
M. Haüy nomme f i r exidé graphique 3 c'eft un autre
mélange particulier d'oxide de fe r rouge très-
fin avec de l'argile , que la nature pafoït avoir
pétris enfemble dans l’eau , 8c dépofés au fond de
ce liquide en couches plus ou moins fixes ou den-
fes, d'un tiffu doux , gras , on&ueux, facile à
tailler , & qui s'ufe & fe polit par le frottement.
Il y en a de différentes nuances, de diverfe den-
iité & de grain très-varié par fa fineffe. M. Haüy
dit avoir vu des bâtons de crayon rouge qu'un
phyfîcien a convertis en aimant par l’adion du
feu , & il rapporte à cette occafion que M. Lelièvre
a obfervé qu'il fuffifoit de chauffer au chalumeau
un fragment d'oxide de fe r pour lui donner
des pôles magnétiques.
31. Les fels ferrugineux natifs, compris dans
le cinquième & dernier ordre des mines de ce
métal, font plus nombreux encore que ceux qui
ont été indiqués dans l'hiftoire naturelle du plomb.
Il eft facile au refte d'expliquer cette multiplicité
quand on fait combien ce métal eft abondant au
fein & à la furface de la terre , dans combien de
lieux il fe rencontre, à quelles circonftances &
féaétions nombreufes il eft expofé, & avec quelle
facilité il obéit aux attractions dans fort état d'oxide.
On l'a jufqu’ici trouvé combiné avec les acides
fulfurique, phofphorique, carbonique, funf-
tique & pruffique, & l'on peut foupçonner qu’il
exifte encore uni aux acides muriatique, fluori-
que, arfenique, molybdique & chromique, quoiqu’on
ne l'ait point encore reconnu dans ces cinq
derniers états. Il ne faut point oublier que la minéralogie,
quoique très-avancée par les chimiftes
modernes, depuis Bayen, Bergman & Scheele ,
jufqu'à M. Klaproth & M. Vauquelin, eft encore
à fon berceau , & que, malgré les travaux & les
découvertes multipliées qu'elle doit à la chimie
depuis une trentaine d'années, on voit que ces
belles recherches ne font encore que bien peu de
chofe en comparaifon de ce qui refte à faire.
3 2. Le fui rate de fe r exifte allez fréquemment
dans la nature : il provient manifeftement de la
eombuffion lente du fulfure natif de ce métal ; il
eft fouvent diffous dans les eaux j quelquefois on
le trouve foiide en ftaladites, en dépôts, rarement
en criftaux rhomboïdaux verdâtres , qu'on
avoit nommés autrefois couperofe •verte. On le re-
connoît à fa couleur, à fa faveur âcre & ftypti-
que, à fa forme. Le plus ordinairement il eft ef-
neuri, demi-defféché, privé de l'eau de fa criftalli-
fation , & blanc. On le nommoit autrefois, dans
cet état, fory. Lorfque, plus décompofé, il a pris
une couleur jaune en perdant plus d’eau & en ab-
forbant plus d'oxigène de l'atmofphère, on le dé-
fignoit, dans l'ancienne minéralogie, fous le nom
de mify ou rnijjy. Enfin, s'il a perdu une portion
de fon acide, fi fon oxide mis a nu, & plus oxi-
géné encore que dans le cas précédent, a pris une
couleur rouge , il conftitue alors le colcothar ou le
chalciïis des anciens minéralogiftes. On nommoit
en général pierres atramentalres toutes les modifications
du fulfure de fe r naturel plus ou moins
décompofé &r altéré5 8c comme, mêlé avec quelques
matières inflammables, il affedoit fouvent
la couleur noire , le mot melantery lui étoit fpé-
cialement appliqué dans cette dernière circonf-
tance, allez fréquente. Il faut ajouter à ces notions,
que , dans les lieux où la nature préfente
plus ou moins abondamment cette combinaifon ,
furtout diffoute dans l'eau , l'art peut 8c doit en
tirer un parti plus ou moins avantageux, foit en
évaporant cette diffolution naturelle pour en obtenir
du fulfate d é fe r 3 très-utile dans beaucoup
d’opérations induftrielles , comme je le ferai voir
plus bas, foit pour en préparer fur le lieu même
différens compofés ou produits qui fervent fans
ceffe aux befoins de la vie. Cependant on iailfe
perdre'trop fouvent cette richeffe naturelle.
33. Le phofphate de fe r n’a point encore été
compris par les minéralogiftes dans l'énumération
des nombreufes efpèces de mines de f e r 3 qu’ils
ont diftinguées & décrites fouvent même minu-
tieufement. L'exad & habile M.-Haiiy fe contente
d'annoncer à la fuite de l’hiftoire du fe r oxide &
de la variété qu'il appel!e f e r limoneux, la poffibi-
lité qu'il exifte dans la nature une combinaifon directe
de fe r & d’acide phofphorique. Ce qu’il
n’annonce que comme poffible eft cependant reconnu
comme réel par les chimiftes modernes. La
prétendue efpèce particulière de métal que Bergman
avoit diftinguée du fer fous le nom de fydé-
rite ou f e r d'eau , n'eft que du phofphate natif. Il
eft vrai qu'on ne l'a point encore reconnu peut-
être très-pur, bien féparé & ifolé d'avec les autres
efpèces-, & furtout d'avec les oxides jaunes
de fe r j dans les maffes duquel il fe trouve le plus
fouvent confondu ï mais on peut préfumer qu’il
exifte feul & indépendamment des autres mines
quelconques de ce métal, & que les minéralogiftes
fa-u-ront bientôt le di flingue r , peut-être même
le trouver pur & fous forme criftalline dans les
lieux où l’on rencontre furtout le fe r limoneux.
Jufqu’ici il a été feulement reconnu dans cette
efpèce de mine. On a vérifié qu’il n'étoit pref-
qu'aucun oxide de fe r natif, furtout dans les lieux
marécageux, dans tes vallées couvertes de végétaux,
qui ne contînt plus ou moins de phofphate
de fe r 3 8c que c'étoït à fa préfence qu'il faltoit
attribuer la mauvaife qualité du fe r caftant a froid*
qu’on obtient fpécialement de ces efpèces de mines.
Il eft très-commun de trouver dans les mines
de fe r limoneux des parcelles plus colorées , plus
denfes, plus falines, diftinguées du refte ou de la
maffe du Ample oxide, comme des grains diffémi-
j nés dans une pâte. Ces particules m'ont paru être
le phofphate de fe r pur, & je ne doute pas qu'on
ne parvienne non - feulement à l'extraire de ces
mines, mais à le trouver féparé dans la nature.
Le phofphate 'de f e r eft très-caradérifé par fa propriété
de former un phofphure lorfqu'on le chauffe
avec du charbon : il fe précipite de fa diffolution
fulfurique en poudre blanche très-lourde ,■ quoiqu’elle
refte long-tems divifée. On verra que c'eft
par ce phénomène que l’on reconnoït & que l'on
analyfe le fer caffant à froid, provenant de beaucoup
de mines limoneufes ‘3 8c qui contient du
phofphure' & non pas du phofphate de fer, comme
on l’a dit 8c répété dans un fi grand nombre d’ouvrages
de chimie; C'eft par l’effet même de L’action
de l'acide fulfurique fur ce phofphure de
fer, & par d’oxigène que l ’eau y porte, qu'il paffe
à l'état de phofphate de fer.
34. Le tunftate de fer natif dont j’ai déjà parlé
à l'article du tungftène, peut être compté parmi
les mines falines de f e r 3 puifque c’eft une combinaifon
d’acide tunftique 8c de l'oxide de ce métal,
mêlé à la vérité, ou plutôt faturé en partie d’oxide ;
de manganèfe. On lui donnait autrefois le nom de
wolfram, formé de deux mots allemands qui lignifient
écume de loup 3 fpuma lupi. On l'avoit pris à
différentes époques pour une mine d'étain arfe-
niale, pour un mélange de manganèfe de f e r 8c
d’étain, pour un lchorl, pour iin bafalte chargé
de fer 3 &e. &c. MM. d'Elhuyar, chimiftes efpa-
gnols, ont les premiers découvert que c'étoit un
véritable tunftate de fer. Ce fel eft d’un noir-bru-
râtre, en maffes irrégulières, ou criftallifé en
prifmes hexaèdres comprimés , terminés par des
pyramides tétraèdres, dont les angles font tronqués
: il eft brillant 8c prefque métallique dans fa
caffure feuilletée ; il donne une poudre d'un brun-
rougeâtre j il eft très-lourd j fa pefanteur eft de
é.835 5 il eft prefqu’infufihle feul > il fe fond très-
bien avec trois ou quatre fois fon poids depotaffe,
qui forme du tunftate alcalin diffoluble,, 8c laiffe ,
l ’oxide de manganèfe & de, fe r à part. Il eft auflï
attaquable par l’acide muriatique, qui diffout le
fer 8c féparé l'acide tunftique en poudre jaune.
MM. d'Elhuyar l’ont trouvé eompofé de o .65 d'acide
tunftique, 0.22 d'oxide de manganèfe, 8c de
€.13’ d'oxide de fer. On voit, d'après ce dernier
réfultat, que fi on a égard au principe le plus
abondant de ce eompofé naturel, le wolfram doit ;
être rapporté aux mines de tungftène ; qu'il de- :
vroit, au moins en apparence, être plutôt encore
rapporté au manganèfe qu’au fer '; mais on a penfé
que l'oxide de manganèfe n'y étoit que diffeminé
ou mêlé , qu'il n’étoit pas néceffaire à fa compo-
fition j &: voilà pourquoi on lui a donné feulement
le nom de tunftate de fer, dans lequel on croit que i
l ’oxide de fer fature l’acide tunftique j 8c comme j
la couleur de ce fel, ainfi que fa nature, fa forme!
& fes propriétés, a paru être en grande partiel
due au fer 3 on a généralement adopté fa claffifi- ;
cation parmi les mines de ce métal. Son feul 8c en 1
même tems fon important ufage pour les chimiftes
eft de fervir à l'extfladion de l'acide tunf-j
tique , qu’il fournit par le même procédé que le:
tunftate de chaux , c'eft-à-dire, par l’adion fïie-
eelEve de l'acide muriatique , qui enlève les fubitances
métalliques, 8c de l'ammoniaque qui prend
l’acide.
35. Le carbonate de fe r eft une des mines les
plus abondantes 8c les plus pures de ce mécal.
Dans la métallurgie on le nomme fouvent mine
d* acier, parce qu'il fournit facilement cette efpèce
de modification du fer. On l’a nommé encore
f e r fpathique, fpath martial ou ferrugineux 3 mine de
fe r blanche , parce qu'il reffemble par fa couleur,
fes lames & fon tiflu, à quelques jpachs calcaires.
Cette mine eft répandue avec profufion dans quelques
lieux, & fpécialement dans les Pyrénées, par
la nature, qui l'y a dépofée en filons ou en couches
épaiffes & profondes : il criftallifé comme le
carbonate de chaux , foit dans fon rhombe primit
if, foit dans les formes fecondaires qu'il prend
par les lois de décroiffement des molécules rhom-
boïdales : aüffi ce fel n’eft-il jamais du carbonate
de fe r pur. Outre l’oxide de manganèfe qu'il contient
fi fouvent, 8c qui fait varier fa couleur du
blanc au fauve, au rouge-brun, au brun-noirâtre
& au noir, fuivant fon état d’oxidation , il eft
toujours mêlé de carbonate de chaux, qui v a ,
fuivant Bergman, jufqu’à la moitié de fon poids,
& que M. Haüy confiüère ingénieufement comme
: l'origine de fa forme, abfolument comme il l’efl
des rhomboïdes du grès de Fontainebleau 5 en
; forte que fes criftaux bien prononcés peuvent être
regardés comme du carbonate de chaux mêlé de
carbonate de fe r 3 qui eft interpofé entre fes lames
rhomboïdales, ainfi que l'oxide de manganèfe. Ce
n’eft donc pas, comme l'ont cru autrefois les chi-
miftes 8c les minéralogiftesde l’oxide de fe r faturé
immédiatement d’acide carbonique diffous
d'abord dans l’eau, 8c dépofé enfuite fous forme
criftalline, ni ce fel ferrugineux qui a remplacé
la terre calcaire, dont il auroit revêtu la forme
' comme s'il eût été coulé dans un moule, mais du
carbonate de chaux mélangé de carbonate de f e r ,
comme l'avoit déjà annoncé Cronftedt, qui le
premier a lié les eonnoiffances de chimie à la méthode
minéralogique. Cette mine a la propriété
de noircir par l ’aétion du feu, de donner de l'acide
carbonique gazeux , foit par la diftillation , foit
par l’a&ion des acides ; de fe colorer par le contad
de l’a it, 8c d'y prendre peu à peu une nuance
brune 8c noire, par l’oxidnion du manganèfe
qu'elle contient, ainfi que l'a prouvé Bergman
dans fa belle Dijfertation fur les mines de fe r blanches
, a i’occafion defqueîles il a décrit d'une manière
fi complète 8c fi méthodique pour l’époque
où il l’a rédigée, les propriétés du manganèfe,
qu'on eft porté à croire j en la lifant avec attention,
qu'elle a été'faîte plutôt pour fournir à fon
auteur l’occafion de traiter ce dernier métal, que
pour faire connaître- en détail les propriétés du
carbonate de f e r , fous le nom de mine de fe r blanche.
Bayen, en donnant en France , le premier
parmi les chimiftes, l’analyfe du fé r fpathique, &
en y montrant la préfence de I’ackle carbonique,