
graijfi de porc, qu'on nomme en cet état fain-doux
ou axonge. hz graijfe ainft purifiée eft plus opaque ^
moins denfe, & beaucoup plus blanche que: dans
L’état naturel ; elle retient entre Tes molécules une
certaine quantité d’eau qui lui donne ces nouveaux
caractères..
7. Lagraijfe > expofée à un feu doux, fe liquéfie,
prend de la tranfparence, & fe fige en petits crif-
taux ferrés & grenus par le refroidiflement. Sa
fufion a lieu entre 40 & 70 degrés du thermomètre
centigrade, fuivant les- diverfes- variétés de
cette matière animale. On peut la faire fondre au
bain-marie pour éviter de l’altérer , quand on ne
veut qu’en opérer la fufiou. Chauffée avec le con-
taCt de l’air au-delà de la chaleur néceflaire pour
la fondre, elle prend promptement, une température
fepérieure à celle de l’éau bouillante } elle
devient capable de cuire & de deflecher les matières
végétales 8c animales qu’on y plonge, 8c
qu’on en retire endurcies à leur furface 8c privées
d’eau. Bientôt il s’en élève des vapeurs âcres &•
piquantes qui tirent les larmes & irritent la gorge.
Cette fumée s’enflamme,, & la graijfe continue à
brûler jufqu à ce qu’elle foit réduite en charbon.
On voit par-là qu’elle ne brûle qu’après s’être
volatilifée, & que c’eft pour la vaporifer que,,
lorfqu’on l’emploie pour faire des lampions, on
fe fert de mèche, afin de conduire dans l’air la
partie réduite en vapeur.
La graijfe diftillée au bain-marie donne une certaine
quantité d’eau d’une odeur Fade, dans laquelle
les divers réaCtifs ne montrent rien, & qui
cependant fe trouble , dépofe des flocons, 8c
prend une odeur fétide lorfqu’on la garde. Cette
eau cependant préfente, une altération moins fen-
lïble que la plupart des.autres febftances animales}
elle devient moins ammoniacale} & c’eft en gé- j
néral un caractère bien marqué de cette efpèce
d’humeur, de donner beaucoup moins de.ce dernier
produit que tous les; autres compofés animaux
: ce qui a; fait, dire jufqu’ici aux chimiftes,
que c’étoit une matière prefque végétale, ou qui
pafloit prefque fans changement de la nourriture
végétale dans le corps des animaux. L’eau qu’on
obtient dans-cette diftillation de la graijfe ^u bain-
marie n'étoit pas toute contenue dans cette humeur
: une partie eft formée aux dépens de l’hydrogène
& de Foxigène qu’elle contient. Voilà
pourquoi, après ce mode d’aCtion du feu y quelque
légère que paroiffe cette aCtion, la graijfe eft.
fenfiblement plus fèche, & d’une couleur jaune
fauve ou brunâtrequi en annonce la décompo-
fîtion commencée & la précipitation du carbone.
8. Quand on diftille la graijfe à la;cornue, on en
opère la décompofition d’une manière beaucoup
plus complète. Il y a.long-tems qu’on fait cette,
opération dans les laboratoires de chimie, & cependant
on en a ignoré jufqu’ici le véritable mé-
canifme & les phénomènes remarquables. On
ayoiLobfervé. que,, dans cette diftillation,, la graijfe
} pafloit prefque toute- entière dans le récipient
lorfqu’on la chauffoit un peu fortement ; qu’ il fe
dégageoit cependant une petite quantité d’eau
très-acide, un fluide élaftique que Haies fait monter
à dix-huit fois le volume de la graijfe y qu’on
croyoit être de- l’air, & qu’il reftoit une trace
charboneufe dans la cornue. On avoit vu que par
des diftiilations répétées fur la graijfe feblimée on
en obtenoit chaque fois une partie d’eau acide ^
une huile qui s’atténuoit peu à peu, une portion
d'air & une couche légère de charbon : on en
avoit conclu qu’à force de recommencer cette-
opération, la graijfe pafferoit à l’état d’eau & d’air,
fl réfulte de ces faits mieux vus aujourd’hui, que
c ’eft en eau & en acide carbonique, plus une petite
quantité d’arçimoniaque , que la graijfe fe réduit
complètement & en dernière analyfe} mais
que , pour parvenir à- cette décompofition-complète
, il faut ajouter à cette madère chauffée une
grande quantité d’oxigène } que c’eft pour cela
qu’un grand vaiffeau.l’avance beaucoup plus qu’un-
petit , ou qu’on eft obligé de recommencer un
grand nombre de fois de fuite les diftiilations} que
cette décompofition enfin relFemble, quoiqu’avec
un autre mode 8c d’a-utre.s phénomènes, à la com-
buftion de la graijfe dans des vaifleaux ouverts }
que quand celle-ci eft faite avec foin , on n’a quo
de l’eau 8c de l’acide carbonique pour produits }.
que, fi elle ne s’opère qu’èn partie, ori en obtient,
comme dans la diftillation, une vapeur acide , une
partie d’ huile non décompofée 8c Amplement volatilifée,
8c une fuie charboneufe ou dès-concrétions
fungiformes de charbon, qui fe raffemblenc
ferla mèche, & portent un nouvel obftacle à la
cômbuftion; qu’ainfi les produits de la diftillation
. de la graijfe à la cornue,, le phlegme, l’acide fé-
. bacique, les gaz, l’huile plus ou moins liquide, le
charbon, font des efpèces de compofés intermédiaires
entre ce corps, l’eau 8c l’acide carbonique-
qui font les derniers termes de fa décompofition }
que leur, proportion doit varier fuivant la force de1
j la décompofition qu’on opère, fuivant la température
qu’on emploie, la grandeur des vaifleaux
la quantité d’air qu’ils contiennent, la manière
dont on conduit le feu, &c.
9. Ces notions générales fervent à bien concevoir
8c à bien expliquer ce que les différens chi.~
miftes ont écrit fer la diftillation de la graijfe,
Neumann, Lun des premiers qui aient bien décrir
cette opération, a diftillé comparativement les
graijfes de boeuf, de mouton, de porc 8c d’ oie 5
il a employé onze cent cinquante-deux parties1
( grains ou deux onces ) de chacune de ces graijfes..
Celle de boeuf lui a donné'foixante parties de-
phlegme de liqueur empyreumatique & âcre, dont1
il n’a point cependant indiqué la nature acide} huit'
cent cinquante-deux parties d’huile & dix-huit de-
charbon. li a eu de la graijfe de mouton quatre-
vingt-dix parties de phlegme, huit cent cinquante-
quatre d’huile 8c feize cte charbon} de celle, de;
porc, foixante-dix parties de phlegme.& huit cent
quatre-vingts d’huile, 8c de la graijfe d'oie, foixante
parties d’eau empyreumatique, huit cent quatre-
vingt-dix d’huile âcre & dix de charbon. 11 regar-
doit ce charbon comme de la terre ; il n’a point
tenu compte des fluides elaftiques}. il n’a point
connu l’acide fébacique. Hoffman croyoit que le
produit de la diftillation de la graijfe étoit alcalin,
parce qu’il bleui doit le cuivre. Segner a obtenu .
de quatre onces de graiffe humaine , chauffée à
600 degrés du thermomètre de Fahrenheit, ou
270 de Réaumur, cent gouttes de phlegme, dont
il a indiqué l’acidité y ainfi que Vogel ; il ar obfervé
que ce.produrt rougifloit la couleur bleue des violettes,
que fon odeur forte troubloit le cerveau,
qu’ il refroic dans la cornue, après l’avoir obtenu ,
une huiie concrète & noirâtre.
Crell a fait avec plus de foin la diftillation de La
graijfe humaine : vingt-huit onces , chauffées dans
une cornue de verre au bain de fable , ont donné,
après s’être fondues au degré du thermomètre
de Réaumur , un phlegme infipide }. à 220
degrés, il y a eu du bou.rfouflement que ne lui a
point préfenté la graijfe de boeuf : il s’eft dégagé
deux liqueurs , une huile brune 8c liquide fer une
eau d’un jaune doré, & de plus une huile figée
au fond de cette eau. L’opération a duré vingt-
une heures : tous les produits avoient une odeur
forte. En les rediftillant, il a eu vingt onces cinq
gros quarante grains d’ huile fluide, trois onces
trois-gros trente grains de phlegme acide , trois
onces un- gros quarante grains de charbon brillant,
cinq gros dix grains de perte,
f On re'connoït bien , dans les différences des
proportions entre ces diverfes analyfes, la vérité
de ce que j’ai expofé fer la variété du mode d’opérer
, de la température, de la forme & de la grandeur
des vaifleaux, fer la rapidité de réchauffement,
la répétition des diftiilations, 8cc.
C ’eft du produit de la graijfe diftille que M. Thénard
a retiré l’acide fébacique par te procédé qui
fera décrit plus bas, n°. 23.
10. La graijfe gardée à l’air s’y altère d’autant
plus, qu’elle en a le contaCt plus multiplié,. 8c que
i’atmofphèîe eft plus chaude : elle fe colore en
jaune & quelquefois en orangé y elle prend une
odeur piquante qu’on connoît fous le nom d‘odeur
rance, une faveur âcre & manifeftement aigre.
Cette efpèce de rancidité » due au développement
d’un acide, fuppofe encore la fixation d’une portion
cf oxigène. liftparoït qu’elle eft due à une fermentation
qui s’établit dans la fubftance gélati-
neufë, qui accompagne h graijfe même purifiée,
qui réagit fur la fubftance adipeufe elle-même,,
qui développe dans celle-ci de l’acide fébacique,
8c peut-être un peu d’acide acéteux dans la première.
L’eau dans laquelle on lave la graijfe rance,
acquiert une faveur acre & la propriété de rougir
les couleurs bleues végétales. M. Poerner s’ eft
'fervi de ce liquide pour la purifier. L’alcool-a égar
lement cette propriété, fuivant Mach-y. Cependant
l’un 8c l’autre de ces a gens diflolvent une
partie delà graijfe en même rems que fon acide j ce
la graijfe} quoique bien lavée, retient une portioiî
de ce dernier. Ces obfervations prouvent déjà que
l’acide fébacique, développé dans la rancefcence
de h graife3 n’étoit pas tout contenu dans cette
fubftance, 8c qu’ il s’ eft formé par la fermentation:
■ même qu’elle a éprouvée. Pour peu que la graijfe
foit rance, on voit qu’elle prend des propriétés
très-différentes de celles quelle avoit avant cette
rancidité, 8c quelle devoir cependant avoir en
partie au moins fi elle contenoit naturellement
de l’acide fébacique tout fait.
11. La graijfe fe mêle très-bien avec le foufre
par la Ample trituration ; elle le difîout à 1 aide de
la fufion, 8c prend une confiftance allez forte par
cette union, oui forme la pommade de foutre.-
Quand on chauffe cette graijfe lulfurée on n’en*
obtient point de foufre fublimé , mais une grande
quantité de gaz hydrogène lulturé 8c d’acide fui-
fut-eux, parce qu’une haute température , en favori
fan t la-décompofition de la graijfe, porte une
portion -de fon oxigène fur le foutre qui fe brûle
en partie, & de fon hydrogène fer le même corps*
qu’il entraîne fous forme gazeufe.
Il en eft de même du phofphore, qui eft diffous-
très-facilement à chaud par. la graijfe fondue. On-
ne retire que difficilement le phofphore de cette
combinaifon : il n’y eft- cependant pas fixé autant
que le foufre, mais il s’en dégage aufli par la chaleur
en gaz hydrogène phofphoré. En faifant cette
expérience, il faut employer des précautions pour
éviter la détonation & l’ inflammation brufque que
peut opérer ce compofé phofphoré.
La graijfe agit même à froid fer quelques métaux,
dont elle opère ou dont elle favorife au*
moins l’ oxidation quand on U triture avec ce»
corps- réduits en petites molécules, & avec le
contaêfc de l’air. Cet effet eft fertout fenfible dans
la préparation de la pommade ou de 1 onguenc
mercuriel, qui- confifte à triturer du mercure coulant
avec de l’axonge. On voit peu à peu ce métal;
perdre fa forme,métallique & fa liquidité: la graijfe
fe colore en noir. Quoique ,.dâns cette extinction,,
on ait penfé d’abord que le mercure ne fàifoit qu&
fe divifer, parce qu’on voit toujours des globules
métalliques dans l’onguent le mieux préparé, il?
eft certain que c’eft une véritable oxidation de ce.
métal en noir, puifqu’elle a lieu beaucoup plus-
promptement lorfqu’on ajoute à la graijfe de l’oxide-
de mercure rouge, du muriate furoxigéné de mercure
; lorfqu’au lieu d’axonge fimple on prend delà
graijfe oxigénée , comme je l’annoncerai plus-
bas } lorfqu’on aide cette extinction par des matières
animales très-oxigénées , telle que la falive.
La graijfe agit de la même manière fer le cuivre ^
qu’elle change très-promptement en oxide verr.-
Ce phénomène eft très-fenfible avec la- cire >qjfe