
la férié des effets de l ’air fur ces matières';.car le
contact de l’air la favorife & l’accélère.
45. Si l ’on compare ces fix effets indiqués entre
eux, on trouve pour réfultat une grande altérabilité
dans les fu b fiances animales ; on reconnoît
que ce réfultat etl d’accord avéc celui de l’aétion
du feu, qu’il dépend de la compofîtion compliquée
de ces fubftances, du nombre des principes primitifs,
qui les conftituent, des attractions multipliées
qu’ils exercent les uns fur les autres, & de
la légéreté même de la caufe néceffaire pour mettre
toutes ces attractions en jeu. On y voit encore
des compofés formés, pour la plus grande partie
de leur maffe, de corps combuftibles, portant
dans l’enfemble de leur compofîtion, comme dans
chacun de leurs principes en particulier, une grande
tendance pour s’unir à l’oxigène, l’abforbant d’abord
dans leur intégrité, s’y diffolvant enfuite
dans leurs élémens qui fe féparent, & éprouvant
ainfi des changemens fuccefïîfs qui les conduifent
peu à peu à une décompofition totale. La différence
remarquable de la volatilité de quelques-uns
de ces principes & de la fixité de quelques autres,
-rend encore cette théorie générale plus affurée &
plus facile à concevoir. On la verra de plus en
plus fortifiée & confirmée dans les paragraphes
îuivans.
$. V I . Des c ara Hères tirés de t aÜion de Veau fur
les matières animales.
46. Quoiqu’on ait eu de fréquentes occafions ;
d’examiner l’aCtion de l’eau fur les fubftances ani- •
mates 5 quoique les expériences fur cette aCtion
•/oient très - multipliées , même dans l’économie
domeftique & dans une foule d’arts , on n’a point
encore toutes les connoiflànces qu’elle femble devoir
fournir fur leur nature, & l’on n’ en a pas tiré
•tous les caradères propres à les diftinguer des matières
végétales. Il en exifte cependant d’affez marqués
& d’affez faillans, pour pouvoir établir des
diftinCtions importantes entre ces deux claffes d’êtres
, & je vais les expofer ici.
47. L’ eau froide pénètre, par le feul conta#,
les matières animales les plus folides ; elle en écarte
les fibres & lés lames ou les plaques ; elle rend
leur tiffu plus fenfible en le groffiffant & en le
diftendant ; elle tend à féparer leurs faifeeaux ou
leurs couches, & , fous ce point de vue, elle fert ;
à l’anatomifte lorsqu’il veut aller plus loin, dans
la connoiffance de leur ftru.Cture, que ne le conr
duifent fon fcalpel & la difteClion la plus foignée.
Il y a des matières animales qu’on trouve toujours
étendues d’eau, liquéfiées par elle, & lui devant
leur état , comme la mobilité, qui en permet le
-mouvement fie le tranfport dans différentes parties
du corps des animaux. La plupart des liqueurs animales
font bien mifcibles à l’eau ; fi l’on en
excepte tes folides , tomes tes parties animales fe
diffolvent dans ce liquide. .
48. Lorfqu’on fait agir l’eau chaude & bouillante
fur les matières animales, il en eft plufieurs
qui, indiffolubles dans ce liquide froid, fe diffol-;
vent promptement & facilement à l’aide de l’aCti-
vite que lui communique le calorique. Tels font
la plupart des tiffus membraneux blancs qui fe
fondent dans l’eau bouillante, & forment enfuite
avec elle des gelées par le refroidiffement, & des
colles par l’évaporatioo ; c’eft pour cela qu’on
nomme ces tiffus gélatineux en chimie. En donnant
à l’eau, par la preflion dans le digefteur de
Papin qui en empêche l’évaporifation, une beaucoup
plus haute température que celle de l’eau
bouillante, on parvient même à ramollir les os ,
& à leur faire prendre l’état gélatineux. Les tiffus
cornés & cartilagineux paffent à cet état beaucoup
plus facilement & promptement encore.
49. Il y a des matières animales liquides, analo*-
gties au blanc d’oeuf, & qu’on nomme à caufe de
cela albumineufes , qui éprouvent, par l’aâàon de
l’eau chaude au deffus de 48 degrés, une coagulation
, un durciffement 5c une opacité que tous
les hommes connoiffent. Cette propriété, qui eft:
l’oppofé de la diffolubilité gélatineufe, annonce,
dans les matières qui en font fufceptibles, une
nature très-différente, & elle a mérité d’occuper
beaucoup les chimiftes & les médecins. Tandis que
ceux-ci l’ont décrite comme une force particulière
& vivante, qu’ils ont nommée plafiique^ les pre4-
miers ont reconnu cju’eîle dépendoit de l’état oxi^-
gêné des liquides animaux, ou qu’au moins elle fui-
voit cet état j qu’elle étoit due, comme je l’ai déjà
fait voir, à la combinaifon intime, à la fixation de
ce principe.
fQ. L’effet le plus généralement connu de l’action
de l’eau chaude fur les folides animaux non
diffolubles, eft la cuiffon des viandes,. Les chimiftes
n’ ont cependant point encore .exactement
déterminé le mécanifrae de cet effet. On fait qu’il
en réfulte, dans les matières cuites, une perte de
leur ténacité, un ramolliffement, un changement
de tiffu, de couleur, de faveur & d’odeur, qui
les rendent agréables à l’organe du goût, & faciles
à digérer. Il paroît que la coétion confifte
dans un changement de proportion & d’état dans
la compofîtion animale , la Fufion de la gélatine,
lacoagulation de l’ albumine, & une forte de macération
de l’organifme fibreux, d’où provient la
facilité d’être broyé par les dents, & réduit en
une pâte molle & duétile par la maftication. Cette
propriété eft très-différente de la codbon qu’éprouvent
les fu bilan ces végé cales , 8c le changement
que ces dernières fubifient eft très-diftin#
& moins fenfible pour-tous les hommes, puifque
tant de matières végétales' peuvent fervir d-ali-
mens dans-leur crudité, tandis que l’efpèce humaine
civilifée ne peut pas manger de fubftances
animales crues.
51. LJpe longue macération dans l’eau èhange
.encore le tiffu & la nature des fubftances animales ,
d’une manière fi différente de ce qu’elle produit
fur les végétaux, qu’on doit en tirer un caradtère
bien tranché pour établir entre ces deux claffes de
compofés organiques une différence bien marquée.
Prêfqùe toutes les matières animales, plongées dans
l’eau, fe convertiffent en une fubllance graffe,
yoifine du blanc de baleine, que j’ai déjà indiqué
fous le nom d’adipocire. Il s’y forme en même tems
de l’ammoniaque qui fe diffout, & de l ’acide carbonique
qui s’exhale. On fait que dans pareille
circonftance les matières végétales noirciffent &
fe charbonnent. Ce phénomène ^ de la part des
matières■ animales , tient à leur putrefeibilité ; &
il fuftit ici de l’énoncer, parce que fa caufe & fes
réfultats feront traités avec plus de développement
à l’article de la putréfaction.
52. Il eft évident, d’après ces effets de l’eau fur
les compofés animaux, que la caufe générale qui
détermine leurs différences de ce qu’éprouvent les
matières végétales, eft fondée fur la compofition
plus compliquée de ces corps. C ’eft toujours la
proportion moindre du carbone & de l’oxigène ,
& plus forte de l’hydrogène & de l’azote , qui
donne naiffance aux changemens énoncés , aux
phénomènes décrits. Si ces changemens font plus
nombreux , plus variés, plus confidérables, c’eft
qu’ils fe paffent dans des matières dont les principes
conftituans font plus multipliés, & qui obéïf-
fent à un plus grand nombre d’attraCtions à la fois;
ç’eft qu’ils ont lieu dans des matières dont /équilibre
de compofition eft bien plus facile à troubler
que celui qui exifte dans tes compofés végétaux
moins compliqués que ceux-ci.
. On voit, dans, cette explication fimple, un accord
qui ne fe dément pas , entre ce qui fuit l’action
de l’eau & les effets des autres agens qui ont
été étudiés dans les articles précédens. Cet accord
fe retrouvera dans tous les articles qui vont fuivre.
§ . VII. Des caractères des matières animales tirées
d cl action des acides fur ces fubfiances.
$$' La manière d’agir des acides fur les fubftances
animales , fournit aujourd’hui aux chimiftes
un moyen de caraétérifer encore ces compofés ,
& d’en apprécier la nature. La fcience a fait de
grands progrès fur la connoiffance de cette aétion,
depuis l’établiffement de la doctrine pneumatique,
& elle doit furtout beaucoup aux travaux des chimiftes
français, fpécialement à ceux de MM. Ber-
thollet, Vauquelin & moi. Il y a deux confidéra-
tions principales à préfenter fur cette aélion des
acides : l’une appartient à tous ces corps , & eft
générale entr’eux ; l’autre eft relative à chacun des
acides en particulier, & diffère fuivant leur nature
fpéciale. Je vais fui vre cettre double manière de
les envifager.
54. Tourtes acides peu concentrés confervetit
tes madères animales y & les préfervent de la putréfaction
5 auffi ont ils toujours paffé pour des amifeptiquës
puiffans, 8c les a-t-on placés à !a tête de
ces méditamens. Tous ont auffi la propriété de
coaguler les liauides albumineux & de les épalffir,
de tondre rapidement les organes gélatineux &
membraneux, de conferver la fluidité des liquides
de ia même nature, & de les empêcher de fe
prendre par le refroidiflemenc , comme ils ont
coutume de la faire feuls ; ils ramoiliiïent & dif-
folvent auffi, à l'aide de la chaleur , les organes
fibreux, ou ceux qui contiennent, dans leur tiffu la
matière qu'on nomme fibrine. Cette diffolution
prend fouvent la forme tremblante & gdatineufe.
Ils fondent & décompofent en partie les fubftances
animales folides, & en changent le phofphate de
chaux en fel acidulé. Enfin , tous les acides „ laiffés
long-tems en contait avec la plupart des compofés
animaux mous , membraneux ou fibreux, les altèrent
à la longue., en convertiffent une partie en
ammoniaque , & fe trouvent enfuite plus ou moins
faturés par cet alcali.
p j . L’aétion particulière de chaque acide eft dé-
terminée par fa nature propre ; elle eft , en général
, d’autant plus forte tk fufceptibîe de dé--
compofer les matières animales , qu’ils font eux-
mêmes plus foibles dans leur compofition intime ,
que leurs radicaux tiennent moins à l’oxigène. il
en eft auffi qui, fans fe décompofer facilement.
agiffent fur ces matières par leur feule puiffance
acide. Cette aétion varie d’ailleurs fuivant l’état
de concentration de chacun de ces acides, fuivant
la quantité qu’on en met en contaél avec les ma-
ti'eres animales , fuivant l’état plus ou moins foiide
ou mou de ces matières , enfin fuivant la température
à l’aide de laquelle on les fait agir récipro--
quement. Parmi les acides divers qui exercent une
influence plus ou moins marquée & plus ou moins
différente fur les compofés animaux, il faut fur-
toutdiftinguer l’acide fulfurique, l’acide nitrique,
l’acide muriatique & l'acide muriatique oxigénét-
ils renferment tout ce qu’on peut confidérer dans
cette aétion particulière ; car les autres, 8c notamment
le phofphorique, l'acéteux, le citrique,
le tartareux , l'oxalique, fe rapprochent fîngulié-
rement du muriatique. 11 ne faut pas oublier non
plus que les quatre premiers, pris dans un état
foible, n'exercent jamais que les aâions générales
qui ont été indiquées ci-detlus'.
S fC, On avait obfervé autrefois dans la manière
d’agir de l’acide fulfurique fur les matières animales,
le ramolliffement qu elles éprouvent, la coloration
plus ou moins foncée qui les affeiâe : on avoit‘
cru que cet effet annonçoit une forte de denri-
combuftion au-delà de laquelle on ne voyait rien
& qu’on avoitcomparée â l’aâion du feu. En examinant
, M. Vauquelin 8c moi, les phénomènes
de cette aétion, nous avons reconnu que cette an*
cienne notion étoit erronée , 8c qu’il fe paffoit
en tre ces corps une férié d’attraétions qui en chan-
geoit la nature tout autrement qu’on ne l’avoit
penfé. Quand on plonge une matière- animale, de