
ves , les plus aromatiques & les plus pures. On
croyoit autrefois que, dans la diftillation de 1 alcool,
il fe dégageoit toujours une grande quantité
d'air ; on fait aujourd’hui que c’eft la partie la plus
volatile qui fe fépare de l’eau, & qui paffe dans
l’état du gaz. Il bout à foixante-quatre degrés j il
eft en violente ébullition à foixante-huit de la graduation
de Réaumur. Quand on le tient plongé
dans un vafe fermé au milieu de l’eau chaude à
foixante-douze degrés, il prend la forme gazeufe,
& la conferve tant que la température refte à cette
élévation.
52. 11 eft beaucoup meilleur condu&eur du calorique
que l’eau j il eft bien plus dilatable qii’elle :
c’eft pour çeia qu'on l'emploie à la conftru&ion
des thermomètres ; il eft aufli très-bon condu&eur
de l'électricité,
C. Des propriétés chimiques de F alcool, comme
dijfolvant & non décomposé.
53. Dans l’expofé des nombreufes propriétés
chimiques dont jouit l’alcool, j’ai trouve utile de
diflinguer celles qu’il offre dans l’intégrité de fa
çompofition, ouïes combinaifons danslefquelles
i f entre tout entier fouvent comme diflblvant,
quelquefois comme difîous, de celles ou des cir-
conftances dans lefquelles il eft plus ou moins altéré
, décompofé. Peut-être même cette méthode
pourroit-elle être adoptée dans l’hiftoire de tous
les corps compofés. Aux premières propriétés appartiennent
les unions de ce liquide inflammable
avec l’air , le foufre, le phofphore, l’eau, queU
ques acides, les alcalis, un affez grand nombre de
fels & plufieurs fubftances métalliques. Je traiterai
ici de chacune d’elles dans des numéros féparés.
54. L’alcooj expofé à l’air s’évapore & s’y diffout
à une température de dix degrés +• :oj il ne
laiffe aucun rendu quand il eft très-redifié, &
feulement quelques portions d’eau quand il l’eft
moins : plus la température de l’air èft élevée, &
plus il s’y diffout. abondamment ou promptement.
A mefure que cette diffolution s’opère, il s’excite
du froid fur les furfaces des vafes d’où l ’alcool
s’échappe. On s’en apperçôit très-fe'nfiblement en
trempant les doigts dans ce liquide & en les agitant.
enfuite dans l’air : on ne fait pas s’il a plus
d’attradion pour la gaz oxigène, que pour le gaz
azote,
5/. L’alcool n’a aucune adi-on fur lé foufre fo-
lide ou en pouflière, ni à la Ample température
commune, ni par.celle qui le fait bouillir. Mais
quand les deux corps; fe rencontrent en vapeur,
ils fe combinent bien l’un avec l’autre ; il en refaite
un alcool fulfuré fétide, qui dépofe un peu
de foufre blanc & fe trouble en refroidi flan t , qui
fe précipite par l’eau, & où l’on trouve environ
un foixantième de foufre; il diffout mieux le gaz
•hydrogène fulfuré, qui lui donne un peu de couleur,
& qui fe décompofé dans cette combinailon ;
par le conwd du gaz oxigène & de tous lés corps
oxigénés, encore plus vîte que lorfqu’il eft feul &
dans l’état de gaz. A l’aide de la diftillation, l’alcool
enlève l’hydrogène fulfuré aux eaux qui le
contiennent.
yé. L’alcool diffout aufli un peu de phofphore
par la chaleur. Cette diffolution fétide fe précipite
par le contad de l’eau ; elle eft très - lumineufe
quand on l’agite dans i’obfcui;ité. Au moment où
on la verfe dans l’eau pendant la nuit, elle laiffe
exhaler de fa furface de brillantes aigrettes lumi-
neufes , & il s’en précipite un oxide de phofphore
en poudre blanche. L’alcool paroît aufli fufcepti-
ble de diffoudre le gaz hydrogène phofphore.
. 57' L’alcool s’unit à l’eau en toutes proportions,
& il y eft parfaitement diffoluble. Cette
diffolution fe fait avec chaleur, & elle forme des
efpèces d’eaux-de-vie fadices d’autant plus fortes,
que l’alcool y eft en plus grande quantité. L’affinité
de combinaifon entre ces deux fluides eft fi
grande, que l ’eau eft capable de féparer de ràl-*
cool plufieurs corps qui lui font unis, & que réciproquement
l’alcool décompofé la plupart des
diffolutions falines & en précipite les fels. C ’eft
d’après cette dernière propriété que Bolduc avoit
propofe de fe fervir d’alcool pour précipiter les
fels contenus dans les eaux minérales, & polir les
obtenidans altération. On s’ en fert dans une foule
de circonftances. Comme l’union de l’alcool & de
l’eau fe fait avec dégagement de calorique , cette
-combinaifon eft plus denfe que la proportion des
deux liquides ne l ’indique par le calcul de leur
pefanteur fpécifique. On fépare facilement l’alcool
de l’eau par la diftillation } il paffe le premier
en vapeur , & c’eft même, comme je l’ai dit plus
haut, un bon moyen de le féparer complètement
de l’huile qui lui eft unie dans fon état d’eau-de-
vie.
58. Il n’y a que les acides foibles que l’alcool
eft fufceptible de diffoudre fans éprouver d’altération
: c’eft ainfi qu’il diffout, à l’aide de la cha-
^eur 3 J1ac^ e boracique, qui lui donné la propriété
de brûler avec une flamme verte. Il diffout aufli le
gaz acide carbonique, qu’il condenfe & liquéfie
plus qu’à la proportion d’un volume égal au fien.
Il précipite au contraire de l’eau l’acide phofpho-
rique concentré fous forme muqueufe ou prefque
concrète, ainfi que ceux des. acides métalliques
qui font diffolubles dans le liquide aqueux.
- 59' On ne connoît pas de bafes terreufes qui
foient diffolubles dans l’alcool, mais les alcalis s’y
combinent très-bien. La potaffe & la foude pures
ou cauftiques s’uniffent directement à l’alcool,
comme le prouve la préparation connue depuis
.long-tems en pharmacie fous le nom de teinture
âcre du tartre. Pour préparer ce médicament, on
fa i foi t fondre de la potaffe dans un creufet, on la
pulvérifoit toute chaude, on la met toit dans un
matras,-on verfoit de l’alcool très-reéfcifié trois ou
quatre travers de doigt au deffus de l’alcai, on
po,uch,oit le matras avec un autre plus petit, on les
lutoit enfemble, & on faifoit digérer le tout au
bain de fable, jufqu’à ce que l’alcool eût acquis
une couleur rougeâtre. Il reftoit plus ou moins
d’alcali au fond du vaiffeau. Tout ce qui étoit
carbonate de potaffe ne s’ y diffolvoit pas.
Le trop fameux lilium de Paracelfe ne différoit
de la teinture âcre du tartre que parce que l’alcali
fixe qu’on employoit pour le préparer, étoit
mis dans l ’état de caufticité par la chaleur forte
qu’on lui faifoit fubir. On faifoit fondre enfemble
parties égales de trois alliages nommés alors régules
d’antimoine martial, jovial & de Vénus : on
les réduifoit en poudre, on les faifoit détoner
avec une fois & demie leur poids de nitre & autant
de tartre 5 on pouffoit à la fonte , on pulvérifoit
ce mélange, on le mettoit dans un matras , & on
verfoit par-deffus de l’alcool bien fec , jufqu’à ce
qu’il furnageât décroîs ou quatre travers de doigt.
Ce mélange, mis en digeftion fur un bain de fable,
prenoit une belle couleur rouge, plus foncée
que celle de la teinture âcre du tartre, & elle pré-
fentoit tous les mê.mes phénomènes : on pouvoit
faire cette dernière entièrement femblable au
lilium de Paracelfe, en faifant digérer l’alcool fur
l’alcali fixe cauftique,au lieu de fe fervir de fel i
fixe de tartre, que l’a&ion du feu ne privoit pas
entièrement d’acide carbonique, à moins qu’on
ne le tînt rouge pendant long-tems.
M. Berthollet s'eft affuré que ces teintures ne
font que des diffolutions de potaffe cauftique dans
l’alcool, & qu’elles fourniffent un moyen utile
d’obtenir cet alcali très-pur en le féparant par
l’évaporation.
L’alcool a la même aétion fur la foude. Par cette
diffolution, non-feulement on obtient des alcalis
fixes très-cauftiques, très-purs, féparés de lafîlice,
de l’alumine, & des fels neutres qui y font fi fou-
vent unis après leur traitement par la chaux, en
évaporant rapidement leur diffolution alcoolique
dans un vaiffeau d’argent, mais encore en expo-
fant à l’air tte au refroidiffement lent leur diflolu-
tion faturée ; elle donne des criftaux de potaffe &
de foude en belles lames blanches ou en prifmes
réguliers, groupés les uns avec les autres. C’eft le
procédé qu’on emploie pour obtenir ces bafes, 8t
le feul qui les donne dans l’état criftallin.
L ’ammoniaque s’unit avec chaleur à l’alcool : on
l’en fépare , à l’aide de l’action du feu, parce que
l’ammoniaque forme un gaz permanent; mais il
retient en difioiution gazeufe un peu d’alcool, qui
modifie fon odeur & Tes propriétés.
60, L ’alcool diffout plufieurs fubftances falines.
Macquer a déterminé le premier que les fulfates
ne s’ y diffolvoient que difficilement » que les nitrates
& les mariâtes s’y uniffoient beaucoup mieux,
& qu’en général l’alcool diffolvoit d’autant plus
les.fubftances faillies, que leur acide y étoit moins
adhérent.
L’alcool bouilli fur les fulfates de potaffe & de
foude n’en a riendiffous. Les carbonates de potaffe
& de foude ne s’ y uniffent point : ces fels,
non diffolubles dans l’alcool, font même précipités
de l’eau par ce réaêtif. La plupart des fels
ammoniacaux fe combinent à l’alcool. Ce font fur-
tout les fels terreux déliquefcens, tels que les nitrates
& les muriates calcaires & magnéfiens qui
s’y diffolvent abondamment. Bergman a même
confeillé de s’en fervir pour féparer les fels déliquefcens
d’avec les autres par une première lef-
five alcoolique, appliquée aux réfidus d’eau minérale
: on peut employer ce procédé pour faire
criftallifer quelques fels très-difficiles à obtenir
fous leur forme régulière.
Un grand nombre de fels métalliques font aufli
très-folubles dans l’alcool : tels font furtout le
fulfate de fer furoxigéné rouge ou à l’état d’eau-
mére, le nitrate de cuivre, les muriates de fer\&
de cuivre, le muriate furoxigéné de mercure ou
fublimécorrofif : tous les fels cuivreux donnent une
très-belle couleur verte à fa flamme. Depuis Macquer,
M. Guyton a donné dans le Journal dé physique,
une table plus complète des degrés de fo-
lubilité des fels par l’alcool.
61. L’alcool n’a aucune a&ion fur les matières
métalliques ni fur leurs oxides, au moins fans être
décompofé : on trouvera plus bas qu’ il l’ eft fou-
vent par les diffolutions des métaux dans les acides;
mais ce genre d’aétion eft étranger à cette
partie de fon hiftoire, & fera retracé dans celle ou
il doit être queftion de fa décompofition.
62. Il eft peu de matières végétales fur lefquelles
l’alcool ne puiffe exercer une aétion plus ou moins
marquée, mais elle eft plus ou moins prononcée
fuivant la nature diverfe des matériaux immédiats
des plantes.
Margraff a extrait par l’alcool une matière fu-
crée de la betterave, du chervis, du panais ,&rc.
Depuis , on en a retiré par le même procède des
tiges de mais & d’un grand nombre de fruits.
L’extra&if s’y diffout très-bien en général, &
d’autant mieux qu’il eft plus oxigéné. Il donne
conftavnment à l’alcool une couleur jaune, fauve
ou rougeâtre.
Les fubftances végétales qui s’ uniffent le mieux
à l’alcool font les huiles volatiles, le camphre, les
réfines, les baumes & plufieurs matières colorantes.
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63. On donne le nom impropre d’eau diltillee
fpiritueufe à l’a'cool , charge par la diftillation
d'un peu d’huile volatile des végétaux odorans :
on a cru qu’il s’uniffoit, par cette opération , à
un principe particulier de 1 odeur qu on nommoit
efprit relieur ou arôme : je vais prouver que c’^ft
une petite quantité d’huile qu’ il emporte avec lui.
Pour obtenir ces fluides nommés efprits odorans
ou eaux difiillées fpiritueufes, on diAille au bain-
marie l’alcool avec des plantes odorantes ou avec
leurs parties, hachées ou broyées. Ce liquide
s’empare d’une portion de leur huile volatile, &
fe voliiilife avec elle > aufli a-t-il la propriété de