
des matières animales a lieu même par les alcalis
fixes fol ides, parce qu'ils trouvent allez d'eau dans
ces matières pour fe ramollir d'abord & fe diffou-
dre 3 ce qui leur permet en Cuite d'agir comme dife
folva ns. 6j . En 17S.1, M. Berthollet a donne un Mé--
moire fur cette aêtion des alcalis ; il l'a préfentéè
comme l’effet d’une combinaifon fîmple, dans laquelle
les matières animales entroient toutes entières
; il a remarqué que la laine, la foie, la chair,
bouillies avec une leflive de potaffe concentrée ,
s’y diffolvoient, lui ôtoient fa caufticité, lui don-
noient une laveur amère, une couleur rouge, ne
leur enlevoient pas d'acide carbonique, comme
Macbride l’avoit cru 3 que cette diffolution étoit
précipitée par les acides & parles fels métalliques}
que dans cette dernière précipitation, le dépôt
compofé de la matière animale & de l'oxide rapproché
de l’état métallique, étoit inaltérable &
jmputrefcible ; qu'elle ne précipitoit pas le mu-
riate furoxigéné de mercure, tandis qu une difl'o-
lution de fucre & d’amidon dans le même alcali ne
détruifoit pas fa cauflicité & décompofoit ce fel
métallique} qu'ainfî la matière animale faturoit l'alcali.
66. Un phénomène obfervé par ce chimifte me
fit adopter une opinion différente de la iîenne 5 il
me conduifît à faire une fuite d’expériences qui
m’ont fourni’une autre théorie, en me montrant
qu’il fe pafToit autre chofe qu’une fimple diffolution.
M. Berthollet avoit remarqué que la diffoln-
tion d’une matière animale par l'alcali cauflique ,
exhaloit une odeur putride défagréable. Je reconnus
bientôt qu’en effet toute fubftance de cette
nature laiffoit dégager une quantité notable d'ammoniaque
dans le moment où on la traitoitparune
forte leflive d’alcali 3 qu'il fe dégageoit en même
tems du calorique; que la même chofe avoit lieu,
mais avec moins d’énergie, avec la chaux, 'a ftron-
tiane.& la baryte. Une matière animale fraîche ne
contenant pas d'ammoniaque toute formée, j'en
conclus qu’il s’en formoit.par l’aélion des alcalis ;
que d’après cela, cette matière une fois diffoute
n’étoit plus la même qu’avant fa diffolution, &
qufetle avoit changé de nature. Dans la préparation
du favon animal qu'on fabrique, fuivant le
confeil & le procédé de M. Çhaptal, en faifant
bouillir des rognures d'étoffes, de laine dans une
leflive, forte de potaffe, jufqu’ à ce que celle-ci
refufe d’en difioudre, ce favon liquide & coloré,
utile dans les fabriques de molletons, de draps ,
de couvertures, retient & donne aux étoffes une
odeur défagréable qui.eft due à cette ammoniaque
formée, & qui. fe diflipe à l’air ou par un grand
lavage.
. 67. Il eft facile de concevoir qu'à mefure qu'il
fe forme de l'ammoniaque, la matière animale per-
dant par-là cinq fois autant d’azote que d'hydrogène,
elle doit contenir dans fa portion unie àTal-
eali beaucoup plus d’hydrogène qu'auparavant, &
qu'ayant ainfi contracté un CAra&ère huile u t , h
combinaifon alcaline eft un véritable favon : aufli
toutes les propriétés décrites par M. Berthollet
dans cette diffolution font-elles autant de caractères
d’un compote fayoneux. Les a.d’dfs lèdécoir.po.fent
& en fépa,ren.t une huile concrète brune} les diffolu-
tipns métalliques y forment des précipités de favons
métalliques indiflblubles : il en eft de même des
fels terreux. M. Chaptal l’a propofée pour remplir
les conditiops d’un véritable favon dans les
manufactures de laine. Il ne manque, comme on
voit, aucune preuve à mon opinion.
68. La couleur rouge ou brune, plus ou moins
foncée que prennent les fubftances animales quand
on les diffqut dans les leflîves d’alcalis fixes caufti-
ques, annonce encore un autre changement dans
ces fubftances. On conçoit facilement que lorfqu'il
s'en fepare del’azote & de l’hydrogène pour la formation
de l'ammoniaque qui fe dégage, il doit fe
précipiter une portion de carbone mis à nu,
que l'huile formée doit fe rapprocher par-là de
celles qu'on nomme empyreumatiqu.es. Petit obferva
en 1753, dans les Mémoires de l’Académie des
fciences, qu'un morceau de pierre à cautère, enveloppé
de graiffe & de peau, rendoit ces parties
rougeâtres par quelques heures d.e féjour. Poulie -
tier de la Salle a décrit dans fon Commentaire fur
la pharmacopée de Londres, des expériences faites
fur l’application de la pierre à cautère à la peau
d'un cadayre , dans l.efquelles il a obtenuje même
réfultat. Cet agent, employé avec les mêmes foins
& le même appareil que fur un fujet vivant, a
offerti après vingt-quatre heures de féjour, une
efcarre, un trou creufé ; & un bord d’un rouge
livide, dus à fon aétion colorante fur la graiffe fouf-
cutanée.
69. L'aêfion des alcalis fur les matières animales ,
aujourd’hui bien déterminée, explique leur ufage
comme pierre à cautère, comme caùftiques pour
emporter les loupes, les tumeurs indolentes : ou
voit pourquoi leur emploi comme fondant pour les
maladies qui exigent ces fortes de remèdes, peut
devenir dangereux fi l’on en abufe; comment les
ieffives alcalines altèrent & affoibliffent tous les
tiffus animaux qu’on en imprègne, qu’on y laiffe
féjourner, & furtout qu'on fait chauffer avec ces,
liqueurs, comme on le pratique fouvent pour les
laines,les foies, les crins, les plumes, &c.
§. IX. Des caraBères des matières animales, tirés de
laction des fels , des oxides , & des fels métalliques
■ fur ces fubftances.
70. Je réunis dans un feul article I’aêlion de?
trois genres de corps fur les matières animales,
parce qu'elle eft, ou foible, ou difficile à déterminer
, ou non encore appréciée avec exactitude.
Il y a peu de faits à décrire , & peu de réfuitats
à tirer de l'aCtion de ces corps : j'ai donc dû les
çonfîdérer enfemble,.ne pas les réparer, & les
affoeier dans une feule confédération.
M A T
71. On connoît la propriété confervatrice des *
fels fur toutes les fubftances organiques en gêné- ]
ral j & une foule d’arts & de-procédés prouvent j
fpecialement 1 exiftence de cette propriété' par rapport
aux madères animales. L’alun durcit les peaux
&: en refferre les tiffus , qu’il rend plus durables }
fa diffolution fert fouvent pour défendre de toute
altération les organes ou les parties-dés animaux
dans les collections anatomiques. Le muriate de
foude produit un effet analogue & fi confervate'ur
dans les viandes', qu'on s’en fert pour les empêcher
de s altérer, & lesdeftiner à la nourriture.-
On emploie le même procédé pour le beurre & le
fromage. Pringle avoit cru qu’une petite' do'fe de
fel hâtoir leur putréfaction, tandis qu’une grande
étoit antifèptiqtie. On a- reconnu que cette Opinion
étoit une erreur, &■ que peu de fel laiffoit
feulement pourrir les'- matières animales 3 parce'qu’il
n’abforboit pas toute leur'humidité.
72. Les fels terreux , en1 préfentant là-propriété'
des précédons-, offrent un1 caractère de plus dans
leur énergie' aCtive fur les matières animales ; ils
en décompofent les phofphates diffol'ublês, ceux
de foude & d’ammoniaque , qui font prefq-ue conf-
famment contenus d'ans les liqueurs des animaux :
de là vient qu'en verfant dés difiolutibns de $PI
frates &: de rfcuriàtesde chaux-, de magnéfieyde
ftrontiane, dans_le ferurn, le petit-lait, l'urine,'
Feau dés hydropiqües, le bouillon , 8/c. il y a un
précipité plus ou moins abondant, qui: eft toujours
du phofphate de chaux. La fonde, qui exifte ifo-
lee ou à l'état favoneux dans plufîeurs de' ces liqueurs
& dans la bile, décompofe encore ces-fels',
& en précipite les bafes rerreufès-} en forte que'
ce précipité eft fouvent double, & formé de phof
phates terreux & d'e terre. Dans le’ca'-sd es-liqueur s-
animales fàvoneufes, le1 précipité qui fe forme eft
un favon terreux indiffbkibie. Les-fels-alumineux,
en produifant le même effet fur les liqueurs’ colo^
rées, en emportent fouvent les couleurs:, avec la
matière defquelles l’alumine a une grande affinité'.
73. On voit, par cet eXpofé, que les matières
falines ont prefque toujouîs- un effet très-compli--
que fur les fubftances animales liquides-, dont elles
décompofent une partie des fels en fe dëeompo,-
fant ellës-mêmes quand elles font furtout de nature
terreufè , & que, confervatrices de ces1 matières
folides , elles-en rapprochent & con’denfent
le tiffu; On doit borner à ces effets la généralité
qu’il eft néceffaire de préfenter ici: on aura par la
fuite l'occafion de faire connoître quelques autres
aCtions exercées par les fels fur plufieufs fubftances
animales en particulier, de faire-voir que ces
aCtions dépendent de la nature- fpéciale - de cës
fubftances', & qu'elles doivent être confédérées
comme très-propres à les eatàCtérifër. On ne peut
guère douter que beaucoup de fels à bafé^alca-'
fine, qui ne' fé trouvent pas- dàns: lés- compofès
animaux, ne produifent, dans ces compofès, des
phénomènes de décompofttion ou <F union triple
M A T 6gg
& peut-être quadruple, qui n’ont point encore été
détermines. La fcience a beaucoup à faire encore
fous tous ces rapports.
74. Ceux des métaux qui font les plus faciles à
oxider éprouvent ce genre d’altération quand on
les tient plongés dans plufîeurs liquides animaux.
Le fer, le z in c le plomb , le cuivre, font fpécia-
lèment de cet ordre 3 loxidation en eft furtou-t
plus prompte & plus marquée dans les liqueurs1
albumineu(es. A cettè combuftion lente fuccède
fouv.erft une véritable phofphatifanon>ar l'union1
dès oxides métalliques avec l’acide phofphorique'
des- matières animales. Tout le monde fait combien
l’argent eft facile à colorer, à noircir par le
c'ontâCf de ces matières, & même des- vapeurs
qui s en exhalent. Le gaz hydrogène fulfui-é, dont
elles font fou veut chargées1, eftla fource dé cette'
altération : le foufre qui l’abandonne, s’unit à la
longue à eé métal, & elle eft la caufe du fulfuré
d'argents formé par des- piafs, dé ce métal, qui
avoient long-te ms féjourné dans une foffe d’ai-
faricé a Gompiègne, & qui ont été examinés , en
I7Ôji3 par Maequér. Les métaux mêmes les moins
faciles à oxîdêi* p r e n n e n t néanmoins^ cet état par
Ta trituration avec celles- des liqueurs1 animales qui
abforbent promptement ce principe. C ’eft ainfi
que M mercure , l’or & F argent, broyé S' avec Ia-
fali've & la- graiffe, fe eortvertiffënt, avec plus ou
moins de te.mSj en véritables oxides loifqu'ils ont
le contaâ: de l’air.
Les1 oxides métalliques très-oxides cèdent
îu contraire une partie plus- ou moins grande de
leur Oxigène aux matières animales- avec lefquelles
on les met en contad. C ’eft ainfi que ceux de-
1 n^rcure & d’argent épaiflîffent & coagulent l’ai-
buminè j quelques-uns parmi ceux qui y adhèrent
le moins, & qui le laiffent enlever avec plus ou
moins de facilité, vont même jufqu’à brûler les
compofés: animaux. Reconnus comme caùftiques
quand on1 les applique fur ces compofès vivans , ’
ils1 peuvent fervir à en faire l’analyfe lorfqu’ils font
pri/es de la vie. On réduit les matières animales.
en^ charbon par 1 adion de ces oxides }-pendant
quelle a lieu, il fe forme de l’eau , quelquefois
de l’ammoniaque, & , dans d’autres ciiconftances,
dé l’acide nitrique. C’eft pour cela que de l’oxide
dé fer rouge, mêlé aux fubftancès: animales employées
dans desnitrièrës artificielles, contribue
à- la formation de cet acide.
j 6. Les diflolutiofis des métaux dans les acides
agi fient, par leurs doubles compofans , fur les liqueurs1
animales } auffi n'en eft-il pas une qui ne
foie déeompofee, & dont l’oxide' féparé ne fe rapproche
de l'état métallique par leur féjour dans
ces liqueurs. Celles des métaux blancs, & notam-
rtteHt du mercure', d'u plomb & de l'argent, font
précipitées au moment même de leur mélange
avec ceis-liquides. Ce précipité eft formé, fort par
l'acide muriatique, foit par l’acide phofphorique
qui fout partie' des élément de cesmia-tières. La-
T t t e L