
i°. Des ccu'iars, confidérées comme réactifs.
Il y a environ un fiècle & demi que l’on a
commencé -à employer quelques matières colorantes
végétales, pour reconnoître les propriétés
des autres corps, & que ces matières font par
conféquent comprifes dans la claffe des réactifs.
Après beaucoup d'elïais , on s eft fixe a quelques-
unes d’entr’elles, qui ne feront qu indiquées ici^
& qu’on fera connoître plus en détail à l’article
de chacune d’elles. | •
On emploie fpécialement les couleurs végétales
pour reconnoître les acides & les alcalis. Les premières
rougiffent ou changent en rouge quelques
couleurs végétales 3 & l'on choifit furtout pour
les reconnoître, la teinture aqueufe fucrée des violettes
ou le firop de violettes, la teinture de
tournefol. La première ne rougit que par les
acides allez forts ; la fécondé, moins bleue à la
vérité, & tirant fur le violet, eft changée en
rouge par les acides les plus faibles : ainiï les
deux réaéfifs colorans font en quelque manière
des moyens de mefure pour l’énergie des divers
acides. ( Voye[ Us articles T ournesol & Violette.)
.
Il—y a des bleus, tels que Y indigo, qui ne changent
pas parles acides les plus forts : aufli on l'applique
fouvent fur les tiffus, après l’avoir délayé,
dans l'acide-fulfurique.'
11 v a beaucoup d’autres couleurs végétales
bleues, qui,font fufceptibles de rougir par l’action
des acides ; mais on n’emploie guère que
les deux qui font cités i c i , foit à caufe de la
facilité qu’on a pour fe les procurer, foit à caufe
de leur fenfibilité.
Quant aux alcalis, ils agiffent d’une manière
variée fur les matières colorantes végétales, &
celles-ci font employées diverfement pour reconnoître
leur préferice , fuivant l’ énergie , la
concentration & la quantité des alcalis. En général
ils vqrdiffent ou changent en vert plufîeurs
couleurs bleues végétales, fpécialement celles des.
violettes, des mauves, des oeillets, des rofes,
de l’écorce de raves & de radis.
On n’emploie guère pour réaéfifs que le firop
de violettes & les papiers peints avec les fleurs
de mauves. On prépare ce dernier dans les laboratoires
, foit en écrafant les fleurs fraîches fur
du papier blanc, foit en appliquant leur couleur
à la colle fur le papier. ( Voye{ Us mots Violette
& Mauve.)
11 e?xifte aufli quelques couleurs jaunes végétales
, qui paffent au pourpre par le contaél des
alcalis : tel eft furtout le curcuma ou terra mérita.
( Voye\ ce mot. ') Le curcuma eft beaucoup plus
fenfible au contait: des alcalis, & en fait reconnoître
beaucoup plus fûrement les plus petites
quantités poflîbles, que ne le font les couleurs
bleues. Aufli fe fert-on plus fréquemment du papier
jauni par le cucurma, que-de tous les autres
réa&ifs colorans, pour reconnoître la préfence
d’un alcali même très-foible.
30. Des couleurs pour la teinture.
Une des plus belles & des plus utiles applications
de la chimie confifte certainement dans
l’art d’enlever les matières colorantes aux végétaux
& aux animaux , de les diffoudre dans un
liquide , de les faire dépofer de celui-ci fur les
fils ou les tiffus j & de les y attacher èn quelque
forte de manière qu’elles ne puiffent plus en être
féparés. Tel eft le but de la teinture. Cet a r t,
entièrement chimique , ordinairement pratiqué
par des hommes à qui les traditions & l'expérience
fuffifent à peine pour tenir lieu des con-
noififances théoriques qui leur manquent 3 a reçu
depuis un demi-fiecle, & doit recevoir encore de
grandes améliorations par le fecours de la chimie.
Les ouvrages de Hellot, Macquer & Bertholet
prouvent fuffifamment, poûr.la France , cette utilité
des connoiffances chimiques 3 appliquées à la
teinture.
On en traitera les généralités, on en expqfera
les bafes appartenantes à la fcience, aux articles
T einture & Peinture. ( Voye% ces mots. )
COUPELLATION, ƒ. ƒ. La coupellation eft une
opération qui a pour objet la détermination exaéte,
des rtiétaux étrangers alliés à l’o r , à l’argent, ou
à ces deux métaux enfemble.
Pour y procéder, on prend de l’un ou de l’autre
de ces mptaux alliés dont on veut connoître le
titre, une'quantité, quiétoit autrefois de 36 grains
ou femelle, mais qu’on a réduite à un gramme,
qui eft l’unité des poids du nouveau fyftème, &
qui repréfente 18,841 grains. ^
Lesfubftances qu’on emploie à la réparation des
métaux alliés à l’or & à l ’argent, font le plomb
& le bifmuth > cependant ce dernier a quelques
inconvéniens qui l ’.ont fait abandonner.
Pour mieux concevoir les effets de ces métaux
dans la coupellation, il faut d’abord favoir que le
plomb furtout eft un.métal très-fufible, facile à
oxider, dont l’oxide, par fa propriété fondante,
vitrifiante & pénétrante, favorite l’oxigénation,
& la vitrification du cuivre, métal le plus communément
uni avec l’or & l’argent.
Ce n’eft pas affez de favoir qu’il faut du plomb
pour enlever le cuivre à l’ or & à l’argent ; il eft
néceffaire- d’en déterminer, au moins d’une ma-
nière approchée, la quantité la plus convenable,
car elle doit augmenter, dans une certaine raifon,
avec celle du cuivre. Ce moyen eft donné par
l ’habitude & le tâtonnement ; c’eft ordinairement
par la couleur , la pefanteur, le fon , l’élafticité,
& furtout par le changement de couleur que le
métal prend par la chaleur rouge, que l’on juge à
peu préside fon titre, & que l’on établit la dofe
de plomb a employer > la réfiftance qu’il oppofe à
la lime & Il couleur que prend la furface limée, |
font encore des indices qui mettent fur la voie
celui qui a de l’exercice dans ce genre de travail.
Plus l’argent & l’or font alliés de cuivre, plus leur
couleur tire fur le rouge, plus leur pefanteur Spécifique
eft petite, plus leur fon ik leur elaifcicité
font grands , plus ils noircifftnt lorfqu’on fait
rougir leurs furfaces polies, plus leur dureté &
leur réfiftance à la lime augmentent, & plus leur
limaille eft rouge.
Coupellation de Vargent.
Si ce métal contient un vingtième, ou 0,05 de
cuivre, il faudra employer quatre fois & demie
autant de plomb que de métal allié ; mais s’il en
contient 0,20, il faudra en mettre au moins onze
parties. La quantité de plomb doit, comme il eft
fenfible, augmenter comme le métal étranger : de
là il fuit que fouvent il arrive qu’on eft- obligé de
n’opérer que fur le demi-gramme , lorfque l’argent
eft tellement chargé de cuivre, qu'il exige
quinze ou feize parties de plomb ; par exemple , à
moins qu’on n’emploie dans ce cas des coupelles
deux fois plus grandes que pour l’argent. qui ne
contient qu’un vingtième de cuivre ; car les coupelles
ne peuvent guère abforber plus d’un poids
égal au leur d’oxide de plomb, fans cela le furplus
refteroit à la furface de ce vafe j ce qui feroit un
inconvénient. L’effai n’a pas eu aflez de plomb
lorfque le bouton de retour eft p'at, que fes l^ords
font aigus, & qu’il préfente à fa furface des taches
grifâtres.
Lors donc que la quantité de plomb néceffaire
pour la coupellation de l’efpèce d’argent dont on
veut connoître le titre, a été appréciée par les
moyens indiqués plus haut, on place une coupelle
dans la moufle du fourneau ; on charge ce dernier
de charbons d’une moyenne groffeur, & quand on
juge que la chaleur eft fuffifamment élevée, ce
qu’on reconnoît au rouge légèrement blanc des
coupelles, on y met le plomb. Dès qu’il eft découvert
& que fa furface eft bien brillante, on y
place aVec foin , à l’aide d’une pincette, l ’argent
enveloppé dans un cornet de papiér. Si le plomb
eft fuffifamment chaud , l’argent fe fond promptement
, la matière fe découvre & s’éclaircit j l’on
voit fe former des points plus lumineux que le
refte de la matière, qui fe promènent à fa furface
' & tombent vers la partie inférieure ; l’on voit en
même tems une fumée s’élever & ferpçnter dans
l’intérieur de la moufle. A mefurë que la coupellation
avance, l’oeuvre s’arrondit davantage, les
points brillans deviennent plus grands, & font
agités d’un mouvement plus rapide. Il eft toujours
utile que l’effai ait plus chaud au commencement
de l’opération, furtout fi la matière eft à
un titre bas ; mais il eft dangereux que la chaleur
foit trop élevée fur la fin, parce qu’une portion
d’argent fe volatiliferoit, & le bouton de retour
courroit le rifque de rocher. Ce font deux caufes
puiffantes de déperdition, qu’il fjaut éviter avec
foin lorfqu’il s’agit de prononcer d’une manière
rigoureufe fur la quantité de fin que contient un
lingot ou tout autre ouvrage allié. 11 faut donc ,
lorfque les deux tiers environ de Teffai font paffes,
rapprocher la coupelle fur le devant du fourneau,
de forte qu’il n’ait que la chaleur néceffaire pour
bien préfenter tous les lignes de Xéclair. On appelle
ainfi ou encorq fulguration 3 corufcation, le mouvement
rapide dont le bouton eft agité , lorfque
les dernières portions de plomb s’évaporent, qu'il
préfente, fur toute fa furface, des bandes colorées
de toutes les nuances de l’iris, qu’ il fe fixe enfuite
en devenant terne, &: s’éclaircit immédiatement
après, comme fi un nuage difparoiffoit de fa fur-
face. On reconnoît qu’ un effai eft bien paffé lorfque
le bouton de retour eft arrondi, qu’il eft blanc-
clair, & criftallifé en deffus & en deffous; enfin,
qu'il fe détache facilement du baftîn de la coupelle
lorfqu’elle eft froide.
Cependant, comme il eft très-difficile, à moins
qu’on ait une grande habitude, de faifir le degré
de chaleur convenable pour reliai de tel ou tel
argent , il eft toujours prudent d’en faire deux
effais, qu’on a foin de placer aux deux côtés de la
moufle , ou de faire dans deux opérations différentes
, afin que les caufe s de déperdition qui pour-
roient avoir lieu dans l’une , n’exiftent pas dans
l’autre, & que l’ on puiflè conféquemment avoir
une garantie'àe l’exactitude de l’opération. Si les
deux boutons font égaux, ou s’ils ne different que
d’un millième, par exemple, on peut regarder
l’opération comme ayant été bien faite; mais s'il
y avoit plufieurs millièmes, il faudroit la recommencer
jufqtt’à ce qu’on fût parvenu à cette pré-
cifion indifpenfable, pour prononcer fur le titre
d’une grande maffe d’argent, & en garantir le titre
par l’appofition d’un paraphe.
Il n’eft pas néceffaire d’ avertir qu’ il faut pefer,
avec beaucoup d’exactitude, l’ argent que l’on fou-
met à l’effai, car la moindre négligence pourroit
apporter plufieurs millièmes en plus ou en moins;
ce qui deviendroit d’ une conféquence confidé-
rable fur une grande quantité de matière. Il n’eft
pas moins important de ne pas employer, dans la
pefée, de trop petits fragmens de matière, parce
qu’ils peuvent s’échapper fans qu’on s en apper-
çoive, en les enveloppant dans le papier , ou lorfqu’on
place le cornet dans la coupelle , par le
courant d’air qui s’établit, ou le pétillement qui
a lieu quelquefois lorfque le papier s’enflamme.
La pureté du plomb n’eft pas une chofe dont la
conlidération doive être négligée : on conçoit, en
e ffet, que s’il contenoit des quantités notables
d’argent, comme cela arrive fouvent, il ajoute-
roit à la matière une quantité de fin qui n’v exif-
toit pas. Une remarque qu’il ne faut jamais perdre
de vue , c’eft «qu’en général, lorfque l’argent eft à
un bas titre, il a befoin d’une chaleur plus forte,
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