
fenfiblement plus que le petit-lait de vache. Cependant
Haller donne pour la quantité du corps
mucofo-fucré contenu dans le lait d'âneffe, une
proportion plus grande que pour le lait de femme :
cette proportion eft, fuivant lui , comme 82 eft
à 67 j en forte que cette liqueur paroît être celle
de toutes qui contient le plus de fucre de lait.
MM. Deyeux & Parmentier, en examinant comparativement
le lait de trois âneffes, affurent avoir
trouvé beaucoup de variétés dans le ferum qu'ils
eti ont obtenu. Il leur a paru contenir les mêmes
fels que celui de vache 3 mais en moindre quantité.
71. Le lait de chèvre eft le plus épais de tous,
fuivant les mêmes chimiftes. Il a une odeur qui
déplaît à quelques perfonnes, & qu'on peut diminuer
par les foins & la propreté dans l'entretien
de l’animal 5 celui des chèvres blanches eft moins
odorant que celui des chèvres noires. 11 donne
beaucoup de crème, & celle-ci fournit beaucoup
de beurre. Le beurre de chèvre eft blanc 5 il prend
beaucoup de fermeté , & il fe conferve long-tems
fans fe rancir. Le même lait contient suffi beaucoup
de matière caféeufe qu'on en fépare facilement
par tous les moyens connus. On l’obtient
fous la forme d’un caillé très-ferré, très-épais. On
clarifie bien enfuite le ferum de ce lait j il eft ordinairement
jaunâtre, avec une teinte verdâtre.
Suivant Haller, la proportion du fucre de lait qui
y eft contenu par rapport à celui du lait de vache,
eft comme 49 eft à 54 3 & , fuivant MM. Deyeux
& Parmentier , il n'en contient pas moins que ce
dernier j mais ce qui leur a paru très-remarquable,
c'eft qu'ils afliirent n'y avoir trouvé que dumu-
riate de chaux après en avoir extrait la matière
mucofo-fucrée. Ôn fer.oit porté à croire que le
phofphate de chaux doit y être aufli abondant d’après
la groffeur, la dureté & la longueur du poil
de cet animal, fur la nature duquel ce fel a beaucoup
d’influence, comme je l’ai déjà indiqué dans
l’article de l'analyfe du poil.
72. Peu' différent au premier afpeéf du lait de
vache, il préferite cependant à l'analyfe, faite
furtout par MM. Deyeux & Parmentier, des caractères
bien prononcés qui le diftinguent. Il offre
une crème abondante mais peu épaifîè, d'où l'on
fépare un beurre mou, très-fufible, de la confif-
tance d'une huile figée, d'une couleur jaune très- ,
pâle, qui fe rancit facilement. Les acides & l’ai- j
cool le coagulent promptement. Sa matière caféeufe
eft graffe & vifqueufe : fon ferum, difficile
en général à clarifier , donne facilement du fucre
de lait prefque pur dès la première criftallifation,
fuivant les chimiftes cités. C ’eft cependant de tous
les laits celui qui, d'après les auteurs, recueilli &
comparé par Haller, fournit le moins de ce corps
mucofo-fucré : fa proportion avec celui de vache
èft comme 37 eft à 54. Le ferum, après l'extraction
de ce corps, contient du muriate de chaux en
très-petite quantité, fuivant MM. Deyeux & Parmentier.
La différence la plus remarquable ou le caractère
le plus faillant du lait de brebis confifte dans
les propriétés ou la manière d’être de fa partie caféeufe
: fon état vifqueux & mou eft la caule de
la confiftance. graffe que préfentent conftamment
les fromages qu’on en prépare. C'eft pour cela que
dans quelques pays on a foin de mêler le lait de
brebis au lait de vache & de chèvre, pour donner
aux fromages qu'on y fabrique , une qualité plus
graflV, plus mcëleufe ; une pâte plus molle, & qui
ne fe deffèche que difficilement-.
73. C'eft le lait le plus-fluide de1 tous ceux qui
ont été cités. Il eft prefque fans odeur & fans faveur.
Le peu de crème qu'il donne eft très-liquide,
jaunâtre , & ne fournit que difficilement une petite
quantité de beurre de mauvaile qualité 5 il
femble que la matière caféeufe , qui ne- fe fépare
que difficilement de ce lait par les acides végétaux,
refte adhérente au beurre, comme il en
refte une portion diffoute par ces acides ainfi que
par le fërum. Cependant on clarifie aifément celui
ci , & on en. obtient du fucre de lait par l’évaporation.
Suivant les extraits comparés de Haller, le lait
de jument eft le fécond dans la férié des laits, relativement
à la quantité de fucre qu'il peut donner
; il fuit immédiatement 1 e lait d’âneffe, & il
tient le milieu entre celui ci & le lait dé femme.
La proportion de ce principe mucofo-fucré, relative
à celle que préfente le lait de vache, eft, lui-
vant ce célèbre phyfiologifte , comme 70 eft à 54.
On fait que le lait de jument gardé quelque tems
devient enivrant, & que c’eft celui dans lequel on
a obfervé pour la première fois cette propriété de
fermentation vineufe.
74. En comparant, après ces détails donnés fur
chaque lait en particulier , la nature confiante,
plus utile à connoître que la proportion variable
des produits qu'on en retire, voici tes réfultats
que les recherches de MM. Deyeux & Parmentier
leur ont préfentés.
Tous les laits fe couvrent de crème à leur fur-
face , niais elle varie dans les laits divers.
a. Dans le lait de vache el le eft abondant e, épaiffe,
jaune.
b. Dans le lait de femme, plus liquide , blanche
& en petite quantité. ..
’ c. Dans le lait de chèvre, plus abondante que dans
le lait de vache , plus épaiffe, plus blanche, & fur-
tout moins acefeente.
d. Dans le lait de brebis , prefqu’auffi abondante
& aufli jaune que dans celui de vache,
mais toujours reconrroiffable par une faveur particulière.
.
e. Dans le lait d'âneffe, peu épaiffe , peu abondante,
fou vent analogue à celle du lait de femme.
f i Dans le lait de jument, très-fluide, fem-
blable, par fa couleur & fa confiftancè, à de
bon lait de vache qui n'a pas laiffé monter fa
crème.
7 y Lé beurre, toujours huileux, doux, très-fufible,
a'les propriétés comparées fuivantes :
a. Extrait de la crème de vache, tantôt très-
jaune, tantôt pâle, fouvent blanc ^ toujours allez
confiftant.
b. Difficile à extraire de la crème du lait de
femme, en petite quantité, infipide, d’un jaune-
pâle , fouvent inféparable de la crème qu’il rend
onélueufe : on en a fauffement conclu que ,ce lait
ne donnoit pas de beurre.
c. Le beurre de lait d'âneffe , toujours très-
blanc, mou & très-fujet à fe rancir promptement.
d. Le beurre de chèvre fe .fépare facilement de la
crème, eft très-abondant, toujours blanc, ferme
& mou, rancefcihle.
e. Le beurre de brebis, un peu jaune, toujours
mou, affez fujet à fe rancir.
ƒ. Le beurre de lait de jument, difficile à obtenir
en petite quantité, ne prenant de la confif-
tance qu'à force du lavage à l'eau froide, tr.ès-
difpofé à la rancefcence.
7(?. La matière caféeufe eft aufli un produit
confiant, un des matériaux conftituans du lait y
elle varie dans les efpèces, de la manière fui vante :
a. Celle du lait de vache eft volumineuse , tremblante,
comme gélatineufe , fort abondante, retenant
beaucoup de ferum qu’on en fait fortir par
une légère compreffion.
b. Celle du lait de femme, peu abondante, fans
cohéfion entre fes molécules, toujours on&ueufe
& filante, ne retenant que peu de ferum entre
fes molécules.
c. Celle du lait d'âneffe, à peu près femblable à
la précédente, fans être onétueufe.
d. Celle du lait de chèvre, en grande quantité,
en coagulum épais, plus denfe que le caillé du
lait de vache, retenant moins de ferum.
e. Celle du lait de brebis, toujours graffe , vifqueufe
, difficile à rapprocher en caillé, donnant
line pâte molle aux fromages.
ƒ. Celle du lait de jument peu abondante , fort
femblable à celle du lait de femme.
77. La liqueur féreufe fait en général la partie
la plus abondante des laits ; elle y varie ainfi dans
les efpèces :
a. Le ferum du lait de vache clarifié eft tantôt
d’une couleur ci tri ne, tantôt verdâtre , d’une faveur
douce, contenant du fucre de lait & des
fels.
b. Celui du lait de femme , peu coloré,, d'une
faveur très-fucrée, le troifième, fuivant Haller,
par rapport à la proportion de corps mucofo-
fucré.
c. Le ferum du lait d'ânejfe3 fans couleur, contenant
moins de fel & plus de fucre de lait que
celui de vache. • .
d. Le ferum du lait de chèvre, à peine jaunâtre,
peu fucré, tenant l'avant-dernier rang par la quantité
de matière fucrée, avec peu de fels ; pref-
qu'uniquement du muriate de chaux.
e. Le ferum du lait de brebis , prefque toujours
fans couleur, d’une faveur fade & comme graffe ,
Je moins chargé de fucre de lait t tenant du muriate
& du phofphate de chaux en très-petite
quantité. • . _ 1 » 1 r
ƒ. Le ferum du lait de jument peu colore, Infécond,
d’après Haller, pour la quantité de matière
fucrée qui y eft contenue, & chargé , fuivant
MM. Deyeux & Parmentier, de plus de matières
falines que la plupart des autres laits.
§. VIII. Des -ufages du lait.
78. Les ufages du lait font extrêmement multipliés
& toujours d'une grande importance. On
peut les confidérer fous le quadruple rapport
d'ufages naturels, d'ufages économiques, d ’ ufages
médicinaux & d’ufages dans les arts. Sous les
trois premiers de ces rapports , ce liquide alimentaire
& médicamenteux fait la richeffe de plü-
fieurs nations entières affez fages dans leur fim-
plitité, & a f f e z h e u r e u f e s 'd a n s ce que nous appelons
leur barbarie, pour fe contenter des dons
purs de la nature, & pour placer leur richefie
dans l'abondance des beftiaux, qui fourniffent de
quoi Satisfaire tous leurs beloins. Les peuples
pafteurs ou nomades , qui vivent prefqu’unique-
mënt dë laitage, & les tems où un grand nombre
de ceux qui font aujourd’hui'civilifés, y puifoient
leur fimple nourriture , nous retracent encore les
beaux jours que les poètes nous ont peints comme
l ’âge d’or, & il femble au philofophe qui compare
3 & ces fiècles, & ces hommes heureux à
ceux d’aujourd’hui, que la douceur de cet aliment
des premiers habitans de la^ terré ait dû influer
fur la douceur & l’aménité de ces moeurs
antiques. . ,
79. En gonflant de les mamelles des meres
immédiatement après le part, la nature a donné
aux animaux le double bienfait d’une nourriture
néceffaire au petit, & d’une évacuation utile aux
femelles. Celles-ci, après l’abondance des Aies
qui ont diftendu long-tems leur fyftème utérin,
trouvent dans l’évacuation du lait un écoulement
à ces fucs furabondans, tandis que les petits y'
puifent un aliment approprié à leur foibleffe ,
d’abord laxatif, enfuite devenant de plus en plus
nourriffant, facile à changer en leur propre fubf-
.tance , & contenant, par une admirable prévoyance
, la matière folidifiable de leurs os dans
une proportion correspondante à l ’accroiffément
rapide que ces organes prennent dans le premier
! âge de là vie. Sous ce double rapport on voit qu’il
eft aufli néceffaire aux femelles, après l’accouchement,
d évacuer cet excès de liquides, qu'aux
• petits de s'en nourrir, & que, fi les premières
Gg g g 2