
eft fervi pour confirmer ion opinion fur l’état
tres-oxidé de Yétain dans l’or tnuflîf.
47. Le même chimifte a publié, en mars 1792, '
des recherches & une fuite de découvertes bien
plus importantes fur la diffolution muriatique d’é-
tain. Il y a été conduit par l’importance de cette
préparation pour la teinture, & parla diverfité
des effets qu’on en obtient, fuivant celle de la
méthode que l’on fuit pour l’obtenir : c’étoit pour
remédier aux incertitudes qui en provenaient, qu’il
a examiné l’état & les caufes des variétés de cette
diifolution. Son travail a répandu le plus grand
jour fur cet objet, & contribué aux progrès de la
doétiine pneumatique. Il a fait d’abord une dif-
folution cYétain, avec ce métal laminé & coupé
en petits morceaux , fur lefquels il a verfé dans un
matras quatre fois leur poids d’acide muriatique
concentré bien pur. En plaçant ce Vafe fur un bain
d.ï fable chauffé par degrés, il a obtenu une dif-
folution complète. C’eft avec cette diifolution
qu’il a fait un grand nombre d’expériences annonçant
toutes qu’elle eft fufceptible d’abforber
avec activité l’oxigène à une foule de corps , &
de palfer au nouvel état de muriate furoxigéné
à?étain, jouilfant de propriétés nouvelles, & en-
tr’autres d’une qualité bien fupérieure pour la
plupart des opérations de teinture. Voici le précis
de fes découvertes fur ce point.
A. La diifolution muriatique àï étain abforbe
avec chaleur le gaz acide muriatique oxigéné,
qui perd fon odeur, &la fait changer de nature.
B. Elle fait une violente effervefcence avec
J’acide nitrique, en dégage beaucoup de gaz nitreux
, & eft fouvent lancée hors du vailfeau par
çette addition.
C. Elle devient rougeâtre par l’acide fulfureux,
dépofe de l’oxide à'étain fulfuré jaune d’une
magnifique couleur.
D. Elle noircit & change en métal l’acide ar-
fenique , bleuit & fait repalfer à l’état métallique
les acides molybdique & tungftique, le tunftate de
chaux & celui d’ammoniaque, en enlevant l’oxi-
gène à ces trois acides.
E. L’oxide rouge de mercure, le muriate furoxigéné
de mercure, jetés dans cette diifolution,
lui cèdent auffi leur oxigène, & repaient à l’état
métallique.
F. Il en eft de même de l’oxide blanc d’antimoine
, de celui d’argent.
G. Elle décompofe la diifolution d’o r , en précipite
le pourpre de Calïius en enlevant l’oxigène
qui rendoit ce métal dilfoluble $ ce qu’elle ne fait
pas lorfqu’ elle eft faturée d’oxigène.
H. Enfin elle abforbe immédiatement le gaz
oxigène, & paffe au même état que fi elle avoit
été mêlée avec l’acide muriatique oxigéné ; ce qui
^ engagé Pelletier à la regarder comme très-propre
à fournir aux chimiftes un moyen de plus pour
déterminer la quantité de gaz oxigène contenu
qans un fluide aériforme.
I. Il a propofé de faire la eompofition pour la
teinture, en chargeant la diifolution d'étain de gaz
muriatique oxigéné } il a obfervé que cette diffo-
lution abforbe ce gaz prefque jufqu'à la moitié du
poids de Y étain qu’ elle a dilfous. Il faut enfuite la
chauffer fur un bain de fable pour en féparer la
portion d’acide muriatique libre quelle contient
après cette abforption.
48. Les réfultats de ces expériences intérelfantes
fe font trouvés d’accord avec d'autres recherches
également curieufes & concordantes avec la doctrine
pneumatique, que M. Adet avoit faites quatre
ans auparavant fur une efpèce de muriate aï étain
fumant, nommé liqueur de Libavius, du nom de
fon premier auteur. Quoique ce fingulier produit
foit le réfultat de la décompofition du muriate
furoxigéné de mercure par Y étain s il a trop de
rapport avec ce qui vient d’être expofé pour ne
pas en préfenter ici la préparation & les propriétés
comparées aux deux diffolutions muriatiques que
je viens de décrire. On a déjà tant eu d’occafions
de reconnoïtre la forte attraftion de Y étain avec
l’oxigène, qu’il ne fera pas néceffaire d’expliquer
la théorie de cette décompofition. En triturant
parties égales d’une amalgame faite avec deux parties
d'étain & une de mercure, deftinée à divifer
le premier de ces métaux, & de muriate de mercure
corrofif $ en diftillant ce mélange dans une
cornue de verre à une très-douce chaleur, il paffe
d’abord une liqueur fans couleur, & il s’élance
enfuite, avec une forte d’explofion & en un feul
jet , une vapeur blanche épaiffe, qui enduit le
récipient d une couche très-mince. Cette vapeur
fe condenfe en une liqueur tranfparente, qui exhale
à l’air une fumée blanche, lourde , très-
abondante : c’eft la Liqueur fumante de Libavius , ou
le muriate furoxigéné & fumant à'étain. Renfermée
dans un flacon, cette liqueur ne répand pas
de vapeur vifible; elle dépofe cependant, au haut
du vafe qui la contient, des criftaux aiguillés qui
bouchent fouvent fon ouverture étroite ; il fe
précipite auffi une portion de ces criftaux au fond
du liquide. A l’air, elle fume beaucoup, & répand
une odeur âcre qui excite la toux j c’eft à l’eau
atmcfphérique, qui opère une criftallifation de
muriate à'étain y qu’eft due cette vapeur. L ’eau ne
précipite pas ce muriate d'étain fumant liquide.
Quand on le verfe dans l’eau, il y produitun bruit
femblable à celui qu’occafionne l’acide fulfurique
concentré; il fe fépare tout à coup en plufieurs
bulles tranfparentes, qui s’échappent du mélange,
&: viennent crever à la furface de l’eau en un gaz
qui blanchit par le contaéfc de l’air. En agitant
l’eau , on les diflipe plus promptement, & la
liqueur ne fume plus. Macquer dit qu’étendue de
beaucoup d’eau, la liqueur fumante précipite un
oxide àï étain en petits flocons blancs. Le réfidu
de la diftillation de ce muriate furoxigéné & fumant
àïétain préfente auffi plufieurs phénomènes
iptéreflaps, qui ont été bien décrits par Rouelle
le cadet. La voûte & le col de la cornue font enduits
d’une couche blanche & grife, contenant
un peu de muriate fumant, plus un autre muriate
d'étain concret, qu’on nommoit autrefois étain
corné/ du muriate mercuriel doux & du mercure
coulant. Le fond du même vaiffeau contient une
amalgame de mercure & d'étain, recouverte de
muriate àï étain folide, d’un gris-blanc, qui peut
être volatilifé par une chaleur plus forte que celle
qui eft néceffaire pour obtenir le muriate fumant.
En traitant de nouveau à la cornue le muriate
d'étain folide, il fe fond & fe fépare en deux
couches, l’une noire, placée au bas, & l’autre
blanche, analogue au premier muriate àï étain fu- \
blimé en étain corné. On voit par ces détails, que, \
dans l’opération de la liqueur fumante de Liba- ■
vius, Y étain enlève l’oxigène au mercure, & fe j
partage en plufieurs oxides plus ou moins chargés
de ce principe, qui forment des combinaifons di-
verfes avec l’acide muriatique.
49. M. Adet a fournis la liqueur fumante de j
Libavius à plufieurs expériences, qui lui ont fait j
connoître exactement fa nature. Les principales
font les fuivantes :
A. En unifiant ce liquide à l’eau, il s’en dégage, ■
par une véritable effervefcence, des bulles de gaz
azote, dont il n’eft pas facile de déterminer l’origine,
que l’auteur lui-même n’a pas cherché à
connoître.
B. Combinée avec l’eau, à la proportion d’un
tiers environ du poids de ce liquide, ou dans le
rapport de 7 à 22, la liqueur fumante forme un
corps folide, fufible au feu, congelable par le
froid, & femblable à ce que les chimiftes nom-
moient autrefois beurre dïétain.
C. Ce muriate fumant d’étain, étendu d’eau,
diffout de Y étain fans effervefcence, fans mouvement,
fans production ni dégagement de gaz hydrogène,
& vfournit un fel en tout femblable à
celui que donne la diffolution immédiate de Y étain
dans l'acide muriatique.
Le chimifte cité conclut de ces expériences, que
la liqueur fumante eft un compole d’acide muriatique
difpofé à prendre l’état aériforme, & d’oxide
àï étain furoxigéné ; qu’il eft à la diffolution muriatique
d'étain ordinaire ce qu’ eft le muriate de
mercure corrofif au mercure doux, & que c’eft un
muriate furoxigéné d'étain. Pelletier, d’après fes
expériences, conclut de fon côté que la diffolu-
tiori muriatique d'étain, chargée de gaz acide
muriatique oxigéné qu’elle décompofe en lui enlevant
fon oxigène, & privée de l’acide muriatique
en excès qu’elle contient alors à l’aide dç
la chaleur, eft entièrement femblable à la liqueur
fumante étendue d’eau, & l’on voit qu’il eft parvenu
au même réfultat que M. Adet par des expériences
faites abfolument d’ une manière inverfe,
Il annonce que la diffolution furoxigénée & muriatique
à'étain s préparée par fon procédé, crif-
taîlife par l’évaporation , & fe fublime en entier
Chimie, Tome IV .
comme le muriate d'étain fumant mêlé avec l’eau.
Une obfervation dernière confirmera encore l’en-
femble de cette théorie fur les deux muriates
d'étain dont je viens d’expofer les différences &
les propriétés. Il eft fi vrai que la diffolution muriatique
d'étain doit fa propriété de précipiter l ’or
en pourpre à fa tendance pour lui enlever l’oxi-
gène, que, laiffée à l’air quelque tems après fa
préparation, elle perd cette propriété en rai fon
de l’oxigène atmofphérique qu’elle a abforbé : d’où,
il fuit que les vues dans lefqueiles on doit préparer
cette diffolution , font véritablement l’in-
verfe l’une de l’autre quand on la deftine à fervir
à la précipitation & à l'avivage des couleurs, ou
à précipiter l ’or de fa diffolution en oxide pourpre,
comme je le ferai voir encore à l’article de ce
dernier métal.
Ajoutons à tous les faits fur les deux muriates
d'étain3 qu’ils diffèrent l’un de l’autre par la manière
dont ils font précipités par les hydroful-
fur.es. La diffolution muriatique d'étain fimple
donne un précipité brun-noirâtre d’étain fulfuré,
& celle qui eft furoxigénée en donne un d’une
belle couleur jaune, qui n’a befoin que d'être
chauffé pour paffer à l'état d’or muflïf.
50. U étain, jeté en limaille dans le gaz acide
muriatique oxigéné, s’enflamme & s’oxide fortement..
Cet acide liquide l’oxide, & le diffout fans
mouvement & fans effervefcence. On peut, fuivant
lès proportions réciproques de ces deux
corps, faire du muriate d'étain ou du muriate furoxigéné
àï étain , le premier précipitant l’or en
pourpre & abforbant eudiométriquemer.t l’oxigène
atmofphérique, le fécond n’offrant ni l ’une
ni l’autre de ces propriétés. On confirme ainfi par
un feul fait toute la théorie que j’ai développée
ci-deffus.
51. L’acide nitro-muriatique, furtout celui qui
eft fait avec une partie d’acide nitrique & deux
ou trois parties d’acide muriatique, diffout facilement
Y étain. Cet acide mixte a même prefque
toujours été regardé comme fon véritable diffol-
vant. Il s’excite une vive chaleur, qu’on diminue
en plongeant le vafe dans de l’eau froide. On ne
met le métal que par parties pour avoir une diffolution
permanente, & l’on attend qu’une foit dif-
foute pour en ajouter une autre. L’acide nitro-
muriatique peut diffoudre ainfi la moitié de foit
poids d'étain. Il eft aifé de concevoir, d’après ce
qui a été dit ci-deffus, que cette diffolution doit
varier fuivant la proportion des deux acides mêlés ;
qu’elle peut être plus ou moins oxigénée fuivant
la quantité d’acide nitrique que l’on mêle, & fuivant
la température qu’on emploie pour la faire :
de là vient la différence d’effets que préfente fi
fouvent cette diffolution dans les arts où on l’emploie
, d’après le procédé par lequel on l'a préparée.
Elle eft prefque toujours colorée 5 elle forme
fouvent une matière tremblante & gélatineufe par
le refreidiffement > elle prend alors une folidité
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