
par les rouges 8c les bruns, de produire le jaune ,
J a plus confiante, la plus fixe, la plus inaltérable
des couleurs naturelles des végétaux. M. Ber-
■ thollet a confidéré, de fon côté, la coloration en
brun-foncé 8c en noir par le contaét de l’air,
comme le produit d’une combuftion de l’hydrogène
8c de la dénudation du carbone, comme une
forte de combuftion lente , & il a fait voir que la
folidité , la fixité des couleurs végétales, dépen-
doient de la difpofition plus ou moins grande
qu’ avoienc ces parties à éprouver cette corn-
buftion. . . -
.10. A mefure que les matières colorantes éprouvent
le premier de ces effets ou l’abforption de
l ’hxigènéi qui fe combine en entier à elles & qui
en change la nuance, elles ceffent en général d ê-
tre aufii difiblubles dans l'eau qu elles 1 étoient
d’abord ; elles deviennent même entièrement in-
diffolubles dans ce liquide; elles prennent en-même
rems de la difiolubilité dans les alcalis 8c dans 1 alcool
; elles paroiffent fe rapprocher beaucoup des
matières hnileufes, tenir une forte de milieu entre
les réfiries 8c les graiffes, fans être cependant exactement
ni les unes ni les autres ; elles font ce que
j’ai rfommé l ’extra fl; i f oxigéné, car le plus grand
nombre des couleurs végétales font du caractère
de ce qu’on a défigné par le nom d extraits. 11 en
eft de même de-c,elLes qui fe font foncées par 1a
perte de leur hydrogène & par la furabondance
de leur carbone : en devenant plus noires , elles
font devenues moins altérables, moins fenlibhs,
moins diffolubles, & l’on remarque même que les
parties colorantes, qui de leur nature font les plus
folides, les moins changeantes, les plus durables
ou permanentes, doivent; cette propriété à la proportion
confid'érable de carbone à nu qu elles contiennent
; aufii font-elles préparées en général par
une combuftion préliminaire plus ou moins avancée
de leur hydrogène, qui a lieu fur tout dans les
fermentations dont on fe fert pour 1 indigo, de
paftel, la vouède, 8cc. : ç ’eft ce qui fait que ces
couleurs, quoique fufceptibles encore d éprouver
quelques changemens par l’oxigène, font plutôt
délayables que difiblubles.
i i . Les matières colorantes s’unifient facilement
aux oxides métalliques, 8c éprouvent de leur
part , dans l’ünion qu’elles contrarient avec eux^,
une combtiftion proportionnée à la quantité d oxi-
gène qu’elles peuvent leui enlever. Ainfi les couleurs
de ces combinaifons font, comme 1 a fait
remarquer M. Berthollet, un produit de celle qui
leur eft propre 8c de celle de l’oxide, plus l ’oxigène‘
a jouté aux premières 8c moins celui qdi eft
enlevé au dernier ; car il faut calculer ce double
(effet qui modifie la nuance de chacune de ces fubf-
tances : de là les oxides auxquels l'oxigène eft peu
adhérent font les moins propres à attirer 8c à fixer
Je s matières colorantes végétales , qu’ils brûlent trop
fortement, comme le font ceux d’or, d’argent Sc
.de mercure ; ceux qui en cèdent trop, & qui éprou-
Vent par-là de grands changemens dans leur couleur,
tels que ceux de bifmuth, de plomb 8c de
cuivre, font aufii de mauvais intermèdes. Les plus
propres à remplir l'objet de fixer les couleurs fans
les altérer, font ceux qui retiennent l'oxigène
avec force , qui changent peu de couleur en en
cédant une portion : c’eft ainfi que l’oxide d’étain,
peu adhérent aux diflolvans acides, très-attiré par
les parties colorantes , leur donnant une bafe d un
beau blanc 8c qui relève leur éclat en affoibliffant
leur teinte, a les plus grands avantages dans la
teinture. , »•
12. C’eft par cette théorie fimple que s’expli-’
qiient l’effet produit fur les diAblutions de parties
colorantes par les diffolutions métalliques, 8c fur-
tout la précipitation qu’y occafionne le murtate I d’étain furoxigéné. Il y a quelqu’analogie entre
cet effet 8c celui de l’alumine , qui s’unit très-facilement
aux matières colorantes, qui abandonne
fouvent fes diflolvans acides pour s’y combiner ,
•qui, en fe précipitant avec elles fur les étoffes j
en favorife l’adhérence 8c la fiabilité, 8c qui, par
fon blanc pur, éclaircit leur nuance en arrêtant
en même tems la marche de leur combuftion, foit
dans la fixation de l ’oxigène, foit dans le dégagement
de l’hydrogène : telle eft l'idée qu’on doit fe
former de l ’aétion des mordans. Parmi ceux-ci,
la fubftance aftringente végétale, principalement
celle qui eft contenue dans la noix de galle, le fu-
. mac 8c l’écorce de chêne, 8c dont l’effet fur les
étoffes fert fi fouvent de préparation préliminaire
à la teinture, eft fpécialement utile par fa combuftion
8c fa carbonifation, fi faciles au contaél
de l’air, par la propriété de s’arrêter promptement
dans cette combuftion, 8c d’abforber peu
d’oxigène ; par fon attraction réciproque avec les
matières des tiffus, Sc furtout de ceux qui font de
nature animale, ainfi qu’avec les diverfès parties
colorantes, qu’elle attire 8c fixe folidement fur
les étoffes , auxquelles elle communique fa folidité.
Voilà pourquoi i’engallage eft une opération
lî fréquente 8c fi avantageufe dans les teintures.
L’alunage qu’on pratique après rend encore la
matière colorante plus adhérente , 8c 1 éclaircit fur-
tout en favorifant la précipitation de 1 alumine
par l’addition de l’acétite de plomb à l’alun, qu il
décompofe en formant de l’ acétite d’alumine ,
dont la bafe eft bien plus facile à féparer 8c à précipiter
, parce qu’elle adhère n^oins a 1 acide ace-
foux.
13. On a remarqué depuis longrtems que les
matières colorantes ont une forte attraction pout
les fubftances animales, qu elles fe portent plus
vite, 8c qu’elles adhèrent bien plus fortement fut
ces fubftances que fur les végétales. Ainfi la laine
8c la foie font les corps qui prennent le plus vite ,
8c qui retiennent le plus long-tems les teintures ,
tandis que le lin 8c le chanvre font les plus difficiles
à teindre. Cela paroit venir de ce que leis
matières colorantes font d’un ordre de compofition
qui fe rapproche de celui des matières animales ;
elles diffèrent en effet des gommes, du fucre, des
huiles, des réfines, des acides, par la préfencs de
l ’azote, qui fait un de leurs principes primitifs,
8c c’eft à lui qu’elles doivent la propriété de donner
de l’ammoniaque dans leur analyfe par le feu;
elles fe rapprochent par-là de la matière extractive
, dans l’hiftoire de laquelle j'ai fait remarquer
le même caractère, 8c du corps ligneux, dont je
parlerai dans un des articles fui vans.: aufii -la, fubftance
colorante adhèrè-t-elle eh général ou fe
trouve-t-elle le plus fouvent fous l’une 8c l’autre
forme dans les végétaux ; 8c lorfqu’on a voulu en
donner une définition chimique relative à fes propriétés
8c à fa nature, on l’a fpécialement regardée,
foit comme un extrait, foit comme une fubftance
ligneufe. ~
14. Quoique ce qui a été expofé jufqu’ici fur
les propriétés chimiques de la matière colorànte
pmite fufïire pour la caraClérifer comme genre, 8c
que de plus amples détails appartiennent plutôt à
l’hiftoire de fes efpèces, je ne dois pas cependant
laifler ignorer ici qu’avant les découvertes modernes
qui ont conduit aux confidérations générales
que je viens de faire connoïtre, l'es chimiites, 8c
fpécialement Macquer 8c Bucauet, avoient diftin-
gué ces couleurs, qu’ils reconhoiftoienr déjà très-
variées 8c très - différentes les unes des autres :
a. en couleurs extractives ou favoneufes, entièrement
difiblubles dans l’eau, de forte qu’on ne
pouvoir les précipiter fur les étoffes que par l’action
des mordans qui les décompofoient ; b. en
couleurs réjino-terreujis, dont le caractère étoit de
fe fondre 8c de fe délayer feulement dans l’eau à
l ’aide de la chaleur, de manière qu’elles s’en pré-
eipitoient par le leul refroidifiement, 8c aahé-
roient à l’étoffe qu’on tenoit plongée dans leurs
bains ; c. en couleurs réfineufes , indiffolubles dans
l’eau, difiblubles dans les alcalis, fouvent dans
l’alcool; d. en couleurs huileufes , difiblubles particuliérement
dans les huiles. Mais cette diftinftion
trop peu nombreufe eft en même tems très-inexacte
car elle ne donne qu’une idée très-imparfaite
des diverfités des couleurs 8c de leurs véritables
caractères diftinétifs, quoiqu'il foit cependant très-
difficile d’en fournir même encore une beaucoup
plus précife & beaucoup plus fatisfaifante.
iy.. Il eft une autre différence beaucoup plus
importante à rechercher dans fa caufe, relativement
aux parties colorantes végétales, c’eft celle
qui eft relative à la nature même de la coloration..
En généralon ne connoït guère que tre.is cou-.
leurs primitives ou principales dans les végétaux;
favoir : le bleu , le jaune 8c le rouge ; 8c il y a lieu
de penfer que chacune de ces couleurs primitives
eft une combinaifon déterminée des principes qui
conftituent les matières colorantes. On n’a rien encore
dans la fcience fur la différence de ces trois
couleurs : tout ce qu’on en fait, c’eft que des
t r o i s l e jaune eft en général plus. permanent 8c ,
plus fiable ; que les bleus font très-variés dans
leurs propriétés , que les rouges tendent au brun
8c au noir. A plus foire raifon ignore-t-on encore
les caufes intimes ou les combinaifons multipliées
qui forment les nuances fi nombreufes de ces trois
couleurs mères de toutes les autres.
16. L’hiftoire des efpèces eft bien véritablement,
comme je l’ai déjà «énoncé x celle des matières
colorantes végétales, puifque ces efpèces,,
en conflit liant une fuite de différences réelles en-
tr’elles, exigent qu’on les examine les unes après
les autres, 8c donnent les feuis moyens qui existent
de tirer de'leùrs comparaifons générales les
rapports qu’elles peuvent avoir, 8c les caractères
qui peuvent les réunir comme genre ; mais cette
hiftoire fpécifique fembie ne faire pas encore partie
de la fcience : toute entière appartenant à l'ars
de la teinture, elle n’offre, au lieu d'une conooif-
fance parfaite des couleurs végétales, qu’une fuite
de procédés pour les extraire, les féparer de leur»
diflolvans, les précipiter fur les étoffes, les y faire
adhérer, 8c les rendre plus ou moins fiables, fixes „
permanentes 8c inaltérables. Ce n’eft cependant
pas l’art qu’il s’agit de décrire ici, puifqu’il eft
tout entier contenu dans cette partie de la fcience
que je défigne par le mot applications , & qui ne
doit être traitée qu’après avoir parcouru les trois-
premières branches du fyftème chimique. Je ne
dois emprunter à cet art ingénieux 8c important
que ce qui peut jeter quelque jour fur les propriétés
des matières colorantes.
17. La difficulté de diftinguer 8c de claffer les
matières colorantes végétales vient furtout de ce
qu’on ne connoït pas exactement la nature dç chacune
d’elles : aufii eft-il véritablement impoflible
de les difpofer, au moins d’une manière exacte 8c
fatisfaifante , ‘d’après leurs propriétés chimiques.
On fent bien qu’on ne peut plus adopter la divi-
fîon de Macquer. Ce qu’on peut faire à cet égard
fe réduit à confidérer ces matières colorantes comme
formant quatre genres encore très-inexaéte-
ment partagés, 8c dont la divifion n’eft qu’un fitn-
ple apperçu Ces quatre genres font, i° . les couleurs
extraétives pures; 20. les couleurs extraèti-
ves oxigénées ; 3®. les couleurs carbonées ; 40. les
couleurs hydrogénées, huileufes ou réfineufes.
18. On peut ranger dans le premier genre, c’eft-
à-dire, parmi les couleurs extractives pures , çelles-
qui paroiffent en effet être entièrement femblables
à l’extractif, qui font tout-à-fait di.ffblubles dans
l’eau chaude, qui n’abandonnent point ce diffol-
vant par le refroidi fie ment, qui ne peuvent s’appliquer
aux étoffes qu’à l’aide de mordans falins
ou métalliques , iefquels les décompofent 8c les
oxident de manière à les rendre indiffolubles. Par-
là , 8c en employant le tartre, l’alun , les acides 3
8c furtout les oxides 8c les Tels métalliques, on
les rapproche dé celles du fécond genre, on leur
fournit de l’oxigène, on change leur nuance à la
vérité, on les modifie d’une manière qu'on dok