfin elle éprouveroit quelque
autre altération.
Le même jour, je mis de la même liqueur dans
Un autre flacon, mais dont les trois quarts demeurèrent
vides , & fur lequel je mis aulfi un tube pour
favoir fi le volume augmenteroit ou diminueroit.
Quelques heures après que ces liqueurs furent
mifes dans les appareils dont je viens de, parler,
elles s’éclaircirént, & la fubftance qui les trou-
bioit fe dépofa fous la forme de flocons blancs. Au
bout de deux jours ( température ,1 2 degrés) ces
liqueurs ne préfentoient. aucun phénomène qui
annonçât un changement dans leur état ; au moins
il ne fe manifefta aucune effervefcence, il n’en
fortit aucun gaz, & i’air ne diminua point de volume.
Les deux liqueurs avoient paflé à une légère
acefcence, & l’air du fécond appareil contenoit
une petite quantité d’acide carbonique :cette expérience
n’a pas été pouffée plus loin.
J’ai dit plus haut, qu’ayant mêlé de l’eau de
Chaux à une portion de l ’infufion des lentilles, le
mélange fe troubla, devint laiteux , mais ne forma
point de précipité, tandis que la même infufion
en donna fpontanément un confidérable ; cependant
, au bout de trois à quatre jours, il s’en forma
aufli un dans celle-ci. Cette différence provient
fans doute de ce que, par fa préfence, la chaux
aura retardé la fermentation acide de la liqueur,
ou que , fans s’yoppofer, elle aura abforbé l’acide
à mefure qu’il fe fera formé , & empêché ainfi la
matière animale de fe précipiter; mais enfin lorf-
que la chaux aura été fatUrée par l’acide, le phénomène
aura eu lieu.
La chaux avoit été mêlée à cette liqueur dans
l’intention de favoir fi elle contenoit du phof-
phate de potaffe ou autre.
AU ion de V alcool furies lentilles.
Cinquante grammes de farine groflière de lentilles
ont été mis en digeftion avec fept à huit fois
leur poids d’alcool bien déflegmé. Au bout de
quelques inftans l’alcool prit une couleur jaune-
verdâtre , une faveur amère & âcre. Deux jours
après, le premier alcool fut décanté, & de nouvelles
quantités furent mifes fur le marc jufqu’à ce
qu’ellesne fe coloraffent plus. Lesliqueurs réunies,
fournifes à la diftillation, fournirent un alcool fans
couleur, mais d’une odeur de vanille très-prononcée,
& reconnoiffable pour tout le monde. Cette'
odeur fe perdit par l’addition de l’eau, & fe tranf-
forma en une autre très-défagréable.
Le réfidu contenu dans la cornue avoit une couleur
verte jaunâtre : une huile verte Un péu çon-
fiftante nageoit à la furface de la liqueur. Cette
liqueur, qui contenoit encore un peu d’alcool,
étoit épaifle, gluante, ayant une faveur rance &
âcre, l’odeur du favon, & fe troublant par l’addition
de l’eau ; cette liqueur fe eaillebotoit par les
acides & par l’eau de chaux comme unedilîolution
de favon.
Pour favoir fi en effet elle contenoit véritablement
du favon, je la décompofai par l’acide
fulfurique, qui forma fur le champ un précipité
floconeux, dofit les parties, en fe raffemblant,
formèrent bientôt une couche huileufe de couleur
verdâtre, d’une faveur rance, St d’une odeur
qui avoit quelqu’ analogie avec celle de l’onguent
populum.
La liqueur, filtrée & évaporée avec ménagement*
a donné un réfidu noir, acide, qui paroiffoit contenir
quelque chofe de falin ; mais quand il a été
defleché, il y en avoit fi peu, qu’il n’a pas été pof-
fible d-’en reconnoître la nature : il faudroit faire
cette expérience plus en grand.
Cinquante grammes de lentilles, entières & mu-
: nies de leurs enveloppes , ont été mifes en macération
dans cent grammes d’eau :au bout de vingt-
quatre heures, l’eau avoir acquis une légère teinte
jaune-verdâtre, une faveur aftringente, accompagnée
de l’odeur des femefices légumineufes.
Cette eau précipitoit abondamment la folutiort
de colle-forte, l’eau de froment & d’ orge en flo-
: cous blancs; elle précipitoit abondamment auflîl©
fulfate de fer- en très-beau bleu , & l'acétate de
i plomb en blanc-jaunâtre.
Elle ne rougiftoit pas la teinture de tournefol ;
Ce qui prouve que la fubftancequi précipite le fer
en bleu n’eft pas l’acide ga lique, mais du tannin ;
ce que confirme d’ailleurs la précipitation de la
colle-forte*
Après avoir féparé l’eau qui avoit féjourrié pendant
vingt-quatre heures fur les lentilles, on les
dépouilla de leurs enveloppes, & on les remit fé-
parément dans l’eau pour favoir fi elles con:enoient
du ta-rin'in dans leur propre fubftance ; mais elles
n’en offrirent pas la plus légère trace; ce qui démontre
qu© cette fubftance eft exclufi vement contenue
dans les enveloppes.
Quand on eut épuifé les enveloppes de lentilles
par l’eâu, on les fit macérer avec de 1’ lco< 1 \ celui-
ci prit bientôt une couleur verte-jaunâtre très-
agréabJe.
Pendant l’ évaporation fpontanée de l’alcool, il
fe dépofa des flocons verts, & l’alcool biffa fut
les parois de la capfule un enduit vert. Outre cette
matière verte, l’alcool contenoit du tannin, caf
il noirciffoit légèrement la diffoiution de fer.
Après avoir enlevé aux env.loppes de lentilles
tout ce qu’elles ont de folubte dans l’eau & d.-.ns
l’alcool, eftes étoiem blanches-, fèches St arides
comme du parchemin. Soumifts à la diftillation,
elles ont fourni une affez grande quantité d'huile
dont l’odeur & la faveur avoient la plus grande
analogie avec la fumée de tabac : le phlegme étoit
acide , mais la potalfe y développoi-t de l’ammo-
ftiaque.
fl eft évident par ce qui précède fur les lentillesy
! que Cette g-raiue coHtieiit, comme toutes les autres,
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