
conclu que ce liquide abforboit un peu plus de gaz
oxigène que de gaz azote de l’atmofphère. Veau y
bien privée d'air, n’a pas la faveur vive & comme
piquante qu’elle a lorfqu’elle en eft pourvue 3 elle
pèfe fur leftoifiac & ne favorife pas aufïi bien la
digeftion que la première.
16. On ne connoît pas de combinaifon entre
l 'eau &r l’azote. Le gaz azote, mis en contaél avec
ce liquide, n’ ell pas fenfiblement abforbé, & lui-
même ne parcît dilfoudre que très-peu d‘eau.
Cette propriété négative du gaz azote pour Yeâu e(l
même un des caractères qui fert fouvent en chimie
pour reconnoïcte & diftinguer cette efpèce de
gaz. ’ a | | ' |
17. L'hydrogène ne paroît pas non plus avoir
d’attradlion pour Y eau; les 0,15 de ce principe
qu'elle contient, en faturent complètement i’oxi-
gène, le gaz hidrogène n’eft en aucune manière
dilfoluble dans ce liquide. Cependant ce gaz contient
lbuvent une certaine quantité d‘eau qu'ü
diffout en paffant à travers. L'eau chargée d'air,
& furtout de gaz oxigène, paroît avoir la propriété
d'abforberdu gaz hydrogène 3 mais ce fait,
qui n'a point encore été vérifié, femble dépendre
de quelque impureté dans ce gaz, qui varie beaucoup
de propriétés, fuivant les divers corps com-
buftibles qu'il tient fi fouvent en diffolution. Cependant
on verra bientôt que l ’azote & l'hydrogène,
qui feuls font indilfolubles dans Yeauy y deviennent
très diflolubles quand ils font combinés
enfemble.
18. L'eau n'a qu'une aôtion foible fur le car-
bonne froids elle eft facilement abforbée par les
charbons, qui deviennent.humilies dans l'air fur-
chargé d‘eau, & qui exercent fur lui une forte
daétion hygrométrique. J'ai examiné des charbons
confervés depuis plufieurs fiècles dans des
tombeaux, & je les ai trouvés ramollis, rendus
prefque friables par l'eau dont ils étoient imprégnés.
La nature a des moyens qui nous font
encore inconnus , de difloudre le carbonne dans
Y eau pour le porter dans les filières des végétaux
dont il forme la principale nourriture. Si l'on ne
peut pas obferver d'action entre Y eau & le car
bonne froid , on en remarque une très-forte entre
Yeau & le carbonne rouge. A cette température,
le carbonne a plus d’attraélion pour l'oxigène,
que n'en a l'hydrogène. Veau eft décompofée rapidement:
il s'en dégage du gaz hydrogène carboné
& du gaz acide carbonique. Des charbons
bien rouges, plongés fous des cloches pleines d'eau,,
excitent une effervefcence accompagnée d'un
bruit fenfible, & donnent ces deux gaz. Voi'à
pourquoi, en jetant peu d’eau fur une grande
mafle de charbons allumés , onjiugmente la com-
buftion plus qu'on ne l’éteint : voilà pourquoi des
charbons humides, fortement chauffés, brû'ent
avec flamme, & exhalent un gaz hydrogène carboné,
très-fétide & très-méphitique. L’eau n’a
que peu d aélion fur le gaz hydrogène carboné 3
cependant elle contra été, par leur contaél réciproque,
une odeur fétide, & elle en diffout plus
que du gaz hydrogène pur.
19. Lephofphore & l’eau ne s’ uniffent point à
froid ni à chaud. On voit le phofphore chaud, liquide
& bien fondu fous l’eau : en continuant à
le chauffer, il la traverfe , & vient brûler à fa fur-
face, où il fe volatilife. Onconferve fans altération
du phofphore tranfparent fous l’eau bouillie & bien
privée d’air, en tenant exactement bouchés les vafes
qui les contiennent. Au contraire, Y eau aérée brûle
peu à peu la furface du phofphore, & le recouvre
d’un oxide blanc qui cache fatranfparence. Si la lumière
frappe le phofphore plongé dans Y eau aérée,
la couleur rouge qu’ il acquiert prouve qu’il brûle
encore davantage à l’aide de l’oxigène diftous
dans l’eau. Il-n’eft pas prouvé qu’à une très-haute
température le phofphore n’àit pas plus d’attraction
avec l’oxigène que n’en a l’hydrogène, &
ne décompofe pas Xeau. Cette expérience dan-
gereufe n’a pas été tentée. On ei flamme t*ès-bien
le phofphore fondu fous Y eau, en y portant du
gaz oxigène au fond d’un rnatras 3 c’eft unè dei
plus éclatantes inflammations que l’onpuiffe faire.
Le gaz hydrogène phofphore n’eft pas diffoluble
dans Y eau; il fe dénature , ceffe d’être fpontané-
ment inflammable à l’air, & dépofe du phofphore
quand on le tient long-temps en contaéi avec ce
liquide.
20. Le foufre & Y eau , dans différens états, & à
quelque degré de température que ce foit, n’ont pas
une aétion chimique appréciable. A froid, le foufre
trempé dansTeaa ne perd rien de fon poids, & ne lui
donne aucun caractère chimique particulier, quoiqu’on
ait prétendu qu’il lui communiquoit des
propriétés médicinales. Le foufre foudu , jeté
dans Y eau liquide, lorfque furtout il a été tenu
quelquetems en fufion, & jufqu’ à ce qu’il ait
pris un état vifqueux , y conferve un degré de
molleffe & de duélilité 3 mais Y eau, en acquérant
cependant une légère faveur & une odeur remarquable,
ne lui fait rien perdre de fon poids.
Il ne faut pas confondre cette aélion avec celle
qu’exerce le foüfre lorfqu’ -l a commencé à-s’en-
flammer avant qu’on le verfe dans l’eau : dans ce
dernier cas, il fe diffout un peu d’acide fulfureux.
Il eft bien reconnu qu'à une haute température le
fourre n’a aucune àétion decompofante fur Yeau3
qu’il n’a jamais pins d’attraélion pour Boxigène
que celui-ci n’en a pour l’hydrogène , & que c’tft
pour cela qu’ on n’a jamais pu favorifer ni la
combuftion du foufre ni la formation de l ’acfde
fulfurique par l’èau même en'vapeur. Le gaz hydrogène
fuliùré fe diffout dans Y eau, & forme
une eau fuifureüfe artificielle.
21. L’eau, fans difloudre le phofphore fulfuré
ou lé foufre phofphoré, & fans être décompofée,
comme on l’a vu , ni par le phofphore ni par le
foufre, paroît. cependant être décompofable par
ces deux combuftibles unis.en combinaifons bimires,
lla etéditque le phofphore fulfuré, fon- ]
du dans l’eau, fe bourfoufloit, fe gonfloit, &
qu’il fortoit de fa furface des bulles qui s’enflarn-
nvoient fouvent dans l’air : on a remarqué qu’il
fe dégagoit en même tems une odeur fétide ^alliacée.
Ces deux phénomènes annoncent en effet
que Y eau eft décompofée, puifqu’il s’en dégage
du gaz hydrogène fulfuré & phofphoré.
22. Il n’y a nulle aétion entre le‘diamant & Y eau.
Il paroît certain cependant que ce corps combufti-
b!e, quelque dur qu’il foit, a été diffous dans l’eau,
& qu’il ne doit qu’à l’évaporation lente de fon
diffolvant, & à,la concentration de fa diffolution,
les formes criftallines confiantes & fi remarquables
qu’il affeéte dans la nature. L’art n’a encore
recherché ni foupçonné par quel procédé cette,
diffolution pouvoir être opérée dans le fein de la
terre, où il n’eft pas douteux qu’elle ait lieu.
23. Les métaux fe comportent de deux manières
générales avec Y eau liquide & Y eau en vapeur,
car leur adlion fur la glace fe borne à partager
le calorique qu’elle contient, fuivant leur
capacité réciproque. Les uns, & c’eft le plus
grand nombre, n’ont aucune aétion fur elle , &
relient en contaél fans lui faire éprouver aucune'
altération , & fans en éprouver eux-mêmes, à
quelque température qu’on élève leur mélange.
On a cependant dit qu’ il n’y avoit pas de métal
qui ne put s’oxide'r dans un très-grand état de di-
vifion , & avec une très-grande mafle d‘eau , à
l’aide d’une violente & longue agitation 3 mais on
fera voir ailleurs que, cela ne peut dépendre que
de l’air contenu dans Y eau. Quelques métaux, ce
font les plus combuftibles & ceux qui ont la plus
forte attraction pour l’oxigène , peuvent décom-
pofer Yeaua même à froid, -quoique lentement,
mais rapidement & abondamment lorfque leur
température eft affez élevée. Dans ce dernier cas,
il fe dégage une grande quantité de gaz hydrogène,
& le métal fe trouve réduit en - oxide.
Comme ce dégagement de gaz hydrogène a lieu
même à froid , il en réfulte que l’oxigène aqueux
fe fixe plus folide dans le métal, qu’il ne l’étoit
dans Veau, & que c’ eft au calorique féparé qu’eft
due la fufion aériforme de l ’hydrogène. On verra
par la fuite combien d’applications heureufes
Fournit à la fcience ce fait capital de la décompo-
fition de Y eau par les métaux, découvert à Paris
en 1784.
24. Veau3 par fa grande abondance, par fes
divers états, par fes propriétés phyfiques, par fon
aClion chimique fur un grand nombre de corps,
foit comme diffolvant, foit comme fe décompo-
fànt, remplit une foule de fondions dans la nature
& dans les arts, Il eft prefque fuperflu
d’expofer ici fes grands ufages dans les phénomènes
naturels. L’hydrographe, le géologifte , le
naturalifte, le météorologille, peuvent & doivent
emprunter toutes les lumières de la chimie
pour en expliquer les grands effets. Le mécani--
ci en même , quoique fondé fur l’hydroftatique
& l’hydrodinamique pour fe guider dans l ’emploi
de cet agent, ne doit pas négliger les lumières que
lui fournit la chimie fur ce corps fi important: elles
font également ihdifpen fables à l’agriculteur &
au médecin i car Y eau joue un grand rôle, comme
aliment, dans la végétation & l’animalifation , &
comme médicament dans les maladies de l’homme
& des animaux. Le rriinéralogifte ne peut rien fa-
voir d’exad fur la nature & la différence des eaux
terreftres, fans lesconnoiffances chimiques. Enfin,
les réfultats de l’aCtion chimique de Y eau fur tous
les corps de la nature & dans les productions des
arts, font fi multipliées & fi utiles., que chacun
des articles fuivans de cet ouvrage en préfente-
rontdè continuelles applications à toutes les branches
de la philofophie naturelle.
Eau ACIDULE. On nomme eau acidulé Y eau
chargée par la nature ou par l’art, d’acide carbonique
, & encore toute eau qui contient .affez
d’un acide quelconque pour offrir une faveur aigre
prononcée.
Eau acidulée. On donne plus particuliérement
l’épithète d * acidulée à Veau à laquelle on
ajoute affez de vinaigre, de fuc de citron, &
même d’un acide minéral, fulfuriqué ou nitrique ,
pour lui donner une faveur aigre & des propriétés
médicinales.
On applique, plus fpécialement l’expreffion eau
acidulé à Y eau naturellement chargée d’acide carbonique.
Eau aérée. A l’époque où l’on confondoit
l’acide carbonique avec l’air, à celle encore où
Bergman lui avoit donné le nom à.'acide aérien , on
nommoit eau aérée Y eau chargée de cet acide , foit
par la nature, foit par l’art. ( Voye£ Acide carbonique.
)
Eau céleste. On appelle ainfi, à caufe de fa
couleur bleue, une eau qui contient un peu de
diffolution d’oxide de cuivre dans l’ammoniaque.
On préparoit autrefois , en pharmacie , de Y eau
célefie en mettant dans une b affine de cuivre de
Y eau de chaux & un peu de fel ammoniaque. O11
la prépare aujourd’hui beaucoup plus Amplement,
en jetant dans de Y eau quelques gouttes de fulfate
ou de nitrate de cuivre, & fuffifante quantité d’ammoniaque
pour décompofer ce fel & en redif-
foudre l’oxide 3 ce qu’on reconnoît à la couleur
bleue dé faphir qui réfulte de cette diffolution.
On proportionne la quantité de fel cuivreux, &
par conféquent d’ammoniaque, fuivant l’intenfité
du bleu qu’on veut obtenir.
Cette eau étoit autrefois employée pour les
maladies des yeux. Aujourd’hui elle fert d’ornement
aiix boutiques de pharmacie. Chez les joailliers
on en remplit les bocaux qu’on place entre