
extraite du fer caftant à froid, qu*il avoit cru être
un métal particulier, & qu’il défignoit par le nom
de fydérite, laquelle a été reconnue après lui pour
du phofphure de fer. En recouvrant de l’étain avec
de la limaille de fer dans un creufet rempli d’ailleurs
de charbon & bien fermé , & en chauffant
cet appareil au feu de forge pendant une .demi-
heure j il a conftamment obtenu deux alliages métalliques
diftinéts , répondant au poids des deux
métaux qu’il avoit employés. Ces deux culots
etoient deux alliages féparés, l’un de fer uni à un
peu d’étain, l’autre d’étain retenant un peu de fer.
Les extrêmes de ces deux combinaifons métalliques,
ou les points de leurfaturation réciproque,
étoient de 1 étain contenant un vingt-deuxième
de fon poids de fer 3 & du fer faturé de la moi tié
de fon poids d’étain : ce font au moins ceux dont
il décrit avec foin les propriétés. L’étain tenant
un vingt-deuxième de fer étoit très-malléable,
fe coupoit au couteau, quoiqu’un peu obfcurci
dans fon brillant, plus dur , donnant avec les
phofphates fufibles un verre brun moins fufible,
moins alliable au plomb & à l’étain, noirciftant &
Jaiftant une poudre indifloluble avec l’acide nitrique.
L’étain ne tenant que deux centièmes & demi
d f f ir étoit encore attirable â l’aimant, & noir-
C1 . dans fon oxidation. Le fer, faturé de la
moitié de fon poids d’é.tain, offre des propriétés
modifiées par ce dernier métal : cet alliage eft légèrement
tnalleabje, ne fe coupe point au couteau
, ne s unit que très-difficilement au mercure,
fe fond avec peine avec les phofphates, donne
conftamment, dans cette fufion, des étincelles
brillantes étoilées que ne fourniffent jamais ni le
fer ni 1 étain feuls. En augmentant la proportion
du fer, ces propriétés diminuent & fe rapprochent
de celles du fer. Cependant quand on eft arrivé,
par l’addition du fert à avoir dans l’alliage o. ii
à‘'étain, cet alliage eft encore très-caractérifé par
les étincelles étoilées , brillantes, lancées du milieu
du phofphate , avec lequel on le fait fondre
au chalumeau ; il a encore la propriété de précipiter
& de colorer en brun la diffolution d’ or.
Bergman concluoit de ces expériences, que les
divers alliages de fer & d’étain qu’il avoit obtenus
, différoient de la fy dé ri te ; & s’il n’avoit pas
encore trouvé par-là ce qu’étoit ce corps, il avoit
au moins trouvé ce qu’il n’étoit pas } genre de
découverte q u i, prefqu’auflï précieufe, & fou-
vent auffi difficile à faire que celle de la nature
exa&e d’un compofé, détourne au moins du chemin
de l’erreur, & rapproche infenfibiement dé
celui de la vérité.
79' f er ne peut pas fe combiner au plomb
par la fufion. Tous les chimiftes ont obfervé que,
quand on fondoit les deux métaux , le fer nageoit
à la furface du plomb, & r.eftoit conftamment fans
s’y unir. Juncker avoit même cherché à expliquer
ce phénomène par l’épaiffeur & la confif-
tance des molécules du plomb, & par la légéieté
de celles du fer. Cependant Mufchenbroë'ck a
décrit les propriétés d’un alliage d’une partie de
fer avec trois parties un quart de plomb : il dit
qu’un parallélipipède de cet alliage, d’un dixième
de pouce, a exigé deux cent vingt - cinq livres
pour le rompre. Il ajoute qu’un alliage de dix parties
de fer avec une de plomb a uns pefanteur
fpécifique égale à 4.250. Il y a quelqu’erreur à
cet égard dans les expériences du phyfiçien hollandais.
Cellert, celui des chimiftes fyftématiques
qui a le plus étudié les combinaifons réciproques
des métaux, obferve que le fer, ne pouvant pas
.s’unir au plomb, peut fervir, en raifon de cette
propriété, à féparer le plomb de prefque tous les
autres métaux, pourvu cependant que le métal
qu’on veut ifoler du plomb ait moins d’attraéïion
avec lui qu’avec le fer. Macquer remarquent, dans
le même fens, que le plomb pouvoit férvir d’intermède
pour féparer le fer des autres métaux,
auxquels ie plomb peut s’unir de préférence. On
verra, dans l’hiftoire de l’argent, un exemple bien
prononcé de la purification du fer par fa fufion
avec le plomb.
Aftion fur Veau & les oxides.
80. J'ai fait remarquer plus haut ( n°. yp) que
l’oxide de fer rouge étoit en partie décompofé
par le gaz hydrogène, mais que l’oxide noir n'é-
toit jamais altéré par ce corps combuhible. J ai
infift.é fur la différente attraction qui exiile entre
l’oxigène 8c l’oxide de f r noir. On fe rappelle que
la première portion doxigène qui s’unit au fe r ,.
y adhère bien davantage que la dernière. C'elt
dans cette différence d'attraction que confifte la
manière d'agir de ce métal, fur l ’eau. Une, foule
d’obfervations prouve combien il eil altérable p r
ce liquide , avec quelle facilité il fe rouille &
fe brûle par fon contaét. Les découvertes de
MM. Monge 8c Lavoifier fur. h nature de l’eau ,
dont j'ai tant de fois parlé., ont fait connoître à
quoi eft due cette aétion de l’eau; & l’altération
même qu’elle fait éprouver au fer eft devenue,
entre les mains du dernier.de ces célèbres phyfi-
ciens, un moyen ingénieux d'en déduire la nature
compolee de l’eau, & d’y prouver la préfence de
l’oxigène ; auffi ai-je annoncé que l'hiftoire fi in-
téreffante, à tous égards, de ce métal étoit liée
aux plus importantes époques des révolutions des
fciences, 8c qu'il avoit beaucoup contribué, par
fes belles propriétés, à l'établiffement de la doc-
ttine pneumatique. A cette généralité de l’aâion
du fer fur l'eau , il eft riéceffaire de joindre ici.
l’expofé des phénomènes qu’elle préfente, fui-*
vaut les différentes circonllances qui l'accompagnent
8c les divers procédés par lefquels on la fait
naître.
8ï. En mettant du fer en limaille avec de l’eau
au deffus d’une cloche pleine de mercure, 8c en
expofant l’appareil à une température qui excède
quinze degrés, il ne tarde pas à fe remplir de
petites bulles qu’on voit d’abord comme attachées
aux molécuLs du fer .- peu à peu les bulles, qui
deviennent plus groffes 8c plus nombreufes, fe
raffemblent au deffus de l’eau 8c du fer, 8c font
baiffer le mercure par le volume qu’elles, occupent.
Cette aâion dure long tems, 8c 1 e fer fe
trouve à la fin changé en une poudre très-noire,
plus volumineufe. que n’étojit d'abord 1 efer d’où
elle provient : l’eau, fi elle n’ayoit été mifequ’en
petite quantité, eft bien diminuée, 8c le gaz recueilli
eft du gaz hydrogène. Lavoifier, à qui eft
due _ cette-jolie expérience, a trouvé que le fer
avoit augmenté de poids, 8c qu’en ajoutant cette
augmentation au poids du gaz hydrogène obtenu,
on avoit jufte celui de l’eau, qui manquoit. Jamais
1 efer, biûléainfi par l’eau, ne devient jaune
ou rougeâtre tant qu'jl n’a point le contaâ de
1 air ; mais auffitôt qu’il jouit de ce contaét, 8c
qu’il eft en même tems humeété, il paffe au jaune
dérouillé, en abforbant peu à peu une qualité
un peu plus grande d'oxigène, 8c furtout de l ’acide
carbonique.
82. Lémery avoit fait, par un procédé analo-
gue, une préparation de fer qu’il croyoit n’être
qu une fimple divifion ou atténuation de ce métal
, 8c qu’il nommoit êthiops maniai à caufe de
fa couleur noire : il mettoit du fer en limaille au
fond d un vafe alongé, rempli d'eaü ; il agitoit de
teins en tems ce métal dans l'eau qui le furnageoit,
en évitant qu’il eût jamais le contaét de l'air, 8c
en enlevant aveefoin celui qui, furnageantquelquefois,
y prenoit promptement le caraétère de
rouille ou d'ocre. En quelques femaines ou quelques
mois, onconvertiffoit ainfi toute la limaille
en éthiops. Dans la perfuafion où les chimiftes ont
long - rems été , que ce n’étoit qu’une véritable
divifion ànfer, ils ont cherché à i’envi les moyens
de la rendre plus facile, plus aétive, 8c de,diminuer
la longueur de l’opération par laquelle on
obtenoit cette préparation. Rouelle avoit confeillé
l’emploi des moufibirs de la Garaie pour favorifer
& multiplier le contaét entre l’eau 8c le fer; d’autres
, en ajoutant à l’eau un peu d’acide nitrique,
d acide fulfurique, ou même d’acide du vinaigre,
avoient remarqué qu’on formoit promptement
une grande quantité de cette poudre, qui n’èft
que de l’oxide noir de fer e: les uns l'obtenôient
en réduifant de l’oxide de fer rouge, à laide de
l'huile, dans un creufet; les autres en diftillant,
dans une cornue ouverte , de la rouille de fer.
Quelques-uns, tenant toujours à l’action de l’eau
8c croyant que, préparé par une autre voie que ce
liquide, l ’éthiops ne devoit point avoir les qualités
requifes, font revenus à fon emploi; & l’on a
trouvé qu’en faifant une efpèce de pâte de limaille
de fer avec de l’eau, 8c la .laiffant quelques jours
expofée à l’air, elle s’échauffoit, fe bourfoufloit,
fe fendilloit, s’oxidoit-en jaune, 8c devenoit en-
fuite, par la fimple calcination dans un creufet.
un magnifique 8c abondant éthiops. Dans ce dernier
procédé, on fait la même chofe abfoiument
que orfquon chauffe le carbonate de fer de la
rouille; & toujours on oxide le fer par l’eau, qui
ne lui cède que la portion d’oxigène néceffaire à
Ion oxidation en noir. Auffi, dans la manière d’o-
perer même de Lémery, il fe «egageoit du gaz
hydrogène qui fortoit peu à peu en bulles très-
hnes, & qui répandoit fon odeur très-reconnoif-
lable dans les lieux où cette opération étoit établie.
On a une preuve très-forte que la préparation
de Lemery, ou toute autre analogue, n’eft
qu une oxidation du fer, opérée à l ’aide de l’oxi-
gene de l’eau, non-ieulement par la réduâion de
1 oxide rouge , qui repaffe feulement au noir à
1 aide du gaz hydrogène, mais encore par l’inté-
refiante expérience de M. Vauquelin, qui, en
chauffant dans une cornue ou dans un creuiet parties
égalés. d’oxide rouge de fer 8c de limaille de
ce métal, a réduit tout lé mélange en oxide noir,
I en faifant ainfi partager au fer la portion de l’oxi-
gene contenue dans l’oxide rouge au-delà d e l’oxi-
; dation en noir. M. Monnet a prétendu que, dans
; tous les cas où l'on laiffe de l’eau en contaâ avec
1 dp fer, elle en diffolvoit un peu dans fon état de
purete, 8c contiaétoit un goût ferrugineux trè,-
I ^nfable.
83. La décompofition de l’eau par le fer a lieu
beaucoup plus rapidement lorfqu’on élève la tem-
perature de ces deux corps, 8c furtout lorfqu’cn
met ep contaâ l’eau en vapeur 8c le fer rouge.
G elt ainfi que Lavoifier a confirmé la belle d“-
cquvqrte de la nature de l’eau. J'ai décrit cette
opération ailleurs^: je.dois feulement rappeler ici
qu au moment où l’eau en vapeur touche l’intérieur
d’un canon de fer rouge, il fe dégage une
grande quantité de gaz hydrogène ; l'eau difpa-
roit; le fer Ce brûle, s’oxide en noir, fe ramollit
fe bourtoufle également dans toute la furface, de
manière que fa cavité intérieure fe rétrécit en
reftant cependant cylindrique. Quand cette fur-
face de fer eft tellement oxidée que l’eau traverfe
le canon fans éprouver d’altération, en laiftanc
refroidir entièrement 1 appareil, 8cdepefant avec
- exactirude , on trouve dans la fomme du poids du
gaz hydrogène 8c de l’augmentation du canon la
quantité totale de l’eau qui a difparu. L’intérieur
du tube ie fe r préfente une couche dilatée, noire
brillante, lamelleufe, caflanté, qui, réduite en
poudre, eft de véritable oxide de fer noir. On
obtient le même réfultat en faifant paffer de l’eau
en vapeur dans un tube de porcelaine où Von a
introduit des lames de fer; 8c c’eft ie procédé que
I on fuit aujourd hui en France pour obtenir !■= gaz
hydrogène néceffaire à la diftenfion des machines
aeroftatiques. Cette belle expérience explique Une
foule de phenomenes qui n’étoient pas intelligibles
avant la découverte de la décompofition de 1 eau. On fait, d’après elle, pourquoi le fer rouge
plonge dans l’eau, produit une effervefcence Sc