
actuellement en a&ivité , le mot cohéfion doit
exprimer la fécondé actuellement en exercice.
Les détails expérimentaux & théoriques con-
fignes dans les articles adhéfion, affinité , attraction
, ont trop de rapports elfe-miels avec ce qui
elt relatif à la cohérence & à la cohéfion , & ils
font trop propres à en bien faire concevoir les.
principes & la nature j ils ont en même tems
été expofés avec trop de développement &
d'étendue , pour qu'il foit néceffaire de réunir -
ici de nouvelles confidérations fur la caufe &
les effets de cette force qui rapproche les molécules
des corps. En fuppofant même que
toutes les données qui ont été raflemblées &
tous les réfultats qui ont été offerts dans les
intereffans & favans articles dus à la plumé
de M. Guyton , ne fatisfaffent pas complète-^
ment l'efprit des leâeurs, parce qu’en effefj
excepté les phénomènes eux mêmes qu'on peut
apprécier par l’expérience , les raifonnemens
confacrés à en rechercher la fource & la véritable
origine , doivent'être en général clafles
dans, ces produits de l'efprit ou de l'imagination
qui biffent touiours du vague & prefque de
l'arbitraire dans la penfee , il feroit entièrement
fuperflu d’eflayerici de répandre une lumière plus
vive fur cette partie de la phyfique, dont,, à tout
prendre, la chimie, plus f.vère dans fa marche,
peut & doit peut-être même négliger l'examen ;
il feroit au moins inutile de développer de nouveau
les idées qui ont été expofées dans lès
articles cités : on fe contentera donc dans celui-
ci , de donner une définition exaéie dè. la cohéi
rence & de la cohéfion , d'en faire voir les analo-
gies avec les forces chimiques , de préfenter un
petit nombre de faits certains fur fes rapports
avec lès phénomènes de la fcience , & d'en tiret
quelques réfultats immédiatement applicables ,
foit à l'expérience , foit à la théorie.
- Il faut d'abord bien convenir que la Cohérence
eft la puiflance naturelle par laquelle les môlé-i
cule.s des corps; femblables adhèrent les uritS
aux autres , & q*ue la cohéfion eft l'exercice ou
l'âéle même de cette puiflance dans les corps
adhérens. Il eft aifé de voir au premier coup
d'oeil que la cohérence > comme la cohéfion , dife
fèré\& varie dans les différens corps , & que*
fous ce* point- de- vüe , l'idée" de cette forcé
aêi ve chez eux eft repréfentée par les expref-j
fions fohde 3 folidité , ^ojicret , ,dur. , mou. lié
qui de , flufie , &c. qui rendent différentes modifications
, différens états ou deg’rés de cette force,«
11 ne l'êftpas moins defentir que,' fous ce point
de vue, le mot cohéfion fe rapproche finguliére-
ment du mot aggrêgution, comme, celui de coÀ
kérénce- du mot forée i 3 aggrégation , & que les
chimiftesqui, depuis; le tems qu'ils ont admis
le raifonnement dans leur fcience ,- s'apperçoi-
vehr'qu'il eft riéceffaife de tenir comptede cette J
force 'ou venu dans les corps- qu'ils ontà'-trai- *
ter , l?ont défignée par cette dénomination particulière
d'affinité' , d3 aggrégation , parce qu'ils ont
fuppofé qu’elje dépendoit d'une certaine analogie,
d'une -certaine identité entre les molécules des
corps agrégés ou cohérens. Ainfi , par rapport
à cette dernière confidération , la cohéfion 3
comme le mot aggrêgaiion\, rend réellement un
état, une modification, oppofés à ceux qu’on
1 nomme ou tas.
Pour peu *• qu’on réfléchifte fur l’exercice' de
cette force dans les divers produits naturels, on
trouve qu'elle doit être due à un certain rapprochement
, ou plutôt qu’elle exige , .qu'elle
opère même ce rappprochement y qui eft toujours
en rail on directe de la cohéfion dans " les
matières minérales ou brutes , mais qu'elle ne
fuit pas copftamment la même raifon dans ées
fubftancès tiflües des organes végétaux ou animaux
, où elle dépend d'un arrangement particulier
entre lès lames ou les fibres qui en conf-
tituent le parenchyme. Gette première réflexion
conduit nécelfairement à regarder la câhéfion
comme le réfultat de l'attraélion quelles molécules
fîmilaires des corps ont les unes pour des
autres j ainfi l’on eft toujours ramené à cette
dorme primitive qui dirige & conduit toutes des
operations de la• nature , qui domine & modifie
toutes les autres forces , & qui règle véritablement
tous les mouvemens comme tous
.le? phénomènes de notre globe. Voilà ce qu’il
y-a dé - plus clair , de plus certain & de feul
utile copféque.mment à confidérer dans la caufe
la' définition de la cohéfion. Voyons aétuellément
fes rapports qufelle a avec les forces chimiques
proprement dites, l'influence qu'ellè porte dàns
1 ur exercice , & conféquemment l'état que les
chimiftes doivent en faire dans l'étude comme
dans la~ pratique dé leur fcience.
Po.ur peu qu’on fafle desv expériences de chimie
ou qu’on en voie faire, un des premiers
phénomènes qu'on obferve , c’eft que les corps
foiidès ne s'uniffent point chimiquement, qu'il
n'y a le plus fouvent aucune àéfion fenfible
cntr'eux j qu'il faut, pour qu’ils contractent de
l’union } qu’ils foient, au moins l'un d'eux , à
l’état fluide j qu'on a eu raifon d’établir l'axiome
corpora non agunt, nifi fioluta, & que telle eft
la fource de la néceflité où font les chimiftes
de détruire d'abord ['aggrégation, de faire difpa-
roitre 1a folidité ou la cohéfion , dé réduire ces
corps à l'état de fujets phyfiques, à celui de fujets
cHimiqués pour ;en favori fer l'union intime.
On ne peut attribuer cette nullité ou cette foi-
bleffe de la tendance à la combinaifon , Cette
forte de répugnance à l'exercice de l'attraClion
de compofition dans les corps concrets pu fondes
, qu'à la cohérence même des Molécules, fï-
rnilaires ou homogènes , qu'à l'attràCHori! cfag-
gtégation qui les l ie ’ les unes aux autres. En
effet j plus les'-mcrlécules - adhèrent en tr’elles,
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• u exercerd’attraCho-n fur celles
™oir,s l'on ne Peut dével°PPe t j ]
dSy T ? f l iv e cette dernière.force en elles, qu en
^tM ÿiï&è 'o uSe l'mon fait enen P p u lv é»n fanpterenm ipèorre--
pbyrifant ,\ n diviiant pat le^feu les divers corps
on en déttuifant d’une manière quelconque leur
cokéfion , leur tiffu par ' aftion des m<uners,
des cifeaux , des râpes, des moulins. , des lmi-s,
l’eau elle-même, dont on fe fert G fouvent pour
dilfoudre un grand n o m b r e de_ matières naturelles,
pour leur faire partager fa fluidité , pour
les tendre fufceptibles denrrer dans les combi-
naifons 3 n’opère cet effet qu’en divifant ces matières
. en écartant leurs molécules 3 en detrui-
farit leur cohéfion , conféquemment en diminuant
ou même en détruifaat l’attraaion propre de
leurs molécules. r
Ainfi le premier but du chimilte dans Les travaux
3 la première opération qu il exécute, c elt
la deftruaion de la cohéfion', il apprend des les
premiers pas qu’ il fait dans fon a r t, que cette
férce qui rapproche les molécules des corps femblables
, eft l’oppofée de «elle qu il veut faire
agir ; il proportionne les moyens neceflaires
pour détruire la cohéfion ou l’aggrégation a l é-
nergie de cette force même ; il emploie des
agens qui l’emportent fur elle , & depuis la
fimple opération mécanique de la fcie , de la
lime, de la râpe ou du moulin, jufqu'à l'emploi
fi varié du calorique pour fondre les eom-
buftiblss, des diftolvans aqueux peur divifer les
corps falins, de la fufion avec l’alcali fixe pour
atténuer les folides pierreux les plus durs & les
plus réfradtaires , il reconnoît que dans toutes
fes opérations il commence par relâcher & rompre
le lien qui tient plus ou moins rapprochées
fes molécules identiques des corps , par combattre
& vaincre leur cohéfion; il apprend enfin,
que s’il n'avoit pas en fa puiflance des moyens
de rendre cette force, ou nulle, ou bien moins
adtive qu'elle ne l'eft dans les corps naturels , il
ne pourroit tirer aucun parti de l'attradlion de
compofition , ni arriver à la connoiffance des
compofés naturels , ou à leur imitation.
■; Cette connoiffance exadle & pofitive une fois
acquife fur-l'oppofition de la cohéfion aux forces
chimiques , & fur la néceflité comme fur le fondement
de l’art de la détruire on va voir par
d’autres confidérations, que ce n'eft pas à ce
feul point de vue qu'il faut fe borner pour en
déterminer l’influence dans toutes les parties de
la fcience. En effet, fi beaucoup d'opérations de
chimie ont pour but de réduire à»p la cohéfion
des molécules des corps , il en eft d'autres aufli
qui font faits dans une intention abfolument
oppofée, & qui doivent être pratiquées pour
remplir une indication contraire. Il importe fou-
vent aux chimiftes , de conferver des compofés
plus ou moins compliqués, foit de ceux que la
nature lui préfente , foit de ceux que fon art
crée en quelque foi te dans un état d’équilibre
& de permanence t e l , qu'ils reftent tels -que la
nature ou l'art les a formés, fans changement ,
fans altération : pour cela un des plus fdrs moyens
d'arriver à cette confervation , à cette permanence
d’éta t, c'eft d’en rapprocher les molécules
, de diminuer les vides qui les féparent ,
de fermer pour ainfi dire l ’entrée à tous les
corps qui pourroient s'infinuer entr'elles , & en
opérer l’écartement, en changer le tiflu , en
altérer par fuite la compofition 5 en un .mot, de
leur donner de la cohéfion , ou d’augmenter celle
qu'ils avoient en eux-mêmes pour aflurer leur
durabilité & prévenir leurs altérations. C ’eft ainfi
que les compofés en poudre ou criftaux fe con-
fervent mieux, toutes chofes d’ailleurs égales ,
que les mêmes compofés liquides , fondus j c'eft
ainfi qu’à plus forte raifon les compofés folides ,
maflirs , condenfés , gardent bien plus !ong-tems
leur nature propre, font bien plus inaltérables
qu'ils ne le feroient en fragmens , en pouflière,
& fous la confîftance molle & ductile.
Voilà ce qui fait que les chimiftes emploient
dans beaucoup de circonftances tous les moyens
qui font en leur pouvoir pour rendre cohérens
ou agrégés folides des corps qui étoient mous
ou liquides 5 c'eft pour cela qu’ils font criftal-
lifer les Tels, fondre & folidifier par le refroi-
diffement les métaux d'abord en limaille ; qu'ils
épaifliflent & concentrent au feu les liquides
'falins, huileux,,favoneux j qu’ils conduifent par
le refroidiflement & la congélation plufieurs liqueurs
de diverfe nature 5 qu'ils évaporent à fîc-
cité les extraits & les fucs des plantes j qu'ils
compriment ou deiïechent les bois , les feuilles
, les fleurs , les fruits , les racines , les
fibres charnues ou mufculaires , les parenchymes
vifeéraux, &c. ,-Souvent la feule preflion fuffit
pour procurer aux corps une cohéfion qui en
arrête 1*altérabilité & qui en conferve la compofition.
Quelquefois c'eft par une combinaifon chimique
que la; cohéfion naît tout à coup dans les
fubftancès qui n'en jouifîoient pas avant leur
union. Ainfi l’eau, en fe combinant avec la baryte,
avec la chaux , avec les fels calcinés _, & en
perdant le calorique qui tenoit fes molécules
écartées & en fufion , prend & partage avec ces
matières, dont elle rapproche les propres molécules
, une folidité , une cohéfion , qui rend leur
état permanent & peu altérable , comme on le
voit dans les mortiers , les cimens , le ftuc , Je
plâtre gâché , &c.
D'après cette courte expofition , on voit que
'le phénomène delà cohéfion doit être confidéré
; avec attention par le chimifte , qu’il influe fur
! fes opérations , que fouvent il ne doit s'occuper
qu’à fe détruire en la confidérant comme une
force oppofée à la combinaifon chimique, que