
Les effais en petit peuvent toujours fe faire
dans une forge ordinaire, qu'on environne avec
des briques réfractaires pour foutenir les charbons.
Le fourneau du fondeur en cuivre, avec un bon
foufflet, peut aufli fervir. Il faut toujours commencer
par voir, en petit, fi l’acier ou le fer qu’on
deftine à devenir acier fondu y fera propre : l’acier
fondu ne peut être bon qu’en employant, pour le
former, de l’acier ou du/*r d’excellente qualité.
On peut fondre à la fois, dans une forge ordinaire
, quatre ou cinq livres de matière , plus ou
moins, fuivant- la force du foufflet. Il ne faut
employer que du charbon de bois de bonne qualité
& bien fec. Il eft bon aufli de luter les creufets
avec un mélange d’argile cuite , ou de teflon de
creufec d’Allemagne broyé, & d’argile crue très-
réfraCtaire. Il ne faut mettre dans cet enduit que
la quantité d’argile crue néceflaire à fa liaifon.
Pour fondre en grand, un fourneau conftruit
d’après les principes des fours à réverbère, deflinés
à fondre le fer dont on fabrique les pièces d’ar:
tilierie, peut donner un feu fufEfant, furtout fï
on a foin de tenir la cheminée aflez haute. Le
fourneau doit être aufli plus court* il ne lui faut
qu’une longueur égale à fa largeur : il fera d’une
capacité fuffifante fi on peut y mettre quatre creufets
contenant chacun environ vingt-cinq livres de
matières fondues 5 de plus grands creufets feroienc
plus fujets aux accidens.
* Il eft très-eflentiel que les creufets puiflfent foutenir
un violent degré de chaleur : il faut employer,
à les compofer, les matières les plus réfra&aires
qu’on pourra fe procurer. Ce fourneau fe chauffe
avec du charbon de terre.
Il eft néceflaire, lorfqu’on veut fabriquer de
l’acier fondu, de ne pas commencer trop en grand :
il faut faire fon apprentiflage : la manipulation ne
peut fe donner par une Ample defeription ; c’eft la
pratique qui la donne, 8c rien ne peut y fup-
pléer. 66. Quelques-uns des faits énoncés dans les
détails précédens ont fait voir que le phofphore
eft fufceptible de fe combiner au fer. Pelletier a
obtenu cette combinaifon par plufieurs. moyens.
En fondant parties égales de fer en copeaux &
d’acide phofphorique vitreux avec un fixième du
poids de ce dernier de charbon en poudre, il a
obtenu un phofphure de fer très-aigre, blanc dans
fa caflure, d’un tiflii ftrié 8c grenu, attirable à
l’aimant, criftailifé dans quelques points en prif-
mes rhomboïdaux : c’eft la fy dérite de Bergman,
qu’il avoit prife pour un métal particulier. Ce
phofphure s'eft fondu fous la mouffle : il a laifle
fur la coupelle un oxide de fer qui avoit en partie
pénétré le vafe ; il contenoit 0,20 de phofphore.
Pelletier a obtenu le même compofé en chauffant,
fans charbon , parties égales de limaille de fer 8c
de verre d’acide phofphorique. C ’eft alors 1 e fer
qui décompofe une partie de l’acide phofphprique,
U la convertit en phofphore qui s’ unit à la portion
de/è/inon oxidé : il y a un phofphate de fer
en verre noir. On forme également, fuivant lui,
du phofphure de fer en jetant fur de la limaille
rougie dans un creufet, du phofphore en petits
morceaux : fur le champ le fer encre en fulion , 8c
il abforbe le phofphore avec lequel il fe combine.
Un peu de fer eft oxidé par l’eau qui mouille le
phofphore, 8c dont il eft impoflible de le priver
entièrement 5 & cet oxide, uni à un peu d'acide
phofphorique, forme un verre noir qui recouvre
e m®tal phofphoré, 8c qui, comme fondanc très-
adtif, attaque le creufet, le pénètre, & fe fiitre
à travers les parois. On verra plus bas qu’on peut
fe procurer le phofphure de fer facilement 8c à
peu de frais, en décompofant le phofphate de fer
par le charbon. C ’eft ainfi que les mines de fer
iimoneufes, qui contiennent fi fouvent du phofphatede
fer natif parmi l’ oxide trè^s-abondant de
ce métal qui en conftitue la bafe, donnent, après
l ’affinage de leur fonte, un fer caflant à froid, 8c
qui doit cette mauvaife qualité, fi dangereule pour
les arts , à un phofphure de fer qui s’y trouve uni,
que Bergman avoit méconnu & regardé comme un
métal particulier fous le nom de fy dé ri ce, 8c qui,
dans la diflolution de ce fer caftant par l’acide lul-
furiqûe , donne fpontanément, lorfqu’on l’étend
d’eau , un précipité blanc de ph fphate de fer.
67. La combinaifon du fir avecde fou fre fe fait
de plufieurs manières d'fférentes. A froid, à fec,
ces deux corps ne s’unifient pas intimement, quoiqu’ils
ne foient pas abfolument fans adt:on l’un fur
1 autre 5 mais quand on ajoute de T •..•au , cette
union s’opère avec facilité. On fait une pâte avec
parties égales de foufre en poudre & de limaille
de fer fine , que l ’on mêle bien par h trituration,
& fuffifante quantité d’eau : cette pâte, expofée
à 1 air 3 s’échauffe bientôt, fe bourfouflt, fc fendille
, exhale des vapeurs qui prennent i’odeur de
gaz hydrogène lulfuré, 8c qui s’enflamment fou-
vent fpontanément. Quoique l’air contribue à cette
aétion, puifque M. Prieftleya trouvé qu’ij étoit
altéré par ce mélange, & qu’il perdoit une por-
t.on de fon oxigènê, l’eau eft véritablement dé-
compofée, c’eft elle qui fournit la plus gr ande quan
tité de ce principe àu/cr .-celui-ci eft oxidé ; le foufre
eft en même rems brûlé & converti en acide fulfu-
riquej l’hydrogène fe dégage en gaz, en entraînant
une petite portion de foufre. Si le mélange ne
s’échauffe pas aflez pour s’enflammer , il s’arrête
a 1 état de fulfure de fer3 ou même en plus grande
partie d’oxide de /èrhÿdro fulfuré, d’où les acides
peuvent dégager avec effervescence une grande
quantité de gaz hydrogène fulfuré : c’eft même le
moyen que plufieurs chimiftes modernes ont pro-
pofé pour obtenir abondamment ce gaz. Si la température
s’eft beaucoup plus élevée dans ce mélange
, s’ il s’en eft dégage beaucoup de gaz hydrogène
fulfuré , s’il y a furtout inflammation, le ré-
fidu eft rouge, & femblable au fulfate de fir calciné.
En le leflivant dans l’eau, on en retire un peu
de fuifate furoxigéné de fer , dont il fera queflion
plus bas. On voit donc que le mélange fimple de
foufre 8c de fer h urne-été fe brûle fpontanément,
ÿc tend à fe fulfatifer comme le •fulfure de fer naturel
, qui éprouve, comme je l’ai dit plus haut,
une pareille altération, qu’on nommoit autrefois
ejflorefcence ou vitriolifation des pyrites. La chaleur,
le bourfouflement, les vapeurs inflammables 8c
l’inflammation même qui s’excitent dans ce mélange,
avoient fait penfer à Lémery le père, qu’elle
étoit la caufe de l’incendie des volcans. Il avoit
même dit avoir imité un petit volcan en plongeant
dans la terre un vafe rempli de foufre & de
limaille de fer humeété, qu’ il recouvroit de terre.
Le fo l, fuivant lu i, étoit foulevé, fendu ; il
s’ey.haloit des vapeurs * les fentes fe couvroient
d’une pouffière jaune ou rougeâtre de foufre fu-
blimé > quelquefois même l’aétion réciproque des
matières allojt jufqu’à l’inflammation du mélange.
Cette expérience a long-tems porté le nom de
•volcan artificiel de Lémery * mais Bucquet -, qui l’a
répétée avec foin , n’en a point obtenu le même
réfultat, quoique rien ne s’oppofât à la regarder
comme bien d’accord avec tous les phénomènes
bien connus.
68. On unit le fer avec le foufre par plufieurs
autres procédés. Quand on chauffe ces deux corps
bien mêlés 8c en poudre à parties égales dans un
creufet, ils fe fondent très-aifément, en compa-
raifon de l’infufibiiité du fier } orrobtient un fulfure
de fer en grains ou en ftries grifes foncées,
très-dur, fragile, très-fcintillant avec le briquet,
qui ne s’ altère que très-lentement par le cor.taét
de l’air 8c de l’eau dans fon état d’aggrégation,
mais qui s’échauffe , fe brûle & fe réduit en fulfate
rouge de fier par ce même conta&, lorfqu’il
eft auparavant réduit en pouffière. On opère un
compofé à peu près femblable en faifant traverfer
un morceau ou canon de foufre par une baguette
de fier rouge à blanc. La partie de cette baguette
qui touche le foufre, fe fond tout à coup, fe combine
avec ce corps combuftible * 8c reçue en gouttelettes
livides dans de l’eau , ces gouttes fe figent
en larmes dures, grifes dans leur caflure, en véritable
fulfure de fer analogue au précédent. Il eft
évident, d’après ces faits, qu’en fcellant dans les
pierres, comme on Y a propofé , les barres de fer
à l’aide du foufre fondu , elles forment avec lui
un fulfure caftant, qui doit avertir qu’il ne faut
pas enfuite faire fupportêr à ces barres des poids
confidérables fi on ne veut pas les voir fe brifer
dans leur fcellement. Le fulfure de fer ainfi préparé
n’imite point exactement celui de la nature*
il n’en a point la couleur jaune , & furtout l’éclat 8c le brillant doré* Il eft vraifemblàble que cela
eft dû, foie à l’alumine ou autres matières qui font
combinées avec le foufre & le fer dans les pyrites ,
foit au mode même de la compofition que la .nature
paroît former au moyen de l’eau , tandis que
d'art ne l’opère que par le feu. La ciiftuilifation du
Chimie. Tome IV*
fulfure de fier artificiel n’imite pas non plus celle
du naturel. On n’allie que difficilement les oxides
de fer avec le foufre. A un grand feu , l’oxide, en
perdant une portion de fon oxigène, s’ unit au
foufre, & forme un compofé fulfuré, plus foncé en
couleur que le fulfure de fer 3 8c qui eft toujours
recouvert d’une pouffière noire.
69. Les fulfures alcalins ne diflolvent que très-
peu le fer ; ils diflolvent mieux les oxides de ce
métal, qu’ils font repafler au noir, 8c qui leur
donnent une couleur verte t r è s - in te n f e : il paroït
que cette couleur des diflolucions des fulfures al-^
câlins ferrugineux eft due, en grande partie, à
l’union de l’hydrogène fulfuré avec le fer; car les
acides qui dégagent ou d é c o m p o f e n t ce combuftible
mixte, fi fugace 8c fi altérable, la font
promptement difparoître , & blanchiffent ces dif-
folutions en quelque petite quantité qu’on les y
ajoute. Le gaz hydrogène fulfuré ne s’ unit point
au f e r - , mais il agit très-promptement fur f s oxides.
A l’inftant où l’on jette de l’oxide de fer rouge
dans une eau qui tient ce gaz en diflolution , cet
oxide.change de couleur , pafle au noir plus ou
moins foncé , 8c l’eau perd fon odeur fétide lï
l’on y a mis une fuffifante quantité de ce métal
brûlé. La poudre noire recueillie & féchée répand
une flamme bleue, & exhale l’odeur d’acide ful-
fureux quand on la jette far des charbons allumés î
traitée par l’acide muriatique , elle fait effervef-
cence & donne du gaz hydrogène fulfuré * ainfi ,
c’eft un oxide defer h y d r o f u l f u r é , qui s’eft formé
par l’union de l'oxide de fier en partie réduit avec
l’hydrogène fulfuré tenu en diflolution dans l’eau,
dont l’odeur a été diffipée au moment même de
cette union.
70. Le fer s ’allie à beaucoup de fubftances métalliques
, & forme par fes alliages des compofés
très-utiles. Il fe combine à l’arfenic par la fufion ;
il réduit même l'acide arfenieux avec lequel on
le chauffe * 8c il réfulte des expériences de Wal-
lerius, de Gellert & de Weigel fur cette efpèce
d’alliage, qu’il eft caflant, d’une couleur blanche,
analogue au fer arfenié natif ou mifpickel, beaucoup
plus fufible que le fier 3 & qu’on s’en fert
pour faire des agraffes, des chaînes 8c des bi-‘
jous, à raifon du brillant v if & de la beauté du
poli qu’ il reçoit. Bergman regarde cet alliage
comme la caufe de la fragilité du fer caflant à
chaud.
71. On n'a rien dit ou prefque rien dit encore
de l’union du fier avec le tungftène , le molybdène ,
le chrome, le titane & l’urane. Son alliage avec
le cobalt a été indiqué par plufieurs chimiftes.
Wallerius, en le décrivant, dit qu’on peut alliée
ces deux métaux fans perte, lorfqu’on y ajoute du
flux noir &c de la pouffière de charbon. Cet alliage,
.fuivant lui, eft attirable à l’aimant, même quand
il ne contient qu’ une partie de fer fur trois parties
| de cobalt* mais j’ai fait voir plus haut qu’une
' bien plus petite portion de fer pouvoit rendre
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