
la langue, non-feulement elles y feraient une
Jenfation de faveur, très - forte., mais encore
qu'elles la cautériferoient avec violence ainfï
que toutes les autres parties du corps > qu’elles
le joindroîeiît avec une; activité fingulière aux
parties de l'air, à celles de l’eau, en un mot à celles’
de toutes les autres lubftances auxquelles elles
pourroient toucher.
Ce que nous n’avons pu faire jufqii’à préfent
à l’égard de la terre par aucune opération de
l’art , la nature le fait habituellement, du moins'
jufqu’à un certain point , à l’égard de la terre
qui fert de baie aux coquilles- dis animaux matins
8c autres. Cettë terre eft tellement divifée
t e atténuée par l’aélion vitale & organique de
ces animaux , que fes parties intégrantes fe trouvent
affez ifoie es , affez libre s pour agir fur des
matières aqueufes 8e gazeufes , 8c pour s’unir
avec elles en un nouveau compolé "qu’on nomme
terre calcaire. Les parties intégrantes de la terre
calcaire , compofées chacune de terre, d’eau &
d'e gaz, ont une moindre adhérence entr’elles
que celles de la terre pure te fiir.ple , parce que
1 union que les parties purement terreufes de la
terre calcaire ont contra&ée avec celles dé l’ëau
te du gaz, fature- julqu à un certain point leur
tendance à la combinaifon ; mais comme elle
ne lepuife point entièrement, il s’enfuit que
la terre calcaire doit avoir plus d’adiion diffol-
vante, plus de difpofltion à le combiner avec
d’autres fybftances , que toute autre efpèce de
terré qui ii’èft pas difpofée de cette meme manière.
Audi l’expérience prouve-t-elle que les
pierres calcaires font en général moins dures que
les autr.es pierres , te qu’elles fe combinent facilement
, non-feulement avec les acides libres ,
mais encore avec ces acides , lotfqu’ils font combinés
avec certaines bâfes métalliques , telles que
la terre de l’alun, les fubftànces métalliques, te
peut-être plufieurs autres.
On peut, par le feul effet d’une chaleur convenable
, appliquée à la terre calcaire, lui enlever
l’eau te le gâz , qui font deux de fes parties
conftituantes; elle éprouve alors, fuivantle degré
de chaleur qui lui eft appliqué , deux changemens
bien differens , mais bien remarquables & bien
parfaitement d’accord avecla théorie que je tâche
d’éclaircir. Si le degré de chaleur qui eft appliqué
à la terre calcaire, eft affez fort J non- feulement
pour lui enlever les parties aqueufes &
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lion ; alors , dès qu’elle ceffe d’éprouver ce
degré de chaleur nëceffaire pour les tenir en
fonte, fes parties terreufes propres fè rapprochent
3 s’uniffent entr’elles en une aggrégation
vitreufe à- p'eu-près & auffi forte que celle des
terres non calcaires , & il ne refte plus au verre
qui refaite de cette fufion , aucune des propriétés
des terres cîtîcaires, aucune aétion diffulvante ,
aucune d'.fpofition à S'unir aux acides 8c autres
fubfran.ees i’ur lefquelles les terres calcaires ont
une aétion manifcfle.
Si au contraire le degré de chaleur qu’c.n applique
aux terres calcaires eft tel qu’il puiffe leur
enlever leurs parties aqueufes te. gazeufes, mais
trop loible pour faire entrer en fûfion les parties
terreufes qui reftent ; alors ces parties terreu fi s
ne peuvent d’une part fe rejoindre entr’elles
faute de la liberté de fe mouvoir que la fufion
feule peut leur donner 5 te d’une autre part privées
de l’eau te du gaz fur lefqueîs s’épuifoit en
grande partie leur tendance a l’union , elles reftent
par cette privation même douées de presque
toute l’énergie de cette tendance, e’eft-i-
aire de la mujpçhê de î’action diffolvante, en
un mot de toutes les propriétés qui car.aêlérifcnç
la chaux vive.
A regard de‘ l’objVêtion' qu’on% pourroit
tirer de l’eau 8e de l’air , qui , quoique fluides,
Terrible nt n’avoir aucune caujticité, pas même
le plus foible degré de cette qualité qui eft la-
faveur, j’ofe dire qu’une pareille-objection ne
peut avoir le moindre fondement qu’aux yeux''
de ceux qui jugent fans réflexion de d-après'de
limples apparences. Mais un phyficjen-, qui fera
une attention convenable aux propriétés de ces-.
fubftànces ; fera bientôt convaincu qu’elles ont
comme tous les autres fluides le degré d’adlion
diffolvante , te même de faveur, qui convient
à leur nature. Des expériences fans nombre prouvent'
eue l’air te l’eau font peut - êtrè les
deux plus grands diffolvans qu’il y ait dans la
nature , quoiqu’ils ne foient pas b s plus forts >
& dès-lors il n’e'ft pas poffible qu’ils n’aient une
faveur proportionnée à leur- aétioft diffolvante.-
11 eft bien vrai, que cette faveur ne nous tft
pas ienfible ; -mais qui ne fait que les fenfations
qu’excite en nous l’impreffion des corps étran-8
s font relatives à la difpofition de nos organes^
que l’habitude fur-tout r L nous empêche d’appercevoir
des impreffions qui, fans elle,. nous
paroïtroient très-fortes , 8c peut-être même dou-
ioureufés & infupportabîes ? Depuis' le premier
inftant de notre exiftence, mous ne cernons pas
un feul moment, d’éprouver l’impreflion-de l’eau
& de l’air qui probablement eft d’abord très-
vive, comme l’indiquent affez lés cris de douleur
des enfans qui refpirènt pour la première
fois ; mais l ’oubii total où nous fommes des
premières Tentations que nous avons éprouvées,
8c l’habitude non interrompue d’en éprouver
quelques-unes,. nous rendent ces dernières bientôt
infenfibles.' Les faveurs- de' l’eau 8c de l’air
deviennent donc nuiles pour nous quoiqu’elles
ioient très-réelles, par la'même raifon que nous
ne Tentons nullement la preffion de l’air, qui eft
pourtant très-forte 8c très-démontrée.
Heurs , quoj'qti’ii fo-k vr'aâ Î Æggvégv
pioiî ■ d’une fttbihin:cec fcbk .plus forte dans létat
de folidité que dans celui de fluidité , te
par-là l’aétion diffolvante loit plus marquée dans
ce dernier état que dans, le premier , il ne s enfuit
pas pour cela que l’aggrégatron d un fluide
ou liquide fcvit nulle j une fubftançe peut être
très-liquide, fans que fon aggrégation foit abolie.
Cette aggrégation doit néceffai rement fubfifter
toujours plus ou moins complettement, tant que
les parties intégrantes du; „liquide ne font -pas
affez ifolées-, allez ecarrées les unes des autres
pour être absolument hors de leur fphere d activité
mutuelle ; ce n’eft cependant que dans
ce dernier cas que ces parties peuvent jouir de
toute la caujticité de l’air te de l’eau ; probablement
elle féroic moins forte que celle de la
terre te du-feu; mais il eft certain quelle fe-
#nit beaucoup plus fenfible que celle que nous
leur connoiffons dans leur aggrégation de fluide
ou de liquide , qui eft le feul état dans lequel
on ait jufqu’à préfent fait quelqü attention à
leurs propriétés.. On ne peut guère douter néanmoins
que l’eau 8e l’aie ne deviennent des agens
&: même très-puilTans dans un grand nombre
d’effets phyfiques te chimiques.,, de meme que
le feu te la terre. Ces, confidératians offrent
aux chimiftes une carrière aufti neuve quelle
eft importante à parcourir , te il y a lieu d-’ef-
pérer que des hommes de genie ne tarderont
pas à s’y engager. La découverte des ga% qu on
peut regarder comme toute récente , & qui ne
fait, à proprement parler , que commencer , en
annonce beaucoup d’autres prêtes à éclore. Aptes
avoir bien conftaté l’exiftence te les. propriétés
efîentielles des. gaz }: on cherchera fans doute à
connoître la nature de ces;. lubftances fi • différences
de toutes-celles auxquelles on a fait attention
jufqu-’ à préfent ; te qui fait-fi l’ examen
des combinairôns où l’eau te l’air.entreront pour
beaucoup , "-'8c qu’on n’a pas même encore foup-
çonnées , ne répandra pas .le; plus grand jour fur
la nature te les principes des matièrès gazeufes ?
Parmi ces. fùbftances’ , il y en a quelques-unes
qui contiennent évidemment, du principe inflammable
5 telles font celles qui fe dégagent du
foie de fouffre & de la dtffolution de plufieurs
métaux par les acides vitriolique te marin. Mais
celle que je nommerai gaç méphitique , celle qui
loin d’être inflammable , éteint fubitement toute
flamme , te tue les animaux en un inftant,. dont
les propriétés participent d’ailleurs beaucoup de
celles de l’eau te de l’air , ne fcroble-t-elle pas-
compofée principalement d’eau 8c d’air ? Et 'eft-'
il hors de la vrai Lmb lance que ces deux principes
qui , dans leur état d’.aggrégation ne peuvent
ni l’un ni. l’autre fe^.combtner affez intir
niement avec la .chaux vive - te avec les alcalis
cauftiques pour leur enlever leur cauftic'ué , acquièrent
cette, propriété , te par cotiféquent une
affio r» difiblvante , une vraie cavfticitc , Iorfcju’iJs
fe Grc:uventr difpofés de manière, que leur aggre-
gation. étant beaucoup moins forte que dans leur
état ordinaire , leurs-parties intégrantes ne foient
point d’ailleurs liées par une union réciproque,
affez intime pour amortir toute la tendance a
la combin.iifon que leur laiffe , dans ce nouveau
mixte, l’abolition de leur aggrégation ? Nous ne
pouvons encore rien prononcer fur cela j, mais
peut-être un jour parviendra-t-on , à 1 aide de
l’expérience , a établir fur cet objet important
une théorie fatisfaifante.
II me paroît ré fuit et de tout ce qne^ j ai ex-
pofé dans cet article , que la caujticité n’eft autre
chofe que l’effet de la force avec laquelle les
parties des cauftiques tendent à s unir aux parties
des autres corps; te fl jrefque tous les
chimiftes qui ont voulu établir une théorie de
la caufiicité'ont pris le change , comme je crois
l’avoir-prouvé, cela vient de ce qu’ils n’ont fait
attention qu’à une partie, de l effet <de la cauf-
ticiié , en fermant.pour ainfi dire , les yeux fur
la circonftance la -plus effentielle ; faute énorme
en phyfique, te bien etonnante de la part de
plufieurs très-bons chimiftes. Affe&és uniquement
de la diffolutton des parties des corps fur
lefquels agiffenr les cauftiques ou diffolvans , &
du tumulte -, de la douleur , de la chaleur , de
i'inflammation même qui accompagnent ces diffo-
• lutions dans certaines circonftances ; & voyant
d'un .autre côté que le feu libre & en aétion
produit conftarr,nient ces effets , ils en ont conclu
, comme le feroit fe vulgaire le moins phyficien
, que la rrnr/ï/Vrr n'eft que l'effet du fea
contenu dans les cauftiques &£ diffolvans , fans
faire la moindre attention à la nouvelle union
qui refaite dés parties du- cauftique avec celles
du corps fur lequel il a exercé fon aâion; fans
confiderer que la caufiUiié diminue toujours exactement
en proportion dé l'intimité de cette nouvelle
union , que le cauftique refte auffi caufiiq; e
qu'il l'etoit, s'il ne s'ell nullement uni au coi, s
qu’il a dSviië î qu'il n’a plus au contraire la
moindre apparence de ca ificitc , s'il s eft combiné
le plus fortement qu'il eft poffible avec les
parties du corps diflous ; enfin , fans fe rappeller
que tout diffolvant dont là iaufiieiti a été même
le plus complettement abolie par l'union qu il a
contr-iclée avec un corps capable de^ produire
cet effet fur lui, reprend fa caufiicité toute entière,
dès qu’on le dégage par un moyen quelconque
des liens de cette union.
Je fens parfaitement bien que cette tendance
à l’union, que je : regarde avec plufieuts_ [jhyft-
ctens tomme caufe unique de la caufiiciie , Sç
en même teins de la dureté des corps, ne fera
pas adoptée ni peut-être même entendue par
tous les chimiftes ; que bien des arrêtes regar-
- Q i