
férentes époques , dans un efpace de vingt-quatre
heures3 offre de grandes différences, fpécialemeut
ii Ton multiplie les traites à des diftances de tems
11 régulières. Les changemens de l'atmôfphère, pour
les animaux nourris à la prairie, font les principales
c.iufes de ces différences. La plus fingulière remarque
qu ils aient faite, eft relative à la diverfîté du
lait d une ftule traite, fuivant qu’on coupe diver-
fement cette traite., & qu’on vide les mamelles
en différentes fois. Le produit d’une traite faite
avec foin, & reçu fucceflivemenr dans quatre
vafes, donne véritablement quatre efpèces de lait :
le premier produit eft le plus féreux j le fécond l’eft
moins j le troifième encore moins, & le quatrième
contient une très-grande quantité de crème.-Les
laitières connoiftent depuis long-tems ce phénomène
, & elles en tirent bien parti en mettant à
part & en confervant le dernier produit de la traite
pour le vendre, fous le nom de crème, à ceux qui
aiment le Lan doux, on&ueux,- épais & gras, à
qui l’on donne ce nom.
16. Les tems pendant lefquels on examine le
lait le présentent variable , fuivant l’époque di-
verfe de l’éloignement du part & de la première
formation du lait. La plus faillante de ces différences
qu’on remarque dans le lait eft celle qui
Je caraétérife dans ce qu’oa nomme le coloftrum,
qui fe forme le premier immédiatement après le
part. Le coloftrum eft un fluide d’un jaune-foncé,
épais, vifqueux & filant, entraînant fouvent des
filets de fang, donnant beaucoup de crème jaune
par le repos, & cejle-ci un quart de plus que la
véritable crème, d’ un beurre jaune-foncé très-
fclide, laiffant, après cette féparation de fa crème,
un liquide moins blanc & opaque que le lait ordinaire,
non coagulable, comme ce dernier^, par
la préfttre, vifqireux & filant, peu fucré. Le coloftrum
change „beaucoup : dès le fécond jour il
perd de fa couleur jaune & de l’abondance de fa
crème. En quatre jours, il pafle à l'état de lait
ordinaire, & ce n eft qu’à cette époque que les
laitières commencent à le débiter dans nos cités.
A dater de ce cinquième jour, le lait de vache va
toujours fe perfectionnant & prenant de la confif-
tance-jufqu’au troifième mois, o-ù il eft le plus
parfait.
§. III. Examen chimique du lait entier. ]
17. J ai déjà dit que le lait a été l’objet de
beaucoup de travaux & de recherches. Boyie en
a fait un des fujets de fes expériences. Boerhaave ;
en a traité le premier avec un aflez grand détail, j
Hoffman l’a fournis aufli à beaucoup d’effais. Mac-
quer a décrit avec clarté & précifion les procédés
de f°n analyfe, & en a connu les principales propriétés.
Spielmann s eft occupé de fa-propriété fer-
mentifcible 5 Rouelle le jeune, de la matière mu-
cofo-fucrée & des fels qu’il contient. Schéele a
découvert l’acide fachlaétique, a fait voir que le
• /a/r donnoit dans quelques cas de l’acide acéteur,
& que l’efpèce d’acide dans lequel il fe convertif-
foit fpontanément, avoit des propriétés'particulières
& caraétériftiques. J’ai donné, en 1790,
plufieurs obfervations nouvelles fur les divers matériaux
du lait. Enfin , MM. Deyeux & Parmentier
ont fait un grand nombre de recherches fur
le lait de vache, pris dans beaucoup de circonf-
tances différentes , fur les propriétés économiques
de cette liqueur animale & de fes produits , &
fur les changemens ou modifications dont elle eft
fufceptible. Leur travail, fou étendu fur tous ^e$
objets, conftitue aujourd’huiun ouvrage entier qui
préfente l’hiftoire la plus complète de cette liqueur
animale. Je n’ai cité ici que quelques traits de cette
notice chimique, & quelques-uns des principaux
auteurs de fon analyfe. On pourroit y ajouter les
faits nombreux décrits par Verheyen , Barchufen,
Verduc, Doorfchodc, Egeling, Young , Gou-
raigne, Acoramboni , Geymuller , Cartheufer ,
Gmelin, qui tous ont donné, dans des ouvrages
phyfiologiques ou dans des Traités monographiques
, des détails plus ou moins précieux fur le
lait de d'ifférens.animaux. Haller a péniblement recueilli
de ces nombreux auteurs, les faits qu’il a
employés pour fon hiftoire du lait ; & comme la
marche de ces auteurs n’étoit point uniforme , ces
citations multipliées font plus capables d’embar-
raffer le le&eur, que de l’éclairer.
18. Le lait, expofé à un feu modéré, fe dilate
& fe bourfoufle confidérablement : on connoït
cette propriété dans les ufages économiques > on
a obfervé qu’il bouilloit au 199e. degré de Fahrenheit,
que L’alcool bouilloit au 181, & l'eau feulement
au 212e. degré du même thermomètre. Il
fe forme à fa furface une pellicule qui s’épaiflit
peu à peu, fe; ride, fe fèche, & jaunit en.fe Léchant.
C ’eft de la matière caféeùfe qui fe fépare
& fe folidifie. Quand on l’enlève, & qu’on continue
à évaporer le lait, il fe forme une- fécondé
pellicule, & ainfi de fuite. On obferve que,ces
pellicules font plus minces & plus tranfparentes
à mefure que l’évaporation avance j elles fe fé-
parent ainfi jufqu’à ce qu’il ne refte plus qu’un
liquide féreux & prefque tranfparent dans le vafe.
Pour obtenir & bien féparer les dernières portions
de la matière caféeùfe à cet état de pellicules , il
faut avoir foin d’ajouter, fur la fin , de l’eau dif-
tillée.du lait. Quand cette liqueur ne fournit
;plus de pellicules , elle n’eft plus fufceptible de
je coaguler.
Si l’on évapore le lait entier jufqu’à confiftanee
épaifîe , on obferve qu’il éprouve une véritable
coagulation, qu’il, s’y forme des grumeaux : fa
matière folide, une fois épaiffie,. prend une couleur
fauve pour peu qu’on la chauffe un peu plus.
Avant de fe colorer ainfi, & quand elle eft molle
encore, quoique plus épaiffe & plus folide que le
miel, elie conftitue la franchipane , efpèce de met
que l’on prépare en ajoutant au lait des amandes
broyées, du fucre, & de la fleur d’orangé fur la
fin de fon évaporation. Autrefois on confervoit
cet extrait du lait pour préparer, en y jetant de
l’eau chaude, le petit-lait d’Hoffman. C ’eft un\né-
dicament prefque toujours mauvais , parce que
cet extrait s’altère ttès-aifément, & devient âcre
& rance.
19. Si l’on chauffe le lait dans des vaifleaux fermés
y & fi on l'évapore au bain-marie , on obtient
une grande quantité d’eau très-peu odorante ,
fade & infipide, qui n’offre aucun phénomène
par les réaètifs, mais qui entraîne cependant quelques
matières en vapeur , puifqu’elle fe pourrit,
dépofe de légers flocons , & devient fétide quand
elle eft gardée. On préparoit autrefois cette eau
diftillée du lait dans les pharmacies , & on lui at-
tribuoit de grandes vertus qu’on a reconnues enfin
ne point exifter. Le lait eft épaifti & coagulé en
grumeaux, après avoir fourni ce produit aqueux
qui fait prefque les deux tiers de fon poids, lorf-
qu’on pouffe l’opération jufqu’à obtenir le réfidu
fous forme d’extrait. En diftillant cet extrait à la
cornue, il donne une eau trouble, rouffeâtre ,
fétide , chargée d’acide zoonique & d’ammoniaque
j une huile fluide & d’une couleur brune
affez abondante -, une portion d’hui Le concrète
& empyreumatique, du carbonate d’ammoniaque
folide & criftallin , des gaz hydrogène carboné
& acide carbonique. Le charbon qui refte après
cette opération, eft aflez volumineux : par l’incinération
, il laiffe dans fes cendres quelques
traces de muriate de foude, du muriate de po-
taffe beaucoup plus abondant que le premier, &
du phofphate de chaux. Rouelle, qui a trouvé
dans le lait la préfence de la potaffe à l’état de
muriate, a fait remarquer que cette efpèce d’alcali
n’exiftoit pas dans le fang, & que celui-ci
ne contenoit que de la foude, ou pure, ou combinée
avec l'acide muriatique. Cela pourra fervir à prouver qu’une autre matière que le fang contribue
à la fécrétion du lait s & fi elle porte à
croire que c’eft le chyle comme provenant immédiatement
d’alimens végétaux, (car c’eft du lait
de vache dont il eft quefiion ) , elle annonce en
même tems que les fels de potaffe contenus dans
le chyle changent en paffant dans le fang. L ’une
ou l’autre de ces confidérations préfente un problème
chimique fort important à réfoudre.
20. Le lait, expofé à l’air, fe couvre promptement
d’une couche de matière légère, d’un blanc
plus mat que le lait entier , qui devient en même
tems plus limpide , & prend une teinte bleuâtre.
■ Cette couche blanche, d’une faveur douce, onc-
tueufe, conftitue la crème ; elle fe fépare plus
ou moins vite , fuivant une foule de circonftances
& en quantité , qui, dans ie lait de vache , rér
pond toujours à la bonté & à l’abondance de fa
nourriture : de là I’expreftîon poétique de gros
pâturage. Elle eft d’autant plus jaune & confif-
tante, que cette nourriture eft plus abondante &
| de meilleure qualité. La crème contient l'huile
■ butyreufe, qui n’eft point encore du beurre tout
j formé j un peude flocons caféeux très-fins, très-
légers & très-doux, & une proportion affez grande
de petit-lait ou de ferum. Quoique la crème four-
niffe feule le beurre, jamais celui-ci ne s’en fépare
•fpontanément & fans agitation : on fait qu’elle
peut être convertie en efpèces de fromages légers
& gras. Elle s’aigrit, fe colore , fe noircit à fa
furface , & fe pourrit fan? laifler féparer de beurre.
La crème eft un des produits du lait qui fe refl’ente
le plus de h quantité.& de la qualité de nourriture
fournie aux animaux» elle change finguliéremer.t,
diminue en quantité , & prend une faveur défa-
gréable dans les maladies, comme on le voit conf-
tamment dans les épizooties. J'ai obfervé que le
contact de l'air contribuoit beaucoup à la fépara-
tion & à la butyrifation de la crème. On l’obtient
plus vite dans des vafes plats & larges qui préfen-
tent une grande furface à l’atmofphère, que dans
des vaifleaux étroits. ( V oye^ le mot B e u r r e , t. 2
de ce Diét., p. jy 1.)
21. Le lait entier , dont quelques voyageurs
ont annoncé la propriété enivrante, furtout dans
le lait de jument en Sibérie , & dans celui de
brebis dans les Hébrides, eft fufceptible de pafler
à ,1a fermentation vineufe. C’eft un art qu’exercent
depuis long*tems les Tartares & les peuples pafteurs
& nomades. Ils laiffent dans de grands outres ie
lait de jument j ils le mêlent même avec du fang „
& obtiennent de ce mélange une liqueur énivrante
dont ils ufent au défaut d’autre vin. On a vu, en
faifant cette expérience avec foin, que la fermentation
vineufe du lait n’avoit lieu que lorfqu’il
étoit en aflez grande mafle j qu’elle ne s’établif-
foit bien que dans du lait de bonne qualité & au
deflus de 10 degrés de température ; que l’intégrité
de tous fes elémens y étoit néceflaire ; qu'une
agitation légère & répétée de cette liqueur dans
des,vaifleaux fermés l ’accéléroit & la favorifoit
en mêlant bien tous fes matériaux qui tendoient à
fê féparer les uns des autres; qu’il fe dégageoit
un fluide élaftique affez abondant, auquel il falloit
donner de tems en tems iflue, & que c'étoit de
l’acide carbonique 5 qu’il fe formoit une écume
vifqueufe & tenace, & une forte de chapeau à
fa furface ; enfin que le lait, tout en éprouvant
.ce mouvement inteftin & vineux, s’acidifioit &
.fe coaguloit en partie. Lorfque ces phénomènes
.ont eu lieu, le lait grumelé , d’une odeur piquante,
acidulé & vineufe en même tems, fournis
à la diftillation par une légère ébullition,
donne un produit d’alcool peu abondant, aigre
fur la fin, qu’on peut reétlfier par deux difiilla-
tions fucceflîves, & qui préfente toutes les propriétés
de ce liquide, identique dans tous les cas,
puifqu’il provient toujours d’une fource commune
; mais fa quantité eft toujours fi petite,
qu’il n’ÿ aura jamais ancun avantage à le retirer
du lait. On verra que la matière légèrement fu