
nomme touraillons ; on le moud en une farine
nommée nudt} on délaie cette farine dans la cuve
matière avec de l’eau chaude, qui diffout le mucilage
fucré, On appelle cette diffolution premier
métier; on la reverfe de nouveau fur le malt, après
1 avoir, fait chauffer, & elle forme le fécond métier;
on la fait cuire ou bouillir quelque tems, & on
met à fermenter avec du houblon & de la levure
dans une cuve nomm ée guilloire. Quand la fermentation
eft appaifée, on l'agite ou Ton bat la guil-
loire i on tire la bière dans des tonneaux : la fer-,
mentation fecondaire, ou fuite de la première,' en
foui ève une écume nommée levure, qui fert à exciter
la fermentation de la décoétion d’orge dans
la cuve guilloire.
B. De l’analyfe du vin.
- 30. Quoique différentes que foient les diverfes
efpèces de vins dont je viens de faire mention ,
elles fe reffemblent cependant toutes dans leu s
propriétés générales & dans la manière dont elles '
fe comportent, à l’analyfe à laquelle on les fou-
met. Ce. font toujours des liqueurs plus ou moins
colorées, d’une faveur piquante# chaude^ d’unè
odeur plus ou moins.aromatiquequi raniment Sc
fortifient à une petite dofe, & qui, à une- plus
grande, portent dans les idées & dans les mouve-
mens des animaux cette confilfion, cette agitation,
cette vacillation qu’on nommé ivrejfe. T outes
contiennent un principe commun & identique,
auquel font dus leurs effets femblables.. ■ -
. -31. En effet, tous les vins donnent également,
par l’aétion du feu, cette liqueur âcre:& inflammable
qu’on nomme eau-de-vie, qui n’y diffère
que par la proportion, la facilité ou la difficulté
de fon dégagement, & l'on odeur particulière fer-
vant. à faire reconnoîrre l’efpèce de vin qui la
fournit. Ils diffèrent enfuite les uns des autres par
la proportion de tartre qu'ils contiennent cependant
tous, ou dont très-peu au moins font dépourvus
; ils diffèrent encore par la quantité & la na
ture de la partie excraûive & colorante. Quelques
uns font chargés de matièfe muqueufe plus
ou moins abondante : c’eft elle qui diflingue. fpé-
cialement le vin de pommés, de poires, de ceri-
fes, d'orge, ou les cidres & les bières.
; 32. En prenant le véritable vin ou le vin de
rai fini pour exemple , c’eft un compofé d’une grande
quantité d'eau, de matière volatile & inflammable,
très-voifine de la nature de l'alcool, fans l’être
encore de tartre en quantité diverfe, d’une matière
extraâivecolorante oxigénée, & d’ une proportion
plus- ou moins grande d'acides végétaux.
Ce compofé s’unit en toutes dofes à l’eau , quoiqu'il
foit fouvent plus léger quelle, & qu'il tende
a la fiirnager. Il s'unit fans décompofition à beaucoup
de fubflances, & notamment à quelques métaux
qu’il attaque, & à prèfque tous les oxides
métalliques dont il diffout une partie, comme le
prouvent les opérations de pharmacie dans lesquelles
on fait le vin antimonié ou émétique, &
le vin ferrugineux ou vin chalibé. 11 diffout beaucoup
de fubflances végétales, les mucilages, les
extraits, les parties colorantes, & c’eftainfi que
l’on fait les vins médicinaux, tels que le fciliiti-
que, l’aftringent, l’antifcorbutique, le laudanum
de Sydenham.
33. Tous les acides avivent la couleur du vin,
qui la doit en partie à la préfenced’un de ces corps:
les alcalis la foncent & la font plus ou moins tourner
au violer. On l’unit fouvent à l’alun pour le
rendre plus durable : on reconnoxt la préfence de
ce fel par l'addition des -alcalis, qui en féparent
de l’alumine colorée en violet, une efpèce de laque.
Souvent auffi on adoucit fon aigreur avec de
l'alcali ou de la craie. Cette bafe' fe retrouve en
chaux dans fon extrait brûlé. La plus dangereufe
combination que l’on fait avec le vin pour l’adoucir
& lui donner une faveur fucrée, c’eft celle des
oxides de plomb. Cette liqueur donne la colique
des peintres ou de Poitou: on reconnoît fûrement
la préfence de ce métal avec l’eau chargée d’hydrogène
fulfuré, que j’ai propofée le premier il
y a quinze ans, & qui eu bien préférable “aux
fuifures-alcalins dont l’effet eft incertain & trompeur,
à caufe des acides naturels des vinsqui-.les
précipitent, tandis que l’hydrogène fulfuré n'efl
précipité que par les oxides métalliques. On s’af-
fure d’ailleurs de la préfence du plomb plus'pofi-
tivement encore par l'extrait du vin qu'on chauffe
fortement dans un creufet, & qui donne des globules
de ce métal. Lorfqu’iJ s’agit de juger d’un
vin lithargiré ,qomme on l'appelle, on ne doit
pas fe contenter du précipité qu’il forme avec
l ’eau fulfurée; il faut traiter fon réfi.du par la fu-
fion. La préfence du cuivre, dont le vin diffout
auffi très-facilement & très-abondamment l’oxide
vert, eft démontrée par un barreau de fer qui en
fépare le cuivre métallique dont ce barreau eft
bientôt recouverr.
34. La plus fréquente & la plus utile analyfe
qu’on fait fur le vin , conlifte à le traiter par l-’ é-
bullition dans des vaiffeaux diftillatoires. Il'donne
alors un produit liquide, connu fous lenomd'cau-
de-vie. Dans les laboratoires de chimie on le dif-
tille dans un alambic de cuivre étamé, auqiièl on
adapte un récipient, & l'on a foin de refroidir le
chapiteau en ^entourant continuellement d'eau
froide. Dès que le vin bout dans l'alambic, il pafle
en gouttes non interrompues & très-rapprochées
l’une de l'autre, un liquide blanc légèrement opaque
& laiteux, d’une faveur piquante 8c chaude,
d’une odeur forte & fuave, inflammable : c’eft
l’eau-Je-vie. On continue l’opération jufqu’à ce
que ce produit ceffe d’être inflammable 8c piquant,
& à l’époque où ce n'eft plus que de l’eau
acidulé qui fe condenfe. Si l’on continue l'opération,
on obtient de l’eau chargée d’un peu d’acide
acéteux. Il refte enfuite dans le vafe diftillatoire
une
une liqueur d'une.couleur rouge-foncée , qui n'a
plus la faveur du vin, qui eft au contraire acide '
& auftère , trouble & toute remplie de criftaux
de tartre qui s‘en féparent. Ce fluide eft alors
entièrement décompofe : on ne peut plus lui rendre
fes premières propriétés > il a une odeur aigre.
En l'évaporant davantage, on le réduit en un extrait
d'un rouge-brun , qui eft décoloré par l'alcool
, & qui lai lie beaucoup de tartre après fa
décoloration.
35. On fait en grand la diftillation du vin pour
obtenir l'eau-de-vie dans les pays où cette liqueur,
très-abondante, eft en même tems très-généreufe
ou très-forte, Spécialement dans plufieurs dépar-
temens méridi-onamx de la République, furtout
dans les départemens qui remplacent le ci-devant
Languedoc. C'tft à Armand ae Villeneuve , chi-
mifte de ces contrées, qui vivoit dans le treizième
f ï è c l e , que Ton doit cette belle découverte. On
diftilloit ou l'on y bi ûloit autrefois le vin dans des
alambics de cuivre, furmontés d'un long col cylindrique
étroit , terminé par une demi-boule
creufe où las vapeurs fe condenfoient : cette efpèce
de chapiteau portoit un bec ou un tuyau peu
large, qui recevoit & faifoit couler la liqueur
dans un ferpentin. Le premier changement qu'on
a fait à cet appareil a été la diminution de la longueur
du col ; enfuite on a élargi les cucurbites,
quoiqu'on aitlong-tems refîerré leur partie fupé-
rieure, & continué à la terminer par un col étroit
auquel étoit foudé , par le haut, un chapeau en
forme de cône renverfé’, portant à fa partie fu-
périeure un petit bec conduifant les vapeurs par
le ferpentin renfermé dans un tonneau. Ces machines
avoient un grand nombre de défauts par
leur rétréciffement, qui fait retomber beaucoup
de vapeur ; par la hauteur de la cucurbite , qui
fait brûler le fond du vin j par les fourneaux qui
chauffent mal & inégalement ; parla forme du chapeau
qui repouffe la vapeur & refoule celle qui
s'élève.
36. Suivant la dernière méthode adoptée- par
M. Chaptal, qui a établi avec une grande fagacité .
des manufactures chimiques importantes à Mont-
■ peliier, on doit employer des chaudières plus larges
que hautes: leur fond eft bouché en dedans:
pour porter l'aétion du feu également dans tous
les points de la liqueur ; elles ne font que très-peu:
.rétrécies par le haut, & feulement pour recevoir
un large chapiteau entouré, de fon réfrigérant 5
elles portent une rainure ayant un demi-décimètre
de faillie , & des parois inclinées de foixante-
quinze degrés, parce que cette inclinaifon favo-
rife l'écoulement des gouttes d’eau-de-vie'con-
denfée : le bec de ce chapiteau eft entouré d'un
réfrigérant dont l'eau s'écoule fans ceffe & refte
toujours froide. A l’aide d’un robinet, on n'a pas
befoin de ferpentin dans cet appareil, & l'opération
donne une eau-de-vie excellente & abondante
: on en tire environ d’un cinquième à un
Ch im i e » T om e I V .
quart du poids du vin. Toutes Iss brûleries de vin
modernes font établies fur les mêmes principes ,
& donnent aufli un produit plus pur qu'on ne l'ob-
tenoit autrefois.
- 3,7. L'eau-de-vie, dans le procédé décrit * ne
fe dégage du vin qu'au moment où celui-ci eft
bouillant, & qu'à l'époque où il fe décompofe-
profondément : il eft donc évident qu’elle n’y eft
pas entièrement formée ou contenue, qu’il faut
cette température affez élevée, non-feulement pour
la dégager, mais encore pour achever d’en combiner
les principes. En effet, du vin traité au bain*
marie ne donne qu’une eau peu fragrante & point
d’alcool, & c'ett ainft même qu'on diftingue du
vin naturel & pur d'avec celui qui eft formé artificiellement
par l’union de l’eau-de-vie & de divers
ingrédiens, ou d’avec celui auquel on a ajouté
cette liqueur pour lui donner de la force. Ces deux
derniers fourniffent à la chaleur du bain-marie,
& fans avoir befoin de bouillir, l'eau-de-vie qui
y a été mife toute faite ou ajoutée.
38. C'eft furtout par la proportion différente de
ce produit, nommé fpiritueux ou alcoolique, que les
vins diffèrent le plus entr'euxion en obtient beaucoup
plus des vins des départemens méridionaux
des ci-devant Languedoc, Guyenne & Roufliilon 3
que de ceux des départemens du centre qui remplacent
la Bourgogne & la Champagne. Le vin de
canne ou des fucs très-fucrés en fournit une très-
grande abondance, & il eft même particuliérement
fabriqué pour les rhumeries. On en obtient
d'affez bons cidres, & même des bières fortes;
& fi on les diflille avec précaution , ces eaux-de-
vie font affez bonnes. Les vins verts & aigres, faits
en général avec des raifins qui ne mûriffent pas,
ne donnent que de l ’eau-de-vie foible & peu abondante.
Les vins mouffeux, chargés d’acide carbonique
, dont la fermentation a été arrêtée, n'en
fourniffent point ou prefque point. Il y a encore
beaucoup d'expériences à faire pour bien connoî-
tre au refte les différentes efpèces de vin fous le
rapport de i'eau-de-vie qu'ils peuvent donner, &
beaucoup de tentatives pour en tirer des végétaux
fermentifcibles qui n’ont point été effayés, ou qui
ne l'ont été qu'imparfaitement.
■ 39. Souvent oii ne diftille que les lies, formées
de tartre & d'extra&if dépofés & imprégnés de liqueur
vineufe, pour en extraire î'eau-de-vie. Souvent
encore on ne brûle que les vins déjà altérés ,
qui commencent à fe détériorer, à tourner à l'aigre,
& qui ne peuvent plus être bus : on fe fert
aufli des lies pour en obtenir de la potaffe. Après
en avoir retiré l’eau-de-vie par la diftillation , on
les brûle à l’air libre ou dans des fours ; l'acide
tartareux fe décompofe ; on pouffe la combuftioa
.ou l'incinération jufqu'à brûler tout le charbon,
& réduire la cendre à l'état de potaffe cauftique &
de carbonate de potaffe. Cette forte d'alcali porte
dans les arts le nom de cendres gravelées. En les
apalyfant avec foin , on y trouve, outre la potaffe
A aa